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06/05/2008 | FRANCE | N°07-13762

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 06 mai 2008, 07-13762


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'administration fiscale n'a pas admis le caractère de biens professionnels, exonérés en tant que tels de l'impôt de solidarité sur la fortune, retenu par les époux X... dans les déclarations souscrites par eux au titre des années 1998 à 2001, à des comptes courants ; que M. X... détenait, en tant qu'entrepreneur individuel de location de fonds de commerce, dans les sociétés X... et X... levage (les sociétés), dont il était actionnaire majoritaire ainsi qu'à des

comptes bancaires ; qu'elle leur a notifié, le 6 novembre 2001, un redre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'administration fiscale n'a pas admis le caractère de biens professionnels, exonérés en tant que tels de l'impôt de solidarité sur la fortune, retenu par les époux X... dans les déclarations souscrites par eux au titre des années 1998 à 2001, à des comptes courants ; que M. X... détenait, en tant qu'entrepreneur individuel de location de fonds de commerce, dans les sociétés X... et X... levage (les sociétés), dont il était actionnaire majoritaire ainsi qu'à des comptes bancaires ; qu'elle leur a notifié, le 6 novembre 2001, un redressement et a émis, le 21 août 2001, un avis de mise en recouvrement du supplément d'impôt estimé dû ; qu'après rejet de leur demande, les époux X... ont assigné le directeur des services fiscaux de Seine-Maritime devant le tribunal afin d'obtenir le dégrèvement des impositions réclamées ; que leur demande a été accueillie par la cour d'appel ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le directeur général des impôts fait grief à l'arrêt d'avoir reconnu le caractère de biens professionnels aux comptes courants détenus par M. X... dans les sociétés, alors, selon le moyen, que, conformément aux dispositions de l'article 885 N du code général des impôts, les biens nécessaires à l'exercice, à titre principal , d'une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont considérés comme des biens professionnels ; que si en principe l'inscription d'un bien au bilan d'une entreprise individuelle présume du caractère professionnel dudit bien, il n'en demeure pas moins que ce caractère n'est définitivement établi que si le bien en cause est réellement nécessaire à l'exploitation ; qu'au cas particulier des comptes courants d'associés ouverts dans une société, ces comptes ne constituent pas pour une société une augmentation de ses fonds propres mais s'analysent en une créance des associés titulaires desdits comptes sur la société ; qu'à ce titre, ces apports ne peuvent en aucun cas être qualifiés de biens professionnels ; que dès lors, ne saurait être exclu de la base taxable à l'impôt de solidarité sur la fortune le montant d'un compte courant détenu par l'associé majoritaire, quand bien même ce dernier aurait inscrit ledit compte à l'actif du bilan de son entreprise ; qu'en l'espèce, c'est ce que faisait valoir l'administration devant la cour d'appel de Rouen en relevant que les comptes courants détenus par M. X... dans les sociétés SA X... et SARL X... Levage et inscrits à l'actif du bilan de son entreprise individuelle de loueur de fonds de commerce étaient sans lien direct avec son activité individuelle et devaient dès lors être compris dans la base taxable à l'impôt de solidarité sur la fortune, conformément aux dispositions des articles 885 N et suivants du code général des impôts ; que la cour d'appel de Rouen a néanmoins estimé le contraire en jugeant que lesdits comptes, inscrits au bilan de l'entreprise individuelle, étaient indétachables des fonds de commerce donnés en location gérance et devaient dès lors bénéficier de l'exonération relative aux biens professionnels ; qu'en agissant de la sorte, en contradiction avec l'ensemble des principes susvisés, la cour a nécessairement violé les dispositions de l'article 885 N du code général des impôts ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, que l'inscription au bilan de l'activité commerciale exercée à titre individuel par M. X... des comptes courants d'associé litigieux faisait présumer leur caractère professionnel, de sorte que l'administration fiscale qui entendait réintégrer ces comptes dans l'assiette de l'impôt devait faire la preuve que les sommes y figurant n'étaient pas réellement nécessaires à l'activité professionnelle du contribuable, l'arrêt retient, par motifs propres, d'un côté, que ces comptes courants étaient, non des créances détenues par un dirigeant à titre personnel, mais des créances "indétachables" du fonds de commerce donné en location-gérance à une société d'exploitation dont les titres étaient eux-mêmes représentatifs d'un bien professionnel, de l'autre, que ces comptes courants, qui résultaient, pour partie des bénéfices de l'exploitation, et pour partie d'emprunts dont l'administration avait admis la déductibilité, étaient nécessaires aux besoins de l'exploitation compte tenu de l'importance des pertes d'exploitation des exercices concernés ayant entraîné une procédure d'alerte; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel en a déduit à bon droit que les comptes courants d'associé litigieux, nécessaires à l'exploitation du fonds, constituaient des biens professionnels ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le second moyen :

Vu l'article 885 N du code général des impôts ;

Attendu que lorsqu'un bien, même inscrit à l'actif du bilan d'une entreprise, est affecté en partie à l'exploitation et se trouve, pour le surplus, mis à la disposition privative de l'exploitant, seule la fraction de ce bien nécessaire à l'exploitation peut être considérée comme un bien professionnel ;

Attendu que pour reconnaître le caractère de biens professionnels aux comptes bancaires détenus par M. X..., l'arrêt, après avoir relevé que les comptes bancaires litigieux étaient inscrits à l'actif du bilan de l'entreprise individuelle de ce dernier, retient, par motifs propres et adoptés, que l'administration se bornait à constater qu'ils n'étaient pas seulement alimentés par les loyers des fonds en location-gérance et qu'ils n'étaient pas entièrement employés pour payer les charges de l'entreprise ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a reconnu le caractère de biens professionnels aux comptes bancaires détenus par M. X..., l'arrêt, l'arrêt rendu le 24 janvier 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Joséphine Y..., veuve X..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'épouse commune en biens de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07-13762
Date de la décision : 06/05/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôt de solidarité sur la fortune - Assiette - Exclusion - Biens professionnels - Définition - Biens servant à l'exercice d'une profession - Limite - Affectation en partie à l'exploitation et pour le surplus privative

Lorsqu'un bien, même inscrit à l'actif du bilan d'une entreprise, est affecté en partie à l'exploitation et se trouve pour le surplus mis à la disposition privative de l'exploitant, seule la fraction de ce bien nécessaire à l'exploitation peut être considérée comme un bien professionnel au sens des dispositions de l'article 885 N du code général des impôts


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 24 janvier 2007

A rapprocher :Com., 3 juin 1998, pourvoi n° 96-16470, Bull. 1998, IV, n° 176 (2) (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 06 mai. 2008, pourvoi n°07-13762, Bull. civ. 2008, IV, N° 94
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, IV, N° 94

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Jobard
Rapporteur ?: M. Salomon
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.13762
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