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03/05/2012 | FRANCE | N°11-14050

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 mai 2012, 11-14050


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 janvier 2011), que, par acte du 1er juillet 2003, M. X...a donné à bail à M. El Houssine Z... un local à usage commercial pour une durée de deux ans ; que, par acte du 15 juillet 2005, un nouveau bail portant sur le même local a été conclu entre M. X...et M. Hamid Z... et la société Le Marrakchi en cours de formation pour une nouvelle durée de deux ans à compter du 1er juillet 20

05 ; que par acte séparé du 15 juillet 2005, le preneur a indiqué renonce...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 janvier 2011), que, par acte du 1er juillet 2003, M. X...a donné à bail à M. El Houssine Z... un local à usage commercial pour une durée de deux ans ; que, par acte du 15 juillet 2005, un nouveau bail portant sur le même local a été conclu entre M. X...et M. Hamid Z... et la société Le Marrakchi en cours de formation pour une nouvelle durée de deux ans à compter du 1er juillet 2005 ; que par acte séparé du 15 juillet 2005, le preneur a indiqué renoncer expressément à se prévaloir des dispositions de l'article L. 145-5, alinéa 2, du code de commerce ; que la société Le Marrakchi a assigné le bailleur afin de se voir reconnaître le bénéfice du statut des baux commerciaux ; que M. X...a reconventionnellement demandé la résiliation du bail ;
Attendu que, pour dire que la société Le Marrakchi bénéficie d'un bail commercial, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'à l'issue du premier bail, le locataire titulaire d'un nouveau bail et qui a été laissé dans les lieux a acquis son droit à la propriété commerciale, les clauses de renonciation contenues dans les baux postérieurs successifs étant frappées de nullité comme frauduleuses aux droits du locataire ;
Qu'en statuant ainsi, sans motiver sa décision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2011 par la cour d'appel de Bordeaux ; remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne la société Le Marrakchi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Le Marrakchi à payer à M. X...une somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Le Marrakchi ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait dit la société LE MARRAKCHI locataire des locaux commerciaux appartenant à M. X..., sis ..., sauf à dire que le bail était soumis au statut des baux commerciaux pour une durée de 9 ans à compter du 1er juillet 2005 et non du 15 mars 2005, d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné M. X...à payer à la société LE MARRAKCHI la somme de 1 392 € au titre d'un trop-perçu de loyers de 2005 à 2007 et d'AVOIR débouté M. X...de ses demandes tendant à voir déclarer la société LE MARRAKCHI occupante sans droit ni titre des locaux, ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef, et obtenir sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation ;
AUX MOTIFS QUE il est de principe, en vertu de l'article L 145-4 du code de commerce, que la durée d'un bail commercial ne peut être inférieure à 9 ans ; que cependant, les parties peuvent déroger à cette durée, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, en consentant un bail inférieur à 2 ans ; que si, à l'expiration de cette durée le preneur reste et est resté en possession, il s'opère un nouveau bail d'une durée de 9 ans (article L 145-5 du code de commerce) ; que la fraude commise lors de la conclusion de baux dérogatoires successifs interdit au bailleur de se prévaloir de la renonciation du preneur au droit à la propriété commerciale ; qu'en l'espèce, par bail du 1. 7. 2003, Denis X...a donné en location à El Houssine Z... à usage de commerce de sandwicherie des locaux commerciaux situés ...pour une durée de deux années à compter du 1. 7. 2003 ; que le locataire s'est maintenu dans les lieux après le 1. 7. 2005 ; que par bail du 15. 7. 2005, " il a été convenu et arrêté.... (que) Mr X...Denis fait bail et donne à loyer à M. Z... El Houssine SARL MARRAKECH " les mêmes locaux à usage de " ventes de sandwiches (Sandwicherie) " pour une durée de deux années à compter du 1. 7. 2005, expirant donc le 1. 7. 2007 ; que selon statuts du 14. 4. 2006, la S. A. R. L. le MARRAKCHI fut constituée entre Hamid, El Houssine et Khalid Z... ; que selon extrait du R. C. S. du 15. 4. 2008, elle fut immatriculée le 10. 5. 