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08/11/2011 | FRANCE | N°10-21971

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 novembre 2011, 10-21971


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 25 mai 2010), que pour le financement d'un marché de travaux de génie civil conclu entre la société Entreprise de travaux publics Botta et fils (la société Botta) et les sociétés La Paix, La Flamme, L'Olympe et L'Olivier, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube et la Haute-Marne, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de crédit agricole mutuel Champagne-Bourgogne (la banque) a consenti à chacune de ces dernières, suivant quatre actes du

22 décembre 1989, un prêt de 7 500 000 francs (1 143 367,60 euros) ; q...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 25 mai 2010), que pour le financement d'un marché de travaux de génie civil conclu entre la société Entreprise de travaux publics Botta et fils (la société Botta) et les sociétés La Paix, La Flamme, L'Olympe et L'Olivier, la caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube et la Haute-Marne, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de crédit agricole mutuel Champagne-Bourgogne (la banque) a consenti à chacune de ces dernières, suivant quatre actes du 22 décembre 1989, un prêt de 7 500 000 francs (1 143 367,60 euros) ; qu'à l'exception de la société La Paix, les trois autres sociétés ont remboursé les prêts ; que les quatre sociétés ont été ultérieurement mises en redressement puis liquidation judiciaires, M. X... étant désigné en qualité de liquidateur (le liquidateur) ; que la banque ayant déclaré au passif de la société La Paix une somme de 15 005 365,50 francs (2 287 553,17 euros), le liquidateur l'a assignée en responsabilité ; que la société Botta, créancière de la société La Paix, intervenant volontairement à l'instance, a formé une demande de dommages-intérêts ;
Sur la recevabilité du moyen unique, en ce qu'il est soutenu par la société Botta, contestée par la défense :
Attendu que la société Botta n'ayant pas qualité pour critiquer le rejet de la demande, formée par le liquidateur contre la banque, de dommages-intérêts de 45 000 000 francs (6 860 205,70 euros) correspondant au montant du passif déclaré pour les quatre sociétés, le moyen qu'elle soutient est irrecevable ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche en ce qu'il est soutenu par le liquidateur :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la banque, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, au paiement de la somme de 45 millions de francs (6 860 205,70 euros) correspondant au montant du passif déclaré à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que le liquidateur montrait dans ses écritures d'appel que, s'agissant de la société La Paix, le renouvellement du crédit initial de 7 500 000 francs (1 143 367,60 euros) et l'absence de poursuites entreprises pour en obtenir le paiement avaient contribué à porter la dette d'emprunt à la somme de 15 005 365,50 francs (2 287 553,17 euros) ; qu'en estimant qu'il n'y avait pas de lien de causalité entre la faute de la banque pour le renouvellement du crédit et le préjudice de la société La Paix, sans répondre aux conclusions pertinentes de l'exposant sur l'aggravation quantitative du passif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir fait ressortir que la banque avait commis une faute en renouvelant son concours en janvier 1992 puis en augmentant le montant du crédit en mai 1992, passé respectivement de 9 000 000 francs (1 372 041,10 euros) à 9 400 000 francs (1 433 020,70 euros), l'arrêt relève que la demande ne peut consister dans la totalité du passif déclaré, dans la mesure où l'octroi du crédit initial de 7 500 000 francs (1 143 367,60 euros) n'est pas fautif, mais dans sa seule aggravation éventuelle