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28/03/2018 | FRANCE | N°16-22188

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2018, 16-22188


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z... et vingt-sept autres salariés des sociétés Norbert Dentressangle Bennes, aux droits de laquelle vient la société Xpo Holding transport solutions Europe, et Norbert Dentressangle Silo, aux droits de laquelle vient la société Xpo vrac silo France, filiales de la société Groupe Norbert Dentressangle, aux droits de laquelle vient la société Xpo logistics Europe, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de rappels de salaires et de dommages-intérêts ;



Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z... et vingt-sept autres salariés des sociétés Norbert Dentressangle Bennes, aux droits de laquelle vient la société Xpo Holding transport solutions Europe, et Norbert Dentressangle Silo, aux droits de laquelle vient la société Xpo vrac silo France, filiales de la société Groupe Norbert Dentressangle, aux droits de laquelle vient la société Xpo logistics Europe, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de rappels de salaires et de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu que pour dire la société Groupe Norbert Dentressangle coemployeur avec les sociétés Norbert Dentressangle Bennes et Norbert Dentressangle Silo, l'arrêt relève que le capital des deux filiales était détenu en totalité par le groupe, que les trois sociétés ont longtemps eu le même siège social concentrant en un même lieu toutes les fonctions supports et en particulier la direction, qu'elles interviennent dans le même secteur d'activité, appliquent en conséquence la même convention collective, que tous les services stratégiques accessoires à la prestation de transport sont gérés et fournis par le groupe, que la filiale n'a aucune marge de manoeuvre dans le choix de ses investissements, ces questions étant déléguées à une autre filiale, que la stratégie est exclusivement définie au niveau du groupe, que le groupe décide seul des mesures d'organisation interne pour l'ensemble des filiales, que la politique de gestion des ressources humaines est exclusivement définie au niveau du groupe, que c'est toujours le groupe qui annonce la mise en place d'outils informatiques et de vidéo-surveillance dans l'ensemble des filiales, que de l'aveu du représentant de la filiale présidant les réunions du comité d'entreprise, c'est le groupe qui décide de tout, que l'établissement de la paie et des bulletins de salaires est effectué par une autre filiale du groupe, choisie et imposée par lui, que les contrats de mutuelles santé et prévoyance appliqués dans chaque filiale sont négociés et instaurés au niveau du groupe, que lors d'une procédure pénale engagée initialement par l'une des filiales contre l'un de ses salariés, c'est en définitive le groupe qui a sollicité et obtenu une indemnisation en qualité de partie civile ; que ces éléments peuvent constituer un faisceau d'indices suffisamment important pour établir une situation de co-emploi, et qu'il n'est pas démontré que la société Groupe Norbert Dentressangle n'ait joué qu'un rôle de holding financière auprès de ses différentes filiales ;

Attendu cependant que, hors existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;

Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, par des motifs qui ne caractérisent ni une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, ni une immixtion de la société Groupe Norbert Dentressangle dans la gestion économique et sociale de ses filiales, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le deuxième moyen, qui est recevable :

Vu l'article 4 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, dans sa rédaction applicable au présent litige ;

Attendu que pour condamner la société Xpo logistics Europe in solidum avec la société Xpo vrac silo à verser à certains des salariés les sommes demandées par eux au titre des heures supplémentaires et du repos compensateur, la cour d'appel, après avoir constaté que la société Norbert Dentressangle Silo bénéficiait d'une dérogation en premier lieu par l'effet d'une décision administrative de décembre 2002 puis en second lieu par l'effet de plusieurs accords d'entreprise, l'autorisant expressément à décompter mensuellement le temps de travail, a retenu que ces sociétés n'ont nullement rapporté la preuve de ce que les dépassements du temps de travail allégués n'étaient pas avérés et que ces différentes atteintes aux dispositions relatives à la durée maximale du temps de travail apparaissant impératives, le temps de travail au sein de la société Norbert Dentressangle Silo doit être calculé non pas de manière mensuelle mais hebdomadaire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le non respect de la durée maximale de travail ne privait pas l'employeur de se prévaloir de la dérogation dont il bénéficiait s'agissant du décompte du temps de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne les défendeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour les sociétés Xpo vrac silo France, Xpo logistics Europe et Xpo Holding transport solutions Europe.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR, par infirmation du jugement entrepris, dit que la S.A. Groupe Norbert Dentressangle se trouvait en situation de co-emploi avec ses filiales, les sociétés ND SILO et ND Bennes, et d'AVOIR en conséquence dit que toute condamnation réclamée par les appelants et prononcée à l'encontre de la société ND SILO, aux droits de laquelle est venue la société Xpo VRAC SILO FRANCE, devra être prononcée in solidum avec la société Xpo logistics Europe, venue aux droits de la société S.A. Groupe Norbert Dentressangle, et d'AVOIR en conséquence condamné cette dernière in solidum avec la société Xpo VRAC SILO France, à verser aux salariés des rappels d'heures supplémentaires et de repos compensateurs, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « les salariés appelants ont une nouvelle fois prétendu que, compte tenu de la confusion évidente existant entre la société mère et ses filiales ND Bennes et ND SILO, la cour devrait retenir une situation de co-emploi entre les trois sociétés;
Attendu qu'à l'occasion de son arrêt daté du 13 décembre 2010, la cour d'appel de GRENOBLE a débouté les appelants de cette demande, notamment au motif que « les appelants ne produisent aucun élément de nature à administrer la preuve de l'existence d'un lien de subordination entre les salariés de ND Bennes et les sociétés Groupe ND ou ND SILO, ni entre les salariés de ND SILO et les sociétés Groupe ND ou ND BENNE» ;
Attendu qu'à l'occasion de son arrêt du 31 octobre 2012, la cour de cassation a considéré qu' « en se déterminant ainsi sans vérifier, comme cela lui était demandé, si les éléments fournis par les salariés ne permettaient pas de retenir l'existence d'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la société Groupe ND et les sociétés ND BENNE et ND SILO, la cour a privé sa décision de base légale»
Attendu que conformément aux moyens soulevés à cet égard par les sociétés intimées, le co-emploi ne peut résulter de la seule appartenance à un même groupe et des solidarités qu'elle crée; qu'il suppose en effet une situation caractérisée par la confusion des intérêts, des activités et de la direction, faisant disparaître l'autonomie de l'employeur soumis à l'ingérence d'un tiers;
Attendu qu'en outre, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant pas une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernier;
Attendu que dès lors que ces différents critères sont établis et réunis, il n'est en l'espèce pas nécessaire de démontrer en outre que les salariés appelants, contractuellement liés aux sociétés ND Bennes ou ND SILO, étaient également en lien de subordination avec la société Groupe Norbert Dentressangle , pour conclure à l'existence d'une situation de co-emploi, comme l'ont pourtant prétendu les sociétés intimées;
Attendu que pour démontrer la réalité d'une situation de co-emploi exercé par la Société Groupe Norbert Dentressangle

