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15/12/2010 | FRANCE | N°08-42290

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 décembre 2010, 08-42290


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 19 mars 2008) que Mme X... a été engagée en qualité de femme de ménage à temps plein à compter du 18 septembre 1989 par l'association la Résidence la Houille blanche de l'Ingp qui gère des logements étudiants ; qu'elle a été élue déléguée du personnel suppléante en 1999 et a démissionné de ces fonctions le 3 mars 2003, après un arrêt maladie d'octobre 2002 à janvier 2003 ; que se plaignant de l'impossibilité de prendre un solde de congés payés, de harcè

lement moral et sollicitant l'annulation d'un avertissement délivré le 9 juillet 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 19 mars 2008) que Mme X... a été engagée en qualité de femme de ménage à temps plein à compter du 18 septembre 1989 par l'association la Résidence la Houille blanche de l'Ingp qui gère des logements étudiants ; qu'elle a été élue déléguée du personnel suppléante en 1999 et a démissionné de ces fonctions le 3 mars 2003, après un arrêt maladie d'octobre 2002 à janvier 2003 ; que se plaignant de l'impossibilité de prendre un solde de congés payés, de harcèlement moral et sollicitant l'annulation d'un avertissement délivré le 9 juillet 2004, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à Mme X... une certaine somme au titre de compensation des congés payés non pris outre une somme à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait du non paiement des congés payés, alors, selon le moyen :
1°/ que seule l'impossibilité de prendre les congés payés du fait d'une décision de l'employeur peut donner lieu à l'allocation d'une indemnité compensatrice de congés payés ; qu'en accueillant la demande d'indemnités de congés payés présentée par Mme X... faute d'une renonciation claire et non équivoque de sa part à ses congés payés pour un motif qui lui aurait été personnel, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-1 du code du travail (anc. L.223-1) ;
2°/ que seule l'impossibilité de prendre les congés payés du fait d'une décision de l'employeur peut donner lieu à l'allocation d'une indemnité compensatrice de congés payés ; que la cour d'appel a expressément relevé qu'en dépit de l'erreur de calcul du droit à congés payés de Mme X... commise par l'employeur deux mois auparavant et reconnue par lui, l'association la Résidence la Houille blanche avait expressément autorisé la salariée à s'absenter du 28 avril au 3 mai 2004, afin d'épuiser son droit à congés payés ; que ces constatations excluaient nécessairement que l'employeur ait mis Mme X... dans l'impossibilité de prendre ses congés payés ; qu'en concluant néanmoins à l'existence d'une impossibilité pour Mme X... de prendre ses congés payés du fait de l'employeur, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, en méconnaissance des articles L. 3141-1 et suivants du code du travail (anc. L. 223-1) ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent allouer au salarié des dommages-intérêts, en sus d'une indemnité visant à compenser des congés payés non pris, qu'à la condition de caractériser un préjudice distinct de celui inhérent à l'impossibilité de prendre l'intégralité de ses congés payés du fait de son employeur ; qu'en allouant à la salariée la somme de 332,34 euros à titre de « compensation financière de ces jours de congés payés perdus», outre la somme de 1 500 euros à titre de compensation du « préjudice distinct consécutif au non-respect par l'employeur de ses obligations en matière d'attribution des congés payés », sans préciser la nature des deux préjudices distincts que la salariée aurait subis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, ensemble l'article L.3141-1 du code du travail (anc. L.223-1) ;
Mais attendu qu'ayant relevé que, quoiqu'autorisée à s'absenter du 28 avril au 3 mai 2004, Mme X... s'était trouvée dans l'impossibilité de prendre le solde de six jours de congés payés non pas en raison d'une renonciation claire et non équivoque pour un motif personnel, mais pour un motif exclusivement imputable à l'employeur qui avait manifesté deux mois auparavant un refus injustifié de lui laisser prendre ses congés et avait opéré une retenue sur son salaire, ayant pour effet que la salariée pouvait légitimement craindre s'exposer à des déboires identiques si elle prenait effectivement ses congés, la cour d'appel a caractérisé l'imputabilité à l'employeur de l'impossibilité de prendre les congés et le préjudice qui en résultait nécessairement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association la Résidence la Houille blanche de l'Inpg aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile, 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de l'association la Résidence la Houille blanche de l'Inpg et condamne cette dernière à payer à la SCP Bouzidi et Bouhanna la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux conseils pour l'association la Résidence la Houille blanche de l'Inpg