et que le passif déclaré est en lien avec l'octroi de ce crédit initial puisque l'opération réalisée s'est finalement révélée infructueuse ; qu'il relève encore que l'analyse des comptes pour 1991 et 1992 montre un maintien des dettes fournisseurs, une baisse des dettes fiscales et un accroissement des dettes financières équivalent au montant prêté et du poste "autres dettes", que les bilans postérieurs ne permettent pas de déterminer si la structure de l'endettement a évolué du fait de l'accroissement des dettes en capital consécutives aux avenants du prêt ou simplement du fait des seuls intérêts échus, notamment de ceux décomptés par la société Botta pour 4 303 791 francs (656 108,70 euros) et que le maintien du crédit et l'augmentation du capital emprunté ont permis la poursuite de la construction de l'immeuble ; que la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le moyen, pris en ses deux premières branches, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., ès qualités, et la société Entreprise de travaux publics Botta et fils aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de Me Spinosi, avocat de M. X..., ès qualités et de la société Entreprise de travaux publics Botta et Fils

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les exposants de leur demande tendant à obtenir la condamnation de la banque, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, au paiement de la somme de 45.000.000 francs correspondant au montant du passif déclaré à titre de dommages et intérêts ;
Aux motifs qu'« ainsi que l'a rappelé le premier juge, fonde la responsabilité d'une banque pour faute délictuelle le fait d'accorder ou de maintenir son concours financier à une entreprise dont elle sait la situation irrémédiablement compromise, ou encore de refuser ou de s'abstenir de s'informer sur la gravité des difficultés patentes d'une entreprise dont il s'avère ensuite qu'elle était dans une telle situation, créant ainsi sciemment une apparence trompeuse de solvabilité pour les tiers qui contractent avec cette entreprise ;
Que de même, la responsabilité d'un établissement de crédit peut être engagée pour avoir pratiqué une politique de crédit ruineux pour l'entreprise devant nécessairement provoquer une croissance continue et insurmontable de ses charges financières ;
Qu'il ne peut en revanche être reproché à un établissement de crédit d'avoir apporté son concours à la création d'une société par l'octroi d'une ouverture de crédit destinée à financer le lancement de son activité ;
1- sur le caractère ruineux du financement initial -
Attendu que l'expert Y... n'a pas pu recevoir de la banque les dossiers financiers constitués à l'époque du prêt initial, la CRCA de CHAMPAGNE BOURGOGNE exposant qu'elle ne les avait plus à sa disposition, en raison du temps écoulé ;
Que les conseils de Me X... et de la société BOTTA ont objecté que la CRCA de l'Aube et de la Haute Marne avait nécessairement constitué un dossier complet compte tenu de l'importance de l'opération, et que dans une espèce comparable ayant opposé le même établissement de crédit au groupe
Z...
et les 70 SC1 le composant, soit pratiquement les mêmes parties, les dossiers de financement avalent été régulièrement produits à l'expert alors désigné, Monsieur A... ;
Que la CRCA réplique que l'expertise avait été ordonnée courant 1995 soit très peu de temps après l'octroi des crédits litigieux (1992/1993) ce qui explique qu'elle était encore en possession de ces documents ;
Attendu que pour palier le défaut de production, la société BOTTA e mandaté un expert amiable Monsieur B... avec mission de prendre connaissance du rapport établi par Monsieur A..., dont il résulte que, dans le cadre de cette autre opération, la CRCAM de l'Aube et de la Haute-Marne avait effectivement constitué un dossier complet par SCI, intégrant tous les documents du client par programme, c'est à dire acte d'achat du foncier, autorisations administratives diverses, coût du portage, tableau de trésorerie, tableau d'amortissement, tous éléments permettant une analyse financière SCI par SCI ;