avec les sociétés ND Bennes et ND SILO, les appelants ont invoqué les éléments suivants:
- le capital des filiales ND SILO et ND BENNE est détenu à 100% par le groupe;
- les trois sociétés ont longtemps eu le même siège social concentrant en un même lieu toutes les fonctions supports et en particulier la direction, la société Groupe Norbert Dentressangle, aux droits de laquelle est venue la société Xpo logistics Europe n'a transféré son siège social [...] qu'en 2013 ;
-les sociétés interviennent dans le même secteur d'activité, à savoir le transport routier et appliquent en conséquence la même convention collective;
- tous les services stratégiques accessoires à la prestation de transport (carburant, location de camions, maintenance etc ... ) sont gérés et fournis par le groupe ND, de sorte que les filiales n'ont aucune marge de manoeuvre dans l'élaboration de ces paramètres pourtant vitaux pour son activité (pièces 3 et 11);
- la filiale n'a aucune marge de manoeuvre dans le choix de ses investissements, notamment l'achat et le remplacement de son parc de véhicules, ces questions étant délégués à une autre filiale, la société ND LOCATIONS (pièces 10 page 11);
- la stratégie est exclusivement définie au niveau du groupe, comme en atteste le courrier du 25 juillet 2008 adressé par le Président du Directoire de la société Groupe ND aux salariés de toutes les filiales (Pièce 4) ;
- le groupe décide seul des mesures d'organisation interne pour l'ensemble des filiales. Exemple: mise en place d'un badge « collaborateur» pour tous les salariés, quel que soit leur employeur, et sans information, ni consultation des représentants du personnel de chaque filiale, étant précisé que les informations contenues sur ces badges sont centralisées au niveau du groupe (pièces 5 et 6) ;
-la politique de gestion des ressources humaines est exclusivement définie au niveau du groupe, comme en attestent les déclarations du Directeur des Ressources Humaines, ainsi que le mémo d'accueil hygiène et sécurité remis à chaque salarié lors de son embauche (Pièce 5 et 6) ;
- C'est toujours le groupe qui annonce la mise en place d'outils informatiques et de vidéo-surveillance dans l'ensemble des filiales, toujours sans information des représentants du personnel (pièce 5) ;
- De l'aveu du représentant de la filiale présidant les réunions du Comité d'Entreprise, c'est le groupe qui décide de tout, jusqu'au choix de l'opérateur téléphonique, le contraignant parfois à revenir sur une de ses précédentes décisions, et ce, en fonction des ordres du groupe (pièce 11 pages 12 et 13) ;
- l'établissement de la paie et des bulletins de salaires est effectué par une autre filiale du groupe, choisie et imposée par lui, sans que, ni la ND Bennes, ni la ND SILO n'ait le choix de ce prestataire, étant précisé que tant les contrats de travail que les bulletins de salaire sont édités à l'enseigne du groupe Norbert Dentressangle                 ;
-les contrats de mutuelles santé et prévoyance appliqués dans chaque filiale sont négociés et instaurés au niveau du groupe, signés par le Directeur des Ressources Humaines non pas de la filiale, mais du groupe, monsieur CZ... (pièces 8, 8-1 et 8-2) ;
- Lors d'une procédure pénale engagée initialement par ND Bennes contre l'un de ses salariés, c'est en définitive le Groupe ND qui a sollicité et obtenu une indemnisation en qualité de partie civile.
Attendu que ces différentes informations peuvent constituer un faisceau d'indices suffisamment important pour établir entre les sociétés ND Bennes et ND Silo et la société Groupe Norbert Dentressangle , une confusion d'intérêts, d'activité et direction, se manifestant par une immixtion de la société mère dans la gestion de ses filiales, dépassant amplement la seule notion d'intérêt de groupe ou d'Unité Economiques et Sociales, et caractérisant une situation de co-emploi;
Attendu qu'à l'occasion de leurs conclusions en réplique, les sociétés intimées se sont contentées d'affirmer sans démontrer, que la Société Groupe Norbert Dentressangle n'avait joué qu'un rôle de Holding financière auprès de ses différentes filiales; qu'à la lecture des écritures des appelants, il n'existe aucune confusion entre la notion de groupe et le rôle joué par la Groupe Norbert Dentressangle aux droits de laquelle est venue la société Xpo logistics Europe;
Attendu qu'en conséquence, le jugement déféré doit être réformé en ce qu'il a débouté les parties appelantes de leurs demandes tendant à déclarer la Groupe Norbert Dentressangle aux droits de laquelle est venue la société Xpo logistics Europe, en situation de co-emploi avec ses filiales, les sociétés ND SILO et ND BENNE;
qu'en conséquence, toute condamnation éventuellement prononcée à l'encontre de la société ND SILO (les appelants ayant limité leur demande de condamnation à cette seule filiale), devra être prononcée in solidum avec la société Xpo logistics Europe»

