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28/03/2008 | FRANCE | N°05-18598

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 mars 2008, 05-18598


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X..., avocat au barreau de Lille, a été poursuivi disciplinairement pour avoir tenu, à l'issue d'une audience de la cour d'assises du Nord, dans le bureau du président de cette cour, à l'adresse d'un conseiller présent, les propos suivants : "Je ne vous supporte plus .. j'en ai assez de vous voir. Vous me gonflez avec votre sourire en coin. Vous serez responsable de ce gâchis. Ce que vous avez fait est dégueulasse. Je regrette de n

e pas avoir, lorsque vous étiez à Lille, déposé plainte contre vous."...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X..., avocat au barreau de Lille, a été poursuivi disciplinairement pour avoir tenu, à l'issue d'une audience de la cour d'assises du Nord, dans le bureau du président de cette cour, à l'adresse d'un conseiller présent, les propos suivants : "Je ne vous supporte plus .. j'en ai assez de vous voir. Vous me gonflez avec votre sourire en coin. Vous serez responsable de ce gâchis. Ce que vous avez fait est dégueulasse. Je regrette de ne pas avoir, lorsque vous étiez à Lille, déposé plainte contre vous." ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Amiens, 20 juin 2005), qui retient que ces propos constituaient un manquement à la délicatesse, prononce la peine de l'avertissement ;

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de statuer ainsi, alors, selon le moyen :

1°/ que les sanctions de la liberté d'expression doivent être prévues par une loi suffisamment claire et précise qui permette aux intéressés de régler leur conduite au regard de ses prescriptions ; que le principe déontologique de délicatesse ne répondant pas à ces exigences, il ne peut servir de fondement à une ingérence dans la liberté d'expression de l'avocat ; que, dès lors, en refusant d'écarter le principe de délicatesse pour sanctionner M. X... en raison de ses propos, la cour d'appel aurait violé l'article 10 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

2°/ qu'au sens de la Convention européenne des droits de l'homme, les sanctions de la liberté d'expression nécessaires, notamment à la défense de l'autorité du pouvoir judiciaire doivent avoir pour objet d'assurer le respect et la confiance du public dans le fonctionnement des tribunaux ; qu'en l'espèce, les propos reprochés à M. X... ont été prononcés en privé, devant un petit nombre de magistrats, si bien qu'ils n'étaient pas de nature à constituer une menace pour l'autorité de l'institution judiciaire ; qu'en estimant, cependant, que le prononcé d'une sanction disciplinaire était nécessaire pour garantir l'autorité du pouvoir judiciaire, la cour d'appel aurait violé l'article 10 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

3°/ que les abus de la liberté d'expression envers les personnes ne peuvent être poursuivis que sur le fondement de textes spéciaux ; qu'en sanctionnant les propos de M. X... adressés à un magistrat sur le seul fondement d'un principe général, tel que la délicatesse, la cour d'appel aurait violé, par fausse application, l'article 183 du décret du 27 novembre 1991 ;

Mais attendu que les propos adressés ad hominem et manifestant exclusivement une animosité personnelle, sans traduire une idée, une opinion ou une information susceptible d'alimenter une réflexion ou un débat d'intérêt général, ne relèvent pas de la protection du droit à la liberté d'expression prévue par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que de tels propos tenus par un avocat sont constitutifs d'un manquement à la délicatesse et entrent comme tels dans les prévisions des textes régissant spécialement la discipline de la profession ; que, dès lors, le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille huit.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 20 juin 2005


Publications
Proposition de citation: Cass. Civ. 1re, 28 mar. 2008, pourvoi n°05-18598

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Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Formation : Chambre civile 1
Date de la décision : 28/03/2008
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05-18598
Numéro NOR : JURITEXT000018550655 ?
Numéro d'affaire : 05-18598
Numéro de décision : 10800362
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2008-03-28;05.18598 ?
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