LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 avril 2007), que Mme X... qui avait acquis, le 13 avril 1984, de sa mère, Mme Y... et de l'époux de cette dernière M. Z..., une maison, bien commun de ces derniers, a, par acte authentique du 30 juin 1984, constitué à leur profit, sans l'affecter d'aucun terme, un droit d'usage portant sur le mobilier et un droit d'habitation portant sur la maison ; que, par arrêt du 27 octobre 1993, la cour d'appel de Paris a prononcé le divorce des époux Z... et, à titre de prestation compensatoire, a dit que Mme Y... jouirait exclusivement, sa vie durant, du droit d'habitation et d'usage sur l'immeuble ; qu' à la suite du décès, le 15 mars 2003, de Mme Y..., M. Z... a assigné Mme X... en vue d'être réintégré dans son droit d'usage et d'habitation ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de M. Z..., alors, selon le moyen :
1°/ que le droit d'usage et d'habitation est un droit réel à caractère personnel, issu du démembrement du droit de propriété, qui ne peut, à son tour, être démembré ; qu'il s'ensuit que la jouissance de ce droit suppose nécessairement que son bénéficiaire soit titulaire du droit lui-même ; qu'en l'espèce, il est constant que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 octobre 1993, statuant sur la prestation compensatoire attribuée à Mme Y... a décidé que "Mme Y... jouira exclusivement, sa vie durant, du droit d'usage et d'habitation sur l'immeuble" ; que, par ce motif, la cour d'appel de Paris a exclu M. Z... de la titularité de ce droit, en sorte qu'au décès de Mme Y..., dont il était divorcé, il ne pouvait plus prétendre l'exercer à nouveau ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 625 et 578 du code civil ;
2°/ que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 octobre 1993 ayant attribué à Mme Y... la jouissance exclusive, sa vie durant, du droit d'usage et d'habitation sur l'immeuble appartenant à Mme X..., la chose jugée par cet arrêt devenu définitif ne pouvait être modifiée par la décision statuant sur la demande de réintégration de M. Z... sans qu'il soit porté atteinte à ladite chose ; que, ce faisant, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
3°/ que le motif selon lequel "il n'a pas été justifié... dans le cours du délibéré du paiement par Mme Y... des droits d'enregistrement ni de la transcription de la cession à la conservation des hypothèques qui auraient dû être faits si l'arrêt avait opéré cession forcée d'un droit réel immobilier" est inopérant, M. Z... étant partie à l'arrêt du 27 octobre 1993, la cession lui était opposable nonobstant l'absence de production de sa transcription à la conservation des hypothèques ; qu'en se déterminant par ce motif inopérant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 625 et 578 du code civil ;
Mais attendu que l'attribution de la jouissance exclusive et temporaire à l'un de ses attributaires d'un droit viager d'usage et d'habitation ne fait pas obstacle à ce qu'à son décès, le cotitulaire de ce droit, seulement privé temporairement de son exercice, en recouvre tous les attributs, sa vie durant ; qu'ayant retenu, sans violer l'autorité de la chose jugée, que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 octobre 1993, rendu en application de l'article 275 du code civil alors en vigueur, n'avait conféré à Mme Y... que la jouissance exclusive et viagère du droit d'usage et d'habitation, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que M. Z..., co-titulaire du droit dont il n'avait plus la jouissance en était redevenu seul titulaire, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Marguerite X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à M. Z... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze octobre deux mille huit.