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13/12/2011 | FRANCE | N°10-21855

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 décembre 2011, 10-21855


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 4 septembre 1995 par la société AMS fiduciaire en qualité de consultant, a été chargé de gérer et d'administrer une villa appartenant aux époux Y... ; que, par acte du 15 mai 1998, ceux-ci se sont engagés à lui verser une indemnité égale à douze mois de salaire net d'impôts en cas de rupture du contrat à leur initiative ou à celle de la société pour quelque cause que ce soit ; que le salarié a été licencié pour faute lourde le 14 août 2002, d

es vols et des faits de détournements consistant en des paiements, par Mme Y...,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 4 septembre 1995 par la société AMS fiduciaire en qualité de consultant, a été chargé de gérer et d'administrer une villa appartenant aux époux Y... ; que, par acte du 15 mai 1998, ceux-ci se sont engagés à lui verser une indemnité égale à douze mois de salaire net d'impôts en cas de rupture du contrat à leur initiative ou à celle de la société pour quelque cause que ce soit ; que le salarié a été licencié pour faute lourde le 14 août 2002, des vols et des faits de détournements consistant en des paiements, par Mme Y..., de factures personnelles au salarié lui étant reprochés ; que, le 3 octobre 2002, Mme Y... a saisi le tribunal de grande instance pour obtenir l'annulation ou la révocation de l'engagement du 15 mai 1998 qualifié, par elle, de libéralité ;
Sur les sixième et huitième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, de sorte que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'une demande en paiement d'heures complémentaires ne peut être rejetée aux motifs que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande; qu'en retenant, pour rejeter la demande formée par M. X... au titre des heures supplémentaire effectuées, que les attestations qu'il communiquait n'étaient pas probantes, la cour d'appel a fait supporter au salarié la charge de la preuve des heures supplémentaires dont il réclamait le paiement, en violation de l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°/ que pour justifier sa demande d'heures supplémentaires, M. X... versait aux débats des attestations de Mmes Z..., A..., B... et de M. C..., indiquant tous qu'ils avaient personnellement constaté les horaires qu'il effectuait, qu'il travaillait tard le soir et souvent le week-end et les jours fériés ; qu'en déboutant M. X... de sa demande, au motif que les attestations ne permettaient pas de savoir si leurs auteurs avaient personnellement constaté les faits reprochés, la cour d'appel a dénaturé ces attestations, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
3°/ que tenus de motiver leurs décisions, les juges du fond ne peuvent statuer au visa de pièces n'ayant fait l'objet d'aucune analyse, même sommaire ; qu'en déboutant M. X... de sa demande, aux motifs que l'employeur produisait divers documents et notamment les bulletins de salaire, sans s'expliquer au moins sommairement sur ces divers documents, et sans indiquer en quoi ils établissaient les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé, hors toute dénaturation, que les attestations produites par le salarié ne permettaient pas de déterminer si leurs auteurs avaient personnellement constaté les faits rapportés et que, de son côté, l'employeur produisait des pièces justificatives, notamment des bulletins de salaires, la cour d'appel, qui a estimé au vu des éléments fournis par l'une et l'autre parties qu'il n'était pas établi que le salarié avait effectué les heures supplémentaires dont il réclamait paiement, a légalement justifié sa décision ;
Sur le cinquième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des congés payés, alors, selon le moyen, que tenus de motiver leurs décisions, les juges du fond ne peuvent statuer au visa de pièces n'ayant fait l'objet d'aucune analyse, même sommaire ; qu'en se bornant à affirmer, pour dire que la demande de M. X... concernant les congés payés postérieurs à juillet 1998 n'était pas fondée, qu'elle était contredite par les bulletins de salaires sur lesquels elle n'a fourni aucune analyse, même sommaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la réclamation au titre des congés payés antérieurs à juillet 1998 était prescrite et que celle au titre des autres congés n'était pas fondée au vu des bulletins de paie produits aux débats, la cour d'appel a motivé sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 102 du code de procédure civile ;