1/ ALORS QUE le motif hypothétique équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant que les différents éléments invoqués par les salariés « peuvent constituer un faisceau d'indices suffisamment important pour établir entre les sociétés ND Bennes et ND Silo et la société Groupe Norbert Dentressangle                 , une confusion d'intérêts, d'activité et direction, se manifestant par une immixtion de la société mère dans la gestion de ses filiales, dépassant amplement la seule notion d'intérêt de groupe ou d'Unité Economiques et Sociales, et caractérisant une situation de co-emploi », la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2/ ALORS QUE hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, lorsque la circonstance que la détermination de politique du groupe par la société mère et la mise en commun des moyens ait une incidence sur l'activité économique et sociale de ses filiales, ne pouvait suffire à caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre les deux sociétés se manifestant par une immixtion dans sa gestion économique et sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de la S.A. Groupe ND, in solidum avec la société Xpo VRAC SILO, venant aux droits de la société ND SILO, à verser à Monsieur Laurent U..., à Monsieur Xavier D..., à Monsieur Christian C..., à Monsieur Christian YO...   , à Monsieur Jean-Claude S..., à Monsieur Robert F..., à Madame Jacky YZ... , à Monsieur Bruno XX..., Monsieur Bernard Q..., à Monsieur Jean-Jacques T... et à Monsieur Jean-Michel E..., salariés ou ex-salariés de la société ND Silo, les sommes réclamées par eux au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs, telles que mentionnées au dispositif de l'arrêt.

