La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2011 | FRANCE | N°10-27759

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 décembre 2011, 10-27759


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. et Mme X... ont confié la défense de leurs intérêts à Mme Y..., avocat au barreau de Paris, à l'occasion de l'information judiciaire ouverte à la suite du décès de leur fille Géraldine ainsi que de plusieurs dossiers relevant du droit de la presse ; qu'après que M. et Mme X... ont mis fin à son mandat, à la suite d'un désaccord, Mme Y... leur a adressé une note d'honoraires, datée du 9 mars 2009, d'un mo

ntant de 120 000 euros hors taxe au titre des diligences effectuées au...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que M. et Mme X... ont confié la défense de leurs intérêts à Mme Y..., avocat au barreau de Paris, à l'occasion de l'information judiciaire ouverte à la suite du décès de leur fille Géraldine ainsi que de plusieurs dossiers relevant du droit de la presse ; qu'après que M. et Mme X... ont mis fin à son mandat, à la suite d'un désaccord, Mme Y... leur a adressé une note d'honoraires, datée du 9 mars 2009, d'un montant de 120 000 euros hors taxe au titre des diligences effectuées au cours de la procédure pénale ; que M. et Mme X... ont refusé de s'acquitter de cette facture et ont saisi le bâtonnier d'une contestation ; que celui-ci a fixé à 15 000 euros hors taxe le montant des honoraires afférents aux dossiers de presse et à 60 000 euros hors taxe ceux dus au titre de la procédure pénale, sous déduction des provisions versées ; que M. et Mme X... ont formé un recours contre cette décision, en faisant valoir qu'ils n'étaient pas redevables du solde de la note d'honoraire du 9 mars 2009 et que les provisions payées étaient satisfactoires ; que Mme Y... a formé un recours incident par conclusions pour solliciter le règlement de cette facture ; qu'elle a réitéré ce recours à l'audience tenue par le premier président ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, tel que reproduit en annexe :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de déclarer d'office irrecevable comme tardif son recours incident ;
Mais attendu qu'en matière de procédure orale sans représentation obligatoire, les moyens soulevés d'office par le juge sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été débattus contradictoirement à l'audience ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 176 et 277 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
Attendu que le recours incident contre la décision d'un bâtonnier rendue en matière de contestation d'avocat peut être formé en tout état de cause, la procédure étant orale ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable le recours incident de Mme Y..., l'ordonnance retient qu'il a été formé par conclusions signifiées plus d'un mois après la décision déférée ;
Qu'en statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 17 septembre 2010, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance d'avoir déclaré irrecevable le recours incident formé par Maître Y... contre la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du Barreau de Paris prononcée le 12 octobre 2009,
AUX MOTIFS QU'en application de l'article 125 du code de procédure civile, le juge doit relever d'office l'irrecevabilité de l'appel formé hors délai en ce compris l'appel incident ; qu'en l'espèce, Madame Y... a signifié des conclusions d'appel incident le 31 mai 2010 soit hors du délai d'un mois, ce qui rend le recours irrecevable pour tardiveté ;
1) ALORS QUE conformément à l'article 16 alinéa 3 du code de procédure civile, le juge qui relève d'office un moyen de droit doit, au préalable, inviter les parties à présenter les observations ; qu'en l'espèce, le premier président a relevé d'office, sur le fondement de l'article 125 du code de procédure civile, l'irrecevabilité, pour tardiveté, du recours incident formé par Madame Y... ; qu'en statuant ainsi sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, le premier président a violé le texte susvisé ;
2) ALORS QUE conformément à l'article 277 du décret du 27 novembre 1991, il est procédé comme en matière civile pour tout de ce qui n'est pas réglé par le présent décret ; qu'aux termes de l'article 176 du même décret, la décision du bâtonnier est susceptible de recours, par l'une ou l'autre partie, le délai de recours étant d'un mois ; que cette disposition qui n'exclut pas le recours incident de l'une quelconque des parties n'exige pas de l'exercer dans le délai d'un mois prescrit pour le recours principal ; qu'en enfermant le recours incident dans le délai du recours principal, le premier président qui a déclaré irrecevable comme tardif le recours incident formé par Madame Y... a, en statuant ainsi violé les textes susvisés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir fixé à la somme de 46 000 € le montant total des honoraires dus par les époux X... à Madame Y... et d'avoir dit que, vu la provision versée, les époux X... devront payer à Madame Y... la somme de 350 euros TTC avec intérêts de droit à compter de cette décision ;