2006, son gérant étant Hamid Z... et elle exploitait plusieurs commerces sous les noms de MARRAKECH, Superette MARRAKECH, et à compter du 10. 5. 2006, au ..., une Sandwicherie à l'enseigne le MARRAKCHI ; que par L. R. A. R datée du 24. 4. 2007, reçue le 27. 4, 2007, adressée à " Z... Hamid (MARRAKCHI) ...", Denis X...rappelait que le bail conclu le 15. 7. 2005 arrivait à expiration le 14. 7. 2007 et lui rappelait qu'à cette date il devait avoir quitté les lieux ; qu'avant de consentir le second bail du 15. 7. 2005, le bailleur avait déjà adressé la même lettre au locataire le 1. 5. 2005 ; que la S. A. R. L. le MARRAKCHI que le bailleur considérait comme sa locataire, à qui il avait remis des quittances, s'est maintenue dans les lieux et a assigné Denis X...aux fins de revendiquer le bénéfice du statut des baux commerciaux ; que si ce second bail, comme le premier, a été consenti à El Houssine Z..., qui devint l'associé de la société le MARRAKCHI, aucun doute n'a pu régner ensuite dans l'esprit du bailleur quant à l'identité de son locataire, puisque c'est à la SARL MARRAKCHI qu'il a remis des quittances et écrit le 24. 4. 2007 en se référant au bail du 15. 7. 2005 qui n'était pas encore expiré ; que c'est donc à juste titre que premier juge a estimé que le bail consenti au profit de la société le MARRAKCHI était soumis au statut des baux commerciaux pour une durée de neuf ans, que par contre, comme l'a indiqué par erreur le tribunal, ce statut ne s'applique pas à compter du 15 mars 2005, mais à compter du 1. 7. 2005, date d'effet du second bail ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE à l'issue du premier bail, le locataire titulaire d'un nouveau bail et qui a été laissé dans les lieux a acquis son droit à la propriété commerciale à compter du 15 mars 2005 où il s'est formé un nouveau bail de 9 ans, les clauses de renonciation contenues dans les baux postérieurs successifs étant frappées de nullité comme frauduleuses aux droits du locataire ; que le bailleur ne peut ignorer que Monsieur Hamid Z... est la même personne qui preneur initial a exploité ensuite le fonds de commerce sous la forme de la SARL LE MARRAKCHI dont il est le gérant et qu'il exploite également à titre personnel le restaurant dans les locaux jouxtant les lieux loués et également donné à bail par le même bailleur au ...ne saurait sauf par une particulière mauvaise foi utiliser la modification juridique opérée pour dénier le droit au statut ; qu'il y a donc lieu de dire que la SARL LE MARRAKCHI par ailleurs régulièrement immatriculée pour son activité commerciale exercée dans les lieux au RCS de Bordeaux, bénéficie du statut des baux commerciaux sur les locaux sis ...(…) ; que le bailleur ne saurait contester l'application du statut des baux commerciaux, puis se retrancher derrière le nouveau bail intervenu depuis le 15 mars 2005 pour refuser de régler le trop perçu de loyer de 2005 à 2007 qui reste dû au locataire et qu'il sera condamné à payer soit la somme de 1 392 euros ;
1°) ALORS QUE les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'il résulte des propres constatations et énonciations de l'arrêt que le bail du 15 juillet 2005 avait été conclu entre M. X...et M. El Houssine Z... ; qu'en retenant néanmoins que le bail avait été consenti à la société le MARRAKCHI, constituée le 14 avril 2006, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1165 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, une contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant que le bail du 15 juillet 2005 avait été consenti à M. El Houssine Z..., puis que ce bail avait été consenti à la société LE MARRAKCHI, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, seul le preneur qui, à l'expiration d'un bail dérogatoire, reste et est laissé en possession, ou se voit consentir le renouvellement exprès du bail ou la conclusion, avec le même bailleur, d'un nouveau bail pour le même local, bénéficie du statut des baux commerciaux ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le bail dérogatoire conclu le 1er juillet 2003, pour une durée de deux ans, l'avait été entre M. X..., bailleur, et M. El Houssine Z..., preneur ; qu'en retenant que la société LE MARRAKCHI, à laquelle aurait été consenti le bail dérogatoire conclu le 15 juillet 2005, pour une durée de deux ans, pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 145-5 du Code de commerce, en sorte que ce bail aurait été soumis au statut des baux commerciaux pour une durée de neuf ans à compter de cette date, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 145-5 du Code de commerce ;