AUX MOTIFS QUE « Vu les dispositions de droit commun des articles L3121-1, L3121-10 et L3121-22 du code du travail relatives à la définition du temps de travail effectif et au régime des heures supplémentaires ;
Attendu que le décret N°83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, (tel que modifié par les décrets successifs N°2000-69 du 27 janvier 2000, partiellement annulé par arrêt du Conseil d'Etat du 30 novembre 2001, les décrets N°2002-622 du 25 avril 2002 et N°2005-36 du 31 mars 2005, également partiellement annulé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 18 octobre 2006, puis par le décret N°2007-13 du 4 janvier 2007), dispose en son article 4 qu'«en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'(ancien) article L212-8 du code du travail, la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants peut être calculée sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent» ; que l'article 5 3°) prévoit ensuite que « la durée du temps passé au service de l'employeur, ou temps de service des personnels roulants de marchandises, est fixée dans les conditions suivantes :
- La durée du temps de service des personnels roulants « grands routiers» ou « longue distance » est fixée à 43 heures par semaine, soit 559 heures par trimestre dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 4 du présent décret,
- Est considérée comme heures supplémentaires, pour les personnels roulants, toute heure de temps de service effectuée au-delà des durées mentionnées au 3°) ;
Que l'article 5 4°) précise qu'est considérée comme heure supplémentaire pour les personnels roulants, toute heure de service effectuée au-delà des durées mentionnées au 3°). Ces heures supplémentaires donnent droit à repos compensateur» ;
Attendu que dans son arrêt du 31 octobre 2012, la Cour de cassation a également cassé l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble en ces termes: « Attendu que pour rejeter la demande des salariés en paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur, l'arrêt retient que si la société ND SILO disposait effectivement d'une autorisation de déroger au calcul de la durée du travail à la semaine pour calculer sur une période d'un mois accordé par le directeur adjoint des transports territorialement compétent le 4 décembre 2002, tel n'était pas le cas de la société ND BENNE; que cependant les salariés n'ont pas effectué de calcul subsidiaire excluant les heures d'équivalence et ne démontre pas en quoi les calculs opérés par leur employeur leur sont défavorables; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la Société ND BENNE ne disposait d'aucune dérogation au calcul sur la semaine de la durée hebdomadaire de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés» ;
Attendu que conformément aux écritures des appelants et intimées, il convient de distinguer la situation de la société ND SILO, disposant d'un accord exprès permettant de déroger au calcul hebdomadaire des heures supplémentaires, de celle de la société ND Bennes qui n'en dispose pas ;
4-1 sur la situation de la société ND SILO
Attendu que la société ND SILO disposait d'une dérogation, en premier lieu par l'effet d'une décision administrative de décembre 2002, puis en second lieu par l'effet de plusieurs accords d'entreprise (pièce 15 pour l'autorisation administrative puis 16 et 16-1 pour les avenants), l'autorisant expressément à instaurer un décompte mensuel du temps de travail ;
Attendu que les appelants ont cependant rappelé que lorsqu'une telle dérogation existe, l'employeur doit respecter la réglementation, et notamment les limites de travail autorisées :
- 56 heures hebdomadaires maximum sur une semaine isolée,
- 50 heures hebdomadaires en moyenne sur un mois,
- 52 heures hebdomadaires en moyenne sur un trimestre,
- 220 heures maximum sur un mois;
Attendu que faute pour l'employeur de respecter ces conditions, l'appelant a alors prétendu qu'il ne peut se prévaloir de la dérogation conventionnelle; que le temps de travail doit alors à nouveau être calculé selon les règles du droit commun, c'est à dire à la semaine ;
qu'en effet, l'employeur ne peut pas à la fois revendiquer l'application de décomptes des heures supplémentaires dérogatoires du droit commun et ne pas respecter ses obligations en la matière ;
Attendu que les appelants ont en effet soutenu que la société ND SILO s'est placée elle même en dehors du cadre conventionnel l'autorisant à opérer un calcul mensuel des heures d'équivalence et supplémentaire, en se fondant sur les éléments d'information suivants :
sur une semaine isolée : 125 dépassements en 2003, 116 en 2004, 153 en 2005, 157 en 2006 etc ..., soit au total entre 2003 et 2014 pas moins de 858 semaines en infraction sur 3396 travaillées, représentant ainsi un taux de 25% ;
en moyenne sur un trimestre : 18 dépassements en 2003, 16 en 2004, 18 en 2005, 25 en 2006 etc ..., soit au total entre 2003 et 2014 125 trimestres en infraction sur 235 travaillées, représentant ainsi un taux de 38 % ;
Attendu que ces chiffres proviennent de la synthèse opérée par les appelants pour chacun des salariés concernés (pièce 1.4 pour chacun d'eux), et comportant la mention « sup 56 » pour chaque semaine de plus de 56 heures, H gliss, pour chaque période de plus de 52 heures en moyenne ;
Attendu qu'en outre, les appelants ont également rappelé que le CHSCT de l'établissement ND SILO de Saint-Rambert-d'Albon avait déjà alerté la direction de tels dépassements sur la période 2005 et 2006 ; qu'enfin, à l'occasion d'un contrôle effectué le 27 mars 2009 sur l'établissement de Saint Avold (57), l'inspection du travail a relevé de multiples infractions sur le temps de travail des chauffeurs routiers (cf. Pièce 21) ;
Attendu qu'en retour, les sociétés intimées ont prétendu que les demandes des appelants tendant au décompte hebdomadaire du temps de travail ne pouvaient prospérer, en se contentant d'opposer les accords d'entreprise négociés et signés, et en considérant qu'il n'était nullement démontré que les heures de travail issues des relevés « discan » n'avaient pas été rémunérées; qu'elles considèrent en effet que la lecture minutieuse des bulletins de salaire permet de constater qu'à l'exception des mois au cours desquels les salariés n'avaient pas accompli le minimum requis de 152 heures, il a été fait application d'une rémunération des heures d'équivalence et supplémentaires conforme aux dispositions en vigueur ;
Attendu que force est cependant de constater que les sociétés intimées persistent à raisonner selon un mode de calcul mensuel du temps de travail; qu'elles contestent en effet avoir régulièrement violé la durée hebdomadaire du travail comme l'ont prétendu (cf. supra) les appelants, et affirment que les règles légales contenues dans les articles L3121- 35 et L3221-36 ne spécifient pas que les règles relatives à la durée maximale du travail hebdomadaire s'imposent malgré l'existence d'accords dérogatoires sur le calcul de temps de travail et des heures supplémentaires ;
Attendu toutefois que la relecture des articles du code du travail relatifs au temps de travail, tant quotidien (L3121-34) qu'hebdomadaire (L3121-35) révèle que des dépassements des durées maximales du temps de travail ne sont possibles, même en cas dérogation conventionnelle, que dans des cas particuliers voire exceptionnels, le plus souvent sur autorisation administrative, et sur des temps limités; que s'agissant du secteur particulier du transport routier, la durée maximale du travail est déterminée sur la base du temps de travail effectif défini par le décret du 26 janvier 1983 modifié, relatif au temps de travail dans ce secteur d'activité, et non sur celle des amplitudes horaires dont doit être déduite la part de l'activité qui ne correspond pas à du temps de travail effectué; que cette question de l'évaluation du temps de travail effectif n'est plus débattue par les appelants ;
Attendu qu'ainsi, les sociétés intimées n'ont nullement rapporté la preuve de ce que les dépassements du temps de travail allégués n'étaient pas avérés; qu'ainsi, ces différentes atteintes aux dispositions relatives à la durée maximale du temps de travail apparaissant impératives, il doit être considéré que le temps de travail au sein de la société ND SILO doit être calculé non pas de manière mensuelle mais hebdomadaire ;
Attendu que c'est sur cette base que les appelants ont procédé pour chacun d'eux à un examen détaillé de la durée de leur temps de travail, et ce, à partir des relevés «scandisk» et des bulletins de salaires ;
Attendu que les appelants ont précisé que le personnel roulant en «longue distance» travaillait selon une durée hebdomadaire de 43 heures, la différence entre les 35 heures légales et 43 heures étant qualifiée d'heures d'équivalence; qu'entre le 36eme heure et la 43e e heure, une majoration de 25% est accordée au salarié; qu'à compter de la 44 ème heure, il est fait application d'un taux de majoration de 50% ;
Attendu que c'est ainsi que pour chacun des salariés concernés, les données suivantes ont été récoltées:
- Les heures de travail réalisées mois par mois et années par années, entre 2003 et 2013;
- Le nombre d'heures supplémentaires selon les règles précitées,
- Le détail des heures supplémentaires dites d'équivalence rémunérées à 125 % et leur coût
- Le détail des heures supplémentaires rémunérées à 150 % et leur coût,
- Le pointage à partir des fiches de paie des heures supplémentaires rémunérées par l'employeur,
- Le calcul à partir des heures supplémentaires demeurées impayées du solde restant dû;
- Le calcul des rappels de congés payés afférents et un rattrapage d'ancienneté sur les heures supplémentaires ;
- le calcul du total récapitulatif pour chaque année de service ;
Attendu qu'ainsi, les appelants ont établi le tableau de synthèse suivant, résumant leurs demandes pour l'ensemble des salariés, ou ex salariés dépendant de la société ND SILO (
) ;
Attendu qu'en présence d'une autorisation administrative, puis d'accords d'entreprise autorisant l'employeur à calculer le temps de travail de manière mensuelle, mais rappelant la nécessité de rétablir un calcul hebdomadaire en raison des violations par l'employeur des dispositions générales sur le temps de travail, les appelants ont légitimement considéré que la preuve d'un préjudice effectif pour chacun des salariés n'était pas nécessaire pour la société ND SILO et résultait en outre de leurs propres calculs détaillés ;
Attendu que les sociétés intimées ont toutefois répliqué en affirmant que ces décomptes ne sont pas fiables; qu'il est en effet prétendu en premier lieu que les appelants ont comptabilisé les heures supplémentaires à compter des 35 heures hebdomadaires à concurrence d'un taux de 25 %, alors que selon les concluants le seuil de déclenchement de ces heures supplémentaires est fixé à compter de la 44ème heure; que toutefois ce moyen ne peut prospérer dans la mesure où il a bien été démontré par les appelants qu'à compter de la 36ème heure jusqu'à la 43ème heure, il est bien appliqué un taux de majoration de seulement 25 % et que ces heures ne constituent pas au sens strict des heures supplémentaires; qu'il est bien fait application d'un taux majoré à 50 % au titre des heures supplémentaires à compter de la 44ème heure ;
Attendu que les sociétés intimées ont indiqué en second lieu qu'il n'a pas été procédé à la déduction des sommes perçues au titre de la garantie de rémunération dès lors que le salarié a réalisé moins de 200 heures; que les appelants ont cependant toujours retranché du montant chiffré de leurs demandes toutes les sommes qui leur avaient d'ores et déjà été versées au titre des heures supplémentaires; qu'au soutien de leur moyen, les intimées ne produisent aucun exemple concret d'application d'une telle mesure, ni ne justifie de son fondement textuel ou conventionnel ;
Attendu qu'en conséquence, le jugement déféré doit être réformé sur ce premier point et que statuant à nouveau, la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de Groupe Norbert Dentressangle, sera condamnée in solidum avec la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de la société Norbert Dentressangle Silo, à verser aux appelants les sommes réclamées au titre des heures supplémentaires par les salariés concernés, telles que énumérées dans le tableau de synthèse ci-dessus présenté » ;

