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16/09/2008 | FRANCE | N°07-43580

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2008, 07-43580


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Doux frais est soumise à la convention collective des abattoirs, ateliers de découpe et centres de conditionnement de volailles du 10 juillet 1996 étendue, dont l'article 5 de l'annexe 1 (ouvriers) prévoit, pour le personnel ayant un horaire quotidien ininterrompu de huit heures au moins, une pause "casse-croûte" de 30 minutes, payée ; que postérieurement à la réduction du temps de travail dans l'entreprise à 39 heures hebdomadaires en 1982, les salariés post

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Doux frais est soumise à la convention collective des abattoirs, ateliers de découpe et centres de conditionnement de volailles du 10 juillet 1996 étendue, dont l'article 5 de l'annexe 1 (ouvriers) prévoit, pour le personnel ayant un horaire quotidien ininterrompu de huit heures au moins, une pause "casse-croûte" de 30 minutes, payée ; que postérieurement à la réduction du temps de travail dans l'entreprise à 39 heures hebdomadaires en 1982, les salariés postés, qui ne travaillaient plus 8 heures en continu mais 7 heures 50, ont continué à bénéficier de cette pause rémunérée de 30 minutes ; que le 23 décembre 1999, a été conclu au sein de l'unité économique et sociale Doux Galina, dans le cadre de l'application du volet défensif de la loi dite Aubry I du 13 juin 1998, un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail prévoyant notamment la réduction du temps de travail effectif de 10 %, un dispositif de modulation, le maintien du salaire brut mensuel de base antérieur par le biais d'une prime "complément ARTT" ainsi que le bénéfice pour les salariés postés et/ ou en journée continue d'une demi-heure de pause payée par jour, sur 5 jours travaillés, intégrée à l'horaire collectif affiché, mais non assimilée à du temps de travail effectif; que la société a dénoncé le 3 avril 2003 l'accord de 1999, lequel est resté en vigueur jusqu'au 3 juillet 2004 ; qu'un "protocole d'accord d'entreprise relatif à la négociation annuelle sur les salaires et le temps de travail 2004" du 27 mai 2004 a prévu notamment l'intégration de la totalité du solde du complément ARTT dans le salaire de base, des augmentations de salaires, et, s'agissant de l'aménagement et du temps de travail, a retenu comme principes devant être mis en oeuvre par un accord collectif postérieur, une durée de travail effectif de 35 heures hors pauses, la modulation du temps de travail, ainsi que le paiement de pauses en sus pour le personnel non cadre travaillant en journée continue, soit au minimum 1 heure 15 de pauses payées par semaine travaillée ; que par note d'information du 2 juillet 2004 émanant du directeur de l'établissement Doux frais de Locminé, les membres du comité d'établissement ont été informés des "modalités concernant la durée du temps de travail au sein de l'établissement que l'employeur envisage d'appliquer à compter du lundi 12 juillet 2004" ; que cette note indiquait que les temps de pause seraient rémunérés par application des dispositions de la convention collective et prévoyait que l'ensemble du personnel à temps plein non cadre accomplirait 35 heures hebdomadaires de travail effectif hors pauses ; que Mme Y... et 4 autres salariés de l'établissement de Locminé, employés comme ouvriers de fabrication, considérant qu'ils étaient payés pour 35 heures de travail effectif et que les 2 heures 30 de pause hebdomadaires n'étaient plus rémunérées, ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de rappels de salaires et congés payés afférents à compter du 5 juillet 2004 au titre des temps de pause ainsi que de dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait jugé que le principe de la rémunération du temps de pause de 30 minutes par jour sur 5 jours travaillés au sein de l'établissement de Locminé pour les salariés exerçant leur activité en travail posté et /ou en journée continue constitue un avantage individuel acquis et condamné en conséquence la société au paiement de rappels de salaires et congés payés arrêtés au 5 mars 2007, outre des temps de pause pour la période postérieure, alors, selon le moyen :

1°/ que ne peut pas constituer un avantage individuel acquis une règle collective, relative aux conditions de travail de l'ensemble des salariés, et tenant notamment à l'organisation du temps de travail ; qu'en retenant en l'espèce qu'il existait un avantage individuel acquis relatif au temps de pause et à sa rémunération qui pourtant concernait, collectivement, les conditions de travail de l'ensemble du personnel travaillant en équipe, la cour d'appel a violé l'article L. 132-8 du code du travail ;

