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15/03/2018 | FRANCE | N°17-10619

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 mars 2018, 17-10619


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 322-1, alinéa 1er, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Attendu que le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ;

Attendu que l'arrêt attaqué (Paris,15 septembre 2016) fixe les indemnités dues à la société civile immobilière des Rosiers (la SCI) par suite de l'expropriation, au profit de la Société d'aménagement et de développemen

t des villes et du département du Val-de-Marne (la SADEV 94), de parcelles lui appartenant ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 322-1, alinéa 1er, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Attendu que le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ;

Attendu que l'arrêt attaqué (Paris,15 septembre 2016) fixe les indemnités dues à la société civile immobilière des Rosiers (la SCI) par suite de l'expropriation, au profit de la Société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (la SADEV 94), de parcelles lui appartenant ;

Attendu que, pour fixer comme il le fait l'indemnité principale d'expropriation et l'indemnité de remploi, l'arrêt retient que le terme de comparaison portant sur l'immeuble sis au [...]             ne peut être écarté car la SCI n'établit pas qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation, qui seule doit être prise en considération, ce bien aurait déjà été démoli ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'expropriée faisait valoir que la démolition du bien sur lequel portait le terme de référence en cause ne permettait pas d'en connaître la consistance et l'état au jour de la vente et que seule la consistance du bien exproprié est appréciée à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe l'indemnité principale d'expropriation à 2 073 558 euros et l'indemnité de remploi à 208 356 euros, l'arrêt rendu le 15 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la Société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne et la condamne à payer à la SCI des Rosiers la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la SCI des Rosiers

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé à 2 073 558 euros l'indemnité principale d'expropriation et à 208.356 l'indemnité de remploi revenant à la SCI des Rosiers.