ET AUX MOTIFS QUE « le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et des majorations s'y rapportant par un repos compensateur équivalent peut notamment être prévu par convention ou accord collectif d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut, par convention ou accord de branche ;
Attendu que le décret de 1983 prévoit en son article 5 5°) que les heures supplémentaires ouvrent droit pour les personnels roulants à un repos compensateur trimestriel obligatoire dont la durée est égale à : une journée à partir de la 41ème heure jusqu'à la 79ème heure supplémentaire effectuée par trimestre,
une journée et demie à partir de la 80ème heure et jusqu'à la 108eme heure supplémentaire effectuée par trimestre,
deux journées et demie au-delà de la 108ème heure supplémentaire effectuée par trimestres ;
Attendu qu'en raison du régime d'équivalence spécifique à cette branche d'activité, le repos compensateur s'établit en outre de la manière suivante :
Un jour pour les heures comprises en 600 et 638 heures,
Un jour et demi pour les heures comprises entre 639 et 667 heures,
2,5 jours pour les heures réalisées au-delà de 667 heures ;
Attendu que les appelants ont également prétendu que lorsque le contrat de travail prenait fin avant que le salarié n'ait pu bénéficier de ses droits au repos, acquis au titre des heures supplémentaires réalisées, le salarié a droit à l'indemnisation correspondante en espèces, conformément aux dispositions de l'article L3121-31 du code du travail, devenu l'article L3121-14 du même code ;
Attendu que dans le cas de M. L..., salarié de l'entreprise ND BENNE aujourd'hui décédé, le même article prévoit expressément que l'indemnité de repos compensateur est également due aux ayant-droits du salarié dont le décès survient avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il avait droit ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos ;
Attendu que le repos compensateur de remplacement s'ajoute, pour les heures supplémentaires y ouvrant droit à la contrepartie obligatoire en repos; que les heures supplémentaires donnant lieu à un repos équivalent à leur paiement, et aux majorations afférentes, ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires ;
Attendu que les appelants ont indiqué que compte tenu du nombre d'heures supplémentaires demeurées impayées, ils ont été privés d'une partie de leurs droits à repos compensateur; qu'en retranchant de leurs prétentions le montant des droits à repos compensateur d'ores et déjà accordés par l'employeur, les appelants ont opéré un calcul des sommes restant dues ; qu'à cette fin, ils ont procédé pour la société ND SILO, à une évaluation de leurs droits selon un décompte mensuel ou hebdomadaire ; qu'une comparaison des chiffres obtenus caractérisent une fois encore l'existence d'un préjudice pour les salariés lorsque l'employeur décompte les heures supplémentaires, puis les repos compensateurs afférents, de manière mensuelle ;
Attendu que suivant un décompte hebdomadaire réalisé par les appelants, les sommes restant à devoir à chacun des salariés des deux sociétés, au titre des repos compensateur non perçus peuvent être chiffrés de la manière suivante (
) ;
Attendu qu'en conséquence, le jugement déféré doit être également réformé sur ce troisième point; qu'en statuant à nouveau, la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de la S.A. Groupe Norbert Dentressangle, sera condamnée in solidum avec la société Xpo VRAC SILO, venant aux droits de la société Norbert Dentressangle Silo                     , à verser aux appelants les sommes réclamées au titre des repos compensateurs demeurés impayés aux salariés concernés, telles qu'énumérés dans les tableaux ci-dessus présentés » ;