Attendu que pour faire droit à l'exception de litispendance, l'arrêt retient que la procédure civile initiée par Mme Y... à l'encontre de M. X... devant le tribunal de grande instance de Nice consiste en une action en nullité de donation et révocation pour ingratitude et que la juridiction civile est déjà saisie de la question de la validité de l'acte sur le fondement duquel le salarié sollicite, devant la juridiction prud'homale, condamnation de Mme Y... ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, lorsque les juridictions saisies ne sont pas du même degré, l'exception de litispendance ne peut être soulevée que devant la juridiction du degré inférieur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 3141-26 du code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement justifié par une faute lourde, l'arrêt retient que le salarié a, non seulement, voulu s'enrichir, mais encore à l'évidence nuire à son employeur dont la réputation a été gravement entachée par la découverte des faits ayant donné lieu à condamnation pénale de l'intéressé ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'intention de nuire à l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le quatrième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié au titre des jours de récupération, l'arrêt indique que cette demande n'est pas sérieuse et rappelle que le conseil de prud'hommes a justement relevé, avec ironie, que M. X... "entend récupérer tout à la fois les jours consacrés aux fêtes religieuses catholiques (lundi de Pâques, Ascension, Assomption) ou israélites (kippour, Breunit Evah, Gahuilny, etc...), les jours fériés français et monégasques" ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs ne permettant pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le septième moyen :
Vu l'article L. 6321-1 du code du travail ;
Attendu que pour écarter la demande du salarié en réparation du préjudice lié à l'absence de formation, l'arrêt relève qu'il ne justifie d'aucune demande en ce sens ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'adaptation du salarié à son poste de travail est une obligation légale incombant à l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, sauf celles rejetant les demandes de M. X... en paiement d'heures supplémentaires, de congés payés, de modification des bulletins de paie et de remboursement de la somme de 250,34 euros au titre de frais avancés et en ce qu'il met hors de cause Mme Y..., l'arrêt rendu le 31 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société AMS fiduciaire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société AMS fiduciaire à payer à M. X... la somme de 2 500 euros et rejette sa demande et celle de Mme Y... à ce titre ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils pour M. X...

Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli l'exception de litispendance soulevée par Mme Lily Y..., renvoyé devant le tribunal de grande instance de Nice la demande de condamnation de Mme Y... au paiement de la somme de 102.506 €en vertu de la convention du 15 mai 1998, mis hors de cause Mme Y... et condamné M. X... à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE "la procédure civile initiée par Madame Lily Y... à l'encontre de Monsieur Didier X... devant le tribunal de grande instance de NICE consiste en une action en nullité de donation et révocation pour ingratitude; que la juridiction civile est déjà saisie de la question de la validité de l'acte sur le fondement duquel Monsieur Didier X... sollicite devant la juridiction prud'homale condamnation de Madame Y... à lui payer la somme de 102.506 €;Que le 15 mai 1998, les époux Y... ont en effet signé la convention suivante:"Compte-tenu du détachement de Monsieur Didier X... à la Villa LA LEOPOLDA depuis le mois de septembre 1995 et les particularités de sa fonction, il est convenu qu'en cas de départ à l'initiative de Monsieur, Madame Y... et/ou l'employeur, (pour quelque cause que ce soit) sera versée une indemnité complémentaire de l'indemnité légale correspondant à 12 mois de salaire net d'impôts, calculés sur la base du plus fort salaire brut mensuel perçu depuis son entrée à la villa LEOPOLDA.Cette indemnité devra être versée par Monsieur/Madame Y... à l'employeur de Monsieur Didier X... afin de lui être reversée".Qu'il convient, faisant droit à l'exception de litispendance soulevée par Madame Lily Y..., de renvoyer le règlement de ce litige devant le tribunal de grande instance de NICE" (arrêt p. 4);
ALORS QUE lorsque les juridictions saisies ne sont pas du même degré, l'exception de litispendance ne peut être soulevée que devant la juridiction de degré inférieur ; qu'en accueillant l'exception de litispendance et en renvoyant le litige concernant l'acte du 15 mai 1998 devant le tribunal de grande instance de Nice, la cour d'appel a violé l'article 102 du Code de procédure civile.
