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13/12/2011 | FRANCE | N°10-27834;10-27840

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 décembre 2011, 10-27834 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° M 10-27.834 et T 10-27.840 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que les sociétés Groupe Cinetic et Most, leurs dirigeants MM. Christophe et Olivier X... ainsi que cinq autres actionnaires ont cédé la majorité des actions représentant le capital de la société Groupe Grand Sud à la société Kardiani qui s'est substitué la société Financière Fimega ; qu'il était notamment stipulé qu'un complément de prix serait dû sous certaines conditions et prévu, en ca

s de désaccord, le recours à un expert désigné, en application de l'article 1843-...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° M 10-27.834 et T 10-27.840 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que les sociétés Groupe Cinetic et Most, leurs dirigeants MM. Christophe et Olivier X... ainsi que cinq autres actionnaires ont cédé la majorité des actions représentant le capital de la société Groupe Grand Sud à la société Kardiani qui s'est substitué la société Financière Fimega ; qu'il était notamment stipulé qu'un complément de prix serait dû sous certaines conditions et prévu, en cas de désaccord, le recours à un expert désigné, en application de l'article 1843-4 du code civil, par le président du tribunal de commerce statuant comme en matière de référé et saisi à l'initiative de la partie la plus diligente ; qu'un désaccord étant né, les sociétés Cinetic et Co et Most et MM. Christophe et Olivier X... ont assigné la société Financière Fimega afin qu'un expert soit désigné ; que par une première ordonnance du 16 décembre 2008, le président du tribunal de commerce a ordonné l'expertise sollicitée et a chargé l'expert de recueillir plus généralement tous renseignements permettant d'apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis ; que la société Financière Fimega ayant été mise en liquidation judiciaire, la société Becheret Thierry Senechal Gorrias (la société BTSG) est intervenue à l'instance en sa qualité de liquidateur ; que par une seconde ordonnance du 10 novembre 2009, la désignation de l'expert a été déclarée commune à cette société ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° M 10-27.834, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 1843-4 du code civil et 490 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel dirigé contre l'ordonnance rendue le 16 décembre 2008, l'arrêt relève que l'assignation du 27 novembre 2008, intitulée "assignation en référé", qui sollicite la désignation d'un expert en application de l'article 1843-4 du code civil, et qui saisit le président du tribunal statuant en la forme des référés, répond aux exigences de ce texte ; qu'il relève encore que, s'il ressort de la rédaction de cette ordonnance que le juge a commis une confusion avec l'expertise de droit commun, cette erreur ne peut dénaturer la demande fondée sur les dispositions de l'article 1843-4 du code civil, lequel prévoit que la décision est rendue sans recours possible ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance déférée mentionnait que la mesure d'expertise était justifiée par l'urgence et ne préjudiciait pas au principal, et alors qu'elle donnait à l'expert mission de recueillir tous renseignements permettant aux juges du fond d'apprécier les responsabilités encourues, ce dont il résultait que le président du tribunal de commerce de Marseille avait statué comme juge des référés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi n° T 10-27840, pris en sa première branche :
Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation de l'arrêt n° 10-03.952 entraîne l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt n° 09-21.661 qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt n° 10/03.952 rendu le 30 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi n° T 10-27.840 ;
Constate l'annulation de l'arrêt n° 09/21.661 rendu le même jour ;
Condamne les sociétés Cinetic et Co et Most et MM. Christophe et Olivier X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi n° M 10-27.834 par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour la société Becheret-Thierry-Senechal-Gorrias et la société Financière Fimega.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel dirigé contre l'ordonnance de référé rendue le 16 décembre 2008 par le président du Tribunal de commerce de Marseille ;
