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11/01/2012 | FRANCE | N°11-80726

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 janvier 2012, 11-80726


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Claude X...,
- Mme Sylvie X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 14 décembre 2010, qui a condamné, le premier, pour escroquerie, complicité de faux et usage, emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié et exécution d'un travail dissimulé, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 euros d'amende et à trois ans d'interdiction de gérer, la seconde, pour faux et usage,

à trois mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende, a ordonné une ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Claude X...,
- Mme Sylvie X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 14 décembre 2010, qui a condamné, le premier, pour escroquerie, complicité de faux et usage, emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié et exécution d'un travail dissimulé, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 euros d'amende et à trois ans d'interdiction de gérer, la seconde, pour faux et usage, à trois mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation, et pris de la violation des articles L. 341-2, L. 341-6, L. 364-3, L. 364-8 et L. 364-9 du code du travail, devenus les articles L. 5221-1, L. 5221-2, L. 5221-3, L. 5221-11, L. 5221-8, L. 8251-1, L. 8256-2, L. 8256-5, L. 8256-4, L. 5224-4, L. 5224-2, L. 8236-3, L. 5224-3 et L. 8256-6 du même code, 121-3 du code pénal, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'avoir employé ou conservé à son service M. Y..., étranger non muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ;

" aux motifs propres que le tribunal, par des motifs que la cour adopte, a exactement apprécié les faits reprochés à M. X...comme constituant le délit d'emploi d'un étranger en situation irrégulière, et il suffit de rappeler ce qui suit, que M. Y...est décédé dans un accident de la circulation ; que l'enquête déterminait qu'il était employé depuis plusieurs mois par l'entreprise X..., comme manoeuvre, sur les différents sites de l'entreprise ; que M. X...nie l'avoir jamais employé, et il maintenait cette position à l'audience devant la cour, expliquant que s'il lui avait donné de l'argent régulièrement, c'est qu'il avait eu pitié de lui et de ses enfants ; que ces affirmations sont en contradiction avec les résultats de l'enquête ; qu'en effet, il est établi que M. Y...percevait régulièrement des chèques de l'entreprise, qu'il avait été vu sur les différents sites de l'entreprise en train de travailler, qu'il portait une tenue de travail au sigle de l'entreprise, qu'il avait une carte de transport SNCF mentionnant l'entreprise X...comme employeur ; qu'à ceci, s'ajoutent les déclarations non équivoques de sa veuve et les déclarations embarrassées du salarié qui l'avait présenté au patron ; que M. X...a remboursé à l'aide de son compte courant d'associé les sommes versées à la famille après le décès de M. Y...; qu'il n'est pas contesté que M. X...ait pu avoir de la compassion pour la situation difficile de cet homme, mais que cela ne l'a pas empêché de l'employer dans des conditions illégales ; que la culpabilité du prévenu sera confirmée sur ce point ;

" et aux motifs adoptés des premiers juges que M. X...considère que les témoins sont tous des menteurs, car M. Y...n'a jamais travaillé dans son entreprise ; qu'il ne pouvait certes pas l'empêcher de prendre un balai s'il le voulait ; que la combinaison de l'entreprise correspond à un vêtement publicitaire comme il en circule beaucoup ; qu'il lui a donné 1 200 euros chaque mois par générosité, en espérant récupérer ce prêt sur son travail ; qu'il a agi ainsi car il avait été ému par cet homme et ses trois enfants qui étaient venus le rencontrer dans l'entreprise ; qu'il précise qu'en cours d'instruction, il a remboursé à la société les sommes versées à M. Y...par le biais de son compte associé ; que son conseil plaide la relaxe et soutient que M. Y...devait être embauché mais pas un élément ne démontre qu'il était embauché à heures régulières pour des tâches précises ; que la preuve du lien de subordination n'est pas rapportée ; que M. X...n'a jamais caché les sommes qu'il lui avait prêtées, mais l'enquête a démontré que l'ensemble des salariés interrogés considéraient M. Y...comme faisant partie du personnel de l'entreprise ; qu'il en avait la tenue de travail, et l'argument selon lequel la combinaison qu'il avait en sa possession est assimilable à un vêtement publicitaire, est peu convaincant ; qu'il percevait une somme mensuelle d'environ 1 200 euros, payée par la société et non par M. X...qui peut donc difficilement invoquer un geste généreux même s'il a régularisé en cours d'instruction ; qu'enfin, et surtout, la déclaration de M. B...établit suffisamment l'existence d'un lien de subordination ; que M. Y...était envoyé sur les chantiers, sur lesquels il y avait un besoin de personnel et n'agissait pas de sa propre initiative, comme a tenté de le soutenir M. X...; qu'aucun élément du dossier ne permet de mettre ce témoignage en doute ;

