La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/09/2008 | FRANCE | N°08-80260

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 septembre 2008, 08-80260


- X... Haitham,

contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, 17e chambre, en date du 28 novembre 2007, qui, après condamnation par arrêt de la cour d'assises de PARIS, en date du 13 septembre 2002, pour abus de confiance, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 1382 et 1383 du code civil, des articles 6, 211, 213, 372, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné Haitham X... à pay

er à Caroline Y..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 15 000 e...

- X... Haitham,

contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, 17e chambre, en date du 28 novembre 2007, qui, après condamnation par arrêt de la cour d'assises de PARIS, en date du 13 septembre 2002, pour abus de confiance, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 1382 et 1383 du code civil, des articles 6, 211, 213, 372, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné Haitham X... à payer à Caroline Y..., en réparation de son préjudice moral, la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs que « selon les réponses aux questions qui ont été posées à la cour et au jury, il est constant :- que Caroline Y... a été, d'une part, à Wissembourg, Strasbourg et Paris, entre le 10 juillet 1990 et le 22 août 1990 victime d'une maladie ou d'une incapacité de travail personnel par administration de substances qui, sans être de nature à donner la mort, étaient nuisibles à la santé, en l'espèce du Glibenclamide et de l'insuline et, d'autre part, à Reims, courant janvier 1990, victime d'une maladie ou d'une incapacité de travail personnel par administration de substance qui, sans être de nature à donner la mort, étaient nuisibles à la santé, en l'espèce du Valium,- que la culpabilité d'Haitham X..., en qualité d'auteur ou de complice du chef de ces deux délits, a été écartée,- qu'il n'a, de même, pas été reconnu coupable des délits de faux en écriture privée et d'usage qui lui étaient reprochés pour avoir à Reims courant juin 1989 rédigé et signé une ordonnance paraissant établie par le C. H. R. U. de Reims, en date du 2 juin 1989, prescrivant du Valium, pour avoir à Reims, courant janvier 1990 rédigé et signé une ordonnance paraissant établie par le Dr Z... en date du 19 janvier 1990, et pour avoir fait usage de ces ordonnances,- qu'il a été déclaré coupable d'avoir à Paris entre le 1er mai 1989 et le 30 avril 1990, détourné au préjudice de la Maison de santé des Gardiens de la Paix, des ordonnances qui ne lui avaient été remises qu'à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage déterminé ; qu'aux termes de l'article 372 du code de procédure pénale, la partie civile, dans le cas d'acquittement, peut demander réparation du dommage résultant de la faute de l'accusé telle qu'elle résulte des faits qui sont l'objet de l'accusation ; que l'administration à Caroline Y... de Glibenclamide et de Valium, substances nuisibles à la santé, étant établie aux termes de la déclaration de la cour d'assises et du jury, précitée, il y a lieu de rechercher si les conditions dans lesquelles ont été délivrées et utilisées les ordonnances ayant permis de se procurer des substances en cause font apparaître, à la charge d'Haitham X... une faute civile d'imprudence distincte des agissements volontaires lui étant initialement reprochés ; qu'il convient de rappeler qu'Haitham X... après des études médicales en Egypte a exercé, dans un premier temps des fonctions d'assistant en chirurgie à l'hôpital de Thionville ; qu'il a connu en 1985 une aide soignante, Liliane A..., mère de la jeune Caroline Y... née en septembre 1981, d'un précédent mariage, qu'ils ont vécu ensemble à partir de la fin de l'année 85 le couple se mariant en juillet 1989 ; qu'Haitham X..., après avoir