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17/03/2010 | FRANCE | N°08-44125

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mars 2010, 08-44125


Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... travaillait depuis le 1er octobre 2004 pour le compte de la société Onet sur le chantier Vetrotex et que, ne disposant pas d'un véhicule personnel ni du permis de conduire, elle était ramenée le soir à son domicile par un véhicule de l'entreprise ; qu'à la suite de la perte du chantier Vetrotex au profit de la société CMS, le contrat de travail de la salariée s'est trouvé transféré à ladite société ; que cette dernière ayant refusé

de continuer à la faire ramener chez elle après 21 heures, Mme X... a pri...

Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... travaillait depuis le 1er octobre 2004 pour le compte de la société Onet sur le chantier Vetrotex et que, ne disposant pas d'un véhicule personnel ni du permis de conduire, elle était ramenée le soir à son domicile par un véhicule de l'entreprise ; qu'à la suite de la perte du chantier Vetrotex au profit de la société CMS, le contrat de travail de la salariée s'est trouvé transféré à ladite société ; que cette dernière ayant refusé de continuer à la faire ramener chez elle après 21 heures, Mme X... a pris acte de la rupture par un courrier du 10 janvier 2006 et saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes liées à la rupture ;
Attendu que pour confirmer la décision des premiers juges en ce qu'elle dit que la rupture reposait sur une démission et débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes, la cour d'appel a retenu qu'il ressortait du contrat de travail conclu entre la salariée et la société Onet, établi en application de l'annexe VII de la convention collective de la propreté, que les horaires sur le chantier de Vetrotex ne prévoient aucun transport pris en charge par l'employeur ; qu'une prime de transport est prévue en avantage acquis ; que la convention proposée par la société CMS à Mme X... reprend les mêmes conditions ; que la convention collective nationale régissant les relations du travail en la matière ne prévoit aucune mesure spécifique concernant le transport des salariés de leur domicile à leur lieu de travail à la charge de l'employeur ; que plusieurs salariés attestent que le transport était assuré par l'entreprise Onet lors de l'exécution du chantier par celle-ci ; que la fiche de renseignements transmise par cette société ne fait apparaître aucun avantage concernant le point en litige ; qu'il y a ainsi lieu de constater qu'aucune disposition contractuelle ne mentionnait que l'employeur était engagé à ramener Mme X... à son domicile au terme de ses horaires de travail ; qu'en outre, la perception d'une prime de transport laisse supposer que cet avantage financier était destiné à compenser la dépense engagée par la salariée pour se rendre de son domicile au lieu du travail ; que la société CMS n'était tenue par aucune disposition contractuelle concernant un transport gratuit bénéficiant à Mme X... ; que le courrier de rupture contractuelle de cette dernière s'avérant non fondé au titre du grief invoqué aura les effets d'une démission ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'employeur, prenant en compte la spécificité de son horaire de travail, faisait raccompagner la salariée à son domicile par un véhicule de l'entreprise depuis le 1er octobre 2004 et qu'il lui incombait de rechercher si, en cessant de la faire bénéficier à compter du 1er janvier 2006 de cet avantage lié à sa fonction, l'employeur ne l'avait pas mise dans l'impossibilité de travailler, caractérisant un manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société La Rayonnante CMS aux dépens ;
Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, condamne la société La Rayonnante CMS à payer à la SCP Peignot et Garreau la somme de 2 500 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la décision des premiers juges en ce qu'elle a dit que la rupture reposait sur une démission et débouté Madame Ana X... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU': « il résulte du courrier adressé par Madame X... à la société CMS le 10 janvier 2006 que celle-ci prend acte de la rupture de son contrat de travail au motif notamment que le transport du soir n'était plus assuré alors que le précédent employeur la ramenait à son domicile après 21 heures ; qu'il ressort du contrat de travail conclu entre la salariée et la société ONET, établi en application de l'annexe VII de la convention collective de la propreté, que les horaires sur le chantier de VETROTEX ne prévoient aucun transport pris en charge par l'employeur ; qu'une prime de transport est prévue en avantage acquis ; que la convention proposée par la société CMS à Madame X... reprend les mêmes conditions ; que la convention collective nationale régissant les relations du travail en la matière ne prévoit aucune mesure spécifique concernant le transport des salariés de leur domicile à leur lieu de travail à la charge de l'employeur ; que plusieurs salariés attestent que le transport était assuré par l'entreprise ONET lors de l'exécution du chantier par celle-ci ; que la fiche de renseignements transmise par cette société ne fait apparaître aucun avantage concernant le point en litige ; qu'il y a ainsi lieu de constater qu'aucune disposition contractuelle ne mentionnait que l'employeur était engagé à ramener Madame X... à son domicile au terme de ses horaires de travail ; qu'en outre, la perception d'une prime de transport laisse supposer que cet avantage financier était destiné