" 1) alors que le délit d'emploi d'un étranger non muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France est une infraction intentionnelle qui requiert, pour être constituée, la connaissance par l'employeur, d'une part, de la qualité d'étranger de l'intéressé, d'autre part, de l'irrégularité de sa situation au regard de la législation du travail ; que, dès lors, en déclarant le demandeur coupable du délit prévu à l'article L. 8256-2 du code du travail (anciennement L 364-3 du même code), sans préciser si le prévenu savait que M. Y...était étranger et qu'il n'était pas autorisé à travailler régulièrement en France, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé et de l'article 121-3 du code pénal ;

" 2) alors qu'en se bornant à énoncer que M. Y...était envoyé sur les chantiers et percevait des chèques de la part du prévenu, pour en déduire que la preuve d'un lien de subordination entre la société X... et M. Y...est rapportée, sans répondre au chef péremptoire des conclusions d'appel du demandeur qui faisait valoir que les sommes ainsi versées ne correspondaient nullement à la rémunération due à un salarié de l'entreprise, et qu'il ne pouvait s'agir, dès lors, que d'un versement spontané, indépendant de tout lien de subordination, la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure pénale " ;

Sur le troisième moyen de cassation, et pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'escroquerie ;

" aux motifs qu'il est reproché à M. X...de faire payer à ses clients plus qu'il ne leur livre, en fraudant régulièrement sur les quantités, en mettant dans le camion une quantité inférieure à la quantité déclarée et facturée, environ'''m3 à 1m3 par camion toupie, et en écrivant sur les bordereaux que le camion que l'on charge n'est pas tout à fait vidé ; que cette formule du camion incomplètement vidé est appelée « retour de camion » ; que des auditions unanimes des employés et de M. X...lui-même, cette opération de retour de camion est peu fréquente, ce qui est logique, car cela signifie que la quantité apportée au client n'a pas été exactement calculée, que ce soit une carence du client ou du fabricant de béton, et qu'il y a une perte pour l'entreprise, ce béton devenant rapidement inutilisable et devant être déversé et entassé sur un recoin de la centrale à béton ; qu'or, il résulte des tableaux reconstitués par les gendarmes à partir d'une série de bordereaux journaliers établis par la centrale de Toulouse, qu'il y avait, à de nombreuses reprises, une différence de l'ordre d'un m3 entre la quantité de béton facturée et la quantité livrée ; que M. X...explique cette différence par les retours camions, et a fait établir un constat par un huissier montrant que sur le site de la centrale à béton, il y avait une importante couche de déchet de béton, ensuite transformé en granulat, mais comme il a été expliqué précédemment, le nombre important de ces retours camions ne correspond pas à une gestion saine de l'entreprise, alors que M. X...justifie de la bonne marche de ses sociétés ; que les témoins, quant à eux, expliquent que les mentions en marge des bordereaux journaliers des centrales à béton correspondent aux quantités non livrées, et ensuite « habillées » en les faisant passer pour des retours camions ; que les déclarations des témoins, comme il a été exposé précédemment, doivent être considérées comme exactes, même avec leurs nuances, car les témoignages sont concordants, et surtout sont corroborés par les analyses des documents faites par les gendarmes ; qu'il convient de rappeler que les témoins travaillaient sur des sites distincts et géographiquement éloignés, n'étaient pas amenés à se rencontrer très souvent, et que M. X...décidait de tout ; que M. X...a également reproché aux enquêteurs de n'avoir pas auditionné la totalité du personnel ; qu'or, seuls