ALORS QUE les infractions aux durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail prévues par les dispositions des articles L 3121-34, L 3121-35 et L 3121-36 du Code du travail ne privent pas l'employeur du bénéfice d'une autorisation de décompter le temps de travail sur une période supérieure à une semaine, sauf si l'accord collectif ou la décision administrative prévoyant cette dérogation le précise ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que conformément à l'article 4 du décret n°83-40 du 26 janvier 1983 la société ND SILO bénéficiait d'une dérogation, en premier lieu par l'effet d'une décision administrative du 4 décembre 2002, puis en second lieu par l'effet de plusieurs accords d'entreprise, l'autorisant expressément à instaurer un décompte mensuel du temps de travail; qu'en jugeant que le non-respect par l'employeur des durées quotidiennes et hebdomadaires maximales avait pour conséquence que la durée du travail devait être calculée sur la semaine et non sur le mois, pour condamner les sociétés Xpo logistics Europe           et Xpo vrac silo France à verser des rappels de salaires pour heures supplémentaires et dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris aux salariés de la société ND Silo, la Cour d‘appel a violé les articles L 3121-34, L 3121-35 et L 3121-36, R 3124-3 et R. 3124-11 du Code du travail, ensemble l'article 4 du décret n°83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de la S.A. Groupe ND, in solidum avec la société Xpo VRAC SILO, venant aux droits de la société ND SILO, à verser à Monsieur Pascal J..., à Monsieur Gilbert E..., à Monsieur Christian I..., à Monsieur Bernard N..., à Monsieur Patrice K..., à Madame Melinda L..., à Monsieur Philippe ZZ..., à Monsieur Marius A..., à Monsieur Eric W..., à Monsieur Nicolas B..., à Monsieur Damien P..., à Monsieur Joël O..., Monsieur Claude H..., à Monsieur Z... et à Monsieur Guy R... , salariés ou ex-salariés de la société ND Bennes, les sommes réclamées par eux au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs, telles que mentionnées au dispositif de l'arrêt, et d'AVOIR dit que toutes les condamnations prononcées en faveur de feu Monsieur L... seront reversées à ses ayants droit, Madame Yolande BB... son épouse et Madame Melinda L... sa fille.

AUX MOTIFS QUE « si les situations juridiques des sociétés ND Bennes et ND SILO ont bien été distinguées par les appelants aux termes de leurs conclusions, les demandes de condamnations financières ne concernent, outre la société groupe Norbert Dentressangle, que la seule société ND SILO, considérant en effet que cette personne morale avait absorbé en 2010 la société ND Bennes; qu'il est en effet précisé par les appelants que la S.A.S. NORBERT DENTRESSANGLES BENNE, immatriculée au R.C.S. de Romans sous le numéro B 414 642 249 ayant son siège [...]dans la Drôme (26), est radiée depuis le 16 septembre 2011, aux droits de laquelle vient la société Norbert Dentressangle Silo ; qu'un extrait du site internet« SOCIETE.COM » (cf. pièce 24 appelants) vient en effet confirmer cette information en mentionnant, après une cession intervenue le 23 juillet 2011, la radiation de cette entreprise à la date indiquée; qu'il n'est toutefois nullement allégué par les appelants que ces deux sociétés étaient co-employeurs de l'ensemble de leurs salariés; qu'il doit en revanche être remarqué qu'aucune pièce justificative de la réalité d'une cession ou d'une fusion de la société ND Bennes avec la société ND SILO, n'a été produite; Attendu que les sociétés intimées contestent que la société ND Bennes ne soit venue aux droits de la société ND Bennes ; qu'elles prétendent en effet qu'il existe toujours trois personnes morales autonomes et distinctes :
- 1 La société Xpo logistics Europe immatriculée au RC.S. de Lyon sous le numéro 309 645 539 pièce 33 intimées) et dont le siège social est fixé au 192 de l'Avenue Thiers-à LYON 6eme ; son objet social est décrit de la manière suivante : « prise de participation dans les sociétés industrielles et commerciales, plus particulièrement dans le secteur du transport, de l'entreposage et des services afférents; assistance et animation de ces sociétés en vue de leur développement» ;
Attendu qu'en dépit de l'absence de mention spécifique sur le Registre du Commerce et des Sociétés (RCS), la société Xpo logistics Europe reconnaît aux termes de ses dernières écritures expressément venir aux droits de la société Groupe Norbert Dentressangle, sans avoir été contredite par les appelants; qu'il lui en sera donc donné acte ;
- 2 la S.AS. Xpo VRAC SILO immatriculée au RC.S de Romans sous le numéro 352 619 845 (cf. pièce 32 intimées) et dont le siège social est fixé au [...]                                  (26). Son objet social est notamment décrit de la manière suivante :
« transports routiers, services de transports de marchandises pour le compte d'autrui et plus particulièrement de produits solides en vrac ... » ;
Attendu que la lecture du RC.S. révèle en outre l'existence d'un [...] dénommé TND SILO, sous la dénomination actuelle ND INTER-PULVE ; que la société Xpo VRAC SILO exerce son activité sous l'enseigne ND SILO; que la S.AS. SPO VRAC SILO reconnaît expressément venir aux droits de la S.N.C. ND SILO, sans avoir été contredite sur ce point par les appelants; qu'il lui en sera ainsi donné acte ;
- 3 La société Xpo(cf. pièce 31 intimées) immatriculée au RCS de ROMANS 386 220 123 RC.S., ayant notamment pour objet « l'exécution de toutes prestations de service pour faciliter la gestion des filiales et leur apporter toute l'assistance technique et administratifs ... la participation directe ou indirecte de la société dans toutes les sociétés, commerces ou industries pouvant se rattacher à l'objet social... » ; que la lecture de son R.C.S. ne révèle aucune mention relative à la société ND Bennes; qu'elle reconnaît cependant venir aux droits de la SASU DENTRESSANGLES Bennes, sans avoir été contredite sur ce point par les appelants; qu'il lui en sera donné acte ;
Attendu qu'enfin, la question de l'absorption par la société ND SILO de la société ND BENNE, aujourd'hui Xpo Transport solutions Europe , ou encore celle de l'éventuel co-emploi des salariés travaillant ou ayant travaillé pour l'une ou l'autre de ces sociétés, apparaissent assez indifférentes à la résolution du présent litige, dans la mesure où les appelants n'ont sollicité dans le dispositif de leurs dernières écritures que la condamnation de la seule société ND SILO, aujourd'hui dénommée selon les intimées, S.AS. Xpo VRAC SILO; qu'enfin, sauf à statuer ultra petita, la condamnation de la société ND Bennes, in solidum avec les deux autres sociétés, est aujourd'hui impossible à un triple titre :
- cette condamnation n'est pas demandée par les appelants,
- il est démontré qu'elle a fait l'objet d'une radiation et n'a donc plus, en tant que telle, d'existence juridique,
-la Société ND SILO a expressément indiqué dans ses conclusions venir aux droits de la société ND Bennes ».