quitté Thionville, a exercé successivement les fonctions d'assistant du 2 mai 1988 au 1er mai 1989 au Centre Hospitalier Robert Debré à Reims, puis du 1er mai 1989 au 30 avril 1990 à la Maison de Santé des Gardiens de la Paix à Paris et a été ensuite affecté en tant qu'assistant au service de chirurgie de l'Hôpital de Wissembourg en avril 1990 ; qu'il résulte de l'arrêt de renvoi qu'Haitham X... qui n'était pas durant cette période titulaire d'un diplôme lui permettant d'exercer en France ne disposait pas d'ordonnances à son nom et ne pouvait pas, en dehors de ses services dans les hôpitaux signer d'ordonnances ; que les époux X... ont néanmoins pu se constituer des stocks de médicaments extrêmement variés, grâce, notamment, aux ordonnances comportant le cachet du Dr Z..., détournées au préjudice de la Maison de Santé des Gardiens de la Paix, et dont de nombreux exemplaires ont été retrouvés à leur domicile ; que s'agissant de l'administration de Glibenclamide dont Caroline Y... a été victime entre le 10 juillet 1990 et le 28 août 1990, il résulte de l'arrêt de renvoi que Liliane X... a pu se procurer 420 comprimés contenant cette substance, commercialisée notamment sous la dénomination « Euglocan » ou « Daonil », entre le 9 juillet 1990 et le 14 août 1990, soit : les 9 juillet et 13 juillet 1990 par des achats dans des pharmacies situées à Wissembourg et Strasbourg, de comprimés d'Euglocan ou de DaoniI, grâce à des ordonnances au nom du Dr Z... de la Maison de Santé des Gardiens de la Paix, dont il est établi qu'elles ont été rédigées et signées par Liliane A... :- le 28 juillet 1990 pour l'achat à Paris d'une boîte de 100 comprimés de Daonil au moyen d'une ordonnance de l'hôpital de Wissembourg,- le 30 juillet 1990 pour l'achat à Paris d'une boîte de 100 comprimés de Daonil au moyen d'une ordonnance au nom de X...,- le 14 août 1990 pour l'achat à Paris d'une autre boîte de 100 comprimés de Daonil, l'ordonnancier mentionnant toujours X... comme prescripteur, qu'il en ressort que si les ordonnances des 9 et 13 juillet 1990 ont été utilisées à l'insu d'Haitham X..., Liliane A... en étant la rédactrice et signataire, les achats importants de Daonil effectués les 28 juillet, 30 juillet et 14 août, ont été effectués grâce à des ordonnances, non falsifiées, dont Haitham X... était le prescripteur ; qu'il apparaît donc que ce dernier, qui a mis à la disposition de Liliane X... les ordonnances pré-signées, sans se préoccuper de l'usage qui en serait fait, a commis une faute d'imprudence ayant directement concouru à l'administration à Caroline Y... d'une substance nuisible à sa santé ; que, s'agissant des prescriptions de Valium ayant provoqué l'intoxication de l'enfant et son hospitalisation à Reims du 27 au 28 juin 1990, l'information a établi que trois achats de ce produit avaient été faits sur ordonnance du Centre Hospitalier de Reims : la première en date du 20 octobre 1988, la deuxième en date du 10 janvier 1989 et la troisième en date du 2 juin 1989 ; que si l'intervention fautive d'Haitham X... n'est pas démontrée s'agissant des premiers achats, Liliane A... étant notamment la rédactrice et signataire de la deuxième ordonnance, les conditions dans lesquelles Haitham X... a rédigé et signé la troisième ordonnance, sans se préoccuper de l'usage qui pouvait en être fait, caractérisent une faute d'imprudence ayant concouru à l'intoxication de l'enfant ; que Caroline Y... ne se prévaut que d'un préjudice moral et fait état des profondes souffrances psychologiques qui l'ont perturbée et d'une sociabilité limitée pendant de nombreuses années ; que les faits d'administration de substances toxiques dont elle a été victime ont provoqué nécessairement un bouleversement d'ordre psychologique pour Caroline Y..., au vu des pièces produites, il convient d'indemniser ce préjudice moral par la somme de 15 000 euros ; que l'arrêt sera réformé sur ce point » ;

