LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Nîmes, 29 juin 2006), que Mme X..., employée en qualité d'esthéticienne par Mme Y... depuis le 9 décembre 1999, a été placée en arrêt maladie le 19 septembre 2002, puis a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur, alléguant des faits de harcèlement moral ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir retenu que la salariée avait fait l'objet d'un harcèlement moral et de l'avoir condamnée à indemniser son employée de ce chef, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article L. 122-49 du code du travail ne peut s'appliquer à des faits antérieurs à la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 qui l'a institué ; qu'en se fondant essentiellement sur des faits antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi susvisée pour dire que les faits de harcèlement moral dénoncés par Mme X... apparaissaient caractérisés, la cour d'appel a violé les dispositions d'ordre public de l'article 2 du code civil, ensemble les articles L. 122-49, L. 122-52 du code du travail ;
2°/ qu'en fondant sa décision sur des témoignages sans rechercher, comme elle y était invitée, si ceux-ci concernaient des faits postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2002, la cour d'appel, qui a expressément fondé sa décision sur les dispositions de la loi nouvelle sur le harcèlement moral, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et a violé de la sorte les articles 2 du code civil, L. 122-49, L. 122-52 du code du travail ;
3°/ que le régime probatoire spécifique en matière de harcèlement moral, qui a été institué par l'article L. 122-52 du code du travail, lui-même issu de la loi du 3 janvier 2003, ne saurait trouver à s'appliquer à des faits antérieurs à cette disposition législative ; qu'en examinant l'ensemble des éléments produits par Mme X... à l'aune du régime probatoire ci-dessus évoqué, la cour d'appel a fait rétroagir les dispositions de l'article L. 122-52 du code du travail à des faits antérieurs à son entrée en vigueur et a ainsi violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 122-52 susvisé ;
4°/ qu'il entre dans l'office de la Cour de cassation d'écarter les dispositions de l'article L. 122-52 du code du travail lorsque, au cas particulier, leur application prive l'employeur du droit à un procès équitable ; qu'en l'espèce, la salariée ne reprochait aucun fait précis matériel et vérifiable à son employeur, mais seulement des reproches désobligeants et un mauvais climat de travail ; qu'en acceptant d'alléger la charge de la preuve de Mme X... et en exigeant au contraire de Mme Y... qu'elle rapporte la preuve objective et certaine que la relation de travail était exclusive de tout harcèlement moral, ce qui est impossible en pratique, la cour d'appel a privé Mme Y... du droit à un procès équitable et a violé les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'abstraction faite d'une référence erronée aux articles L. 122-49 et L. 122-52 du code du travail qui n'étaient pas applicables en raison de la date de survenance des faits, la cour d'appel a caractérisé à la charge de l'employeur un comportement fautif préjudiciable à la salariée dont elle a souverainement estimé qu'il présentait une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille huit.