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association la Résidence La Houille Blanche à payer à Madame X... la somme de 332,34 € à titre de compensation financière pour les six jours de congés payés non pris, outre la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non-paiement des congés payés ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE :
« Attendu que l'association n'a pas relevé appel de sa condamnation au paiement de la somme de 166,17 € au titre des trois jours de ‘congés sans solde' (12, 13 et 14 février 2004), jugés comme retenus à tort sur le salaire de Christiane X... pour ce même mois de février 2004 et qui constituaient une partie des 36 jours de congés payés qu'elle avait régulièrement acquis au cours de la période de référence du 1er juin 2002 au 31 mai 2003, dont le reliquat en janvier 2004 s'élevait à 13 jours et que la salariée avait demandé à prendre au cours de la période du 9 au 14 février 2004 ;
Attendu que l'employeur avait contesté de manière persistante, ainsi que l'avait relevé le Tribunal Correctionnel de Grenoble dans son jugement du 2 février 2005, le calcul de ce reliquat de congés payés ; que ce n'était que devant le Conseil de prud'hommes que l'association avait reconnu ‘avoir commis une erreur dans le calcul' ;
Que le calcul de l'employeur a été considéré, par décisions devenues maintenant définitives, dépourvu de fondement ;
Attendu que dans ce contexte, la salariée s'était effectivement trouvée placée dans l'impossibilité de liquider le solde de six jours de congés payés afférents à la même période, pour lesquels elle avait certes été autorisée à s'absenter du 28 avril au 3 mai 2004, mais qu'elle n'avait finalement pas pris non pas en raison d'une renonciation claire et non équivoque pour un motif personnel, mais pour un motif exclusivement imputable à l'employeur ;
Qu'en effet, celui-ci ayant manifesté, deux mois auparavant, un refus injustifié de lui laisser prendre une partie de ses congés payés acquis au cours de la même période de référence et ayant opéré en conséquence une retenue sur salaire, ce qui avait un effet sérieusement dissuasif, la salariée pouvait légitimement craindre s'exposer à des déboires identiques si elle prenait effectivement ses congés ;
Que les dispositions du jugement déféré, relatives à la compensation financière de ces jours de congés payés perdus, seront confirmées, de même que celles relatives aux dommages et intérêts destinés à compenser le préjudice distinct consécutif au non-respect par l'employeur de ses obligations en matière d'attribution des congés payés, demande de dommages et intérêts que la salariée maintient devant la Cour. »
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE :
« L'article L.223-11 du Code du travail dispose : ‘L'indemnité afférente au congé prévu par l'article L. 223-2 est égale au dixième de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence ... .Toutefois, l'indemnité prévue par les deux alinéas précédents ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler'.
En conséquence, Madame Christiane X... a droit à six jours de congés payés.
L'association Résidence La Houille Blanche de l'INPG l'a d'ailleurs reconnu.
Sur le fait que Madame Christiane X... a renoncé à prendre ses congés en ne formulant pas de demande de report avant le 31 mai 2004 et que l'article L.223-31 du Code du travail prévoit que les congés payés non pris pendant la période de référence sont perdus :
Attendu que :
- Madame Christiane X..., aidée par Monsieur Y..., délégué syndical de la CGT, a fait valoir ses droits auprès de Monsieur Z... et n'a pas obtenu satisfaction,- A la date de la reprise de ses congés du 28 avril au 3 mai 2004, l'association Résidence La Houille Blanche de l'INPG n'avait pas payé les congés de Madame X... de février 2004 malgré les courriers de l'Inspection du travail des 3 février 2004 et 5 avril 2004, son employeur l'a mise dans l'impossibilité de les prendre par crainte pour Madame Christiane X... d'avoir à subir une nouvelle retenue sur son salaire en l'absence de régularisation de la retenue antérieure.