" 1° / alors que l'arrêt de renvoi rendu par la chambre de l'instruction n'établit aucun fait par lui-même et se contente de fixer les limites de la saisine de la juridiction de jugement ; qu'il appartient à celle-ci d'apprécier si ces faits sont établis en se fondant sur les pièces du dossier et le déroulement des débats ; qu'en jugeant qu'il résultait de l'arrêt de renvoi qu'Haitham X... n'était pas titulaire d'un diplôme lui permettant d'exercer en France, ne disposait pas d'ordonnances à son nom et ne pouvait pas, en dehors de ses services dans les hôpitaux, signer d'ordonnances et que Liliane A... avait pu se procurer des comprimés contenant du Glibenclamide entre le 9 juillet 1990 et le 14 août 1990, grâce notamment à une ordonnance non falsifiée dont Haitham X... aurait été le prescripteur, alors que ces énonciations, qui déterminaient seulement les limites de la saisine de la cour d'assises, ne pouvaient, par elles-même, établir aucun fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2° / alors que le préjudice de la victime n'est indemnisable que s'il est la conséquence directe du fait dommageable ; que, s'il résulte des réponses aux questions posées à la cour et au jury que Caroline Y... a été victime d'une incapacité de travail personnel par l'administration de substances qui sans être de nature à donner la mort étaient nuisibles à la santé, il n'est nullement établi que cette administration soit le fait de Liliane A..., la cour d'assises n'ayant pas statué sur ce fait en raison de l'extinction de l'action publique suite au décès de cette dernière et ne l'ayant pas relevé dans sa décision sur les intérêts civils ; qu'en affirmant qu'Haitham X... avait commis une faute d'imprudence ayant directement concouru à l'administration à Caroline Y... de substances nuisibles à sa santé en mettant à la disposition de Liliane A... des ordonnances pré-signées sans se préoccuper de l'usage qui en serait fait alors qu'il n'était nullement établi que l'administration de substances nuisibles à Caroline Y... soit imputable à Liliane A..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 3° / alors que les juges du fond doivent répondre aux moyens péremptoires invoqués par les parties ; qu'Haitham X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que le lien de causalité entre les troubles que présentait Caroline Y... à l'époque des faits et l'administration des substances en cause n'était pas certain et nécessitait un complément d'expertise en raison de l'incertitude sur l'étiologie de ces troubles ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des écritures d'appel d'Haitham X..., la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Liliane A... a été mise en accusation du chef d'empoisonnement, d'administration à Caroline Y..., mineure de quinze ans, de substances nuisibles à la santé, de recel d'ordonnances provenant du délit d'abus de confiance commis par Haitham X..., de faux en apposant sa signature sur plusieurs ordonnances, d'usage de faux ; qu'Haitham X... a été mis en accusation du chef d'empoisonnement, d'administration de substances nuisibles à la santé à mineure de quinze ans, et de complicité d'abus de confiance, en détournant des ordonnances au préjudice de la maison de santé des gardiens de la paix, de faux en écriture privée en apposant sa signature sur diverses ordonnances, et d'usage de faux ; que, par arrêt du 10 septembre 2002, la cour a constaté l'extinction de l'action publique à l'égard de Liliane A... décédée le 4 novembre 1995 ; que, après avoir déclaré constante l'administration, à Caroline Y..., de substances nuisibles à sa santé, la cour d'assises, par arrêt du 13 septembre 2002, a déclaré Haitham X... coupable du seul délit d'abus de confiance ;
Attendu que, pour condamner Haitham X... à indemniser la partie civile du préjudice moral résultant de l'administration de substances nuisibles à sa santé, la cour d'appel énonce qu'en mettant à la disposition de Liliane A... des ordonnances pré-signées, sans se préoccuper de l'usage qui en serait fait, il a commis une faute d'imprudence qui a directement concouru à l'administration de ces substances ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs qui constatent souverainement l'existence d'un lien de causalité entre la faute d'imprudence retenue et l'administration de substances nuisibles à la santé, quel qu'ait pu être l'auteur de celle-ci, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions, a justifié sa décision et fait l'exacte application de l'article 372 du code de procédure pénale ;
Qu'en effet, un verdict négatif ne met pas obstacle à ce que la cour examine si le fait poursuivi, dépouillé des circonstances qui lui imprimaient le caractère d'un crime, n'est pas néanmoins dommageable et de nature à engager, en cas de faute constatée de l'accusé, la responsabilité civile de celui-ci ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 375, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a confirmé l'arrêt civil de la cour d'assises du 14 septembre 2002 en ce qu'il avait condamné Haitham X... à payer à Caroline Y... la somme de 10 000 euros au titre de l'article 375 du code de procédure pénale et a condamné Haitham X... à payer à Caroline Y... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
" aux motifs que « l'arrêt sera confirmé en ce qu'il a alloué la somme de 10 000 euros au titre de l'article 375 du code de procédure pénale, une somme supplémentaire de 1 500 euros étant allouée au titre de la procédure d'appel » ;
" 1° / alors qu'aux termes de l'article 375 du code de procédure pénale, seul l'auteur de l'infraction constatée par la déclaration de la cour et du jury peut être condamné par la cour d'assises à payer des frais irrépétibles à la partie civile ; qu'en confirmant l'arrêt civil de la cour d'assises du 14 septembre 2002 en ce qu'il avait condamné Haitham X... à payer à Caroline Y... la somme de 10 000 euros au titre de l'article 375 du code de procédure pénale tout en constatant que celui-ci avait été acquitté pour les faits dont la partie civile demandait réparation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2° / alors que seul l'auteur de l'infraction peut être condamné au paiement des frais visés à l'article 475-1 du code de procédure pénale ; qu'en condamnant Haitham X... à payer à Caroline Y... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale tout en constatant que celui-ci avait été acquitté pour les faits dont la partie civile demandait réparation, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'en condamnant Haitham X... à payer à la partie civile une indemnité au titre des frais non payés par l'Etat, la cour d'appel a fait l'exacte application des article 375 et 475-1 du code de procédure pénale, dés lors que le préjudice indemnisé se rattachait directement à l'infraction d'abus de confiance dont l'accusé a été déclaré coupable ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Pometan conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-80260
Date de la décision : 17/09/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 sep. 2008, pourvoi n°08-80260


Composition du Tribunal
Président : M. Le Gall (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.80260
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award