ET AUX MOTIFS QUE « Vu les dispositions de droit commun des articles L3121-1, L3121-10 et L3121-22 du code du travail relatives à la définition du temps de travail effectif et au régime des heures supplémentaires ;
Attendu que le décret N°83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, (tel que modifié par les décrets successifs N°2000-69 du 27 janvier 2000, partiellement annulé par arrêt du Conseil d'Etat du 30 novembre 2001, les décrets N°2002-622 du 25 avril 2002 et N°2005-36 du 31 mars 2005, également partiellement annulé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 18 octobre 2006, puis par le décret N°2007-13 du 4 janvier 2007), dispose en son article 4 qu'«en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'(ancien) article L212-8 du code du travail, la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants peut être calculée sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent» ; que l'article 5 3°) prévoit ensuite que « la durée du temps passé au service de l'employeur, ou temps de service des personnels roulants de marchandises, est fixée dans les conditions suivantes :
- La durée du temps de service des personnels roulants « grands routiers» ou « longue distance » est fixée à 43 heures par semaine, soit 559 heures par trimestre dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 4 du présent décret,
- Est considérée comme heures supplémentaires, pour les personnels roulants, toute heure de temps de service effectuée au-delà des durées mentionnées au 3°), Que l'article 5 4°) précise qu'est considérée comme heure supplémentaire pour les personnels roulants, toute heure de service effectuée au-delà des durées mentionnées au 3°). Ces heures supplémentaires donnent droit à repos compensateur» ;
Attendu que dans son arrêt du 31 octobre 2012, la Cour de cassation a également cassé l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble en ces termes: « Attendu que pour rejeter la demande des salariés en paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateur, l'arrêt retient que si la société ND SILO disposait effectivement d'une autorisation de déroger au calcul de la durée du travail à la semaine pour calculer sur une période d'un mois accordé par le directeur adjoint des transports territorialement compétent le 4 décembre 2002, tel n'était pas le cas de la société ND BENNE; que cependant les salariés n'ont pas effectué de calcul subsidiaire excluant les heures d'équivalence et ne démontre pas en quoi les calculs opérés par leur employeur leur sont défavorables; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la Société ND BENNE ne disposait d'aucune dérogation au calcul sur la semaine de la durée hebdomadaire de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés» ;
Attendu que conformément aux écritures des appelants et intimées, il convient de distinguer la situation de la société ND SILO, disposant d'un accord exprès permettant de déroger au calcul hebdomadaire des heures supplémentaires, de celle de la société ND Bennes qui n'en dispose pas ;
4-2 sur la situation de la société ND Bennes
Attendu que les appelants ont produit le même type de décompte que celui établi pour la société ND SILO, suivant la même méthode d'évaluation du nombre d'heures supplémentaires et congés payés afférents qu'ils considèrent comme impayées ;
Attendu que les sociétés intimées ont répliqué en rappelant également les termes de l'arrêt de la cour de cassation du 31 octobre 2012, pour prétendre que la preuve n'était toujours pas rapportée par les appelants que le décompte hebdomadaire des heures supplémentaires était plus avantageux qu'un décompte mensuel ;
Attendu en outre que les sociétés intimées ont indiqué que la société ND Bennes a signé un certain nombre de protocoles d'accord relatifs, non pas spécifiquement au régime des heures supplémentaires, mais à la rémunération des conducteurs en « zones longues» (cf. pièces N° 26 à 29 intimées) ; que le dernier protocole produit aux débats est daté du 11 juin 2004 ; que sa lecture révèle ainsi en page 4 que le taux horaire retenu est celui du Salaire Minimum Professionnel Garanti (SMPG) tel que défini par la convention collective applicable; qu'il est ensuite précisé que les «conducteurs qui effectueront plus de 200 heures, bénéficieront du paiement d'heures supplémentaires jusqu'à 220 heures, et que les heures exceptionnellement effectuées au-delà de 220 heures donneront lieu à récupération sous la forme d'un repos de remplacement» ; qu'un tel mode de rémunération bénéficie à tous les conducteurs sur « longue distance », qu'ils aient ou non effectué dans le mois 200 heures de travail ;
Attendu que les intimées ont ensuite indiqué que les heures d'équivalence bénéficiaient bien d'une majoration de 25%, l'examen des bulletins comprenant des mentions telles que « heures bonifiées », puis « heures supplémentaires à 125% », puis « heures majorées à 125% ; qu'elles considèrent que les heures supplémentaires ont été normalement majorées à 150% ;
Attendu cependant qu'il est manifeste que la société ND Bennes ne disposait pas expressément d'une autorisation administrative, puis d'un accord collectif d'entreprise l'autorisant à déroger à la règle du calcul hebdomadaire du temps de travail, comme cela était le cas pour la société ND SILO ;
Attendu que les intimées considèrent cependant toujours que la preuve qu'un décompte hebdomadaire soit plus avantageux qu'un décompte mensuel, n'était toujours pas établie, quand bien même ce dernier s'avérait illicite ;
Attendu qu'une telle preuve devant manifestement être rapportée par les appelants, ceux-ci ont alors procédé à un nouvel examen des relevés chrono-tachygraphes, à partir desquels ont été refaits les calculs selon les modalités suivantes :
- sur la base d'un décompte hebdomadaire,
- hors la problématique des heures d'équivalence, d'abord intitulées sur les bulletins de salaire «heures bonifiées», puis heures sup 125%, et heures majorées à 125 %, et dont il est dit par les appelants que leur montant a été déduit du chiffrage,
- en déduisant le montant des salaires perçus au titre des heures supplémentaires, au cours de la relation de travail (comme il est mentionné au bas de chaque tableau de synthèse (Pièce1.4 de chaque Bcp individuel) ;
Attendu que les appelants ont ainsi établi la synthèse suivante, en écartant toutefois temporairement la situation de M. DD... pour lequel la cour a décidé une disjonction d'instance ;
Attendu que pour tenter de démontrer l'absence de réel préjudice, les intimées ont considéré qu'il devait être distingué selon que le salarié effectue ou non des horaires réguliers, générant ou non des heures supplémentaires ; qu'elles admettent alors en effet que dans une telle hypothèse, le salarié subit une perte selon le mode de calcul employé, reconnaissant en effet qu'un lissage des heures supplémentaire sur le mois, et non pas sur la semaine, était de nature à générer une perte de revenus; qu'elles ont cependant indiqué que tel ne serait pas le cas d'un chauffeur effectuant chaque semaine des heures supplémentaires, le calcul mensuel ou hebdomadaire n'ayant aucune incidence sur le montant de sa rémunération; qu'il s'agit cependant d'une considération générale et purement théorique ;
Attendu qu'en revanche, les appelants ont examiné de manière concrète la situation de chacun des salariés de l'entreprise en comparant le décompte des heures réellement effectuées avec les bulletins de salaires; qu'il a été amplement démontré lors de examen de la situation de la société ND SILO qu'en calculant le montant des heures supplémentaires et congés payés afférents, non plus de manière hebdomadaire, mais mensuelle, les sommes pouvant être alors être réclamées par les salariés au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents étaient largement moindres; qu'un tel constat peut parfaitement être appliqué à la société ND Bennes ;
Attendu qu'en conséquence, le jugement déféré doit être réformé sur ce second point; qu'en statuant à nouveau, la société Xpo logistics Europe, venant aux droits de la S.A. Groupe Norbert Dentressangle sera condamnée in solidum avec la société Xpo VRAC SILO, venant aux droits de la société Norbert Dentressangle Silo , à verser aux appelants les sommes réclamées au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents par les salariés concernés, telles qu'énumérées dans le tableau de synthèse ci-dessus présenté ».