En conséquence, le Conseil dira que Madame Christiane X... a été empêchée de prendre ses congés du fait de son employeur et le préjudice nécessaire qui en résulte doit être indemnisé ; que l'association Résidence La Houille Blanche de l'INPG doit 9 jours à Madame X..., à savoir :
Salaire horaire : 7,913 € ; 7 heures par jour, soit 7 x 7,913 = 55,39 € / jour ; 6 x 55,39 = 332,34 € nets à titre de dommages et intérêts, outre 3 x 55,39 = 166,17 € bruts à titre de 3 jours de rappel de salaire ;
Etant précisé que le Conseil assortit cette dernière condamnation (166,17 €) d'une astreinte journalière de 50 €, passé un délai de huit jours suivant la notification de la présente décision.».
1. ALORS QUE seule l'impossibilité de prendre les congés payés du fait d'une décision de l'employeur peut donner lieu à l'allocation d'une indemnité compensatrice de congés payés ; qu'en accueillant la demande d'indemnités de congés payés présentée par Madame X... faute d'une renonciation claire et non équivoque de sa part à ses congés payés pour un motif qui lui aurait été personnel, la Cour d'appel a violé les articles L.3141-1 du Code du travail (anc. L.223-1).
2. ALORS en outre QUE seule l'impossibilité de prendre les congés payés du fait d'une décision de l'employeur peut donner lieu à l'allocation d'une indemnité compensatrice de congés payés ; que la Cour d'appel a expressément relevé qu'en dépit de l'erreur de calcul du droit à congés payés de Madame X... commise par l'employeur deux mois auparavant et reconnue par lui, l'Association la Résidence La Houille Blanche avait expressément autorisé la salariée à s'absenter du 28 avril au 3 mai 2004, afin d'épuiser son droit à congés payés ; que ces constatations excluaient nécessairement que l'employeur ait mis Madame X... dans l'impossibilité de prendre ses congés payés ; qu'en concluant néanmoins à l'existence d'une impossibilité pour Madame X... de prendre ses congés payés du fait de l'employeur, la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, en méconnaissance des articles L.3141-1 et suivants du Code du travail (anc. L.223-1).
3. ALORS enfin QUE les juges du fond ne peuvent allouer au salarié des dommages et intérêts, en sus d'une indemnité visant à compenser des congés payés non pris, qu'à la condition de caractériser un préjudice distinct de celui inhérent à l'impossibilité de prendre l'intégralité de ses congés payés du fait de son employeur ; qu'en allouant à la salariée la somme de 332,34 € à titre de « compensation financière de ces jours de congés payés perdus », outre la somme de 1.500 € à titre de compensation du « préjudice distinct consécutif au non-respect par l'employeur de ses obligations en matière d'attribution des congés payés », sans préciser la nature des deux préjudices distincts que la salariée aurait subis, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du Code civil, ensemble l'article L.3141-1 du Code du travail (anc. L.223-1).
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé infondé l'avertissement du 9 juillet 2004 et d'AVOIR en conséquence prononcé son annulation ;
AUX MOTIFS QUE :
« Attendu que le président de l'association Yonnel Z... a reproché à Christiane X..., le 9 juillet 2004, d'avoir refusé de nettoyer un volet sur la demande de la responsable du service de nettoyage, laquelle avait dû suppléer sa carence, selon l'employeur, qui lui a aussi reproché d'avoir indiqué qu'elle n'était pas satisfaite d'une augmentation conventionnelle et qu'elle en ferait le moins possible ;
Que dès le 15 juillet 2004, la salariée a contesté avoir fait l'objet, le jour en cause, d'une critique verbale de sa supérieure, qui lui avait seulement indiqué, selon elle, qu'un volet d'une des chambres était sale et qui l'avait nettoyé ; qu'elle a fait observer que ce nettoyage était difficile, la fenêtre ne s'ouvrant pas complètement ;
Attendu que sa supérieure, la coordinatrice d'entretien Malika A..., entendue par les conseillers rapporteurs le 22 novembre 2005 à propos du nettoyage de ce volet a maintenu que ‘Madame X... fait mal son travail. Je l'ai appelée pour qu'elle nettoie le volet, je lui ai montré qu'il pouvait être fait, le volet était crade' ;
Mais attendu que le rapport de son audition rédigé par les conseillers ne fait pas apparaître que Malika A... avait fait état d'un refus ou d'un acte d'insubordination commis par Christiane X... ;
