La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/2012 | FRANCE | N°10-26159

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 février 2012, 10-26159


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et la note ERDF-GRDF NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008 ;

Attendu que M. X... et dix-sept autres salariés, agents des sociétés Electricité réseau distribution France et Gaz réseau distribution France, ont attrait leurs employeurs devant la juridiction prud'homale afin d'obtenir la pri

se en charge par ceux-ci des frais de nettoyage de leurs vêtements professio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et la note ERDF-GRDF NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008 ;

Attendu que M. X... et dix-sept autres salariés, agents des sociétés Electricité réseau distribution France et Gaz réseau distribution France, ont attrait leurs employeurs devant la juridiction prud'homale afin d'obtenir la prise en charge par ceux-ci des frais de nettoyage de leurs vêtements professionnels à compter du 1er janvier 2005 et jusqu'au 1er décembre 2008, outre des dommages-intérêts ; que pour faire droit à la demande principale des salariés, le conseil de prud'hommes a retenu que les dispositions de la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et de la note ERDF-GRDF NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008, émanant de la direction des deux sociétés et fixant au 1er décembre 2008 la date de début de prise en charge forfaitaire des frais de nettoyage des vêtements professionnels étant moins favorables aux salariés que celles contenues dans le code du travail, seules ces dernières devaient recevoir application ;

Attendu que l'examen du pourvoi contre cette décision nécessite que soit posée la question de l'appréciation de la légalité des textes réglementaires susvisés qui soulève une difficulté sérieuse qui échappe à la compétence judiciaire ;

PAR CES MOTIFS :

Renvoie l'une ou l'autre des parties à saisir la juridiction administrative aux fins d'appréciation de la légalité de la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et de la note ERDF-GRDF NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008 ;

Sursoit à statuer sur le pourvoi jusqu'à la décision qui sera rendue par la juridiction administrative sur la requête de l'une ou l'autre des parties ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour la société Electricite réseau distribution France et autre

Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné les sociétés ERDF et GrDF à payer à chacun des salariés demandeurs la somme demandée par ceux-ci en application de l'article L.4122-2 du Code du travail, concernant les mesures prises en matière de santé et de sécurité au travail, qui ne doivent entraîner aucune chaque financière pour les salariés, outre, à certains d'eux, la somme de 150 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

1°) Aux motifs, sur la compétence du Conseil des prud'hommes, qu'il n'est pas contesté par les employeurs que les demandeurs ressortent du droit privé ; que par conséquent, les dispositions contenues dans le Code du travail leur sont applicables ; qu'il ne s'agit donc pas de prendre position sur la note du 3 novembre 2008, qui au demeurant entend faire application de l'article L.4122-2 du Code du travail en ce qu'il indique que les mesures prises en matière de santé et de sécurité au travail ne doivent entraîner aucune charge financière pour les travailleurs ; que l'article L.1411-2 du Code du travail dispose que « le Conseil de prud'hommes règle les différends et litiges des personnels des services publics, lorsqu'ils sont employés dans les conditions du droit privé » ; qu'en application de l'article L.1411-1 du Code du travail, le Conseil de prud'hommes est compétent pour connaître des litiges nés du contrat de travail ; qu'en l'espèce, le port de vêtement du travail relève bien du respect du contrat de travail ainsi que des dispositions contenues dans le Code du travail ; que c'est pourquoi, le bureau de jugement dit qu'il est compétent pour connaître du présent litige opposant les salariés ERDF-GRDF à leur employeur ;