les employés les plus qualifiés connaissaient exactement la manipulation des machines permettant de mentionner des indications fausses, et ils ont été entendus ; que, sur l'analyse des documents, il convient de rappeler que les gendarmes n'ont pu avoir accès qu'à une partie des documents comptables, puisque, comme il a été dit précédemment, de nombreux documents ont été détruits, parfois dans des conditions surprenantes, et qu'il y a eu deux cambriolages portant sur le matériel informatique dans les bureaux de la société, pendant l'enquête ; qu'à partir de ces données, les enquêteurs ont choisi une méthode d'exploitation informatique qui est expliquée dans la procédure ; que cette méthode a été critiquée par les prévenus, mais aucune demande sérieuse n'a été présentée pour la remettre en cause ; que, pour s'opposer à ces accusations de faux bons de livraison émis sciemment pour faire croire aux clients qu'on leur livrait une quantité de béton correspondant à la commande, alors que la quantité était inférieure, M. X...produit des attestations de clients satisfaits, et considère que l'instruction a été incomplète, ne portant que sur quelques clients alors qu'il en a des centaines ; qu'il n'est pas contesté que tous les clients n'étaient pas lésés, ce qui les aurait conduits depuis longtemps à quitter ce fournisseur, et en droit pénal, le nombre de victimes n'est pas un élément constitutif du délit ; que M. X...entend tirer parti également pour justifier qu'il a bien livré les quantités commandées et facturées de la preuve que, dans un camion indiqué comme contenant 8m3 de béton, il est possible de faire entrer 10 m3 ; que la vérification faite sous le contrôle du juge d'instruction montre que cette manoeuvre est possible ; que, cependant, l'expert qui assistait le juge mentionnait dans son rapport que cela correspond à une marge prévue par le constructeur du camion, dont l'utilisation implique une surcharge, en violation des dispositions du code de la route ; qu'enfin, les commandes portant sur 10 m3 en une seule livraison sont moins nombreuses que celles portant sur des quantités inférieures ; que cette possibilité de transporter 10 m3 en une seule livraison existe, mais reste dangereuse et limitée, et ces constatations n'empêchent pas la fraude sur les livraisons de quantités moindres ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il est établi que M. X...responsable des établissements SA X..., émettait des bons de livraison mentionnant des quantités supérieures aux quantités réellement livrées, et que, par ces manoeuvres frauduleuses, il avait obtenu de plusieurs clients des sommes d'argent supérieures aux sommes réellement dues ; qu'il s'est ainsi rendu coupable du délit d'escroquerie, commis au préjudice de la société Ecad, de la société EBF, de la société NK Construction, de la société Empyco et d'autres clients ;

" alors que la production, à l'appui d'une demande en paiement, d'un bon de livraison faisant état de mentions erronées, ne caractérise qu'un mensonge écrit et, partant, ne constitue pas une manoeuvre frauduleuse au sens de l'article 313-1 du code pénal ; que, dès lors, en se bornant à énoncer que le prévenu émettait des bons de livraison mentionnant des quantités supérieures aux quantités réellement livrées, pour en déduire que le demandeur doit être déclaré coupable d'escroquerie, sans relever l'existence d'un élément extérieur venant corroborer ce mensonge écrit, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 313-1 du code pénal " ;

Sur le quatrième moyen de cassation, et pris de la violation des articles L. 8224-1, L. 8221-1, alinéa 1, 1°, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 du code du travail, L. 8224-3, L. 8224-4 dudit code, 121-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'exécution d'un travail dissimulé ;