Le deuxième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le licenciement de M. X... reposait sur une faute lourde et de l'avoir débouté de toutes ses demandes fondées sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;
AUX MOTIFS QUE "Monsieur Didier X... soutient qu'il a fait l'objet d'une procédure de licenciement irrégulière en excipant de l'article L. 1332-2 alinéa 4 du code du travail, qui dispose que toute sanction disciplinaire doit intervenir dans le délai d'un mois après l'entretien préalable; qu'il ajoute que faute pour l'employeur de lui avoir notifié le licenciement avant le 7 juillet 2002, celui-ci est ipso facto dépourvu de cause réelle et sérieuse;Attendu que sera écarté d'emblée l'argument selon lequel il a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 15 mai 2002, lequel non seulement n'est étayé par aucun élément probant, mais est de plus contredit par la déclaration de son avocat au juge d'instruction: " il est important de noter que Monsieur Didier X... n'a fait l'objet d'une mesure de mise à pied conservatoire qu'à partir du 11 juillet 2002" (pièce n° 24);Attendu qu'il a précédemment été indiqué dans l'exposé des faits et de la procédure que ce n'est que le lendemain du premier entretien préalable du 5 juin 2002 que Monsieur D..., interrogeant les chauffeurs de la villa LA LEOPOLDA, a découvert l'étendue des malversations de Monsieur Didier X..., en sorte qu'il avait non seulement le droit mais le devoir de l'entendre à nouveau et de lui faire part qu'il envisageait un licenciement pour faute lourde;Qu'il ne peut être fait grief à l'employeur de ne pas avoir fait preuve de précipitation et d'avoir pris le temps d'une enquête minutieuse, laquelle a fait apparaître que nombre de factures (pièce n° 12) avaient été remboursées en espèces à Monsieur Didier X..., ce que divers salariés ont confirmé (pièces n° 4, 5 et 6);Que la SARL AMS FIDUCIAIRE n'a donc pas poursuivi la première procédure de licenciement mais en a initié une autre fondée sur des faits beaucoup plus graves;Que la procédure de licenciement n'est dès lors entachée d'aucune irrégularité dans la mesure où l'employeur a notifié le licenciement pour faute lourde le 14 août 2002, soit plus d'un jour franc et moins d'un mois après l'entretien préalable du 18 juillet 2002;Attendu, au fond, que Monsieur Didier X... ne peut, pour éluder la sanction pénale dont il a fait l'objet pour escroquerie, invoquer la loi d'amnistie du 6 août 2002, car elle exclut de son champ d'application dans son article 11 " les faits constitutifs de manquement à l'honneur ou à la probité" dont fait partie à l'évidence l'escroquerie.Attendu à cet égard que la différence de qualification donnée aux faits reprochés dans la lettre de licenciement (détournement) et dans l'arrêt correctionnel (escroquerie) n'empêche pas que les faits retenus par l'employeur et la juridiction pénale sont, au moins en partie, les mêmes et que dès lors peu importe la dénomination qui leur est attribuée;Que tant la lettre de licenciement du 14 août 2002 que l'arrêt correctionnel du 12 décembre 2007 visent les factures personnelles au nom de la société TOP DEQ, qu'il a fait payer au client, à savoir Madame Lily Y...;Attendu que ces seuls faits communs justifient le licenciement pour faute lourde, quand bien même les autres faits n'ont pas été retenus, en l'absence de preuves, par la juridiction pénale;Qu'en effet le salarié non seulement a voulu s'enrichir, mais encore à l'évidence nuire à l'employeur dont la réputation a été gravement entachée par leur découverte;Attendu que Monsieur Didier X... doit donc être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement injustifié et irrégulier, observation étant faite que celui-ci n'a été entouré d'aucune circonstance vexatoire permettant de le qualifier d'abusif" (arrêt p. 5 et 6);
ALORS, D'UNE PART, QUE le délai d'un mois pour licencier un salarié court à compter de l'entretien préalable, sauf dans l'hypothèse où l'employeur a adressé au salarié, dans le délai d'un mois à compter du premier entretien, une convocation à un nouvel entretien préalable ; qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêt attaqué que le premier entretien s'est tenu le 5 juin 2002 (arrêt p. 5 § 9), le second le 18 juillet suivant et que le licenciement a été notifié le 14 août 2002 (arrêt p. 5 in fine) ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... a soutenu qu'il n'avait été convoqué à ce second entretien que le 10 juillet 2002 ; qu'en décidant de retenir, comme point de départ du délai d'un mois, la date du second entretien préalable justifié