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20/06/2012 | FRANCE | N°11-12850

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 juin 2012, 11-12850


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 312-14, alinéa 1er, du code rural, ensemble les articles 724 et 758-5 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Jean-Marcel X... est décédé le 18 octobre 2002 en laissant à sa succession sa veuve, Jeanine Y..., et leurs deux enfants, M. Bernard X... et Nicole X..., épouse Z... ; que, par jugement du 26 août 2005, ont été définitivement fixées leurs créances de salaire différé à la charge de la succession ; que Nicole Z... est décédée le 8

mai 2006 sans descendant ; que son époux, M. Z..., a demandé la liquidation et le...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 312-14, alinéa 1er, du code rural, ensemble les articles 724 et 758-5 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Jean-Marcel X... est décédé le 18 octobre 2002 en laissant à sa succession sa veuve, Jeanine Y..., et leurs deux enfants, M. Bernard X... et Nicole X..., épouse Z... ; que, par jugement du 26 août 2005, ont été définitivement fixées leurs créances de salaire différé à la charge de la succession ; que Nicole Z... est décédée le 8 mai 2006 sans descendant ; que son époux, M. Z..., a demandé la liquidation et le partage de la succession de Jean-Marcel X... et fait valoir la créance de salaire différé reconnue à son épouse ; que Jeanine Y... étant décédée, M. X... a poursuivi l'instance, tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritier de celle-ci ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. Z... tendant à voir reconnaître la succession débitrice de cette créance, l'arrêt retient que l'article L. 312-14 du code rural ne faisant aucune distinction selon que le bénéficiaire est décédé avant ou après l'exploitant, le conjoint survivant ne peut prétendre au bénéfice du contrat de salaire différé dont son épouse était titulaire, peu important que les droits de celle-ci à ce titre aient déjà été déterminés en leur principe et leur montant par une décision définitive à la date de son décès, de sorte que l'impossibilité de dévolution à d'autres que les enfants du bénéficiaire, vivants ou représentés, exclut que d'autres ayants droit que ces derniers puissent revendiquer la créance de leur auteur à ce titre, quand bien même cette créance serait déjà certaine et liquide au décès de ce dernier ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la créance de salaire différé, ayant été définitivement fixée avant le décès de sa bénéficiaire, était entrée dans le patrimoine de cette dernière et devait se retrouver dans sa succession, de sorte que le mari était fondé à demander qu'il en soit tenu compte dans la succession de l'exploitant qui en était débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement qui a statué sur le sort de la créance de salaire différé reconnue à Nicole Z..., l'arrêt rendu le 25 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à M. Z... la somme de 3 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. Z....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Z... de sa demande tendant à voir intégrer dans la succession de son épouse décédée la créance de salaire différé reconnue avant le décès, par jugement définitif du 26 août 2005 ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L.312-14 alinéa 1er du code rural, le bénéfice du contrat de travail à salaire différé constitue pour le descendant de l'exploitation agricole un bien propre dont la dévolution, par dérogation aux règles du droit civil, et nonobstant toutes conventions matrimoniales est exclusivement réservée à ses enfants ; que ce texte ne faisant aucune distinction selon que le bénéficiaire est décédé avant ou après l'exploitant, le conjoint survivant ne peut prétendre au bénéfice du contrat de travail à salaire différé, dont son épouse était titulaire, peu important que les droits de celle-ci à ce titre étaient d'ores et déjà déterminés en leur principe et leur montant par une décision définitive, à la date de son décès ; que l'impossibilité de dévolution résultant du dit texte du bénéfice du contrat de travail à salaire différé à d'autres que les enfants du bénéficiaire exclut en effet que d'autres ayants droits que ces derniers puissent revendiquer la créance de leur auteur à ce titre, cette créance aurait elle été comme en l'espèce dores et déjà certaine et liquide au décès de ce dernier ;
ALORS QUE la créance de salaire différé, reconnue dans son principe et son montant par une décision judiciaire définitive, intègre, dès le jugement devenu définitif, les biens propres du créancier ; que la créance qui perd alors le caractère intransmissible à d'autres ayants droits que des descendants, doit suivre les règles de la dévolution successorale du conjoint pré-décédé, en l'absence de descendants ; qu'en refusant de dire intégrée, dès l'acquisition du caractère définitif du jugement la fixant et avant son décès, dans le patrimoine propre de son épouse décédée sans descendants, la créance de salaire différé non réglée par la succession débitrice dont M. Z... réclamait le règlement, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L.321-14 alinéa 1er du code rural et par refus d'application les articles 758-5 et s. du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-12850
Date de la décision : 20/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

SUCCESSION - Salaire différé - Bénéficiaires - Décès - Décès postérieur à la fixation définitive du montant de la créance - Transmission au conjoint survivant

Une créance de salaire différé, définitivement fixée avant le décès de son bénéficiaire, entre dans son patrimoine et se retrouve dans sa succession, de sorte que le conjoint survivant de celui-ci est fondé à demander qu'il en soit tenu compte dans la succession de l'exploitant qui en est débiteur


Références :

article L. 321-14, alinéa 1er, du code rural

articles 724 et 758-5 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 25 novembre 2010

Sur la transmission de la créance de salaire différé en l'absence d'exercice par le bénéficiaire de son droit de créance de son vivant, à rapprocher :1re Civ., 15 mai 2008, pourvois n° 07-13.179 et 07-13.330, Bull. 2008, I, n° 133 (2) (cassation partielle sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 jui. 2012, pourvoi n°11-12850, Bull. civ. 2012, I, n° 141
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, I, n° 141

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Pagès
Rapporteur ?: M. Savatier
Avocat(s) : SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12850
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