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15/02/2012 | FRANCE | N°09-72283

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 février 2012, 09-72283


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ;

Vu l'article L. 3211-1 du code du travail ;

Attendu que, lorsque la partie variable du salaire est calculée en fonction d'objectifs, il appartient au juge de vérifier le caractère réaliste de ceux-ci ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 25 juin 2001 par la société Steria en qualité de consultant, avec un salaire composé d'une partie fixe et d'une partie variable calculée sur la base d'objectifs dont les modalités étaient fixées chaqu

e année ; que, licencié le 30 juin 2004, il a saisi la juridiction prud'homale d'une dema...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ;

Vu l'article L. 3211-1 du code du travail ;

Attendu que, lorsque la partie variable du salaire est calculée en fonction d'objectifs, il appartient au juge de vérifier le caractère réaliste de ceux-ci ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 25 juin 2001 par la société Steria en qualité de consultant, avec un salaire composé d'une partie fixe et d'une partie variable calculée sur la base d'objectifs dont les modalités étaient fixées chaque année ; que, licencié le 30 juin 2004, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment au paiement d'un rappel de prime sur objectifs pour les années 2002 à 2004 ainsi que des congés payés afférents ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que les formules utilisées pour le calcul de la production individuelle et de la rentabilité n'ont jamais fait l'objet de critiques de la part du salarié durant toute la durée d'exécution du contrat de travail ; qu'elles font référence à des éléments chiffrés et à des pourcentages habituellement utilisés pour le calcul des performances des salariés et ne présentent donc pas, contrairement aux affirmations des premiers juges, de difficultés particulières de compréhension ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les objectifs fixés au salarié et non atteints étaient réalistes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de M. X... tendant au paiement d'un rappel de primes sur objectifs pour les années 2002 à 2004, l'arrêt rendu le 15 octobre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Steria aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Steria à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de condamnation de la société STERIA à lui verser un rappel de primes d'objectifs pour les exercices 2002, 2003, et 2004

AUX MOTIFS QUE « chaque année la société Steria a notifié à M. Arnaud X... les modalités de calculs des primes à objectifs atteints (dont le montant maximum était généralement fixé à la somme de 6 097 euros), ces objectifs étant déterminés en fonction de la production nette individuelle, de la rentabilité de l'entité et de la qualité du travail réalisé (diffusion des connaissances, veille JDE, reporting.........), l'entreprise joignant en annexe les courbes et formules de calcul correspondant à chacun des éléments quantitatifs de la prime ;
Considérant que les formules utilisées pour le calcul de la production individuelle et de la rentabilité n'ont jamais fait l'objet de critiques de la part de M. Arnaud X... durant toute la durée d'exécution du contrat de travail ; qu'elles font référence à des éléments chiffrés et à des pourcentages habituellement utilisés pour le calcul des performances des salariés et ne présentent donc pas, contrairement aux affirmations des premiers juges, de difficultés particulières de compréhension ; Considérant que M. Arnaud X... n'a reçu aucune prime au cours de l'année 2002 n'ayant pas rempli les objectifs fixés sans émettre aucune critique postérieurement au courrier explicatif en date du 20 juin 2003 ;
Considérant que M. Arnaud X... a perçu une prime de 2 439 euros au titre de l'année 2003 en fonction des résultats obtenus qui là encore n'ont fait l'objet de sa part d'aucune critique ;
Considérant enfin qu'aucune prime n'a été versée à M. Arnaud X... au titre de l'année 2004 puisqu'il n'a pu atteindre les objectifs fixés en raison de la cessation de toute activité dès le mois de mai 2004 (date de ses congés suivis d'un arrêt de travail pour cause de maladie et de la rupture du contrat de travail); Considérant qu'il convient donc d'infirmer le jugement déféré et de débouter M. Arnaud X... de ses demandes au titre des primes »

1. ALORS QU' interdiction est faite aux juges de dénaturer les écrits soumis à leur analyse ; qu'en l'espèce, les courriers notifiés au salarié les 20 mars 2002, 2 avril 2003 et 10 février 2004 déterminaient les modalités de calcul des primes d'objectifs par des tableaux, courbes et équations complexes et obscures (cf. productions n° 5, 6 et 7) ; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a dénaturé les courriers adressés par la société au salarié les 20 mars 2002, 2 avril 2003 et 10 février 2004, en violation du principe en vertu duquel interdiction est faite au juge de dénaturer les écrits ;

