La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2008 | FRANCE | N°07-87226

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 avril 2008, 07-87226


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Renaud, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 2 octobre 2007, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de Dominique Y... du chef de diffamation publique envers un particulier ;
Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;

Sur les moyens uniques de cassation du mémoire ampliatif et du mémoire personnel réunis, pris de la violation des articles R. 621-1 du code pénal, 23, 29, 32, aliné

a 1er, 53, de la loi du 29 juillet 1881, 388, 466 et 591 du code de procédure pé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Renaud, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 2 octobre 2007, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de Dominique Y... du chef de diffamation publique envers un particulier ;
Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;

Sur les moyens uniques de cassation du mémoire ampliatif et du mémoire personnel réunis, pris de la violation des articles R. 621-1 du code pénal, 23, 29, 32, alinéa 1er, 53, de la loi du 29 juillet 1881, 388, 466 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a dit n'y avoir lieu à requalification, la poursuite étant définitivement fixée par la citation introductive d'instance, a relaxé en conséquence Dominique Y... du chef de diffamation publique, et a débouté la partie civile de sa demande d'indemnisation ;
"aux motifs que la diffamation a un caractère délictuel lorsqu'elle est publique ; que l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881 exige pour la constitution de ce délit que les écrits aient été vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics ou par tout moyen de communication au public par voie électronique ; qu'en l'espèce, Dominique Y... a adressé copie du courrier litigieux au procureur de la République et au bâtonnier de l'ordre des avocats de Strasbourg, ce qui ne caractérise à l'évidence pas la publicité au sens de l'article 23 de la loi de 1881, le tribunal ayant justement relevé que ces destinataires sont, compte tenu de la profession d'avocat exercée par Renaud X..., liés par une communauté d'intérêts touchant à la dignité de la justice de ceux qui y concourent ; qu'en l'espèce, le tribunal a requalifié les faits en diffamation non publique ; qu'aux termes des articles 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, la citation a pour rôle de fixer définitivement le délit sous le rapport de la qualification précisée selon ladite citation et en application de l'article de la loi du 29 juillet 1881 qui y est visé ; qu'en conséquence, il incombait aux premiers juges de constater que le délit de diffamation publique n'était pas caractérisé et de relaxer Dominique Y... des fins de la poursuite ;
"alors que, d'une part, la distribution d'un écrit non confidentiel à divers destinataires qui ne constituent pas entre eux un groupement de personnes liées par une communauté d'intérêts caractérise la publicité prévue par l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'aucune communauté d'intérêts au sens de ce texte, n'existe entre le bâtonnier et le procureur de la République, leur seul souci commun de la dignité de la justice ne caractérisant pas cette communauté d'intérêts ; que c'est donc à tort que l'arrêt attaqué a exclu le caractère public des propos incriminés dans les lettres adressées au bâtonnier de l'ordre des avocats de Strasbourg et au procureur de la République en se fondant sur une supposée communauté d'intérêts entre ces destinataires ;
"alors que, d'autre part et en toute hypothèse, le juge, saisi d'écrits diffamatoires sous le chef de diffamation publique, a le devoir d'opérer la disqualification des faits en diffamation non publique lorsque les conditions de la publicité ne sont pas réunies, requalification qu'aucune disposition de la loi du 29 juillet 1881 ne prohibe ; qu'en refusant d'opérer la requalification des propos poursuivis sous la qualification de diffamation publique, dont elle avait relevé l'absence de caractère public, en diffamation non publique, la cour d'appel a méconnu son office" ;
Vu les articles 29 de la loi du 29 juillet 1881, R. 621-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, lorsque l'élément de publicité fait défaut, les imputations diffamatoires caractérisent la contravention prévue et réprimée par l'article R. 621-1 du code pénal ; que la juridiction ayant constaté que les faits retenus constituent l'infraction de diffamation non publique a le devoir de statuer sur la prévention ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Renaud X... a fait assigner Dominique Y... devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers un particulier, sur le fondement des articles 29, 32 alinéa 1er et 42 de la loi du 29 juillet 1881, en raison de l'envoi par celui-ci au procureur de la République et au bâtonnier de l'ordre des avocats de la copie d'une lettre le mettant en cause ;
Attendu que les premiers juges, après avoir relevé que les destinataires de ce courrier, compte tenu de la profession d'avocat exercée par Renaud X..., étaient liés par une communauté d'intérêts et qu'ainsi, l'élément de publicité nécessaire pour caractériser le délit de diffamation faisait défaut, ont déclaré Dominique Y... coupable de diffamation non publique ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris, relaxer le prévenu et débouter la partie civile, l'arrêt retient que « la citation a pour rôle de fixer définitivement et exclusivement l'objet de la poursuite et que les juges doivent apprécier le délit sous le rapport de la qualification qui y est précisée » ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que la prohibition de requalifier la prévention en matière de presse connaît ici sa seule exception, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
Que la cassation est encourue de ce chef, et qu'en l'absence de pourvoi du ministère public, elle doit être limitée aux intérêts civils ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, en date du 2 octobre 2007, mais seulement en ses dispositions concernant l'action civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-87226
Date de la décision : 08/04/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Diffamation - Publicité - Diffamation non publique - Disqualification - Contravention - Effet

COMPETENCE - Compétence matérielle - Juridictions correctionnelles - Fait qualifié délit constituant une contravention - Obligation de statuer CONTRAVENTION - Fait qualifié délit constituant une contravention - Compétence - Compétence matérielle - Détermination

Lorsque l'élément de publicité fait défaut, les imputations diffamatoires caractérisent la contravention prévue et réprimée par l'article R. 621-1 du code pénal et la juridiction ayant constaté que les faits retenus constituent l'infraction de diffamation non publique a le devoir de statuer sur cette prévention. Encourt la censure, l'arrêt qui, en pareille occurrence, prononce une relaxe motivée par la prohibition de requalifier la prévention en matière de presse


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 02 octobre 2007

Sur la portée du défaut de publicité en matière de diffamation, à rapprocher :Crim., 21 février 1995, pourvoi n° 92-86617, Bull. crim. 1995, n° 76 (cassation), et les arrêts cités ;2e Civ., 24 octobre 2002, pourvoi n° 01-00029, Bull. 2002, II, n° 237 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 avr. 2008, pourvoi n°07-87226, Bull. crim. criminel 2008, N° 94
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2008, N° 94

Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Mathon
Rapporteur ?: M. Straehli
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.87226
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award