LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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X... Serge,
contre le jugement de la juridiction de proximité de STRASBOURG, en date du 9 avril 2009 qui, pour inobservation par le conducteur d'un véhicule d'un feu rouge fixe ou clignotant, l'a condamné à 150 euros d'amende ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles R. 412-30 et R. 412-31 du code de la route, 388, 427, 537, 538, 539, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que le jugement attaqué a déclaré Serge X... coupable de la contravention d'inobservation, par un conducteur de véhicule, de l'arrêt imposé par un feu rouge fixe ou clignotant, infraction prévue par l'article R. 412-30 du code de la route et en répression l'a condamné à une peine d'amende de 150 euros ;
"aux motifs que Nathalie X..., épouse du mis en cause, est entendue en qualité de simple témoin ; qu'elle déclare : « … en levant la tête, j'ai vu le feu rouge ; j'en ai fait la réflexion à mon mari… » ; de l'emplacement qu'il occupait, le policier voyait très bien le feu, il ne peut y avoir de doute à ce sujet ; Serge X..., en franchissant une intersection, même en ne roulant pas trop vite, alors que le feu est à l'orange, a pris des risques inconsidérés ; il aurait dû aborder cette intersection avec la plus grande prudence pour être en mesure de s'arrêter lorsque le feu passe à l'orange ; le feu orange oblige à l'arrêt et tout conducteur doit marquer un arrêt avant un feu orange fixe, sauf si en raison de circonstances particulières de circulation, celles-ci ne permettent pas de s'arrêter dans des conditions de sécurité suffisante ;
dans le cas d'espèce, Serge X... ne rapporte pas la preuve de cette circonstance exceptionnelle qui l'a entraîné à franchir le feu au rouge depuis deux secondes ; par ailleurs, il ressort des débats et des pièces du dossier que Serge X... n'est pas en mesure d'apporter la preuve contraire aux constatations de l'agent verbalisateur ; la déclaration de son épouse conforte par ailleurs les déclarations des policiers ; l'infraction est donc constituée au sens de l'article R. 412-30 du code de la route ; en conséquence, les faits reprochés à Serge X... sont établis et exactement qualifiés ; il y a lieu de le retenir dans les liens de la prévention et en répression de le condamner à une peine d'amende de 150 euros (jugement, page 3) ;
"1) alors qu'il s'évince des mentions des notes d'audience que Nathalie X..., interrogée en qualité de témoin à l'audience du 12 mars 2009, a déclaré : « en levant la tête, j'ai vu le feu orange ; j'en ai fait la réflexion à mon mari » (notes d'audience, page 3) ; que, dès lors, en estimant que lors de son audition à l'audience susvisée, le témoin aurait déclaré « en levant la tête, j'ai vu le feu rouge », pour en déduire que la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal d'infraction n'est pas rapportée par le prévenu et, en particulier, ne résulte pas du témoignage de Nathalie X..., lequel conforterait les déclarations des policiers, la juridiction de proximité, qui a dénaturé les notes d'audience, a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
"2) alors que les juridictions répressives ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, il résulte des termes de la prévention (jugement, p. 2), qu'il était exclusivement reproché à Serge X... d'avoir, le 20 septembre 2008, à Strasbourg, commis l'infraction d'inobservation, par conducteur de véhicule, de l'arrêt imposé par un feu rouge fixe ou clignotant, fait prévu et réprimé par l'article R. 412-30 du code de la route ; qu'ainsi, il n'était nullement reproché au prévenu d'avoir méconnu l'obligation de marquer l'arrêt devant un feu de signalisation jaune fixe, fait prévu et réprimé par l'article R. 412-31 du même code ; qu'en se déterminant par la circonstance qu'en franchissant une intersection alors que le feu était à l'orange, le prévenu a pris des risques inconsidérés, et qu'il ne démontre pas l'existence de circonstances particulières de circulation l'ayant empêché de s'arrêter dans des conditions de sécurité suffisante, la juridiction de proximité, qui a retenu à la charge de Serge X... des faits excédant les limites de la prévention, et sur lesquels l'intéressé n'avait pas accepté d'être jugé, a violé l'article 388 du code de procédure pénale ;
"3) alors, enfin, qu'en énonçant, d'une part, que Serge X... a pris des risques inconsidérés en franchissant une intersection alors que le feu était à l'orange, d'autre part, que le prévenu a franchi le feu alors que celui-ci était au rouge depuis deux secondes, la juridiction de proximité qui s'est déterminée par des motifs contradictoires, a violé l'article 593 du code de procédure pénale" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement doit comporter les motifs propres à justifier sa décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour déclarer Serge X... coupable des faits visés à la prévention d'inobservation de l'arrêt imposé par un feu rouge, fixe ou clignotant, sur le fondement de l'article R. 412-30 du code de la route, le jugement énonce que Serge X..., en franchissant une intersection alors que le feu est à l'orange, a pris des risques inconsidérés alors que tout conducteur doit marquer un arrêt devant un feu orange fixe ;
Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations la juridiction de proximité s'est prononcé par des motifs contradictoires ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité de Strasbourg, en date du 9 avril 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Strasbourg, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la juridiction de proximité de Strasbourg et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Degorce conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;