2. ALORS QUE Monsieur X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que les représentants élus du personnel de la Société STERIA avaient, à de nombreuses reprises, alerté la Direction sur le caractère obscur, voir occulte, des conditions d'octroi des primes d'objectifs, dont le versement et le montant dépendaient en réalité uniquement du bon vouloir des managers sans engagement de moyens de la part de STERIA (conclusions d'appel de l'exposant p 12), et il versait aux débats pour l'établir, des comptes rendus de réunion du comité d'établissement de la société STERIA région parisienne, et du comité d'entreprise ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

3. ALORS QU'interdiction est faite aux juges de dénaturer les écrits ; que sur le courrier en date du 10 février 2004 lui ayant notifié ses objectifs pour l'année 2004, Monsieur X... avait apposé la mention « sous réserve de l'engagement des moyens de STERIA pour y parvenir », indiquant ainsi à son employeur qu'il considérait que les modalités de calcul de ses primes d'objectifs dépendaient du bon vouloir de la société STERIA ; qu'en affirmant dès lors que « les formules utilisées pour le calcul de la production individuelle et de la rentabilité n'ont jamais fait l'objet de critiques de la part de M. X... durant toute la durée d'exécution du contrat de travail », la Cour d'appel a dénaturé ledit courrier en violation du principe susvisé ;

4. ALORS en tout état de cause QUE le seul silence du salarié, en cours d'exécution du contrat de travail, sur les modalités de calcul de sa rémunération variable ne vaut pas preuve de leur acceptation et d'une renonciation à les contester ; qu'en relevant que le salarié n'avait pas critiqué les formules utilisées pour le calcul de ses primes, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1315 du Code civil ;

5. ALORS QUE les clauses d'objectifs qui ont pour objet de fixer la rémunération du salarié en fonction de ses résultats, ne sont valables que si elles sont fondées sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, si elles fournissent au salarié les moyens de réaliser les objectifs, ne font pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et n'ont pas pour effet de réduire sa rémunération en dessous des minima légaux et conventionnels ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de primes d'objectifs après avoir seulement relevé que les formules définissant les modalités de calcul des primes d'objectifs n'avaient pas été critiquées pendant l'exécution du contrat de travail et n'auraient pas présenté de difficultés de compréhension, et que Monsieur X... n'aurait pas atteint les objectifs qui lui avaient été fixés par la société, sans cependant caractériser que ces objectifs étaient réalistes, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L3211-1 du Code du travail ;

6. ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE ne donne pas à sa décision une véritable motivation le juge qui procède par voie de simple affirmation sans donner à ses constatations de fait une précision suffisante; qu'en l'espèce, l'employeur avait produit aux débats des tableaux, des courbes et des formules mentionnant seulement les types de primes (P01 : prime de production individuelle ; P02 : prime de rentabilité d'entité ; P03 : qualitatif), les objectifs à atteindre (obj. 1 : 118.149 euros pour 2002, 133.472 euros pour 2003, 118.149 euros pour 2004 ;obj. 2 : 8,74 % pour 2002, 92 K euros pour 2003, 1.630 K euros pour 2004), des pourcentages abstraits (P01 : 60 % pour 2002, 60 % pour 2003, 60 % pour 2004 ; P02 : 25 % pour 2002, 40 %pour 2003, 30 % pour 2004 ; P0315 % pour 2002, 10 % pour 2004) et des équations purement théoriques, sans aucune référence aux résultats quantitatifs et qualitatifs effectivement réalisés par le salarié permettant de vérifier que sa rémunération aurait été calculée conformément aux modalités prévues, à les supposer compréhensibles ; qu'en affirmant péremptoirement que monsieur X... n'aurait pas rempli les objectifs fixés en 2002 et 2004 et que la prime perçue en 2003 correspondait aux résultats qu'il avait obtenus, sans indiquer de quelles pièces résultaient les performances concrètement et personnellement réalisés par le salarié permettant d'en déduire que les objectifs n'avaient pas été atteints, la Cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72283
Date de la décision : 15/02/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 fév. 2012, pourvoi n°09-72283


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:09.72283
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