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17/03/2010 | FRANCE | N°08-45479

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mars 2010, 08-45479


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 22 octobre 2008), que M. X... a été engagé en qualité d'agent d'entretien par la société Fromentin transport terrassement (la société) par contrat initiative-emploi le 16 mai 2005 pour une durée de deux ans ; que par lettre du 17 février 2006, la société a mis fin au contrat ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités au titre de la rupture de son contrat de travail ;

Attendu que l'employeur fai

t grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme au titre de la rupt...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 22 octobre 2008), que M. X... a été engagé en qualité d'agent d'entretien par la société Fromentin transport terrassement (la société) par contrat initiative-emploi le 16 mai 2005 pour une durée de deux ans ; que par lettre du 17 février 2006, la société a mis fin au contrat ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités au titre de la rupture de son contrat de travail ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme au titre de la rupture de son contrat de travail, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au juge prud'homal d'interpréter la lettre de licenciement et d'en apprécier la portée à la lumière de tous les éléments produits dans le débat ; qu'en refusant de procéder à une telle interprétation dont elle avait pourtant constaté la nécessité la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1243-1 du code du travail ;

2°/ qu'est suffisamment motivée la lettre de licenciement qui permet au salarié de connaître précisément, et de discuter les griefs qui ont déterminé la décision de l'employeur ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la lettre du 17 février 2006 notifiait à M. X... son licenciement pour "absence depuis le 10 janvier 2006 pour cas de force majeure, vous n'êtes plus en mesure de vous déplacer suite à un manque de véhicule…nous avions une possibilité de vous faire prendre à votre domicile, vous ne l'avez pas souhaité…" et le mettait ainsi pleinement à même de connaître les faits ayant déterminé la décision de rupture de l'employeur et d'en discuter la réalité et la portée ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision, que "la juxtaposition dans la lettre de licenciement de ces notions d'absence et de force majeure (était) de nature à créer une confusion quant au motif effectivement retenu par l'employeur, privant ainsi la lettre de licenciement de motivation", la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé derechef les textes susvisés ;

3°/ que si la lettre de licenciement pour motif personnel fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués et de rechercher s'ils justifient ou non le licenciement prononcé ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la lettre du 17 février 2006 notifiait à M. X... son licenciement pour "absence depuis le 10 janvier 2006 pour cas de force majeure, vous n'êtes plus en mesure de vous déplacer suite à un manque de véhicule…nous avions une possibilité de vous faire prendre à votre domicile, vous ne l'avez pas souhaité…" ; que le motif de licenciement était ainsi pris de l'absence du salarié à son poste de travail pour une double cause, pour partie indépendante de sa volonté et pour partie imputable à celle-ci du fait de son refus du moyen de transport mis à sa disposition par l'employeur ; qu'il incombait donc à la cour d'appel de rechercher, à travers l'ensemble des éléments produits, si les faits dénoncés, dont elle a constaté qu'ils ne relevaient pas de la force majeure mais de la qualification de licenciement pour faute grave, caractérisaient ou non une telle faute grave ; qu'en se refusant à cette interprétation et à cette recherche au motif erroné pris de ce que le visa de la force majeure avait limité le litige à cette seule qualification, la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés ;

Mais attendu que selon l'article L. 1243-1 du code du travail, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait rompu le contrat de travail sans invoquer une faute grave, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Fromentin transport terrassement aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Fromentin transport terrassement à payer à la SCP Peignot et Garreau la somme de 2 500 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour la société Fromentin transport terrassement

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur Denis X..., et condamné en conséquence la SARL FROMENTIN TRANSPORT TERRASSEMENT à régler à ce salarié la somme de 18 268,20 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE "l'article L.122-3-8 du Code du travail prévoit que "sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure" ;

QUE par lettre recommandée avec avis de réception du 17 février 2006, la SARL FTT a notifié (son licenciement) à Denis X... au motif suivant :
"nous vous confirmons votre licenciement pour absence depuis le 10 janvier 2006 pour cas de force majeure, vous n'êtes plus en mesure de vous déplacer suite à un manque de véhicule. Nous avions une possibilité de vous faire prendre à votre domicile, vous ne l'avez pas souhaité" ;

