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19/01/2012 | FRANCE | N°10-20988

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 2012, 10-20988


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 27 février 1978 par la SNCF, occupait, depuis le 1er octobre 1978, les fonctions d'agent de manoeuvre à la gare d'Ussel (Corrèze) ; que son poste a été supprimé en 2008 à la suite d'une réorganisation des postes de circulation en gare d'Ussel ; que le salarié a été affecté, avec son accord, à la gare d'Eygurande (Corrèze) ; que cette nouvelle affectation ayant eu pour effet d'allonger le temps de trajet entre le domicile de M. X... et son lieu habitu

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 27 février 1978 par la SNCF, occupait, depuis le 1er octobre 1978, les fonctions d'agent de manoeuvre à la gare d'Ussel (Corrèze) ; que son poste a été supprimé en 2008 à la suite d'une réorganisation des postes de circulation en gare d'Ussel ; que le salarié a été affecté, avec son accord, à la gare d'Eygurande (Corrèze) ; que cette nouvelle affectation ayant eu pour effet d'allonger le temps de trajet entre le domicile de M. X... et son lieu habituel de travail, celui-ci a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une indemnité au titre des frais de trajet supplémentaires ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil, ensemble L. 3121-4 du code du travail ;
Attendu que pour faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel retient que la nouvelle affectation à la gare d'Eygurande a eu pour effet d'allonger d'un peu moins de trente kilomètres aller et retour le trajet entre son domicile et le lieu de son travail, et qu'elle lui est nécessairement préjudiciable ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser l'existence d'une faute de l'employeur ou d'un abus de son pouvoir de direction dans le changement d'affectation du salarié, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 2221-2, L. 2254-1 du code du travail et 12 du code de procédure civile ;
Attendu qu'aux termes du premier alinéa du second de ces textes, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ;
Attendu que pour faire droit à la demande du salarié au titre du temps de trajet, l'arrêt énonce que la SNCF ne justifie pas par les pièces qu'elle verse aux débats de l'accord qui limiterait l'indemnisation à un supplément de trajet de 45 minutes aller-retour ;
Attendu, cependant, que si le juge n'est pas tenu de rechercher s'il existe un accord d'entreprise applicable au contrat de travail qui lui est soumis, il doit, lorsqu'une partie invoque un accord d'entreprise précis se procurer par tous moyens ce texte qui contient la règle de droit éventuellement applicable au litige, au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors que la SNCF invoquait devant elle les stipulations de l'accord intervenu pour accompagner la mobilité des agents résultant de mesures d'organisation ou d'évolution de leur emploi la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SNCF à payer à M. X... la somme de 5 000 euros au titre des frais de trajet, l'arrêt rendu le 31 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SNCF ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me de Nervo, avocat aux Conseils pour la SNCF.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SNCF à payer à Jean-François X... 5.000 € pour les frais de trajet supplémentaires entre son domicile et le nouveau lieu de son travail
Aux motifs que le poste de Jean-François X... à Ussel a été supprimé, ce qui relève du pouvoir d'organisation de l'employeur et il a obtenu une affectation à Eygurande ; que cette nouvelle affectation ne l'a pas obligé à déménager mais a eu pour effet d'allonger d'un peu moins de 30 kilomètres aller et retour le trajet entre son domicile et le lieu de son travail ; qu'elle lui est donc nécessairement préjudiciable et justifie une indemnité de 5000 €, la SNCF ne justifiant pas par les pièces qu'elle verse aux débats de l'accord qui limiterait l'indemnisation à un supplément de trajet de 45 minutes aller-retour
1° Alors que le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail du salarié ne constitue pas un temps de travail effectif si bien qu'en cas de modification du lieu de travail et de l'éloignement du domicile et du lieu habituel de travail du salarié celui-ci ne peut prétendre à rémunération ni indemnisation sauf s'il est victime d'un comportement fautif ou de l'abus par l'employeur de son pouvoir de direction ; qu'en décidant que la nouvelle affectation de Monsieur X... avait augmenté son temps de trajet ce qui lui avait causé un préjudice, sans relever la moindre faute ou abus de l'employeur de son pouvoir de direction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil et L 3121-4 du code du travail
2° Alors que lorsque la SNCF fait état d' un accord réglant l'indemnisation des agents en cas de nouvelle affectation, il incombe au juge de se procurer le texte en invitant au besoin les parties à le lui transmettre dès lors qu'il contient la règle applicable au litige ; qu'en l'espèce la SNCF a fait valoir qu'un accord signé par la SNCF et les organisations syndicales « pour accompagner la mobilité résultant de mesures d'organisation ou d'évolution de leur emploi » prévoit en son article 1-3-a de l'annexe 1.3, une indemnisation limitée aux agents affectés d'une unité d'affectation à une autre unité d'affectation qui ne déménagent pas et ont un allongement de leur durée de trajet journalier de 45 minutes aller et retour ; qu'en énonçant que la SNCF ne justifiait pas par les pièces versées aux débats, de cet accord, qui limiterait l'indemnisation la cour d'appel qui n'a pas invité les parties à le lui transmettre, a violé l'article 12 du code de procédure civile
3° Alors que lorsque un salarié se prévaut d'un avantage accordé par l'employeur, il lui appartient d'apporter la preuve de ce qu'il répond aux conditions pour en bénéficier ; qu'en énonçant que l'employeur ne justifiait pas que le salarié ne pouvait pas bénéficier d'une indemnisation pour le supplément de trajet, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20988
Date de la décision : 19/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 31 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jan. 2012, pourvoi n°10-20988


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20988
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