" aux motifs que l'enquête et l'instruction ont établi que les salariés effectuaient un nombre d'heures important, plus que les heures légales, mais n'étaient pas payés en heures supplémentaires ; qu'ils percevaient des « primes » qui, selon les documents comptables et les auditions des salariés, constituaient, soit des remboursements de frais de déplacement, soit des frais de repas, soit une gratification indéfinie, ces versements étant non contractuels, et à l'entière discrétion de M. X..., tout comme le montant des salaires ; que M. X...soutient à l'audience devant la cour, comme pendant l'instruction et devant le tribunal, qu'il s'agissait de « lisser » les horaires en fonction des besoins variables de l'entreprise et que ces pratiques étaient tout à fait régulières ; que, cependant, le contrôle de l'URSSAF et celui de l'inspection du travail mettent en avant l'irrégularité totale de ces pratiques, qui ne pouvaient être assimilées à une « annualisation » du temps de travail comme le prétend le prévenu ; que ces versements non déclarés étaient un avantage pour l'employeur qui ne payait pas de cotisations sociales correspondantes ; que les salariés entendus ont expliqué qu'ils avaient accepté ce système, parce qu'ils n'avaient pas le choix, car leur employeur maîtrisait tout, et principalement leur emploi, et parce qu'il y avait aussi un petit avantage pour eux de percevoir ces sommes non déclarées aux impôts, mais qu'ils voyaient également les inconvénients de cette pratique, leur salaire déclaré étant moins élevé ; qu'ils perdraient les avantages pour la constitution de leur retraite et se trouvaient limités dans l'importance des prêts bancaires pour leur maison ; qu'au dossier, figurent des condamnations par la cour d'appel (chambre sociale) de l'entreprise X...au profit d'anciens salariés dans des procédures prud'homales, et portant entre autre sur ce point ; que c'est à bon droit que le tribunal a retenu la culpabilité de M. X...sur ce chef de prévention, et le jugement sera confirmé sur ce point ;

" alors que le délit de travail dissimulé est une infraction intentionnelle qui suppose caractérisée la volonté de son auteur de dissimuler tout ou partie du travail accompli par le salarié ; que le demandeur avait conclu à l'absence de toute intention de travail dissimulé, faisant valoir que c'est de manière apparente et déclarée, et sans aucune volonté de masquer des heures supplémentaires, qu'il appliquait un accord d'entreprise portant sur l'annualisation du temps de travail ayant pour effet de permettre aux ouvriers de récupérer les heures de travail effectuées, un journal de récupération, versé aux débats, étant tenu en comptabilité au sein de l'entreprise et ce, en toute transparence ; qu'en condamnant le demandeur, au titre de l'infraction de travail dissimulé, sans nullement rechercher, ni caractériser l'élément intentionnel de l'infraction, soit la volonté du demandeur de dissimuler tout ou partie du travail accompli par ses salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 121-3, 121-6, 121-7 et 441-1 du code pénal, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mme X...coupable de faux et usage de faux et M. X...coupable de complicité de faux et usage de faux ;