Qu'à juste titre l'expert Y..., auquel ont été soumis les travaux de Monsieur B... et ses conclusions, comme les éléments tirés du rapport A..., note que s'agissant d'un litige différent, dont il n'est pas saisi, il ne peut en tirer aucune conclusion ni extrapoler relativement aux dossiers afférents aux crédits objet du présent litige ; Attendu en l'espèce que la lettre d'intention du 11 décembre 1989 adressée par Monsieur C..., responsable de l'unité engagement des entreprises du Crédit Agricole, à Messieurs D... et Z..., est ainsi libellée : 'je vous confirme l'accord par la CRCAM de l'Aube et de la Haute Marne d'un prêt global de 30 000 000 francs d'une durée maximum de 6 mois à répartir en fonction des besoins de trésorerie de décembre 1989 à couvrir sur la SCI L'OLIVIER, LA FLAMME, LA PAIX, L'OLYMPE. Nous vous demandons donc par courrier de nous communiquer la répartition (...)" ; Que ce prêt a été réparti à raison de 7 500 000 francs pour chaque SCI ;
Que les 4 actes notariés ont été signés individuellement le 22 8 décembre 1989 pour la construction de bâtiments distincts, individualisables ;
Que si l'opération a pour partie permis de couvrir un financement avancé par la SEP SAINT ISIDORE, à bon droit le tribunal a considéré qu'il convenait d'analyser l'économie de l'opération SCI par SCI, lesquelles ont connu un destin différent ;
Or attendu que trois des crédits initiaux ont été remboursés par les sociétés emprunteuses, à savoir LA FLAMME L'OLYMPE et L'OLIVIER, après vente de leurs immeubles respectifs, sans qu'il soit démontré par les appelants ni retenu par l'expert Y..., qui considère peu probante à cet égard l'argumentation développée par Monsieur B... sur la base de documents insuffisants, que les charges financières engendrées par les dite crédits auraient été ruineuses ;
Que Monsieur Y... invite à la prudence quant à l'analyse des causes du déficit engendré par les opérations immobilières une fois réalisées les ventes des immeubles ;
Qu'il rappelle à cet égard qu'il était commun, à l'époque., que les opérations de promotion Immobilières fussent entièrement financées par les banques et qu'il considère qu'en l'espèce, au 22 décembre 1889, la situation des quatre sociétés n'était pas compromise dans la mesure où les ventes sont intervenues dans le courant de l'année suivante, et que seules ces ventes ont permis d'extérioriser des pertes à terminaison ;
Qu'il doit être relevé ensuite comme le souligne la CRCAM de CHAMPAGNE BOURGOGNE, que les prévisions du bureau d'études prévisionnelles affichaient un coût de travaux de 15 387 662 francs lors de la conclusion du marché de travaux avec la société BOTTA, le 6 mars 1989, alors que l'addition de la créance déclarée par cette société, soit 13 402 839 francs et de ce qu'elle e Incontestablement perçu, à savoir 19 779 442 francs permet de conclure que le marché a finalement coûté 33 182 281 francs, représentant plus du double des prévisions ;
Qu'il faut intégrer en conséquence dans l'analyse des causes du caractère peu rentable des opérations menées à terme, que le prix de revient du m2 bâti est ainsi passé de 2 230 francs, base sur laquelle étaient assises les prévisions et octroyé le financement, à 4 809 francs ;
Que pertinemment la CRCAM fait valoir que pour le chantier SOFIEM, objet du litige ayant vu l'intervention de l'expert A... auquel Me X... se réfère volontiers dans ses écritures, le prix de revient de l'opération en cause a été chiffré à une somme située entre 3 000 francs et 3 500 francs au m2, intégrant non seulement le coût de la construction elle-même, mais également le fonder, les frais de fonctionnement, les honoraires divers, ce qui tendrait à démontrer le caractère anormalement élevé de celui afférent à l'opération objet du présent litige ;
