La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2009 | FRANCE | N°08-13922

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 avril 2009, 08-13922


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 15 janvier 2008), que la société Adecco, dont le salarié M. X... avait été victime le 24 juillet 2001 d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse), a contesté l'imputabilité à cet accident des arrêts de travail prescrits à ce salarié jusqu'au 12 août 2002 ; qu'elle a saisi d'un recours la juridiction de sécurité

sociale qui a ordonné une expertise médicale ; qu'ultérieurement, le présiden...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 15 janvier 2008), que la société Adecco, dont le salarié M. X... avait été victime le 24 juillet 2001 d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse), a contesté l'imputabilité à cet accident des arrêts de travail prescrits à ce salarié jusqu'au 12 août 2002 ; qu'elle a saisi d'un recours la juridiction de sécurité sociale qui a ordonné une expertise médicale ; qu'ultérieurement, le président de cette juridiction a dit que l'expertise se réaliserait au vu des pièces médicales et a enjoint la caisse de communiquer les pièces utiles à l'expertise ; que l'expert a dit qu'en l'absence de la victime et de documents médicaux, il ne pouvait accomplir sa mission ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'avait pas rapporté la preuve de la non-imputabilité des lésions à l'accident du travail et de la débouter de sa demande d'inopposabilité, alors, selon le moyen, que le juge doit tirer les conséquences de l'abstention d'une partie qui ne défère pas à l'injonction qui lui a été faite de communiquer à un expert judiciaire les pièces utiles à l'expertise ; qu'en l'espèce, la caisse n'a pas communiqué de pièce permettant au médecin expert judiciaire d'apprécier, comme il en avait été chargé, « les lésions directement imputables à l'accident du travail (…), l'existence d'une éventuelle pathologie antérieure, la durée des arrêts de travail en relation directe avec l'accident initial, en dehors de tout état antérieur, la date de consolidation des lésions en relation directe avec l'accident initial en dehors de tout état antérieur » ; qu'ainsi, la carence de la caisse, qui n'a pas remis à l'expert les pièces médicales de son dossier, devait avoir pour conséquence l'inopposabilité à l'employeur du caractère professionnel des arrêts de travail et soins accordés à M. X... ; qu'en décidant néanmoins le contraire, la cour d'appel a violé l'article 11 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'arrêt, par motifs propres et adoptés, retient qu'il appartient à l'employeur, dès lors que la matérialité de l'accident est établie, d'apporter la preuve que les lésions ne sont pas imputables à cet accident ou qu'elles ne le sont qu'en partie ; que la caisse a adressé l'ensemble des certificats médicaux à l'expert, lequel indique toutefois, dans son rapport, qu'il n'a pu tirer aucune conclusion faute de pièces médicales – scanner ou compte rendu de radiographie notamment – susceptibles de l'éclairer sur l'évolution de la pathologie ; qu'il n'est pas établi que ces pièces médicales, qui appartiennent à l'assuré, soient restées dans le dossier médical de la caisse laquelle ne peut, dans ces conditions, être tenue pour responsable de l'échec des opérations d'expertise ; que la preuve de la non-imputabilité des lésions décrites par les certificats médicaux à l'accident du travail n'est donc pas rapportée par l'employeur ;

