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10/02/2010 | FRANCE | N°08-45465

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2010, 08-45465


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par La Poste de 1995 à 1998 par plusieurs contrats à durée déterminée, puis à compter du mois de février 1998 par contrat à durée indéterminée, en qualité de distributeur d'imprimés publicitaires, était affecté à l'activité "publipostage non adressé" (PNA) ; qu'en octobre 2001, il a été désigné comme délégué syndical, exerçant cette activité

à plein temps dans l'entreprise, avant d'être élu le mois suivant secrétaire du syndicat C...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé par La Poste de 1995 à 1998 par plusieurs contrats à durée déterminée, puis à compter du mois de février 1998 par contrat à durée indéterminée, en qualité de distributeur d'imprimés publicitaires, était affecté à l'activité "publipostage non adressé" (PNA) ; qu'en octobre 2001, il a été désigné comme délégué syndical, exerçant cette activité à plein temps dans l'entreprise, avant d'être élu le mois suivant secrétaire du syndicat CGT PTT 95 ; qu'en 2003, La Poste a décidé de confier l'activité PNA à sa filiale Médiapost, créée à cette fin, en mettant en place une procédure de réorientation professionnelle des agents ; qu'en septembre 2003 et juin 2004, M. X... a exprimé l'intention de rester rattaché au PNA, en raison des fonctions syndicales qu'il exerçait ; qu'après avoir été informé par son employeur, le 17 décembre 2004, de son rattachement à l'entité de Cergy, il a saisi le juge prud'homal de demandes indemnitaires liées notamment à une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière ;
Attendu que, pour débouter M. X... des demandes formées au titre d'une discrimination syndicale, la cour d'appel a retenu qu'une instruction du 1er septembre 2004 exclut de la procédure d'évaluation les agents rattachés à une fonction technique du secteur syndical, lesquels ont vocation à bénéficier de promotions ; que la procédure de promotion nécessite une candidature du salarié, que M. X... ne justifie pas avoir présentée ; et que le 22 septembre 2003, l'intéressé a fait savoir qu'il entendait "rester à la PNA" et ne pas participer à une opération de promotion, de sorte qu'il ne peut se prévaloir d'une promotion tardive par rapport à un autre salarié ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'absence d'entretien d'évaluation de 1998 à 2004, qui était de nature à priver l'intéressé d'une possibilité de promotion professionnelle et laissait ainsi supposer l'existence d'une discrimination liée à l'exercice de fonctions syndicales, ne pouvait être justifiée par une instruction postérieure émanant de l'employeur, la cour d'appel, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a ordonné à La Poste de faire des propositions de poste et l'a condamnée au paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité, l'arrêt rendu le 15 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne La Poste aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne La Poste à payer, d'une part, à M. X... la somme de 350 euros, d'autre part, à la SCP Roger et Sevaux, la somme de 2 150 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de la somme de 41.324,77 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et de sa demande tendant à voir rétablir sous astreinte son déroulement normal de carrière avec sa classification ACC III 3 sur ses bulletins de paie, en lui versant le salaire et tous les éléments de rémunération correspondant à cette classification ;
Aux motifs qu'en application de l'article L.1134-1 (anciennement L.122-45) du Code du travail, il appartient au salarié qui soutient être victime de discrimination de présenter des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination et à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que Monsieur Sébastien X... invoque un traitement discriminatoire à raison d'un salaire horaire qui a chuté en 1998 et en 2004, respectivement à l'époque d'un avertissement infligé pour faits de grève et à l'époque de sa participation aux négociations liées à la PNA ; que le salarié invoque une baisse de salaire horaire durant les années 1997 à 2005 caractérisée par son passage de 7,15 euros de l'heure à 6,46 euros de l'heure entre 1996 et 1997 et de 8,39 euros de l'heure à 7,53 euros de l'heure entre 2003 et 2004 ; que toutefois les cumuls de salaires annuels par année entière passée dans l'entreprise ne cessent quant à eux d'augmenter et à suivre le minimum de base ; que les cumuls annuels de salaire intègrent différentes primes, augmentations en cours d'années avec retrait des périodes de grève ou de maladie ou d'absences injustifiées, de sorte qu'il ne peut être déduit du rapport de ce cumul et du nombre d'heures travaillées un salaire horaire ; que la chute du montant du salaire