Attendu que Monsieur Y..., bien que n'ayant pas eu en main fous les éléments du dossier initial de financement, a pu noter que pour L'OLYMPE, l'état des charges financières au regard du coût de la construction s'élevait à 4,16% après constat d'agios à concurrence de 740744,37 francs et de produits financiers s'élevant à 142 875 francs qu'il a précisé ensuite que la documentation produite pour la société LA FLAMME ne permettait pas d'identifier les frais financiers, tandis que le calcul opéré pour la SARL L'OLIVIER ne démontrait pas un prix excessif, les frais s'élevant à 7,08% du montant de la construction pour un financement intégrai de l'opération ; que l'expert ne retient pas le calcul proposé pour la SARL LA PAIX dès lors qu'il Intervient 4 ans postérieurement au crédit alors que l'économie initiale de l'opération prenait en considération une réalisation rapide du bien construit, ce qui ne fut pas le cas ; qu'en effet il a rappelé à juste titre que le coût d'un portage de l'immeuble postérieurement au délai initial prévu pour la vente ne peut être intégré dans l'analyse du caractère excessif du taux pratiqué ;
Attendu qu'il résulte encore du dossier que le taux de base bancaire â l'époque était de 11% soit une marge de 1,90% intégrant une prime de risque de 1,70% ;
Que le marché immobilier était encore sain ;
Attendu pour conclure que Me X... ne peut s'abriter derrière la vente déficitaire des biens pour Induire l'existence d'un financement ruineux, sans prouver que la valeur des immeubles avait été largement surévaluée lors de la présentation des comptes provisionnels par référence au marché existant au 22 décembre 1989, ce qui n'est même pas allégué en l'espèce ;
Qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, il ne peut être prétendu que ces crédits étaient abusifs ;
Que l'appréciation que la connaissance qu'avait la banque du caractère irrémédiablement compromis des sociétés et du groupe doit s'apprécier à la date de l'octroi du concours financier, soit le 22 décembre 1989 ;
Qu'il n'est nullement justifié du caractère Irréaliste des prévisions initiales, les difficultés rencontrées par les SCI n'étant apparues qu'à la clôture des comptes à la fin de l'année 1990, postérieurement à la vente de trois des quatre ensembles immobiliers ;
Qu'il s'est avéré en effet après réalisation des dites ventes que la société L'OLIVIER accusait un passif de 7 624 280 francs pour un actif disponible de 653 671 francs, L'OLYMPE, un passif de 4 036 719 francs pour un actif de 3 507 388 francs, et L A FLAMME, un passif de 3 634 016 francs pour un actif de 1 936 118 francs ;
Que la preuve de la situation irrémédiablement compromise de la société LA PAIX à la date d'octroi du prêt initial n'est pas davantage rapportée, les prévisions, s'agissant d'une opération similaire à celle menée par les trois autres sociétés, étant fondées sur les mêmes données du moment ;
2. Sur le maintien abusif de crédit à la société LA PAIX
Attendu que Me X... ès qualités fait essentiellement grief à la CRCA de l'Aube et de la Haute Marne de ne pas avoir dénoncé son concours financier accordé à LA PAIX et d'avoir même renouvelé à deux reprises, en janvier puis en mai 1992, augmenté le montant de son crédit, passé respectivement à 9 000 000 francs puis 9 400 000 francs ;
Attendu qu'il est constant que la société LA PAIX est la seule à ne pas être parvenue à céder son immeuble, et à désintéresser la banque dans le délai imparti ;
Qu'il résulte des éléments du dossier que le chantier a connu des vicissitudes tenant pour une large part au litige ayant opposé la société LA PAIX aux propriétaires du terrain sur lequel le chantier avait débuté, las consorts E...