par des faits nouveaux, sans constater que la convocation à ce second entretien avait été adressée à M. X... dans le délai d'un mois suivant le premier entretien, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1332-2 du Code du travail;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge doit s'expliquer sur les éléments de preuve versés aux débats ; qu'en l'espèce, pour établir qu'il avait fait l'objet d'une mesure de mise à pied dès le 15 mai 2002, M. X... a notamment produit une attestation de Mme A... et un constat d'huissier du 20 juin 2002 établissant que l'accès à son lieu de travail lui a été refusé ; qu'en se fondant, pour écarter l'existence d'une telle mise à pied, sur une simple déclaration de son avocat devant le juge d'instruction, sans rechercher si les pièces produites ne permettaient pas de caractériser l'existence d'une mise à pied, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE le licenciement pour faute lourde implique la preuve d'une intention de nuire du salarié ; qu'en l'espèce, pour juger le licenciement fondé sur une faute lourde, la cour d'appel a relevé que certains des faits reprochés avaient valu à M. X... une condamnation pénale pour escroquerie, qu'il avait voulu s'enrichir et, à l'évidence, nuire à son employeur dont la réputation avait été entachée par leur découverte; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l'intention de nuire de M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 3141-26 du Code du travail;
ALORS EN OUTRE QUE tenus de motiver leurs décisions, les juges du fond doivent s'expliquer au moins sommairement sur les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent; qu'en retenant que la réputation de l'employeur avait été entachée sans s'expliquer sur les éléments pris en compte pour procéder à cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE le fait que la réputation de l'employeur ait été entachée ne suffit pas à caractériser l'intention de nuire dès lors qu'il n'est pas constaté que cette circonstance a été recherchée par le salarié lorsqu'il a commis les faits pour lesquels il a été sanctionné; qu'en décidant que la faute lourde était caractérisée, la cour d'appel a violé l'article L. 3141-26 du Code du travail.
Le troisième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents;
AUX MOTIFS QUE "s'agissant des heures supplémentaires alléguées, Monsieur Didier X... verse aux débats diverses attestations dont les premiers juges ont pertinemment relevé qu'elles ne permettent pas de déterminer si leurs auteurs ont personnellement constaté les faits rapportés; que la SARL AMS FIDUCIAIRE produits divers documents, notamment les bulletins de salaires; qu'au vu des éléments fournis par les deux parties, la cour estime que Monsieur Didier X... n'a pas effectué les heures supplémentaires qu'il allègue" (arrêt p. 6, § 7 à 9) ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE " pour réclamer paiement de 80.505,18 €, Monsieur Didier X... explique qu'aucune convention de forfait ne le liait à son employeur et qu'il effectuait au minimum deux heures supplémentaires par jour ; que durant toute sa période d'emploi et rétroactivement sur les cinq dernières années, il a effectué 2.534 heures supplémentaires (sans tenir compte de l'heure pour la pause repas) ; qu'il chiffre sa demande en écartant le calcul sur taux majorés et les repos compensateurs ; que pour appuyer sa demande, il s'en réfère, à nouveau, sur les deux attestations des témoins déjà cités (Mesdames B... et A...); que les personnes précitées n'énoncent pas leurs propres horaires de travail et qu'il est ainsi difficile de savoir précisément si elles attestent par "ouïe dire" ou si, en service ellesmêmes, les week-ends, fériés et les nuits, elles avaient pu constater la présence de Monsieur Didier X... sur son lieu de travail; qu'en tout état de cause, pour l'une d'entre elles, sa prestation n'a duré que 10 mois, ce qui ne permet pas, en tout état de cause de légitimer un rappel de salaire sur cinq ans; que l'employeur conteste cette demande, précisant que M. Didier X... était rémunéré en qualité de cadre, à hauteur de 6000 € par mois, et qu'il organisait son travail à sa guise avec des récupérations constantes ; que force est de constater que Monsieur Didier X... ne fournit en fait, à l'appui de sa demande, aucun horaire de travail, aucun planning détaillé de ses heures d'entrée et de sortie, qu'il procède par allégations ; qu'en l'état, le Conseil rejette sa demande, insuffisamment explicitée et justifiée » (jug. p. 10) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, de sorte