AUX MOTIFS QUE les époux X... ont confié à Maître Y... la défense de leurs intérêts dans la procédure criminelle ouverte après l'assassinat de leur fille dont le corps a été découvert le 9 décembre 2004 ; que l'avocat est également intervenu dans douze procédures connexes de droit de la presse ; que les époux X... ayant souhaité que Maître Y... se fît assister par un avocat pénaliste éminent lors du procès d'assises, celle-ci a décidé de renoncer et a adressé une note d'honoraires en date du 9 mars 2009 intitulée « diligences effectuées du 6 novembre 2004 au 4 février 2009 dossier criminel X.../ Z... » pour un montant d'honoraires de 120 000 € HT ; que cette facture a été contestée devant le bâtonnier ; que celui-ci a fixé à 60 000 € le montant des honoraires dus au titre des diligences de Maître Y... dans la seule procédure pénale ; que l'appel formé par les époux X... ne concerne que le montant des honoraires ainsi fixés ; que les explications contradictoires des parties et les pièces produites aux débats ne permettent pas de retenir l'existence d'une convention d'honoraires ; que, comme l'a exactement retenu Monsieur le bâtonnier, il appartenait à Madame Y... d'informer ses clients des conditions de sa rémunération et ce, non seulement préalablement à sa saisine mais aussi régulièrement, au fur et à mesure de ses diligences et ce, d'autant plus qu'elle a émis des factures en règlement de ses diligences dans les procédures connexes ; qu'elle n'a donc pas satisfait aux exigences imposées tant par l'article 10 du décret du 12 juillet 2005 que par l'article 11-2 du règlement intérieur national ; qu'à défaut de convention entre les parties, les honoraires sont fixés conformément aux dispositions de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991 qui prévoit quatre critères, la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat outre sa notoriété et ses diligences ; que le règlement intérieur harmonisé en vigueur au moment des facturations objet du présent litige, précise un certain nombre d'autres éléments indicatifs servant à déterminer la rémunération de l'avocat, étant en outre rappelé qu'en aucun cas, le résultant obtenu ne peut avoir d'incidence en l'absence d'une convention d'honoraires ; que les époux X... produisent un descriptif signé par Maître Y... et non contesté par elle ; qu'il fait état de ses diligences, sans en préciser la durée pour chacune d'entre elles, et sans préciser le taux horaire appliqué, quand bien même celui-ci aurait été minoré, contrairement aux dispositions ci-dessus rappelées ; qu'aucun élément ne permet d'ailleurs de connaître le taux horaire habituellement pratiqué par Maître Y... ; qu'à la lecture de ce descriptif, doivent être décomptés, au cours de l'année 2004, trois journées à Sens, au cours de l'année 2005, seize journées à Sens ou à Auxerre, une plaidoirie devant la chambre d'instruction, des appels téléphoniques, particulièrement le 25 novembre, au cours de l'année 2006, quinze journées à Sens ou Auxerre ou Villeneuve sur Yonne, et en Allemagne, outre des appels téléphoniques et deux rendez vous à Paris, au cours de l'année 2007, onze journées à Sens ou Auxerre et quatre rendez vous à Paris, au cours de l'année 2008, six journées à Sens ou Auxerre outre deux rendez vous dont un téléphonique ; que Maître Y... produit pour sa part la seule annexe à sa facture émise le 9 mars 2009, justifiant des diligences effectuées ; qu'il s'en déduit au regard du précédent document ci-dessus analysé que les « six jours complets par mois » pour les seules « cotes de fond et de personnalité » sur 50 mois sont excessifs, étant en outre précisé que le nombre d'heures pour les autres diligences pas plus que le taux horaire ne sont précisés alors même qu'un dossier aussi douloureux pour ses clients méritait à tout le moins de la part de l'avocat des explications détaillées et circonstanciées ; que Maître Y... n'établit pas que sa notoriété en matière pénale fût antérieure à sa saisine dans le dossier X..., les pièces produites étant postérieures ; qu'en conséquence, à défaut d'éléments suffisamment probants, sur les heures passées pour le dossier pénal que lui avaient confié les époux X..., les honoraires seront fixés à 31 000 € pour la seule procédure criminelle ; qu'en conséquence, compte tenu des autres motifs de la décision entreprise qui ne sont pas contestés, le montant total des honoraires dus s'élève donc à la somme de 15 000 € + 31 000 € soit 55 016 € TTC ; que les seules sommes justifiées sont les provisions telles qu'elle sont déclarées par Maître Y... soit 54 666 € TTC ; que les époux X... sont donc débiteurs de la somme de 350 € TTC ;