F... qui ont engagé une procédure tendant à ta résiliation du bail à construction de 60 ans consenti en 1988 ;
Qu'il ne peut dans ce contexte être reproché à la banque de ne pas avoir dénoncé son concours dès l'échéance initialement prévue de juin 1990, alors même que les trois autres sociétés, à cette date, étaient en passe de vendre leurs biens immobiliers respectifs, que les produits de ces ventes n'étaient pas encore connus, et qu'il importait de poursuivre la construction de l'immeuble dont la société LA PAIX avait la charge, rien ne permettant de penser qu'elle serait â terme déficitaire ;
Qu'assurément, sans le maintien de ce concours, l'immeuble n'avait aucune chance d'être terminé et encore moins vendu, mettant en difficulté outre la banque elle-même, l'ensemble des créanciers de a société Attendu que les immeubles des sociétés LA FLAMME L'OLYMPE et L'OLIVIER, cédés courant 1990 l'ont finalement été au prix de 8 000 francs le m2, dont il n'est pas démontré qu'il était Inférieur à celui du marché de l'époque, ni, surtout, incompatible avec le prix de revient initialement arrêté ;
Attendu que le bilan établi pour l'exercice clos au 31 décembre 1991, soit avant l'augmentation de crédit consentie par la CRCAM fait apparaître un actif disponible de 14 963 995 francs, "dont encours de production" de 12 944 321 francs, pour un passif total de 14 913 995francs ; que cet "encours de production "correspond en fait à la valeur comptable de l'immeuble à vendre ; que sur la base du prix de vente au m2 des opérations d'ores et déjà réalisées courant 1990, l'immeuble édifié par la SCI LA PAIX avait une valeur de 12 688 000 francs, légèrement inférieure à celle Inscrite au bilan, aboutissant à un léger déséquilibre des comptes ;
Qu'à supposer même que la banque ait ignoré les conditions financières dans lesquelles les premières ventes avaient été réalisées, ce qui parait peu vraisemblable eu égard aux liens unissant les quatre sociétés et au fait qu'elle avait financé les opérations et été réglée de ses propres créances au moyen du fruit de ces ventes, et en retenant l'estimation proposée alors, le souci du maintien d'un bilan en équilibre interdisait toute augmentation de la dette ;
Que, surtout, la banque aurait dû se méfier du dit bilan, qu'elle s'était nécessairement fait communiquer avant de prendre la décision d'augmenter son concours financier, sauf à avoir fait preuve d'une légèreté blâmable s'agissant d'une opération de grande ampleur dont elle suivait depuis le début les évolutions ;
Qu'en effet, la crise de l'immobilier dont les premiers effets se faisaient déjà nettement sentir, aux dires de Monsieur Y... comme de l'expert A... dont les travaux, dans le cadre d'un autre litige, ont été régulièrement produits et débattus par les parties, devait inciter la CRCAM à reconsidérer le montant escompté du produit de la vente à venir dans ce contexte obéré par rapport à celui qui existait encore lors de vente des trois premiers immeubles, en 1990 ; qu'ainsi l'estimation portée au bilan sous la rubrique "encours de production" était manifestement devenue irréaliste, pour un passif qui lui, demeurait constant ;
Qu'en acceptant dans ces conditions d'augmenter le capital emprunté, elle a pris le risque que la vente future ne permette pas un remboursement de l'ensemble des fournisseurs,
Attendu qu'il s'ensuit qu'à bon droit le tribunal a estimé que la CRCAM de l'Aube et de la Haute Marne avait commis une faute en renouvelant son concours à une opération qu'elfe savait alors vouée à l'échec, et en maintenant par là même la fiction de la solvabilité de la société ;
3- Sur le dommage et le lien de causalité
Attendu que si l'expert a précisé que la comptabilité de la SARL LA PAIX incluait des créances dues par les autres sociétés, il n'en demeure pas moins que la faute ayant consisté à proroger l'apparence de solvabilité de LA PAIX n'a pu être le fait générateur des dites créances, apparues antérieurement et pour lesquelles aucun actif rte répondait plus dès la réalisation de la vente à perte des Immeubles construits ;
Qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Me X... n'apporte aucun élément de preuve de la création d'un passif pour les trois autres SARL postérieurement à la vente, qui serait en lien avec l'apparence de solvabilité de la société LA PAIX; que pourtant ses demande indemnitaire correspond au montant du passif social de ces trois sociétés pouf une part et doit à ce titre être rejetée ;