" aux motifs propres que ce faux bon de pesée constitue un préjudice pour la collectivité, puisque la surcharge des camions est un risque possible pour les autres usagers, un risque certain pour les routes qui sont abîmées lorsqu'y circulent des camions trop chargés, et un préjudice pour les autres entreprises du secteur, ce fait constituant une concurrence déloyale ; que le délit de faux et usage de faux est constitué pour le faux bon de pesée découvert le 20 février 2004, et le jugement sera confirmé sur ce point ; que seront déclarés coupables Mme X..., pour la réalisation de ce délit, et M. X...qui en a donné les directives en ce sens ; que, concernant les autres bons de pesée, il n'a pas été possible de retrouver d'autres bons ainsi falsifiés et le tribunal a relaxé sur ce point les deux prévenus ; que, cependant, de nombreuses incohérences, en particulier sur la numérotation, ont été constatées sur les documents saisis et analysés pendant l'enquête, absence de bons, doublons, triplets, ainsi que des mentions manuelles alors que le système est informatisé ; qu'à ces « erreurs » répétées, s'ajoutent les déclarations concordantes de plusieurs salariés, et les réclamations des clients de M. X...; que M. X...maintenait à l'audience devant la cour comme pendant l'instruction et devant le tribunal, que les témoignages des employés ne pouvaient être retenus ; qu'il considère que ce sont des employés qui lui en veulent parce qu'ils ont été licenciés en raison de leurs carences ou bien qui sont partis à la concurrence, laquelle concurrence souhaite la mort de l'entreprise ; qu'or, les gendarmes ont pris soin de vérifier quel était l'état des relations entre les employés (ou anciens employés) entendus, et de le mentionner ; qu'il y a là une totale transparence ; qu'il se trouve que l'éclatement de l'entreprise en plusieurs sites ne permettait que peu de relation entre les employés, et que leurs déclarations sont concordantes sur les incitations à « l'économie », et le manque de scrupule du patron vis-à-vis des clients ;
que, quant au complot ourdi par la concurrence, il est logique que des employés connaissant un métier cherchent un employeur dans le même secteur d'activité, lorsqu'ils changent d'emploi ; que l'argument selon lequel les entreprises concurrentes auraient débauché les employés de X...pour les pousser à accuser à tort l'ancien patron ne repose que sur les affirmations de M. X...; qu'entendus par les gendarmes dns le cadre d'une information judiciaire, comprenant qu'ils pourraient être tenus comme complices des malversations reprochées à leur patron (ou ancien patron), ces employés, au risque pour certains de perdre leur emploi dans une région peu favorisée économiquement, ont choisi en conscience de relater la réalité de leur travail quotidien ; que ces déclarations sont concordantes, elles sont corroborées par les constatations matérielles, et, contrairement à ce qu'a affirmé le tribunal, s'il y a eu des nuances au cours des auditions, aucune contradiction flagrante ne peut être relevée ; qu'on peut également constater que le bon de pesée pour le transport du 20 février 2004 résulte d'une opération parfaitement « au point » et il n'est pas crédible que cela soit une opération unique ; qu'à ces observations, on peut ajouter que le travail des enquêteurs a été considérablement freiné par la destruction de nombreuses archives, et deux cambriolages dans les bureaux de l'entreprise, portant sur du matériel informatique, pendant la durée de l'instruction ; qu'au vu de l'ensemble des éléments du dossier, la culpabilité de M. X...(complice) et de Mme X...(auteur principal), pour les délits de faux et usage de faux, commis entre 2001 et le 12 décembre 2005 et portant sur de faux bons de pesée des marchandises transportées est établie ; que le jugement sera réformé sur ce point ;

" et aux motifs adoptés des premiers juges, que l'infraction est établie concernant les bons, objet du contrôle du 22 février 2004 ; qu'en effet, il est établi que le camion, objet du contrôle, était en surcharge ; qu'avant que cette surcharge ne soit établie par la DRE, le chauffeur avait présenté un premier bon portant le n° 2577 pour un poids total de 31 tonnes 800, soit un bon comportant des mentions en adéquation avec le poids total en charge autorisé de 32 tonnes ; que le deuxième bon mentionnant la quantité réelle transportée, qui a d'ailleurs été facturée au client, n'a été découvert qu'une fois la surcharge établie et lors de la fouille du camion ; que ces éléments attestent de la volonté du chauffeur de tromper les forces de police ou de gendarmerie sur la quantité réelle transportée ; qu'il doit de plus être relevé que Mme X...a varié dans ses explications ; que, pendant l'enquête, elle a indiqué que le chauffeur M. A...avait pris par mégarde deux bons de pesée établis à quelques minutes d'intervalle pour deux camions différents ; qu'une telle explication implique nécessairement qu'un chauffeur est parti sans bon de pesée, ce qui n'aurait pas manqué d'être signalé ; que, lors de l'audience, elle a fait état d'un deuxième bon émis pour régulariser le premier bon, entaché d'erreur ; que, dans cette hypothèse, on voit mal pourquoi le bon erroné aurait été laissé sur le comptoir à portée de main du chauffeur ou pourquoi le chauffeur aurait pris deux bons pour un même transport ; qu'enfin, même si M. X...et Mme X...ne peuvent être retenus dans les liens de la prévention pour que ce seul faux du 22 février 2004, il doit être souligné que les déclarations des autres chauffeurs de l'entreprise corroborent parfaitement les affirmations de M. A..., tant en ce qui concerne l'établissement des faux bons que sur leur destination ; que ce faux porte nécessairement préjudice, car en effectuant des transports en surcharge, la SA X...diminue le coût de ses prestations et fausse ainsi la concurrence ; que M. X...et Mme X...seront donc reconnus coupables du délit de faux commis le 22 février 2004, le premier étant complice par instigation ;