1) ALORS QUE Madame Y... faisait valoir dans ses conclusions que le bâtonnier n'avait été saisi que de la contestation relative à la facture d'honoraires établie le 9 mars 2009, d'un montant TTC de 143 520 € relative aux seules diligences accomplies dans le dossier X.../ Z... entre le 6 novembre 2004 et le 4 février 2009, mais que la contestation ne portait pas sur des honoraires non contestés et versés par les époux X... dans des affaires étrangères au dossier criminel, observant que le bâtonnier avait fixé à la somme forfaitaire de 1250 € HT chacune des interventions ; qu'en confirmant la décision entreprise ayant fixé à la somme de 15 000 € le montant des honoraires dus par les époux X... dans d'autres affaires, le premier président qui a statué sur une demande qui n'avait pas été formée n'a pas respecté les limites du litige déterminées par les prétentions des parties et a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE Madame Y... faisait valoir dans ses conclusions que le Bâtonnier avait statué ultra petita en fixant le montant des honoraires rétribuant ses interventions dans douze dossiers distincts de l'affaire X.../ Z... ; qu'en affirmant, pour confirmer la décision du Bâtonnier en ce qu'elle a fixé à 15. 000 euros les honoraires dus à ce titre, que ces motifs n'étaient pas contestés, le premier président a dénaturé l'objet du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE Madame Y... faisait valoir dans ses conclusions que sur les règlements effectués par les époux X... à hauteur de 54. 666 euros, seule une somme de 14. 162, 80 euros TTC pouvait être imputée à l'affaire X.../ Z... ; que, de leur côté, les époux X... admettaient, dans leurs conclusions, que les sommes qu'il avaient versées avaient aussi rétribué les interventions de Madame Y... « dans des procédures périphériques » ; qu'en retenant, pour dire que les époux X... devaient payer à Madame Y... la somme de 350 euros TTC, qu'il convenait de déduire du montant total des honoraires dus par les époux, l'intégralité des sommes perçues par l'avocate, y compris celles perçues au titre des douze dossiers distincts de l'affaire X.../ Z..., le premier président a dénaturé l'objet du litige et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4) ALORS QUE le client qui a réglé le montant des honoraires demandés par son avocat après que le service a été rendu n'est pas fondé à en contester le montant ; qu'en réduisant le montant des honoraires acquittés par les époux X... après service rendu par Madame Y..., leur avocat intervenue dans différents dossiers indépendants du dossier criminel relatif à la disparition de Géraldine X..., le premier président a violé l'article 1134 du code civil ensemble l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 ;
5) ALORS QUE conformément à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, à défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ; qu'en l'espèce, le premier président ne s'est déterminé ni en relation avec la difficulté de l'affaire ni au regard des frais exposés ni en relation avec les diligences accomplies ; qu'en fixant à la somme de 31 000 € les honoraires dus par les époux X... à Madame Y... pour la procédure d'instruction criminelle, le premier président qui s'est abstenu de tenir compte de la longueur de la procédure, de l'importance des frais engagés, de la difficulté de l'affaire et du travail accompli mais qui s'est déterminé en considération du seul descriptif des déplacements en province, des appels téléphoniques et des rendez vous, ce qui ne traduit ni la complexité de l'affaire ni le travail intellectuel produit ni les frais engagés a, en statuant ainsi, privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ;
6) ALORS QUE, dans le courrier du 3 juin 2005 adressé par Madame Y... aux époux X..., après la contestation de sa deuxième note de frais et honoraires, celle-ci a exposé à ses clients la complexité du dossier comme l'ampleur des diligences à accomplir comme le seul examen des pièces du litige, comme encore sa disponibilité entière à leur égard ; que ces éléments de fixation des frais et honoraires dus se sont poursuivis entre novembre 2004 et février 2009 ; qu'en conséquence, ce courrier a informé les époux X... du mode de calcul, par Madame Y..., du montant de ses frais et honoraires et ils ne l'ont pas alors contesté en son calcul mais au regard de leurs seules capacités financières ; qu'en retenant que Madame Y... s'était abstenue d'informer ses clients des conditions de sa rémunération avant sa saisine et après celle-ci, le premier président qui ne s'est pas expliqué sur l'information contenue dans ce courrier mais qui a néanmoins limité à la somme de 31 000 € le montant des honoraires dus par les époux X..., somme qui n'inclut ni les frais engagés par Madame Y... ni les diligences accomplies, a, en statuant ainsi, méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-27759
Date de la décision : 15/12/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 déc. 2011, pourvoi n°10-27759


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.27759
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award