à compenser la dépense engagée par la salariée pour se rendre de son domicile au lieu du travail ; que la société CMS a proposé à Madame X... une modification des horaires de travail afin que cette dernière puisse prendre sans difficulté les transports en commun à la fin de ses heures ; qu'il est justifié au surplus que la distance à parcourir est de cinq kilomètres ; qu'il convient de déclarer que la société CMS n'était tenue par aucune disposition contractuelle concernant un transport gratuit bénéficiant à Madame X... ; qu'en conséquence, le courrier de rupture contractuelle de 80729 BP / MAM cette dernière s'avérant non fondé au titre du grief invoqué aura les effets d'une démission ; que Madame X... sera déboutée de toutes ses prétentions ; qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société CMS la somme exposée au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « l'employeur apporte la preuve que les griefs invoqués par Madame X... à son encontre ne sont pas fondés et que les faits établis par la rupture du contrat de travail justifient d'une démission ; que sur le contrat de travail du précédent employeur, la société ONET, repris point par point par la SARL CMS, nulle clause n'indiquait que la salariée bénéficiait d'un retour au domicile le soir après son travail par le biais de son employeur ; qu'en l'espèce, Madame X... a pris acte de la rupture sur cette principale raison et qu'elle n'a plus assuré son service ; qu'en l'occurrence, l'employeur n'avait pas obligation de reprendre un usage affirmé par Madame X... et non écrit sur le contrat de travail ; que la société CMS en date du 9 janvier 2006 a proposé à la salariée de décaler les horaires de travail pour bénéficier des transports en commun et rentrer à son domicile le soir ; qu'en l'espèce, le refus de Madame X... d'accepter ses nouveaux horaires car elle travaillait pour un autre employeur ne peut être retenu ; que la prise de poste à un horaire décalé proposé par la société CMS était bien compatible avec celui de son autre employeur ; qu'en conséquence, la rupture du contrat de travail liant Madame X... à la société CMS est bien imputable à la salariée et est considérée comme une démission ; qu'en l'espèce, Madame X... ne peut prétendre à l'indemnité de licenciement, de préavis, de congés payés sur préavis, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; qu'en l'occurrence ces demandes ne sont pas retenues » ;
ALORS D'UNE PART QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que caractérise un manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié, le fait, pour l'employeur, qui en raison de la spécificité du travail et de l'horaire de travail du salarié, le faisait ramener depuis de nombreuses années à son domicile, d'avoir supprimé cet avantage lié à sa fonction et de l'avoir ainsi mis dans l'impossibilité de travailler ; qu'en déboutant la salariée de ses demandes aux motifs qu'aucune disposition contractuelle ou conventionnelle ne mentionnait que 80729 BP / MAM l'employeur était engagé à ramener à Madame X... à son domicile au terme de ses horaires de travail, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 120-4, devenu l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QU'en déboutant la salariée de ses demandes sans même rechercher si, eu égard aux conditions du travail telles que l'éloignement du domicile de la salariée, l'heure de débauchage quotidienne, le transport de la salariée, qui étaient en usage dans l'entreprise sortante, cette facilité de transport ne constituait pas un élément du contrat de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, ensemble l'accord du 29 mars 1990 ;
ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE l'usage correspond à une pratique habituellement suivie dans l'entreprise et doit présenter des qualités de généralité, de constance et de fixité dont il appartient au salarié de rapporter la preuve et au juge de vérifier l'existence ; que les premiers juges, dont la Cour d'appel a adopté les motifs, ont énoncé que l'employeur n'avait pas obligation de reprendre un usage affirmé par Madame X... et non écrit sur le contrat de travail ; qu'en ne vérifiant pas si la salariée ne bénéficiait pas d'un usage, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS ENFIN QUE lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission ; que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, le juge est tenu d'examiner tous les manquements invoqués devant lui par le salarié même si ce dernier ne les a pas invoqués au moment de sa prise d'acte ; qu'en se bornant à examiner le grief invoqué par la salariée tiré de la suppression de la facilité de transport cependant que la salariée exposait que l'employeur entrant avait procédé unilatéralement à diverses modifications notamment sur le nombre d'heures travaillées, sur les taux différents de primes de transport, sur la suppression de la prime d'expérience, et qu'il avait ajouté une clause de mobilité, la Cour d'appel, qui n'a pas examiné tous les manquements invoqués par la salariée, a violé les articles L. 122-4, L. 122-13 et L. 122-14-3 devenus les articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1232-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44125
Date de la décision : 17/03/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Chambéry, 17 janvier 2008, 07/00744

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 17 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mar. 2010, pourvoi n°08-44125


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44125
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