AUX MOTIFS QUE la déclaration d'appel qui figure au dossier de la cour porte la signature de l'avoué et a valablement saisi la cour ; que les intimés ne justifient pas du grief qui leur aurait été causé du fait que l'exemplaire qui leur a été adressé, qui mentionne la constitution de l'avoué, n'est pas signé par celui-ci ; que pour justifier de la recevabilité de l'appel, la SAS FIMEGA et son liquidateur soutiennent que la désignation de l'expert est intervenue dans le cadre d'une ordonnance de référé normale et non par application des dispositions de l'article 1843-4 du Code civil ; que l'article 1843-4 du Code civil prévoit que : « Dans tous les cas où sont prévus la cession de droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible » ; que l'assignation du 27 novembre 2008, intitulée « assignation en référé », saisit le « président du Tribunal de commerce de Marseille », et sollicite la désignation d'un expert en application des dispositions de l'article 1843-4 du Code civil, comme prévu dans les accords des 5 et 17 octobre 2007 au cas où les parties ne parviendraient pas à s'entendre sur le complément de prix de la cession des droits sociaux prévus à ces actes ; que cette assignation qui saisit le président du tribunal statuant en la forme des référés répond aux exigences du texte ; que l'ordonnance rendue est motivée par l'urgence et l'absence de préjudice au principal, que le juge, de son propre chef, a ajouté à la mission demandée, le paragraphe suivant : «plus généralement, de recueillir tout renseignement permettant aux juges du fond d'apprécier les responsabilités encourues et les différents préjudices éventuellement subis par l'une ou l'autre des parties » ; qu'il ressort à l'évidence de cette rédaction que le juge a commis une confusion entre l'expertise prévue par l'article 1843-4 du Code civil, d'ordre public, et l'expertise de droit commun ordonnée avant dire droit par le juge du fond, confusion que l'acte de signification qui fait état des conditions de l'appel a entretenue ; que toutefois l'erreur du juge ne peut dénaturer la demande fondée sur les dispositions de l'article 1843-4 du Code civil, lequel prévoit que la décision est rendue sans recours possible ; qu'en l'absence de recours ouvert, l'appel-nullité, visé dans la déclaration d'appel, reste possible ; que cependant, les appelants qui relèvent seulement la confusion commise pour l'imputer à tort aux requérants, ne soulèvent aucun moyen de nullité à l'encontre de la décision du tribunal qui n'a pas outrepassé ses pouvoirs, dès lors que la mission confiée à l'expert est conforme à celle qui était sollicitée sur laquelle la SAS Financières Fimega ne s'était pas opposée ; qu'il en résulte que l'appel est irrecevable (arrêt attaqué pp. 6-7) ;
ALORS, d'une part, QUE la décision rendue par le président du tribunal statuant en la forme des référés, dans le cadre des dispositions de l'article 1843-4 du Code civil, sur la demande de désignation d'un expert pour la détermination de la valeur de droits sociaux est sans recours possible, sauf en cas d'excès de pouvoir ; qu'en constatant que le président du Tribunal de commerce de Marseille avait en l'espèce opéré une confusion entre l'expertise prévue par l'article 1843-4 du Code civil et l'expertise de droit commun ordonnée avant dire droit par le juge du fond, ce qui l'avait conduit à étendre à tort la mission de l'expert à l'examen des « responsabilités encourues », tout en estimant que le président du tribunal de commerce n'avait pas outrepassé ses pouvoirs « dès lors que la mission confiée à l'expert est conforme à celle qui était sollicitée », la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif inopérant, a consacré l'excès de pouvoir commis par le président du tribunal de commerce et violé l'article 1843-4 du Code civil ;
ALORS, d'autre part et subsidiairement, QUE le recours formé contre l'ordonnance du président du tribunal statuant comme juge des référés de droit commun ne se heurte pas aux dispositions de l'article 1843-4 du Code civil ; qu'en admettant que le président du Tribunal de commerce de Marseille ait eu le pouvoir de conférer à Monsieur Z... la mission d'examiner « les responsabilités encourues », il s'en déduisait nécessairement qu'il avait statué comme juge des référés de droit commun, l'appel dirigé contre l'ordonnance du 16 décembre 2008 étant alors recevable ; qu'en déclarant irrecevable le recours de la SCP BTSG, ès qualités, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1843-4 du Code civil.