2°) Aux motifs, sur la prise en charge du nettoyage des vêtements de travail, que l'article R.4321-1 du Code du travail dispose que « l'employeur met à la disposition des travailleurs les équipements de travail nécessaires, appropriés au travail à réaliser ou convenablement adaptés à cet effet en vue de préserver leur santé et leur sécurité » ; que l'article R. 4321-4 du Code du travail dispose que « l'employeur met à la disposition des travailleurs en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés, et lorsque le caractère particulièrement insalubre ou salissant des travaux l'exige, les vêtements appropriés ; qu'il veille à leur utilisation effective » ; que l'article L.4122-2 du Code du travail dispose « les mesures prises en matière de santé et de sécurité au travail ne doivent entraîner aucune charge financière pour les travailleurs » ; que dans un arrêt daté du 21 mai 2008, la Chambre sociale de la Cour de cassation dit : « mais attendu qu'indépendamment des dispositions de l'article L. 231-11 du Code du travail selon lesquelles les mesures concernant la sécurité, l'hygiène et la santé au travail ne doivent en aucun cas entraîner de charges financières pour les travailleurs, il résulte des dispositions combinées des articles 1135 du Code civil, et L.121-1 du Code du travail, que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; qu'ayant constaté que pour chacune des catégories d'emplois concernés, le port du vêtement de travail était obligatoire et qu'il était inhérent à l'emploi ; que la Cour d'appel a exactement décidé que l'employeur devait assurer la charge de leur entretien » ; que la note d'ERDF-GrDF datée du 3 novembre 2008 intitulée « prise en charge du nettoyage des vêtements imposés par l'employeur » s'appuie sur l'article L. 4122-2 du Code du travail, pour dire qu'à dater du 1er décembre 2008, l'entreprise prendra en charge les frais engendrés par le port des vêtements obligatoires et fixe le montant à hauteur de 1 euros 927 par jour sur la base du barème URSSAF ; qu'il ne saurait être sérieusement contesté que la note du 3 novembre 2008 d'ERDF-GRDF ne vise simplement qu'à se mettre en conformité avec les dispositions du Code du travail antérieures à cette note ; que les sommes données en compensation de l'entretien des vêtements de travail, constituent un accessoire de salaire qui peut être réclamé sur 5 ans en application de l'article L.3245-1 du Code du travail ; que compte tenu de tous ces éléments, le bureau de jugement dit qu'il convient d'accorder aux demandeurs dans la limite de 5 ans, les sommes réclamées pour l'entretien des vêtements obligatoires ;

Alors, d'une part, que la légalité d'un acte administratif échappe à la compétence des tribunaux judiciaires, que lorsque sa validité est sérieusement contestée, ils doivent surseoir à statuer jusqu'à décision des juridictions administratives sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; qu'en faisant droit aux demandes des salariés des sociétés ERDF et GRDF, sans répondre au moyen déduit part les sociétés exposantes de ce que leurs salariés faisaient ainsi nécessairement valoir que les dispositions de la circulaire Pers 633, mettant à leur charge le coût d'entretien des vêtements professionnels, étaient contraires aux dispositions du Code du travail, soulevant ainsi, fût-ce implicitement, une question préjudicielle portant sur l'appréciation de la légalité de cet acte administratif règlementaire, comme de la décision conjointe, de même nature, des directeurs des ressources humaines des sociétés ERDF et GrDF du 3 novembre 2008 maintenant cette disposition en vigueur pour la période antérieure au 1er décembre 2008, le Conseil des prud'hommes, qui n'a pas répondu aux écritures des sociétés exposante, a, quel qu'ait été le mérite de ce moyen, entaché son jugement d'un défaut de réponse à conclusions et l'a privé de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, subsidiairement, part, que la légalité d'un acte administratif échappe à la compétence des tribunaux judiciaires, que lorsque sa validité est sérieusement contestée, ils doivent surseoir à statuer jusqu'à décision des juridictions administratives sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; qu'en s'en abstenant, le Conseil des prud'hommes a méconnu l'article 13 de la loi des 13 et 24 août 1790 et le décret du 16 Fructidor An III ;

Alors, enfin, encore plus subsidiairement, qu'il appartenait en toute hypothèse au Conseil des prud'hommes de rechercher, aux termes d'une appréciation globale de l'ensemble des dispositions régissant les dotations des salariés d'ERDF et GrDF en vêtements professionnels, si les dispositions réglementaires de leur Statut ne leur accordaient pas des avantages supérieurs à ceux résultant de l'application du Code du travail ;
qu'en se bornant à affirmer que les dispositions de la circulaire Pers 633 étaient moins favorables que celles de la loi, sans motiver son appréciation notamment au regard de la valeur et du nombre des dotations en vêtements reçus par les salariés et des économies susceptibles d'en résulter en leur faveur, ainsi que du fait que ces vêtement leur étaient abandonnés en fin de cycle, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-26159
Date de la décision : 08/02/2012
Sens de l'arrêt : Sursis a statuer
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc, 08 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 fév. 2012, pourvoi n°10-26159


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.26159
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award