Que cette responsable avait également indiqué que Christiane X... avait seize chambres à nettoyer dans la journée ;
Attendu qu'au regard de cette charge de travail, l'absence de nettoyage d'un volet ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de sanction ;
Attendu que Malika A..., qui avait été promue coordinatrice d'entretien en septembre 2002 et qui comptait donc Christiane X... depuis cette date dans son effectif de vingt-deux femmes de ménage, n'apparaît pas avoir signalé à son propre supérieur, avant les faits contestés, un manquement quelconque de l'intéressée, même si elle avait déclaré lors de son audition qu'il fallait toujours lui faire des remarques sans citer à ce propos de faits circonstanciés ;
Attendu que les seuls avertissements dont il est fait état par l'employeur remontent à octobre 1994 et février 1998, soit 10 et 6 ans avant l'incident ;
Attendu que l'employeur ne justifie pas de plaintes de résidants ou d'occupants des chambres dont l'entretien était confié à Christiane X..., sur la qualité de son travail ;
qu'interrogée sur d'éventuelles plaintes d'étudiants, Madame A... avait répondu qu'elle n'en savait rien ;
Que la réalité du prétendu refus et des griefs visés à l'avertissement n'est pas suffisamment caractérisée ».
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE :
« L'article L.122-43 du Code du travail énonce : ‘En cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur doit fournir au conseil de prud'hommes les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui peuvent être fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise'.
Attendu que lors de l'audition de Madame A... par les conseillers rapporteurs le 22 novembre 2005, cette dernière a précisé : ‘Je maintiens que Madame X... fait mal son travail. Je l'ai appelée pour qu'elle nettoie le volet, lui ai montré qu'il pouvait être fait. Le volet était crade' ;
Attendu que :
- Madame A... ne parle pas du refus de Madame X...,- Madame X... est bien venue voir comment nettoyer le volet, ne manifestant pas ainsi de l'insubordination,- en l'absence de preuve sur le refus de Madame Christiane X... de nettoyer ce volet, le Conseil ordonnera l'annulation de l'avertissement ».
1. ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que la supérieure hiérarchique de Madame X..., Madame Malika A..., n'aurait pas fait état du refus de la salariée d'accomplir la tâche qui lui incombait ou de son insubordination lors de son audition devant les conseillers rapporteurs, le 22 novembre 2005, sans aucunement examiner l'ensemble des autres éléments de preuve apportés aux débats, et notamment la lettre de Madame X... envoyée à son employeur le 15 juillet 2004 à la suite de la notification de son avertissement - dont il résultait un refus de la salariée ou, à tout le moins, une abstention délibérée d'accomplir les tâches qui lui incombaient constitutive d'insubordination -, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
2. ALORS encore QUE la Cour d'appel a exclu le caractère fautif de l'absence d'exécution par la salariée de la tâche qui lui était demandée au motif qu'elle avait une lourde charge de travail le jour où elle avait commis l'acte litigieux, sans aucunement répondre aux conclusions de l'employeur, pourtant déterminantes, par lesquelles il faisait valoir que « les agents d'entretien n'ont pas à nettoyer les volets tous les jours mais seulement une fois par an ... au départ définitif de chaque résidant ; le 9 juillet 2004, Madame X... avait la charge de 16 chambres, soit 8 le matin et 8 l'après-midi ; sur ces 16 chambres, seulement une était entièrement vide suite au départ d'un résidant et devait donc être totalement nettoyée, volet y compris » (conclusions d'appel, page 7 in fine et page 8) ; qu'ainsi, la Cour d'appel a encore méconnu les obligations qui lui incombent en application de l'article 455 du Code de procédure civile.
3. ALORS enfin QUE la commission d'un acte fautif isolé peut justifier le prononcé de sanctions disciplinaires ; que pour exclure l'existence d'une faute de la part de Madame X..., susceptible de justifier l'avertissement qui lui avait été infligé, la Cour d'appel s'est déterminée par la circonstance inopérante tirée de l'absence de faits de même nature pouvant être reprochés à Madame X... dans un temps proche de celui ayant donné lieu à l'avertissement ; qu'en se déterminant de la sorte, la Cour d'appel a méconnu l'article L.1331-1 du Code du travail (anc. L.122-40).