Que de ces énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que les conséquences de l'accident du travail litigieux jusqu'à la reprise du travail survenue le 7 août 2002 devaient être déclarées opposables à la société ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adecco aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Adecco ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour la société Adecco.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la preuve de la nonimputabilité des lésions à l'accident du travail n'était pas rapportée par la société ADECCO et d'avoir débouté la société ADECCO de sa demande d'inopposabilité ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Monsieur X..., salarié de l'entreprise de travail temporaire ADECCO, avait été mis à la disposition de la société SPADA, en qualité de maçon, à compter du 23 juillet 2001 ; que les horaires de travail étaient 7 h. 30-12 h. 00, 13 h. 00-16 h. 30 ; que le 24 juillet 2001 à 17 h. 45, le salarié a indiqué à l'employeur qu'il avait été victime d'un accident du travail à 8 h. 15 ; que la déclaration d'accident établie le 25 juillet 2001 relate le déroulement de l'accident de la façon suivante : « pendant qu'il utilisait une pioche pour décoller le goudron, Monsieur X... est resté bloqué du bas des reins et a eu des sueurs froides » ; qu'un témoin a été cité, Monsieur Jean Y... ; que le certificat médical initial, délivré le 27 juillet 2001, mentionne : « lumbago d'effort », et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 31 juillet 2001 ; que l'assuré a bénéficié de prolongations d'arrêt de travail jusqu'au 11 août 2002 (la date de consolidation ayant été fixée au 10 août 2002, et la reprise ayant été effective au 12 août 2002) ; que les séquelles consécutives à l'accident ont entraîné un taux d'incapacité permanente partielle de 15 % ; que la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine a admis l'imputabilité des lésions au fait accidentel, et justifié les arrêts de travail ; qu'au contraire, la société ADECCO, se prévalant de l'avis de son médecin conseil, a contesté la durée des arrêts de travail ; que par jugement du 2 décembre 2004, le tribunal a ordonné la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire appropriée à la nature du litige, confiée au docteur Bernard Z... ; que par ordonnance présidentielle du 28 juin 2005, il a été décidé que l'expertise se réaliserait au vu des pièces médicales, et enjoint aux services médicaux et administratifs de la Caisse de communiquer au technicien commis les pièces utiles ; que par ordonnance du 30 octobre 2006, le docteur A... a été désigné aux lieu et place du docteur Virgili ; que le nouvel expert, dans un rapport clos le 18 décembre 2006, a conclu comme suit : « Monsieur X... Kamel n'étant pas présent à l'expertise, le dossier médical inexistant, il ne nous est pas possible de répondre aux questions qui nous sont posées » ; que la société ADECCO fait grief à la Caisse de n'avoir pas déféré à l'ordonnance présidentielle du 28 juin 2005 et, au visa de l'article 11 du Code de procédure civile, estime qu'il y a obstruction de la Caisse et invite le juge à en tirer toutes conséquences au niveau probatoire ; que la société ADECCO ne dément cependant pas la Caisse qui, dans ses écritures du 26 novembre 2004, avait rapporté les propos du médecin conseil de l'employeur qui estimait que : « s'agissant d'une douleur lombaire d'effort, l'arrêt de travail de plus d'un an est anormalement prolongé, la notion de lombalgie chronique à compter du 20 décembre 2001 pouvait faire formuler une consolidation à cette date » ; qu'il s'ensuit que la société ADECCO disposait de certains documents médicaux qu'elle ne peut reprocher à la Caisse de n'avoir pas fournis ; que l'expert A... a pour l'essentiel justifié sa carence en mettant en avant que le salarié n'était plus « joignable » (p. 2) ; qu'une nouvelle expertise ne s'impose donc pas ; la preuve de la non-imputabilité des lésions décrites par les certificats médicaux n'est pas rapportée par l'employeur ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la demande d'inopposabilité formée par la société ADECCO était motivée par la durée – selon elle anormalement élevée – des arrêts de travail de Monsieur X... consécutivement à son accident de travail, la réalité de celui-ci n'étant donc pas contestée ; qu'il appartient à l'employeur, dès lors que la matérialité de l'accident est établie, d'apporter la preuve que les lésions ne sont pas imputables à cet accident ou qu'elles ne le sont qu'en partie ; que l'employeur n'ayant pas accès au dossier médical, le tribunal a ordonné une expertise et, l'assuré ne s'étant pas présenté pour être examiné, a enjoint à la Caisse de produire les pièces médicales utiles ; que la Caisse a adressé l'ensemble des certificats médicaux à l'expert, lequel indique toutefois, dans son rapport, qu'il n'a pu tirer aucune conclusion faute de pièces médicales – scanner ou compte rendu de radiographie notamment – susceptibles de l'éclairer sur l'évolution de la pathologie ; qu'il n'est pas établi que ces pièces médicales, qui appartiennent à l'assuré, soient restées dans le dossier médical de la Caisse laquelle ne peut, dans ces conditions, être tenue pour responsable de l'échec des opérations d'expertise ; que la preuve de la non-imputabilité des lésions décrites par les certificats médicaux à l'accident du travail n'est donc pas rapportée par l'employeur ; qu'il convient, dans ces conditions, de le débouter de sa demande d'inopposabilité ;

ALORS QUE le juge doit tirer les conséquences de l'abstention d'une partie qui ne défère pas à l'injonction qui lui a été faite de communiquer à un expert judiciaire les pièces utiles à l'expertise ; qu'en l'espèce, la Caisse n'a pas communiqué de pièce permettant au médecin expert judiciaire d'apprécier, comme il en avait été chargé, « les lésions directement imputables à l'accident du travail (…), l'existence d'une éventuelle pathologie antérieure, la durée des arrêts de travail en relation directe avec l'accident initial, en dehors de tout état antérieur, la date de consolidation des lésions en relation directe avec l'accident initial en dehors de tout état antérieur » ; qu'ainsi, la carence de la Caisse, qui n'a pas remis à l'expert les pièces médicales de son dossier, devait avoir pour conséquence l'inopposabilité à l'employeur du caractère professionnel des arrêts de travail et soins accordés à Monsieur X... ; qu'en décidant néanmoins le contraire, la cour d'appel a violé l'article 11 du Code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-13922
Date de la décision : 09/04/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 avr. 2009, pourvoi n°08-13922


Composition du Tribunal
Président : M. Gillet (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.13922
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award