AUX MOTIFS PROPRES QUE le bien doit être évalué à la date du 10 février 2014, selon son usage effectif à la date de référence du 22 juin 2007, date de la dernière modification du plan local d'urbanisme de la commune de [...] ; qu'à cette date, la parcelle considérée était située en zone UP, c'est à dire une zone principalement destinée à la construction de logements, de locaux tertiaires et d'activités, de commerces, d'équipements publics ou privés, à l'aménagement d'espaces verts publics) ; que l'appréciation de la valeur du bien en cause doit se faire par comparaison avec celle d'autres biens présentant des caractéristiques semblables dans la même aire géographique et ayant fait l'objet de transactions à des époques proches ; que la parcelle en cause L 90, est un vaste terrain d'une superficie de 846 m², le long de la nationale 7, sur lequel est érigé un ensemble immobilier récent (une dizaine d'années) sur sous-sol (garage, bureaux et cave), de trois étages, à usage d'appartement avec terrasse (troisième étage), de bureaux (premier et deuxième étage) et de locaux commerciaux (rez-de-chaussée) avec emplacements de stationnement délimités à l'avant ; que s'agissant des superficies et plus particulièrement celle de l'appartement, que la Sadev 94 approuve le jugement en ce qu'il a limité à 0,3 la pondération de la surface de la terrasse et écarté la surface des parties communes, de la cave et des parkings, tandis que la SCI appelante considère que, le jugement ayant retenu la surface utile, il convenait de prendre en compte les annexes de l'appartement (terrasse et sous-sol) en appliquant l'abattement de 0,5 prévu aux articles R 331-10, R 111-2 et R 111-10 du code de la construction et de l'habitation ; qu'eu égard à l'importance de l'emprise au sol de l'ensemble immobilier (483 m² sur 846 m²), l'évaluation de l'immeuble se fera en valeur intégrée en ce sens que la valeur au m² déterminée comprendra celle du sol ; que pour permettre les comparaisons avec les éléments de référence fournis, il sera retenu la surface utile de l'appartement, ce dont conviennent les parties, même si elles divergent sur ce qu'il faut y inclure ; que la définition de la surface utile donnée par l'article R 331-10 du code de la construction et de l'habitation, à laquelle se réfère la SCI appelante, a un champ d'application restreint (notamment la détermination des loyers maximum et les règles d'obtention des prêts dans le domaine du logement social) ; qu'il convient de s'en tenir, s'agissant d'un immeuble qui n'est pas en copropriété, à la notion de surface utile nette ; qu'en conséquence il n'est pas tenu compte, pour déterminer la surface de l'appartement, de la superficie des parties communes que le premier juge a exactement évaluée à 10 m² ; que les pondérations retenues, 0,3 pour la terrasse accessible et 0,5 pour le sous-sol, sont correctes et doivent être confirmées ; que dès lors la superficie utile de l'appartement s'établit bien à 109 m², celle des bureaux libres à 402 m², celle du rez-de-chaussée à 423,60 m², celle du sous-sol à 54 m² ; qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte la surface de la cave dépendant de l'appartement, dès lors que les éléments de comparaison seront choisis avec ce même type de local accessoire ; que sur la valeur à retenir au m², le premier juge l'a fondée sur sept références, quatre fournies par le commissaire du gouvernement et trois par la SCI des Rosiers ; que, contrairement à ce que soutient la Sadev 94, les quatre ventes du [...] concernent bien des appartements et non une maison individuelle, même s'ils sont d'une superficie effectivement moindre (de 58 m² à près de 80 m²) que celle du bien en cause ; qu'il s'agit d'éléments de comparaison valables ; que les deux références du [...]           doivent être écartées car il s'agit de ventes en l'état futur d'achèvement, ce qui constitue un bien différent de celui en cause ; que la référence du [...]              ne peut davantage être retenue car l'immeuble de grande hauteur concerné diffère par trop des caractéristiques du bien de la SCI, lequel ne rentre pas dans cette catégorie ; qu'en revanche il convient d'intégrer les trois références fournies par le commissaire du gouvernement, relatives à des ventes d'appartements au [...]              ; qu'en définitive les sept références pertinentes pouvant être retenues, sont celles figurant dans les écritures d'appel du commissaire du gouvernement, qui aboutissent à une valeur moyenne du m² de 3 593,71 euros, arrondis à 3 594 euros ; qu'il apparaît que le facteur de plus-value résulté de la présence d'éléments d'équipements et de confort s'équilibre avec la moins-value découlant du fait que l'appartement est situé dans un ensemble immobilier à caractère mixte et de la circonstance que les références retenues sont de superficie plus petite, ce qui constitue un facteur de renchérissement ; qu'enfin la situation du bien est prise en compte dans le choix des références situées à proximité ; qu'en conséquence l'indemnité principale pour la dépossession de l'appartement est la suivante : 109 m² x 3 594 euros : 391 476 euros ; que s'agissant des locaux commerciaux le premier juge a, à juste titre, écarté les références concernant des mutations intéressant d'autres communes dont il n'est pas établi que le marché immobilier est identique à celui de la commune de [...], ainsi que celles relatives à des locaux occupés ; qu'il convient d'observer à cet égard que la SCI, qui a contesté, par voie de question prioritaire de constitutionnalité, le principe et le quantum d'un abattement de 40 % sur la valeur libre pour déterminer la valeur occupée, se livre à un tel calcul, en page 21 de son dernier mémoire, pour déterminer la valeur libre du bien faisant l'objet de la vente du 23 décembre 2010 ; qu'il n'est pas établi par la SCI qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation, qui seule doit être prise en considération, le [...]             aurait déjà été démoli ; que le [...]               est une référence valable ; qu'en l'état des cinq références pertinentes conservées par le premier juge, une valeur moyenne du m² des locaux commerciaux et locaux a été dégagée à hauteur de 2 186,93 euros ; que pour tenir compte des éléments d'équipement et de confort dont dispose le bien de la SCI, qui n'apparaissent pas de la même façon dans les éléments de comparaison et qui ne sont pas suffisamment compensés par le fait que les superficies des éléments de comparaison sont moins importantes que les biens en cause, même si ceux-ci sont découpés en lots, il convient de porter la valeur du m² à la somme de 2 300 euros ; que l'indemnité principale de dépossession pour l'ensemble du bien immobilier est en conséquence de 391 476 euros + 924 600 euros + 570 492 euros + 62 790 euros + 124 200 euros = 2 073 558 euros ; que l'indemnité de remploi est par suite de 5000 euros x 20 % = 1 000 euros, 10 000 euros x 15 % = 1 500 euros, 2 058 558 euros x 10 % = 205 855,80 euros, arrondis à 205 856 euros ; soit au total, la somme de 208 356 euros.

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE compte tenu de la nature mixte de l'immeuble, divisé en un logement, plusieurs locaux commerciaux et bureaux, il convient de l'évaluer en superficie utile c'est à dire de prendre en compte la surface développée de plancher non pondérée mesurée "dans oeuvre", abstraction faite des caves et combles et sous déduction des murs et cloisons ainsi que des espaces réservés à la circulation des occupants de l'immeuble ; que les espaces communs ne seront pas pris en compte dans le calcul de la surface de l'ensemble immobilier ; qu'il convient, en l'espèce, de déduire la surface de la cage d'ascenseur et des escaliers étant précisé que sont compris dans la surface des espaces communs des 1er et 2ème étage, les sanitaires et un grand dégagement ; que la surface des espaces communs à déduire doit être évaluée à 10 m² de sorte que la superficie utile du logement est fixé à 104 m² - 10 m² = 94 m² ; qu'il convient de pondérer la surface de la terrasse accessible et d'une surface de 48,80 m² par un coefficient de 0,3 ; que la superficie retenue de la terrasse est de 14,64m² ; que sur la détermination des indemnités, la méthode consistant à comparer le bien à évaluer à des cessions de biens équivalents qui ont eu lieu dans la période récente sur le marché immobilier local sera retenue ; que s'agissant des locaux commerciaux et bureaux, le commissaire du gouvernement cite plusieurs références de locaux commerciaux et bureaux de superficie inférieure au bien en cause ; qu'il convient de ne retenir que les ventes de biens en valeur libre ; qu'en outre, la mutation du bien sis [...]                                 ne sera pas retenue car il ne s'agit pas d'une construction similaire et ne disposant pas du même potentiel d'accueil des clients (places de parking, SAS d'entrée et ascenseur) ; qu'il convient de retenir la vente du 29 novembre 2010 d'un immeuble de bureaux du [...]               d'une superficie de 1.000 m² pour un prix de 1.720.000 euros ;