2°/ qu'en matière de rémunération, il ne peut y avoir d'avantage individuel acquis que tenant au niveau de la rémunération effectivement perçue ; qu'en l'espèce, par application de l'accord du 23 décembre 1999, les salariés percevaient, outre la rémunération du temps de travail effectif et de 2 h 30 de pause, un "complément ARTT" permettant le maintien d'un salaire correspondant au paiement de 39 heures (travail effectif + pauses rémunérées + complément = rémunération sur la base de 39 heures) ; que le protocole du 27 mai 2004 prévoyait quant à lui (article I) l'intégration totale du "complément ARTT" dans le taux horaire, si bien que la seule rémunération du travail effectif correspondait désormais à la rémunération de 39 heures de présence ; que le niveau de rémunération était ainsi maintenu, les salariés étant désormais rémunérés pour l'équivalent de 39 heures, indépendamment de la rémunération du temps de pause ; que rien ne pouvait donc interdire que la rémunération des pauses, venant en sus, soit faite selon de nouvelles modalités ; qu'en affirmant néanmoins que les salariés avaient perdu l'avantage individuel acquis de la rémunération des temps de pause en refusant de rechercher si le niveau de rémunération des salariés n'était pas globalement resté le même compte tenu de l'intégration du complément ARTT dans le salaire de base, la cour d'appel a violé l'article L. 132-8 du code du travail ;

3°/ qu'en tout état de cause qu'un avantage individuel acquis ne peut être maintenu que s'il est plus favorable que les règles applicables dans l'entreprise en vertu d'un accord collectif ayant le même objet ; que le caractère plus ou moins favorable doit s'apprécier globalement ; qu'en l'espèce, l'accord du 23 décembre 1999, accordait aux salariés, une rémunération sur la base de 39 heures, pauses et complément ARTT compris ; que le protocole du 27 mai 2004 prévoyait la dernière étape de l'intégration du complément ARTT dans le taux horaire, les salariés percevant donc désormais une rémunération correspondant à 39 heures de travail, indépendamment de la rémunération du temps de pause devant se faire selon de nouvelles modalités ; qu'en refusant en l'espèce de procéder à une comparaison globale avant de dire que les salariés avaient droit au maintien d'un prétendu avantage acquis à se faire rémunérer 30 minutes de pause par jour, la cour d'appel a violé l'article L. 132-8 du code du travail, ensemble le protocole d'accord du 27 mai 2004 ;

Mais attendu que lorsque la convention ou l'accord qui a été dénoncé n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précisés au troisième alinéa de l'article L. 132-8, devenu L. 2261-10, du code du travail, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord ; que constitue un avantage individuel acquis, un avantage qui au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; que tant le niveau que la structure de la rémunération résultant d'un accord collectif dénoncé constitue à l'expiration des délais précités un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l'entreprise à la date de la dénonciation ;

Et attendu qu'après avoir relevé, par des motifs non critiqués, que l'accord du 27 mai 2004 ne valait pas accord de substitution au sens de l'article L. 132-8, alinéa 6, devenu L. 2261-13, du code du travail, la cour d'appel a constaté qu'en application de l'accord du 23 décembre 1999, les salariés étaient rémunérés sur une base de 35 heures pour 32 heures et 30 minutes de travail effectif ainsi que 2 heures et 30 minutes de pause, tandis que postérieurement au 5 juillet 2004, ils avaient été rémunérés, également sur une base de 35 heures, mais pour 35 heures de travail effectif, ce dont il résultait qu'ils avaient été privés d'un élément de rémunération, soit la rémunération des temps de pause ; qu'elle a exactement décidé que cet avantage salarial, qui n'avait pas le même objet que le maintien de la rémunération afférente à 39 heures postérieurement à la réduction du temps de travail, et dont les salariés avaient individuellement bénéficié, leur était acquis ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que la cour d'appel, qui a accueilli intégralement les prétentions des salariés sans répondre aux conclusions de la société selon lesquelles, depuis la prise d'effet de la dénonciation de l'accord, le temps de pause avait été rémunéré conformément aux stipulations de la convention collective de branche et qu'il y avait à tout le moins lieu de déduire ces sommes des montants réclamés par les salariés ainsi que les périodes d'absences, a méconnu les exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société au paiement de sommes à titre de rappels de salaires et congés payés afférents, l'arrêt rendu le 14 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-43580
Date de la décision : 16/09/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 14 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 sep. 2008, pourvoi n°07-43580


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.43580
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