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que les faits imputés par Madame X... à son employeur étaient constitutifs de harcèlement moral et d'AVOIR en conséquence condamné l'Association la Résidence La Houille Blanche de l'INPG à verser à la salariée la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice consécutif aux agissements de harcèlement moral imputable à l'employeur ;
AUX MOTIFS QUE :
« Attendu que Madame X... a été élue déléguée du personnel suppléant en octobre 1999 puis en 2001 ; qu'au cours de ce second mandat, elle a été amenée à remplacer l'une des deux titulaires, Madame B..., qui avait démissionné en octobre 2001 et elle s'est finalement retrouvée seule déléguée du personnel en raison de la maladie de l'autre titulaire, Monsieur C... et de la démission de l'autre suppléante, Madame D... également en octobre 2001 ;
Attendu que l'employeur lui a proposé, le 17 mars 2002 de régulariser un contrat de travail écrit prévoyant une prime d'expérience et une prime d'assiduité mais prévoyant aussi une réduction de son coefficient de rémunération, à savoir la catégorie 1 c..fficient 261 alors qu'elle était classée au coefficient 273 sur ses bulletins de salaire ;
Qu'aucune explication objective n'a été fournie à propos de ce qui s'analysait effectivement comme une rétrogradation ;
Que Christiane X... a refusé, à raison, de signer ce projet et qu'au lieu de lui indiquer qu'il s'agissait d'une erreur, l'employeur lui a fait sèchement savoir par lettre recommandée du 21 mai 2002 qu'il retirait en conséquence sa proposition de versement des primes ;
Que ce n'est que le 3 juin 2002 qu'un contrat reprenant son ancien classement indiciaire et comportant les primes a été proposé à Madame X..., qui l'a signé ;
Attendu que c'est à cette même période qu'elle a été convoquée, le 28 mai 2002, à un entretien préalable fixé le 4 juin 2002 en vue d'un avertissement, au motif qu'elle avait été vue le 28 mai 2002 discuter au lieu de travailler, qu'elle n'avait pas porté ses chaussures de sécurité et qu'elle avait été en absence injustifiée les 20 et 27 mai 2002 ;
Que l'employeur n'a prononcé aucune sanction après cet entretien, que la salariée a produit des certificats médicaux contre-indiquant le port de chaussures de sécurité synthétiques et justifiant ses absences pour raisons de santé ;
Attendu que Christiane X... a été placée en arrêt maladie du 29 octobre 2002 au 12 janvier 2003, a repris le 13 janvier 2003 d'abord à mi-temps thérapeutique puis le 1er août 2003 à temps complet ;
Attendu qu'à sa reprise à mi-temps thérapeutique, elle a été affectée à un autre secteur, le F comportant des escaliers et dépourvu d'ascenseur, ce qui l'obligeait à porter son matériel alors que le médecin du travail avait rédigé une fiche d'aptitude avec restriction limitation du port de charges ;
Que le contrôleur du travail a fait observer le 10 mars 2003 à l'employeur qu'il aggravait les conditions de travail de Madame X... et lui a demandé d'étudier ‘une nouvelle fois' l'affectation de Madame X... afin de suivre les recommandations du médecin ;
Attendu que Madame X... s'était pourtant plainte à la directrice de l'association, le 3 mars 2003, de la non-conformité de son affectation aux prescriptions médicales et avait notifié, dans cette même lettre, sa démission de ses fonctions de délégué du personnel, indiquant être ‘victime de diverses pressions qui lui apparaissaient aujourd'hui insoutenables' et en faisant état aussi de son ‘interpellation' dans le conflit qui opposait le délégué du personnel C... à la direction ;
Que ce n'est que le 14 mars 2003, donc postérieurement à l'intervention de l'inspection du travail, que l'employeur a indiqué à Madame X... qu'il l'affectait à un autre secteur A plus propice à son état de santé ;
Attendu que le 16 janvier 2004, Christiane X... a rédigé une attestation en faveur de son collègue C..., indiquant que les délégués du personnel étaient sans arrêt sous pression, qu'il recevait des courriers agressifs de la direction, que lors d'une réunion du personnel le 2 septembre 2002, il avait été traité d'imbécile, qu'avant son départ en congé maladie, il avait été affecté au sous-sol du bâtiment F, que son moral avait fortement baissé jusqu'à son départ ;