QUE la lettre de licenciement fixe le cadre du litige soumis à l'appréciation des juges du fond qui toutefois, dans le cadre de leur analyse, ne peuvent interpréter les termes énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, il est indéniable que l'employeur a licencié Denis X... en raison de son absence depuis le 10 janvier 2006 ; que la lettre de licenciement aurait donc dû viser la notion de faute grave, à charge pour l'employeur d'en rapporter la preuve, puis aux juges de déterminer si celle-ci était justement qualifiée ; qu'en visant la notion de force majeure l'employeur, compte tenu de la spécificité de la lettre de licenciement, a limité le litige à ce seul motif ; que l'absence d'un salarié à son poste de travail ne caractérise pas les éléments de la force majeure ; que de plus, la juxtaposition dans la lettre de licenciement de ces notions d'absence et de force majeure est de nature à créer une confusion quant au motif effectivement retenu par l'employeur, privant ainsi la lettre de licenciement de motivation ;

QUE s'agissant d'une rupture anticipée abusive de son contrat de travail, Denis X... prétend à bon droit, par application des dispositions de l'article L.122-3-8 du Code du travail, au bénéfice d'une indemnité au moins égale au montant des salaires qu'il aurait perçus si le contrat était parvenu à son terme ; qu'ainsi, Denis X... sera accueilli en sa demande de la somme de 18 268,20 € que la SARL FTT sera condamnée à lui payer (…)" ;

1°) ALORS QU'il appartient au juge prud'homal d'interpréter la lettre de licenciement et d'en apprécier la portée à la lumière de tous les éléments produits dans le débat ; qu'en refusant de procéder à une telle interprétation dont elle avait pourtant constaté la nécessité la Cour d'appel a violé les articles L.1232-6 et L.1243-1 du Code du travail ;

2°) ALORS en outre QU'est suffisamment motivée la lettre de licenciement qui permet au salarié de connaître précisément, et de discuter les griefs qui ont déterminé la décision de l'employeur ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la lettre du 17 février 2006 notifiait à Monsieur X... son licenciement pour "absence depuis le 10 janvier 2006 pour cas de force majeure, vous n'êtes plus en mesure de vous déplacer suite à un manque de véhicule…nous avions une possibilité de vous faire prendre à votre domicile, vous ne l'avez pas souhaité…" et le mettait ainsi pleinement à même de connaître les faits ayant déterminé la décision de rupture de l'employeur et d'en discuter la réalité et la portée ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision, que "la juxtaposition dans la lettre de licenciement de ces notions d'absence et de force majeure (était) de nature à créer une confusion quant au motif effectivement retenu par l'employeur, privant ainsi la lettre de licenciement de motivation" la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé derechef les textes susvisés ;

3°) ALORS enfin QUE si la lettre de licenciement pour motif personnel fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués et de rechercher s'ils justifient ou non le licenciement prononcé ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la lettre du 17 février 2006 notifiait à Monsieur X... son licenciement pour "absence depuis le 10 janvier 2006 pour cas de force majeure, vous n'êtes plus en mesure de vous déplacer suite à un manque de véhicule…nous avions une possibilité de vous faire prendre à votre domicile, vous ne l'avez pas souhaité…" ; que le motif de licenciement était ainsi pris de l'absence du salarié à son poste de travail pour une double cause, pour partie indépendante de sa volonté et pour partie imputable à celle-ci du fait de son refus du moyen de transport mis à sa disposition par l'employeur ; qu'il incombait donc à la Cour d'appel de rechercher, à travers l'ensemble des éléments produits, si les faits dénoncés, dont elle a constaté qu'ils ne relevaient pas de la force majeure mais de la qualification de licenciement pour faute grave, caractérisaient ou non une telle faute grave ; qu'en se refusant à cette interprétation et à cette recherche au motif erroné pris de ce que le visa de la force majeure avait limité le litige à cette seule qualification, la Cour d'appel a violé derechef les textes susvisés.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 22 octobre 2008


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 17 mar. 2010, pourvoi n°08-45479

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Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 17/03/2010
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 08-45479
Numéro NOR : JURITEXT000022003171 ?
Numéro d'affaire : 08-45479
Numéro de décision : 51000497
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2010-03-17;08.45479 ?
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