" 1) alors que, pour être constitués, les délits de faux et usage de faux requièrent l'identification du support d'expression de la pensée, argué de faux, laquelle suppose sa production, qui seule permet aux parties d'en débattre contradictoirement ; que, dès lors, en déclarant Mme X...coupable de faux et usage de faux et M. X...coupable de complicité de ces délits, en ce qui concerne les bons de pesée autres que ceux saisis lors du contrôle routier du 20 février 2004, quand aucun des bons litigieux-qui, d'après la prévention, auraient été établis entre octobre 2001 et le 12 décembre 2005- n'est produit au débat, ni ne figure au dossier de la procédure, de sorte que l'existence même d'une falsification ne peut être établie, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 441-1 du code pénal ;

" 2) alors que le droit à un procès équitable suppose que le prévenu ait accès aux pièces qui fondent la prévention et puisse ainsi discuter les arguments de l'accusation ; que, dès lors, en déclarant Mme X...coupable de faux et usage de faux et M. X...coupable de complicité de ces délits, en ce qui concerne les bons de pesée autres que ceux saisis lors du contrôle routier du 20 février 2004, quand aucun des bons litigieux-qui, d'après la prévention, auraient été établis entre octobre 2001 et le 12 décembre 2005- n'est produit au débat, ni ne figure au dossier de la procédure, de sorte que les prévenus n'ont pas été en mesure de discuter la réalité même de la falsification litigieuse, la cour d'appel a méconnu les règles du procès équitable et violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

" 3) alors que, nul n'est pénalement responsable que de son propre fait ; que, dès lors, en déclarant Mme Sylvie X...coupable de faux et usage de faux, sans relever les circonstances d'où résulterait la participation personnelle de la prévenue d'une part à la confection des faux bons de pesée, d'autre part, à leur utilisation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

" 4) alors que le faux punissable suppose l'existence d'un préjudice précisément caractérisé ; que les demandeurs avaient fait valoir que le délit n'était pas caractérisé en l'absence de préjudice, les investigations ayant été faites par les services de gendarmerie à l'occasion de la découverte des deux bons incriminés lors du contrôle du 22 février 2004 démontrant que les clients destinataires de ces bons avaient déclaré n'avoir jamais été l'objet d'un quelconque préjudice, la société SBPC ayant expressément déclaré, dans le cadre de son procès-verbal d'audition du 28 avril 2004, ne pas avoir constaté la moindre anomalie ; qu'en retenant que le bon de pesée découvert lors du contrôle routier du 20 février 2004 constitue un préjudice pour la collectivité, puisque la surcharge des camions est un risque possible pour les autres usagers, un risque certain pour les routes qui sont abîmées lorsqu'y circulent des camions trop chargés et un préjudice pour les autres entreprises du secteur, ce fait constituant une concurrence déloyale, la chambre des appels correctionnels n'a pas caractérisé un quelconque préjudice même simplement éventuel consécutif au prétendu faux et n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 441-1 du code pénal ;

" 5) alors que les juges du fond sont tenus d'indiquer en quoi a consisté la complicité, sans se borner à paraphraser la loi ; qu'en l'espèce, pour déclarer M. X...coupable de complicité de faux et usage de faux, les juges du fond se sont bornés à relever, par motifs propres, que « seront déclarés coupables Mme X..., pour la réalisation de ce délit, et M. X..., qui en a donné les directives en ce sens » et que la culpabilité de « M. X...(complice) est établie », et par motifs adoptés des premiers juges, que M. X...et Mme X...seront donc reconnus coupables du délit de faux commis le 22 février 2004, le premier étant complice par instigation », sans indiquer concrètement en quoi aurait consisté l'acte de complicité ni, notamment, préciser la teneur des directives qui auraient été données par le prévenu aux fins de commettre les délits de faux et usage de faux, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 121-7 et 441-1 du code pénal " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Leprey ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-80726
Date de la décision : 11/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 14 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 jan. 2012, pourvoi n°11-80726


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.80726
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