Attendu que c'est dans ce contexte que l'employeur a opéré la retenue sur salaire qui s'est avérée injustifiée sur le salaire de Madame X... pour le mois de février 2004, puis la retenue d'une heure en mai 2004 ;
Qu'au cours de son audition déjà citée, Madame A... a déclaré qu'elle avait remarqué que Madame X... n'assurait pas complètement ses heures de travail ; que cependant aucun fait précis n'a été relaté ; que s'agissant de l'heure de retenue le 25 mai 2004, cette responsable avait indiqué lors de cette même audition qu'il était possible qu'elle ait donné son accord à Madame X... pour quitter son poste ;
Attendu que par avenant du 20 février 2003 étendu le 3 octobre 2003, le coefficient de rémunération conventionnel de 273 a été remplacé par le coefficient 276 ;
Mais que ce n'est qu'avec le salaire versé le 31 juillet 2004 que l'employeur en a tenu compte pour Madame X... ; qu'il lui a versé à cette date une régularisation pour les mois de mai et de juin 2004 ;
Attendu que c'est précisément le 9 juillet 2004 que l'employeur lui a notifié l'avertissement litigieux dans lequel il énonçait que ‘les dispositions conventionnelles nous ont imposé de vous changer d'échelon... ce qui augmente votre salaire de trois points. Vous avez demandé à me rencontrer et vous m'avez indiqué que vous en feriez le moins possible car vous n'étiez pas satisfaite de votre augmentation. Nous vous avons fait part de notre mécontentement sur la piètre qualité de votre activité' ;
Attendu que dans une lettre du 12 juillet 2004, le conseil de Christiane X... faisait remarquer à l'employeur qu'il lui avait attribué le coefficient 276 alors que ses collègues de travail s'étaient vus attribuer le coefficient 279 ;
Que dans sa lettre du 15 juillet 2004 portant contestation de l'avertissement, la salariée faisait également observer qu'elle avait refusé de signer un avenant lui attribuant un coefficient inférieur à celui de collègues moins anciennes et que ses fiches de paie de mai et juin 2004 ne comportaient pas l'augmentation due ;
Que dans ses réponses des 16 et 19 juillet 2004, l'employeur n'avait pas contesté la matérialité de cette différence d'attribution de coefficients de rémunération, mais avait expliqué que l'augmentation s'effectuait au mérite, qu'il s'en était tenu à la stricte application de la convention collective, pour cette salariée, en raison d'une ‘forte dégradation de la qualité de son travail' et de son ‘refus d'effectuer des tâches indispensables' ;
Attendu cependant que l'employeur ne justifie pas d'éléments objectifs propres à légitimer cette différence de traitement et ne démontre pas qu'elle aurait démérité ;
Attendu que l'employeur fait état dans son dossier de 117 jours d'absence en 2002, 15 jours d'absence en 2003 et 145 jours d'absence en 2004 mais que Christiane X... était malade et qu'il n'apparaît pas que ces absences aient été injustifiées ;
Attendu que les preuves d'une dégradation de la qualité de son travail, de la commission de manquements, en tout cas récents, de non-respect de ses horaires de travail, d'une propension de Christiane X... à arrêter son travail quand bon lui semble, d'un refus d'effectuer des tâches indispensables, invoquées par l'association, sont absentes du dossier produit par elle ;
Attendu que Christiane X... n'a plus repris son travail pour raison de santé en octobre 2004 ;
Que certes, il résulte des éléments du dossier qu'elle souffrait de problèmes de santé d'ordre physiologique mais qu'elle justifie avoir été suivie tous les quinze jours par un psychiatre depuis septembre 2005 ;
Que sa fiche d'aptitude rédigée par le Médecin du travail le 19 juin 2007 fait état d'une aptitude éventuelle à un poste à charge physique faible et ‘à charge mentale modérée' ;
Attendu que chaque incident pris isolément revêt une apparence plutôt bénigne, mais que :
- remis dans leur ordre chronologique, à la lumière des observations, en fin de compte légitimes, que la salariée avait été contrainte d'adresser de manière réitérée à sa direction à propos de ses conditions d'emploi,- mis en regard des fonctions de délégué du personnel que la salariée avait exercées de manière effective pendant une partie de la période en litige, Ils dévoilent leur véritable caractère de brimades répétitives ;