que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande; qu'une demande en paiement d'heures complémentaires ne peut être rejetée aux motifs que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande; qu'en retenant, pour rejeter la demande formée par M. X... au titre des heures supplémentaire effectuées, que les attestations qu'il communiquait n'étaient pas probantes, la cour d'appel a fait supporter au salarié la charge de la preuve des heures supplémentaires dont il réclamait le paiement, en violation de l'article L. 3171-4 du Code du travail;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE pour justifier sa demande d'heures supplémentaires, M. X... versait aux débats des attestations de Mmes Z..., A..., B... et de M. C..., indiquant tous qu'ils avaient personnellement constaté les horaires qu'il effectuait, qu'il travaillait tard le soir et souvent le week-end et les jours fériés; qu'en déboutant M. X... de sa demande, au motif que les ATTESTATIONS ne permettaient pas de savoir si leurs auteurs avaient personnellement constaté les faits reprochés, la cour d'appel a dénaturé ces attestations, violant ainsi l'article 1134 du Code civil;
ALORS, ENFIN, QUE tenus de motiver leurs décisions, les juges du fond ne peuvent statuer au visa de pièces n'ayant fait l'objet d'aucune analyse, même sommaire; qu'en déboutant M. X... de sa demande, aux motifs que l'employeur produisait divers documents et notamment les bulletins de salaire, sans s'expliquer au moins sommairement sur ces divers documents, et sans indiquer en quoi ils établissaient les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 455 du Code de procédure civile.
Le quatrième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande au titre des jours de récupération;
AUX MOTIFS QUE "concernant la demande au titre des récupérations, le conseil de prud'hommes a justement relevé avec ironie que Monsieur Didier X... "entend récupérer tout à la fois les jours consacrés aux fêtes religieuses catholiques (lundi de Pâques, Ascension, Assomption) ou israélites (kippour, Breunit Evah, Gahuil ny, etc...), les jours fériés français et monégasques..."; que faute d'être sérieuse, cette demande sera rejetée" (arrêt p. 6);
ALORS QUE M. X... faisait valoir qu'en application de la convention collective, le travail les week-end et jours fériés devait donner lieu à une journée de récupération, et il versait aux débats un tableau récapitulant les samedis, dimanches et jours fériés travaillés; que le simple fait que les jours de récupération litigieux concernent des fêtes religieuses catholiques et israélites, des jours fériés français ou monégasques, ne permet pas de justifier le rejet de la demande comme non sérieuse ; qu'en rejetant cette demande au motif qu'elle n'était pas sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le cinquième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande au titre des congés payés;
AUX MOTIFS QUE "ceux antérieurs à juillet 1998 sont prescrits et que les autres sont contredits par les bulletins de salaires produits" (arrêt p. 6);
ALORS QUE tenus de motiver leurs décisions, les juges du fond ne peuvent statuer au visa de pièces n'ayant fait l'objet d'aucune analyse, même sommaire; qu'en se bornant à affirmer, pour dire que la demande de M. X... concernant les congés payés postérieurs à juillet 1998 n'était pas fondée, qu'elle était contredite par les bulletins de salaires sur lesquels elle n'a fourni aucune analyse, même sommaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Le sixième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande au titre de la modification des bulletins de salaires;
AUX MOTIFS QUE "la demande de rectification des bulletins de salaires de Monsieur Didier X... est sans objet" (arrêt p. 7),
ALORS QUE l'employeur doit remettre au salarié un bulletin de paie mentionnant sa classification conventionnelle et sa position dans cette classification conventionnelle; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que ses bulletins de salaires mentionnaient au moment de son embauche et jusqu'au mois d'avril 1998 un coefficient 220 niveau 4 selon la convention collective applicable mais qu'au regard des fonctions exercées, aurait dû être mentionné dès le début de la relation contractuelle un statut cadre, coefficient 300, niveau 3 ; qu'il demandait donc à la cour d'appel de condamner l'employeur à modifier ces bulletins de salaires et à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux; qu'en décidant que cette demande était sans objet, la cour d'appel a violé les articles L. 3243-2 et R. 3243-1 du Code du travail.
