LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° Q 09-41. 403, n° R 09-41. 404 et n° S 09-41. 405 ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1224-1 du code du travail interprété à la lumière de la directive n° 2001/ 23/ CE du 12 mars 2001, ensemble l'article R. 1455-6 du même code ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, statuant en référé, que la société Houlé restauration (la société) fournissait, depuis 2004, un service de restauration de type traiteur à l'association la Ligue pour l'adaptation du diminué physique au travail (ADAPT) qui avait mis à sa disposition un local et du matériel à cet effet ; que souhaitant former des travailleurs handicapés au métier de la restauration, l'ADAPT a mis fin au contrat la liant à la société ; que Mmes X..., Z... et M. Y..., tous trois salariés de la société, ont alors demandé à la juridiction prud'homale, statuant en référé, de constater le transfert de leurs contrats de travail à l'ADAPT ;
Attendu que pour faire droit à ces demandes les arrêts retiennent que l'ADAPT a repris l'ensemble des moyens matériels nécessaires à l'exploitation du service de restauration, antérieurement assurée par la société et que cette association a poursuivi la même activité de restauration exercée par des salariés spécialement affectés à la confection des repas, sans modification de l'identité de l'entité ainsi transférée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la substitution à la fourniture de plats préparés par un traiteur extérieur d'un service de restauration intérieur assuré par un atelier d'apprentissage professionnel destiné aux travailleurs handicapés et encadrés par des éducateurs spécialisés avait modifié la nature et l'objet de l'entité dont relevait les salariés, ce dont il résulte qu'il n'existait pas de trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 17 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Confirme les ordonnances rendues le 21 octobre 2008 par le conseil de prud'hommes de Rouen ;
Condamne la société Houlé restauration aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen identique produit aux pourvois n° Q 09-41. 403, n° R 09-41. 404 et n° S 09-41. 405 par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux conseils pour l'association La ligue pour l'adaptation du diminué physique au travail,
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'ADAPT à payer à la salariée les salaires et congés payés depuis le 25 août 2008 ;
AUX MOTIFS QUE l'activité a continué à être exercée par l'ADAPT dans les mêmes locaux avec les mêmes moyens et matériel par des salariés spécialement affectés à la confection des repas de l'association ; qu'il en résulte l'existence d'une entité économique autonome dont l'activité a été poursuivie ou reprise avec la même clientèle par l'association ;
ALORS QUE l'article L. 1224-1 du Code du travail s'applique à tout transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que l'ADAPT invitait les juges du fond à vérifier si l'identité de l'activité de restauration avait été maintenue dans la mesure où d'une activité commerciale de restauration assurée par les agents d'un prestataire extérieur, elle est devenue un atelier d'apprentissage au métier de la restauration où travaillent des travailleurs handicapés encadrés par des éducateurs techniques spécialisés ayant pour finalité de leur faire acquérir une autonomie sociale, en sorte que l'activité n'était pas poursuivie ; que faute d'avoir procédé à cette recherche, la Cour d'appel ne pouvait conclure à l'existence d'un trouble manifestement illicite et partant a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé et de l'article R. 1455-6, anciennement R. 516-31 du Code du travail.
ALORS surtout QU'en ne s'expliquant pas sur le fait que les travailleurs handicapés n'étaient pas affectés à la restauration, mais tournaient entre les différents ateliers, dans un but d'insertion, en sorte que l'activité n'avait pas d'autonomie, ni de travailleurs spécialement affectés, elle a privé sa décision de base légale au regard de ce texte.