Qu'en réalité, Christiane X... justifie avoir été victime d'agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ;
Que, fragilisée par la maladie, elle a subi une sanction et une menace de sanction injustifiées, des tracasseries non fondées, des retards et même une discrimination en matière salariale et en matière d'attribution de ses congés payés, elle a vu ses conditions de travail s'aggraver lors de sa reprise à mi-temps thérapeutique, elle a dû insister ou faire intervenir l'inspection du travail pour obtenir satisfaction sur ses légitimes revendications face à l'intransigeance opposée par l'association ;
Que même si elle souffrait de troubles physiques antérieurs, ce harcèlement a eu une incidence sur sa santé et a participé à son usure morale ; qu'elle l'a expressément invoqué pour motiver une partie de sa démission de son mandat ;
Attendu que le jugement sera donc infirmé sur cette question et qu'il sera fait droit à la demande indemnitaire, dont le quantum est justifié par la durée des agissements répétés et par l'étendue du préjudice qui en est directement résulté ».
1. ALORS QU' il appartient au salarié qui se prétend victime d'un harcèlement moral d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un tel harcèlement puis à l'employeur de se défendre en apportant la preuve que ces mêmes faits ont une justification objective ; que la Cour d'appel a constaté que la convocation du salarié le 4 juin 2002 à un entretien préalable à une mesure disciplinaire était objectivement justifiée par l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur qui n'avait pas connaissance avant cet entretien des motifs de l'absence de la salariée ni des raisons de son refus de porter les chaussures de sécurité qui s'imposaient ; qu'en estimant que ce fait révélait une situation de harcèlement moral, après avoir pourtant constaté qu'il était justifié par des éléments objectifs, la Cour d'appel a violé les articles L.1154-1 et L.1152-1 (anc. L.122-52 et L.122-49) du Code du travail.
2. ALORS en outre QUE les faits invoqués par le salarié aux fins de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral doivent avoir été dirigés à son encontre et lui avoir été personnellement préjudiciables ; que pour retenir l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel s'est fondée, d'une part, sur la lettre du 3 mars 2003 par laquelle la salariée avait informé son employeur de sa démission de ses fonctions du déléguée de personnel au motif pris de ce qu'elle était sans cesse interpellée par les salariés de l'association sur le conflit opposant la direction à un autre délégué du personnel, Monsieur C..., et, d'autre part, sur l'attestation rédigée par Madame X... le 16 janvier 2004 dans laquelle elle décrivait la situation dont se plaignait Monsieur C... dans le cadre du litige l'opposant à la direction, ces écrits visant chacun une situation à laquelle était totalement étrangère Madame X... ; qu'en se fondant néanmoins sur ces éléments inopérants pour en déduire l'existence de faits de harcèlement moral à l'encontre de Madame X..., la Cour d'appel a violé l'article L.1152-1 (anc. L.122-49) du Code du travail.
3. ALORS enfin QUE dans sa lettre de démission de son mandat de déléguée du personnel du 3 mars 2003, la salariée exposait que sa décision de démissionner de ses fonctions de représentant du personnel s'expliquait par la pression résultant des interpellations incessantes de la part de l'ensemble du personnel sur le conflit opposant l'Association la Résidence la Houille Blanche à Monsieur C..., ce qui l'empêchait de « travailler sereinement » ; qu'en affirmant néanmoins que la salariée aurait expressément invoqué dans sa lettre de démission un harcèlement direct de son employeur sur sa personne en raison de son mandat de déléguée du personnel, la Cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de la lettre de la salariée du 3 mars 2003, en violation de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42290
Date de la décision : 15/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 19 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 déc. 2010, pourvoi n°08-42290


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.42290
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