ET AUX MOTIFS QUE « le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et des majorations s'y rapportant par un repos compensateur équivalent peut notamment être prévu par convention ou accord collectif d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut, par convention ou accord de branche ;
Attendu que le décret de 1983 prévoit en son article 5 5°) que les heures supplémentaires ouvrent droit pour les personnels roulants à un repos compensateur trimestriel obligatoire dont la durée est égale à : une journée à partir de la 41ème heure jusqu'à la 79ème heure supplémentaire effectuée par trimestre, une journée et demie à partir de la 80ème heure et jusqu'à la 108eme heure supplémentaire effectuée par trimestre, deux journées et demie au-delà de la 108ème heure supplémentaire effectuée par trimestres ;
Attendu qu'en raison du régime d'équivalence spécifique à cette branche d'activité, le repos compensateur s'établit en outre de la manière suivante :
Un jour pour les heures comprises en 600 et 638 heures,
Un jour et demi pour les heures comprises entre 639 et 667 heures,
2,5 jours pour les heures réalisées au-delà de 667 heures ;
Attendu que les appelants ont également prétendu que lorsque le contrat de travail prenait fin avant que le salarié n'ait pu bénéficier de ses droits au repos, acquis au titre des heures supplémentaires réalisées, le salarié a droit à l'indemnisation correspondante en espèces, conformément aux dispositions de l'article L3121-31 du code du travail, devenu l'article L3121-14 du même code ;
Attendu que dans le cas de M. L..., salarié de l'entreprise ND BENNE aujourd'hui décédé, le même article prévoit expressément que l'indemnité de repos compensateur est également due aux ayant-droits du salarié dont le décès survient avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il avait droit ou avant qu'il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos ;
Attendu que le repos compensateur de remplacement s'ajoute, pour les heures supplémentaires y ouvrant droit à la contrepartie obligatoire en repos; que les heures supplémentaires donnant lieu à un repos équivalent à leur paiement, et aux majorations afférentes, ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires ;
Attendu que les appelants ont indiqué que compte tenu du nombre d'heures supplémentaires demeurées impayées, ils ont été privés d'une partie de leurs droits à repos compensateur; qu'en retranchant de leurs prétentions le montant des droits à repos compensateur d'ores et déjà accordés par l'employeur, les appelants ont opéré un calcul des sommes restant dues; Attendu que suivant un décompte hebdomadaire réalisé par les appelants, les sommes restant à devoir à chacun des salariés des deux sociétés, au titre des repos compensateur non perçus peuvent être chiffrés de la manière suivante (
) ;
Attendu qu'en conséquence, le jugement déféré doit être également réformé sur ce troisième point; qu'en statuant à nouveau, la société Xpo logistics Europe          , venant aux droits de la S.A. Groupe Norbert Dentressangle                 , sera condamnée in solidum avec la société Xpo VRAC SILO, venant aux droits de la société Norbert Dentressangle Silo                     , à verser aux appelants les sommes réclamées au titre des repos compensateurs demeurés impayés aux salariés concernés, telles qu'énumérés dans les tableaux ci-dessus présentés ».

ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce la société ND Silo faisait valoir qu' « il est erroné de prétendre ou suggérer comme le font les appelants que la société ND Silo viendrait désormais aux droits de ND Bennes ; que ceci est inexact, extrait KBIS à l'appui, il est justifié de l'existence de 3 sociétés juridiquement distinctes : Xpo Holding Transport solutions Europe, Xpo VRAC Silo, Xpo logistics Europe           » (conclusions d'appel des exposantes p 12) ; qu'en affirmant que la « Société ND SILO a expressément indiqué dans ses conclusions venir aux droits de la société ND Bennes », pour condamner la société Xpo VRAC Silo venant aux droits de la société ND SILO à verser aux salariés de la société ND Bennes des rappels de salaires pour heures supplémentaires et dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris, la Cour d'appel a dénaturé ces conclusions et, partant, violé l'article 4 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22188
Date de la décision : 28/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 14 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2018, pourvoi n°16-22188


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22188
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