Le septième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en réparation du préjudice lié à l'absence de formation;
AUX MOTIFS QUE "Monsieur Didier X... ne justifie d'aucune demande de formation et qu'il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef" (arrêt p. 6, pénult. §) ;
ALORS QUE le fait qu'un salarié n'ait bénéficié d'aucune formation professionnelle continue pendant toute la durée de son emploi dans l'entreprise établit un manquement de l'employeur à son obligation de veiller au maintien de la capacité de ses employés à occuper un emploi, entraînant pour les intéressés un préjudice qu'il appartient au juge d'évaluer ; qu'en déboutant M. X... de la demande au motif, inopérant dès lors que c'est à l'employeur qu'il appartient de prendre l'initiative de former ces salariés, qu'il ne justifiait d'aucune demande de formation, la cour d'appel a violé l'article L 6321-1 du Code du travail.
Le huitième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir mis hors de cause Mme Y... et condamné M. X... à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Aux motifs qu'« il est clair que Madame Lily Y... n'avait pas la qualité d'employeur de Monsieur Didier X... ; qu'il est vrai que trois attestations (A..., B... et C...) font état des instructions que lui donnait directement Madame Lily Y... ; qu'il convient d'abord de souligner que ces trois anciens salariés ont quitté la villa LEOPOLDA dans des conditions conflictuelles, ce qui jette inévitablement doute sur leur impartialité ; qu'il doit aussi être admis que 2 6 Monsieur Didier X... trouvait à la villa LA LEOPOLDA des facilités extra-professionnelles, ce qui explique le temps passé dans ce lieu ; qu'il doit ensuite être noté que Madame Lily Y... n'était présente que par intermittence (essentiellement pendant l'été), en sorte qu'elle ne pouvait diriger Monsieur Didier X... de manière continue ; Attendu en bref que le fait que Monsieur Didier X... ait pu recevoir occasionnellement des instructions de Madame Lily Y... ne suffit pas à démontrer un transfert du lien de subordination dès lors qu'il était astreint à rendre compte de son activité à la S.A.R.L. A.M.S. FIDUCIAIRE ; que sa mission était celle d'un collaborateur d'un cabinet comptable détaché chez un client par la S.A.R.L. A.M.S. FIDUCIAIRE qui le rémunérait, à laquelle il rendait des comptes et pour laquelle il accomplissait sa mission de contrôle et de validation ; qu'il s'ensuit que doit être prononcée la mise hors de cause de Madame Lily Y..., motif pris de ce qu'elle n'a jamais été l'employeur de Monsieur Didier X... » (arrêt p. 4 et 5),
Alors que deux personnes distinctes peuvent être employeurs du même salarié, même si l'une d'elles n'exerce pas ses pouvoirs de manière continue ; qu'en l'espèce, la cour a admis que M. X... a pu recevoir occasionnellement des instructions de Madame Y... mais que cela ne suffisait pas à démontrer un transfert du lien de subordination ; qu'en exigeant la preuve d'un tel transfert, bien que deux personnes puissent exercer simultanément les pouvoirs de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21855
Date de la décision : 13/12/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 31 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 déc. 2011, pourvoi n°10-21855


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.21855
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