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05/03/2008 | FRANCE | N°06-60309

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mars 2008, 06-60309


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué qu'une instance de dialogue européenne a été mise en place au sein de la société Bouygues par un accord du 5 mai 1995, qui a été reconduit pour une durée de quatre ans par un accord du 11 juillet 1996 ; que trois accords ont été ultérieurement signés les 12 avril 2000,15 mai 2002,18 septembre 2003 ; que la CGT a désigné le 2 novembre 2004 ses représentants auprès de l'instance de dialogue social européenne ; que la société qui a contesté ces désignations,

a, dans le dernier état de ses écritures, demandé de constater que le protoco...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué qu'une instance de dialogue européenne a été mise en place au sein de la société Bouygues par un accord du 5 mai 1995, qui a été reconduit pour une durée de quatre ans par un accord du 11 juillet 1996 ; que trois accords ont été ultérieurement signés les 12 avril 2000,15 mai 2002,18 septembre 2003 ; que la CGT a désigné le 2 novembre 2004 ses représentants auprès de l'instance de dialogue social européenne ; que la société qui a contesté ces désignations, a, dans le dernier état de ses écritures, demandé de constater que le protocole du 11 juillet 1996 avait été renouvelé en temps utile de sorte que ces désignations qui n'en avaient pas respecté les termes devaient être annulées, et qu'elle n'était pas tenue dès le 11 juillet 2000 de constituer un comité d'entreprise européen ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Bouygues fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'annulation de la désignation par la CGT de ses membres à l'instance de dialogue européenne alors, selon le moyen, " qu'aux termes d'un principe désormais constant, " nul ne peut se contredire au détriment d'autrui " ; qu'en application de ce principe, lorsqu'une partie émet un acte unilatéral susceptible de produire des effets à l'égard d'autres parties, il lui est interdit de se mettre en contradiction avec le parti qu'elle a adopté lorsque l'acte a été émis et notamment de contester la régularité de cet acte ; qu'ayant procédé à la désignation de certaines personnes, dans le but qu'elles siègent au sein de l'instance de dialogue européenne, la CGT ne pouvait contester la légalité de l'instance de dialogue européenne que postulait sa désignation ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, les juges du fond ont violé le principe suivant lequel " nul ne peut se contredire au détriment d'autrui " ;

Mais attendu que le moyen est inopérant dès lors que c'est à la demande de la société Bouygues tendant à ce qu'il soit dit qu'elle n'était pas tenue de constituer un comité d'entreprise européen, que la cour d'appel a statué comme elle a fait ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Bouygues fait encore grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1° / que faute d'avoir recherché, comme le demandait la SA Bouygues, à quelle date l'accord du 11 juillet 1996 avait pu être signé par la CGT, et donc à quelle date la CGT est devenue partie à cet accord, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble au regard de l'article L. 132-6 du code du travail ;

2° / qu'en toute hypothèse, à supposer même que la CGT ait apposé sa signature sur un exemplaire de l'accord du 11 juillet 1996 qu'elle détenait à la date utile, elle ne pouvait être regardée comme ayant exprimé sa volonté de signer l'accord que pour autant que cette volonté se soit manifestée à l'égard des autres parties ; qu'en s'abstenant de rechercher à quelle date cette manifestation avait pu intervenir, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 132-6 du code du travail,13 de la directive n° 94-45 du 22 septembre 1994 et 5 de la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996 ;

3° / qu'à supposer même qu'après avoir adhéré à l'accord du 11 juillet 1996, la CGT n'ait pas adhéré aux avenants ultérieurs (12 avril 2000,15 mai 2002 et 18 septembre 2003), cette circonstance importait peu, l'absence de la CGT ne pouvant faire obstacle au maintien des accords ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1134 du code civil, L. 132-7 du code du travail,13 de la directive n° 94-45 du 22 septembre 1994 et 5 de la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996 ;

4° / que lorsque les parties décident, par une convention, d'actualiser un précédent accord, c'est nécessairement qu'elles considèrent que ce dernier accord continue de s'appliquer ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher si, en signant l'avenant du 12 avril 2000 et les avenants ultérieurs (15 mai 2002 et 18 septembre 2003), les parties à l'accord du 11 juillet 1996 n'entendaient pas maintenir ce dernier en vigueur, et donc le reconduire, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble au regard de l'article L. 132-6 du code du travail ;

5° / que, cinquièmement, les juges du fond devaient rechercher à tout le moins si, à défaut même de volonté expresse des parties de maintenir l'accord, celui-ci ne devait pas être considéré comme reconduit en application de l'article L. 132-6 du code du travail ; que faute de s'être expliqués sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de ce texte ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a retenu, par motifs propres et adoptés, que l'accord d'anticipation du 11 juillet 1996 conclu pour une durée déterminée de quatre ans expirant le 11 juillet 2000 devait conformément à l'article 5 de la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996 et à l'article 1 de l'accord faire l'objet d'un accord de reconduction exprès qui ne résultait pas de l'avenant du 12 avril 2000 portant seulement sur son actualisation, et qui n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise sans incidence sur la solution du litige, a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu les articles 13 de la directive 94 / 45 du 22 septembre 1994 et 5 de la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996, ensemble l'article L. 439-6 du code du travail ;

Attendu que pour valider les désignations des membres de l'instance de dialogue social européenne effectuées par la CGT, la cour d'appel retient par motifs propres et adoptés que la société Bouygues est depuis le 11 juillet 1996 tenue de constituer un comité européen selon les règles fixées par les articles L. 439-6 et suivants du code du travail et que celles-ci n'imposent nullement que les membres du comité d'entreprise européen soient les mêmes que les membres du comité de groupe, qu'il est également possible que les membres désignés par les organisations syndicales le soient parmi les salariés de l'une des entreprises relevant du groupe, sans que ces salariés soient forcément des élus ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constations, que l'accord d'anticipation était caduc depuis le 11 juillet 2000, de sorte, qu'en l'absence de comité d'entreprise européen constitué conformément aux dispositions des articles L. 439-6 et suivants du code du travail, aucune désignation ne pouvait être effectuée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Vu l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande subisidiaire de la société Bouygues tendant à l'annulation des désignations de M. X..., Z..., A... et B... en tant que membres titulaires de l'instance de dialogue européenne et de M. Y... en qualité de représentant syndical à cette instance, l'arrêt rendu le 12 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la disposition cassée ;

Annule les désignations de M. X..., Z..., A... et B... en tant que membres titulaires de l'instance de dialogue européenne et de M. Y... en qualité de représentant syndical à cette instance ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-60309
Date de la décision : 05/03/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 octobre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mar. 2008, pourvoi n°06-60309


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.60309
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