Attendu ensuite que la demande relative au passif de la SARL LA PAIX elle-même ne peut par ailleurs consister dans la totalité du passif déclaré, si l'on se souvient que l'octroi Initial de 7 500 000F n'est pas fautif, mais dans la seule aggravation éventuelle
Que le passif déclaré est en lien avec l'octroi de ce crédit initial puisque l'opération réalisée s'est finalement révélée infructueuse ;Que l'analyse des comptes pour 1991 et 1992 démontre un maintien des dettes fournisseurs, une baisse relative des dettes fiscales et un accroissement des dettes financières équivalent au montant prêté ainsi que du poste "autres dettes" ;
Que les bilans postérieurs ne permettent pas de déterminer si la structure) de l'endettement de LA PAIX a évolué du fait de l'accroissement des dettes en capital consécutives aux avenants au prêt ou simplement du fait des seuls Intérêts échus, notamment à ceux décomptés par la société BOTTA ET FILS, élevés à 43037912F pour 1993 / 1994 ;
Que le maintien du crédit et l'augmentation du capital emprunté, même sils n'ont pas permis le rétablissement de la situation de la société LA PAIX et se sont avérés hasardeux au regard de cette situation, ont néanmoins permis la poursuite de la construction de l'immeuble, Maître G..., notaire en résidence à NICE, relevant dans son constat dressé le 28 avril 1994 que le bâtiment est "à l'état brut' et que ne manquent que les finitions ;
Or attendu que Me X... ne donne pas d'élément d'évaluation de l'immeuble dans l'état où il se trouvait au jour du renouvellement du crédit, de sorte qu'il est impossible de vérifier si la créance privilégiée de la CRCAM à l'encontre de la SARL LA PAIX n'aurait pas d'ores et déjà absorbé l'intégralité du prix que la liquidation aurait permis d'obtenir au détriment des autres créanciers ;
Qu'il s'ensuit que la preuve d'un préjudice en lien direct et certain avec la faute n'est pas rapportée, le jugement entrepris devant être confirmé de ce chef » ;
Alors, d'une part, que Me X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la banque avait commis une faute en ne dénonçant pas le crédit à court terme dès le 14 juin 1990, ce qui avait contribué, dès cette date, à créer une solvabilité apparente et à une aggravation du passif des SARL LA FLAMME, LA PAIX, L'OLYMPE et L'OLIVIER ; qu'en se bornant à examiner, pour estimer qu'il n'existait pas de lien de causalité entre la faute de la banque et le passif des sociétés soumises à une procédure collective, le renouvellement du concours financier à la société LA PAIX par acte des 14 janvier 1992 et 29 mai 1992, sans apprécier, comme le moyen l'y invitait, l'incidence de la faute de la banque, dans le maintien du crédit dès le 14 juin 1990, sur le passif des sociétés soumises ultérieurement à une procédure collective, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, d'autre part, que Me X... établissait dans ses conclusions en cause d'appel l'existence de liens financiers entre la société LA PAIX, dont le crédit avait été renouvelé par la Banque, et les autres sociétés, afin de montrer qu'en soutenant abusivement la société LA PAIX, la Banque avait mécaniquement soutenu les trois autres sociétés du groupe ; qu'en estimant que le lien de causalité entre la faute de la banque s'agissant de la société LA PAIX et les autres sociétés du groupe n'était pas établi, sans répondre aux conclusions péremptoires de l'exposant sur l'existence de virements entre lesdites sociétés, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors qu'enfin Me X... montrait dans ses écritures d'appel que s'agissant de la société LA PAIX, le renouvellement du crédit initial de 7.500.000 Francs et l'absence de poursuites entreprises pour en obtenir le paiement avaient contribué à porter la dette d'emprunt à la somme de 15.005.365,50 Francs ; qu'en estimant qu'il n'y avait pas de lien de causalité entre la faute de la banque pour le renouvellement du crédit et le préjudice de la société LA PAIX, sans répondre aux conclusions pertinentes de l'exposant sur l'aggravation quantitative du passif, la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-21971
Date de la décision : 08/11/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 25 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 nov. 2011, pourvoi n°10-21971


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.21971
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