4°) ALORS QU'en tout état de cause, la fraude ne se présume pas ; que pour dénier tout effet aux actes par lesquels M. Z... avait, après l'expiration du bail dérogatoire du 1er juillet 2003, renoncé au bénéfice du statut des baux commerciaux, la Cour d'appel s'est bornée à dire nulles les clauses de renonciation comme frauduleuses aux droits du locataire ; qu'en statuant de la sorte, sans caractériser une quelconque fraude, la Cour d'appel a violé le principe selon lequel la fraude ne se présume pas ;
5°) ALORS QUE la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation de l'arrêt, en ce qu'il a dit que le bail conclu en 2005 était soumis au statut des baux commerciaux pour une durée de 9 ans, les autres clauses et conditions du bail restant inchangées, entraînera l'annulation par voie de conséquence des dispositions par lesquelles M. X...a été condamné à payer à la société LE MARRAKCHI la somme de 1 392 € au titre d'un trop-perçu de loyers calculé suivant ces clauses et conditions, en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait débouté M. X...de sa demande de résiliation judiciaire du bail portant sur les locaux commerciaux sis ..., et de ses demandes tendant à voir déclarer la société LE MARRAKCHI occupante sans droit ni titre des locaux, ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef, et obtenir sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation ;
AUX MOTIFS QU'en appel, comme en première instance, le bailleur ne démontre pas l'existence de fautes du locataire qui justifierait de prononcer la résiliation du bail ; que la preuve d'une violation par le locataire de la destination des lieux n'est pas rapportée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la violation de la destination des lieux invoquée n'est pas constituée car Monsieur Hamid Z... exploite un commerce d'alimentation dans les locaux adjacents sis ...que la même personne gérante de la SARL LE MARRAKCHI exploite la sandwicherie adjacente au ..., avec les enseignes afférentes aux deux entreprises, ce que ne peut ignorer le bailleur qui a donné à bail les deux locaux et qui est donc particulièrement mal fondé dans ce grief ;
1°) ALORS QUE la méconnaissance, par le preneur, de la destination contractuelle des lieux, réalisée sans autorisation du bailleur ou, à défaut, du juge, constitue un manquement à ses obligations contractuelles pouvant justifier la résiliation du bail ; qu'en se bornant à relever, par des motifs inopérants, que le prétendu gérant de la société LE MARRAKCHI exploitait un commerce d'alimentation dans des locaux adjacents, ce que ne pouvait ignorer le bailleur, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si cette société ne méconnaissait pas la destination des lieux, consistant exclusivement, aux termes du bail, dans la « vente de sandwiches – sandwicherie », en y exerçant en outre les activités de « boulangerie, pâtisserie, pizza, traiteur, alimentation générale, vente à emporter », vente de « spécialités marocaines, couscous, tajines », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1728 et 1184 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à retenir, par une simple affirmation, que la preuve d'une violation par le locataire de la destination des lieux n'était pas rapportée, sans indiquer sur quel élément de preuve elle fondait cette affirmation et sans examiner l'extrait Kbis de la société LE MARRAKCHI, les photographies et le procès-verbal de constat d'huissier de justice dressé le 2 juillet 2007, produits aux débats, d'où il résultait que cette société exerçait dans les lieux les activités de « boulangerie, pâtisserie, pizza, traiteur, alimentation générale, vente à emporter », vente de « spécialités marocaines, couscous, tajines », la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 10 janvier 2011


Publications
Proposition de citation: Cass. Civ. 3e, 03 mai. 2012, pourvoi n°11-14050

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Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Formation : Chambre civile 3
Date de la décision : 03/05/2012
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11-14050
Numéro NOR : JURITEXT000025809628 ?
Numéro d'affaire : 11-14050
Numéro de décision : 31200454
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2012-05-03;11.14050 ?
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