1) ALORS QU'il résulte des articles L.321-1 et L.322-1 du code de l'expropriation que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation, le bien exproprié étant évalué en fonction de sa consistance à la date de l'ordonnance d'expropriation, ce qui implique de tenir compte de la surface de plancher totale de la construction, lorsqu'il est procédé à son évaluation en fonction d'un prix au mètre carré, déterminé à partir des termes de comparaison considérés comme les plus pertinents ; qu'en l'espèce, en retenant que s'agissant d'un immeuble qui n'est pas en copropriété, il convient de s'en tenir à la notion de surface utile nette et qu'il n'est pas tenu compte pour déterminer la surface de l'appartement, de la superficie des parties communes évaluée exactement à 10 m² par le premier juge, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;

2) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en énonçant qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte la surface de la cave dépendant de l'appartement, dès lors que les éléments de comparaison seront choisis avec ce même type de local accessoire (arrêt, 6ème page, avant-dernier paragraphe), puis qu'en définitive les sept références pertinentes pouvant être retenues sont celles figurant dans les écritures d'appel du commissaire du gouvernement qui aboutissent à une valeur moyenne du m² de 3.593,71 euros (arrêt, p. 7, 5ème paragraphe), bien que ces références aient été constituées (conclusions du commissaire du gouvernement devant la Cour d'appel, V.A.1), p. 4), de quatre ventes de biens immobiliers au [...]                            dépourvues de cave et de trois ventes de biens immobiliers au [...]              comportant une cave ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS QU'il résulte des articles L.321-1 et L.322-1 du code de l'expropriation que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation, le bien exproprié étant évalué en fonction de sa consistance à la date de l'ordonnance d'expropriation ; qu'une vente en état futur d'achèvement constitue une vente immobilière à terme, régie par les dispositions des articles 1601-3 du code civil et L.261-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, portant donc sur un bien immobilier dont le prix de vente et toutes les caractéristiques physiques (localisation, surface de plancher) sont précisément définies par le contrat de vente selon l'article L.261-11 du code de la construction et de l'habitation ; qu'en retenant néanmoins en l'espèce que les deux références du [...]           doivent être écartées car il s'agit de ventes en l'état futur d'achèvement, ce qui constitue un bien différent de celui en cause, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

4) ALORS QU'il résulte des articles L.321-1 et L.322-1 du code de l'expropriation que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation, le bien exproprié étant évalué en fonction de sa consistance à la date de l'ordonnance d'expropriation ; qu'une vente en état futur d'achèvement constitue une vente immobilière à terme, régie par les dispositions des articles 1601-3 du code civil, portant donc sur un bien immobilier dont le prix de vente et toutes les caractéristiques physiques (localisation, surface de plancher) sont précisément définies par le contrat de vente ; qu'en retenant néanmoins en l'espèce que les deux références du [...]           doivent être écartées car il s'agit de ventes en l'état futur d'achèvement ce qui constitue un bien différent de celui en cause, sans caractériser autrement les motifs pour lesquels ces deux termes de comparaison invoqués par l'expropriée devaient être écartés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées ;

5) ALORS QUE l'article L.322-1 du code de l'expropriation énonçant que le juge de l'expropriation fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété, cette règle ne s'applique que pour l'évaluation du bien exproprié, et non pour se prononcer sur la pertinence d'un terme de comparaison invoqué ; qu'en l'espèce, en retenant qu'il n'est pas établi par la SCI qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation, qui seule doit être prise en considération, le [...]             aurait déjà été démoli, pour retenir ensuite ce terme de comparaison faisant ressortir un prix de 1.720 m², terme de comparaison que contestait la SCI des Rosiers, la cour d'appel a méconnu par fausse application la disposition susvisée.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10619
Date de la décision : 15/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 mar. 2018, pourvoi n°17-10619


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10619
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