horaire entre 1997 et 1998 est d'autant moins établi e , que Monsieur Sébastien X... n'a travaillé qu'en décembre en 1997 et qu'il a touché pour ce même mois en 1998 une somme supérieure ; qu'entre 2003 et 2004 le cumul annuel net est passé de 13.062,94 euros en 2003 à 13.703,04 euros en 2004, ce qui ne traduit pas la baisse de revenu invoquée ; qu'au surplus la discrimination supposerait une différence dans l'évolution du salaire avec celui des autres salariés placés dans une même situation d'ancienneté notamment ; que certes Monsieur Y..., autre salarié de l'entreprise de même ancienneté que l'intimé a perçu un salaire supérieur à celui de l'intéressé entre 2002 et 2005, en ce qu'il a accédé au grade ACC I.2, en 2002 ; que l'instruction n° 2037 du 1er septembre 2004 dispose que tous les agents de LA Poste, fonctionnaires ou salariés, sont concernés par la procédure d'évaluation, à l'exception notamment des agents rattachés à une fonction technique du secteur syndical, tel que Monsieur Sébastien X... qui était représentant syndical permanent ; qu'il est toutefois expressément mentionné dans différents documents que les agents rattachés à une fonction technique du secteur syndical ont vocation à être promus comme les autres ; que la note de service du 2 décembre 1993 comme la circulaire interne du 4 novembre 2004 qui ont trait à la procédure de promotion font toutes deux état de la nécessité d'une candidature du salarié ; que Monsieur Sébastien X... ne justifie pas avoir fait de démarches en ce sens ; qu'en effet la fiche de desiderata qu'il a signée le 22 septembre 2003 porte la mention au regard de la rubrique « souhait de promotion » : « Monsieur X... a été embauché sur poste PNA, son seul souhait : rester à la PNA » ; que sur le même document, sous la formule « Je souhaite m'inscrire pour participer à l'opération de promotion », le salarié a coché la case « non » ; qu'il ne peut donc se prévaloir de sa promotion tardive par rapport à celle de Monsieur Y... comme de nature à traduire une discrimination ; qu'il s'ensuit également qu'il ne saurait obtenir son rétablissement « dans son déroulement normal de carrière » avec notamment promotion à la classification ACC III 3 en février 2004 ; que l'absence de visite médicale de Monsieur Sébastien X... pendant huit ans ne laisse pas supposer l'existence d'une discrimination, puisqu'il n'est pas établi que sa situation soit différente de celle des autres salariés ; qu'il est constant que l'employeur s'était engagé, dans le cadre des travaux de la Commission de Dialogue Social, à proposer à chaque salarié qui n'aurait pas demandé par une démarche volontaire un reclassement au sein d'autres filiales du groupe ou un départ volontaire, « au moins trois postes dans les douze mois à la suite de la fermeture du centre de rattachement PNA » ; qu'il ne peut certes être déduit de la volonté affichée par l'intimé le 22 septembre 2003 son refus d'abandonner son rattachement à ce centre malgré sa fermeture, puisque celle-ci n'a été décidée de manière certaine que le 22 décembre 2004 ; que toutefois, il est attesté par le conseiller mobilité de l'entreprise que Monsieur Sébastien X... a réitéré lors d'un entretien dit « individuel d'emploi », sa décision de rester à son poste de travail au sein de la PNA, malgré la suppression de celui-ci et la fermeture de l'établissement « UDP de Saint-Ouen L'Aumone » au 22 décembre 2004, « ceci compte tenu de son élection en qualité de secrétaire général de la CGT » ; qu'il ressort en outre de ce document qu'il a refusé toute proposition de poste, ce dont l'employeur a pu tirer de bonne foi une dispense de faire des propositions de poste, d'autant plus que le texte précité intitulé « Evolution de l'activité Publipostage non Adressé (PNA) au sein de LA Poste maison mère » évoquait l'obligation pour l'employeur de faire des propositions de poste en adéquation avec les souhaits du salarié, qui en l'espèce se refusait à en émettre, et que le salarié était déchargé d'activité ; qu'il suit de l'ensemble de ces motifs que le jugement sera infirmé en ce qu'il a jugé qu'il y avait discrimination syndicale et en ce qu'il a condamné l'employeur à verser à l'intéressé la somme de 32.606,64 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subséquent ; qu'il n'en demeure pas moins qu'eu égard à la demande formée au cours de la présente procédure par Monsieur X..., il appartient à l'employeur de faire à l'intéressé trois propositions de postes dans les conditions fixées par le texte intitulé un texte intitulé « Evolution de l'activité Publipostage non Adressé (PNA) au sein de LA Poste maison mère » nonobstant sa dispense d'activité et qu'il lui sera enjoint de le faire dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il n'est cependant pas besoin de recourir à une astreinte ;