Moyen produit au pourvoi n° T 10-27.840 par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour la société Becheret-Thierry-Senechal-Gorrias.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel dirigé contre l'ordonnance de référé rendue le 10 novembre 2009 par le président du Tribunal de commerce de Marseille ;
AUX MOTIFS QUE par une première ordonnance rendue le 16 décembre 2008, le président du Tribunal de commerce de Marseille a désigné Monsieur Raymond Z... en qualité d'expert aux fins de : résoudre le désaccord des parties ; arbitrer sur les points identifiés dans les modalités de calcul de la marge comme faisant l'objet d'un désaccord entre eux, en vérifiant les éléments ayant permis le calcul de ladite marge, notamment les contestations portant sur les décisions de gestion et de politique commerciale des acquéreurs ayant modifié les postes définis aux annexes 3.1, 3.2, 3.3 et 4 de la convention du 5 octobre 2007 et en tant que de besoin, arrêter les compléments de prix ; plus généralement, recueillir tous les renseignements permettant aux juges du fond d'apprécier les responsabilités encourues et les différents préjudices éventuellement subis par l'une ou l'autre des parties ; que la SAS FINANCIERE FIMEGA a relevé appel de cette décision et que son appel a été repris par la société BECHERET THIERRY SENECHAL GORRIAS ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS FINANCIERE FIMEGA ; que par décision de ce jour, cet appel a été déclaré irrecevable, la cour estimant que l'assignation du 27 novembre 2008, intitulée « assignation en référé », qui saisit le président du tribunal statuant en référé répond aux exigences du texte de l'article 1843-4 du Code civil ; que saisi dans la même forme et dans le même cadre juridique, pour que l'expertise ordonnée soit opposable au liquidateur judiciaire de l'une des parties, le premier juge a justement estimé que les textes ne faisaient pas de distinction en la forme quant au mode de saisine du président du tribunal statuant en référé et du président du tribunal statuant en la forme des référés, et a fait droit à la demande, mais en commettant la même erreur de rédaction que dans la première ordonnance, en statuant « par provision et vu l'urgence » ; qu'il ressort à l'évidence de cette rédaction que le juge a commis une confusion entre l'expertise prévue par l'article 1843-4 du Code civil, d'ordre public, et l'expertise de droit commun ordonnée avant dire droit par le juge du fond ; toutefois, l'erreur du juge ne peut dénaturer la demande fondée sur les dispositions de l'article 1843-4 du Code civil ; que dans le cadre de l'article 1843-4 du Code civil qui limite la saisine du président du tribunal statuant en la forme des référés aux cas de cession de droits sociaux, le juge statue au fond et vide sa saisine en désignant un expert ; que la décision est rendue sans recours possible ; qu'en l'absence de recours ouvert, l'appel-nullité, visé dans la déclaration d'appel, reste possible ; que cependant, les appelants ne soulèvent aucun moyen de nullité à l'encontre de la décision du président du tribunal qui n'a pas outrepassé ses pouvoirs ; qu'il en résulte que l'appel est irrecevable (arrêt attaqué, p. 6) ;
ALORS, d'une part, QUE la cassation qui interviendra dans le cadre du pourvoi (n° M 10-27.834) dirigé contre l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 30 septembre 2010 (n° 2010/366) entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt qui fait l'objet du présent pourvoi, en application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
ALORS, d'autre part, QUE la décision rendue par le président du tribunal statuant en la forme des référés, dans le cadre des dispositions de l'article 1843-4 du Code civil, sur la demande de désignation d'un expert pour la détermination de la valeur de droits sociaux est sans recours possible, sauf en cas d'excès de pouvoir ; qu'en constatant que le président du Tribunal de commerce de Marseille avait en l'espèce opéré une confusion entre l'expertise prévue par l'article 1843-4 du Code civil et l'expertise de droit commun ordonnée avant dire droit par le juge du fond, ce qui l'avait conduit à étendre à tort la mission de l'expert à l'examen des « responsabilités encourues », tout en estimant que le président du tribunal de commerce n'avait pas outrepassé ses pouvoirs, la cour d'appel a consacré l'excès de pouvoir commis par le président du tribunal de commerce et violé l'article 1843-4 du Code civil ;
ALORS, enfin et subsidiairement, QUE le recours formé contre l'ordonnance du président du tribunal statuant comme de juge des référés de droit commun ne se heurte pas aux dispositions de l'article 1843-4 du Code civil ; qu'en admettant que le président du Tribunal de commerce de Marseille ait eu le pouvoir de conférer à Monsieur Z... la mission d'examiner « les responsabilités encourues », il s'en déduisait nécessairement qu'il avait statué comme juge des référés de droit commun, ce que relève la cour d'appel en observant notamment que le magistrat a statué « par provision et vue l'urgence », et que l'appel dirigé contre l'ordonnance du 10 novembre 2009 était recevable ; qu'en déclarant irrecevable le recours de la SCP BTSG, ès qualités, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1843-4 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-27834;10-27840
Date de la décision : 13/12/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 déc. 2011, pourvoi n°10-27834;10-27840


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.27834
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