Alors, de première part, que Monsieur X... avait souligné, dans ses conclusions d'appel, que, depuis son embauche, il n'avait jamais bénéficié d'une procédure d'évaluation alors que l'examen annuel instauré par les accords d'entreprise du 12 juillet 1996 est applicable à l'ensemble du personnel contractuel ; qu'en se bornant à relever que l'instruction n° 2037 du 1er septembre 2004 excluait du bénéfice de la procédure d'évaluation les agents de la Poste rattachés à une fonction technique du secteur syndical, tel que Monsieur X... qui était représentant syndical permanent, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'évaluation de Monsieur X... durant la période antérieure au 1er septembre 2004, alors pourtant qu'il était, comme tous les agents de la Poste, concerné par la procédure d'évaluation et alors, qu'elle avait constaté que les agents rattachés à une fonction technique du secteur syndical avaient vocation à être promus comme les autres, n'était pas de nature à démontrer l'existence d'une discrimination à son encontre, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.122-45 et L.412-2, 1er alinéa du Code du travail, devenus les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 de ce code ;
Alors, de deuxième part, que Monsieur X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que, n'ayant jamais été informé de l'existence des campagnes promotionnelles, ni fait l'objet de la moindre procédure d'évaluation, il n'avait dès lors jamais été mis en mesure, par la faute de son employeur, de se porter candidat à une évolution professionnelle ; qu'en se bornant à relever que la note de service du 2 décembre 1993, comme la circulaire interne du 4 novembre 2004, ayant trait à la procédure de promotion, faisaient toutes deux état de la nécessité d'une candidature du salarié, avant de constater que Monsieur X... ne justifiait pas avoir fait de démarches en ce sens, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce n'était pas la faute de la Poste, laquelle s'était abstenu d'informer Monsieur X... de l'existence des campagnes promotionnelles et de procéder à son évaluation annuelle, qui avait empêché ce dernier de faire acte de candidature, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.122-45 et L.412-2, 1er alinéa du Code du travail, devenus les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 de ce code ;
Alors, de troisième part, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, Monsieur X... expliquait dans ses conclusions d'appel, les circonstances très particulières qui l'avaient amené à signer la fiche de desiderata le 22 septembre 2003 ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes pour la solution du litige, la Cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, de quatrième part, que la Poste ne contestait pas la stagnation de carrière de Monsieur X... ; que l'arrêt avait lui-même constaté que les agents rattachés à une fonction technique du secteur syndical avaient vocation à être promus comme les autres ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher comment avaient évolué les salariés de même ancienneté et de même niveau professionnel que Monsieur X... et sans rechercher quel était le temps de passage moyen dans les classifications en cause, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.122-45 et L.412-2, 1er alinéa du Code du travail, devenus les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 de ce code ;
Alors, de cinquième part, que la Cour d'appel a constaté que l'employeur s'était engagé, dans le cadre des travaux de la Commission de Dialogue Social, à proposer à chaque salarié, qui n'aurait pas demandé par une démarche volontaire un reclassement au sein d'autres filiales du groupe ou un départ volontaire, « au moins trois postes dans les douze mois à la suite de la fermeture du centre de rattachement PNA » ; que toutefois, après avoir retenu que Monsieur X... avait indiqué vouloir rester à la PNA, la Cour d'appel a cru pouvoir en déduire, faisant sienne l'argumentation de la Poste, que cette dernière se trouvait par là-même dispensée de lui faire des propositions de poste, alors pourtant qu'elle s'y était engagée ; que malgré le fait que Monsieur X... ait indiqué vouloir conserver son poste au sein de la PNA, la Poste se devait de respecter son engagement et lui faire trois propositions de poste, dès lors qu'il n'avait ni demandé un reclassement au sein d'une autre filiale du groupe, ni fait part de son intention de quitter l'entreprise ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a ainsi violé les articles L.122-45 et L.412-2, 1er alinéa du Code du travail, devenus les articles L.1132-1, L.1134-1 et L.2141-5 de ce code ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45465
Date de la décision : 10/02/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2010, pourvoi n°08-45465


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.45465
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