La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/11/2007 | FRANCE | N°06-41800

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 novembre 2007, 06-41800


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 17 janvier 2006) que le 1er mai 2003, la société Fromagerie de Saint-Désir a cédé à la société Fromagerie de Livarot une branche de son fonds de commerce portant sur la fabrication de produits laitiers ; que le 17 mars 2004, annulant les décisions contraires de l'inspecteur du travail, le ministre a autorisé le licenciement économique de MM. X... et Y..., délégués syndicaux au service de la société Fromagerie de Saint-Désir, qui avai

ent refusé de passer au service de la société cessionnaire ; que les recours fo...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 17 janvier 2006) que le 1er mai 2003, la société Fromagerie de Saint-Désir a cédé à la société Fromagerie de Livarot une branche de son fonds de commerce portant sur la fabrication de produits laitiers ; que le 17 mars 2004, annulant les décisions contraires de l'inspecteur du travail, le ministre a autorisé le licenciement économique de MM. X... et Y..., délégués syndicaux au service de la société Fromagerie de Saint-Désir, qui avaient refusé de passer au service de la société cessionnaire ; que les recours formés contre cette décision ont été rejetés le 21 février 2006 par le tribunal administratif de Caen ; que les 23 et 27 novembre 2003, la société Fromagerie de Livarot avait saisi le tribunal de grande instance de Lisieux pour qu'il soit constaté que les mandats de ces délégués syndicaux avaient pris fin en mai 2003, du fait de la disparition de l'établissement de Saint-Désir ;

Sur le premier moyen :

Attendu que MM. X... et Y... et le syndicat général agro-alimentaire CFDT du Calvados font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevables et fondées les demandes présentées par la société Fromagerie de Livarot alors, selon le moyen, que l'application des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail prévoyant le transfert des contrats de travail des salariés exerçant leur activité au sein d'une branche d'activité cédée ne saurait résulter de la seule décision de la société cessionnaire ou de ses "estimations" ; que de ce chef, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que la cession intervenue le 1er mai 2003 avait entraîné le transfert, à la société Fromagerie de Livarot, d'une entité économique autonome conservant son identité et poursuivant son activité, satisfaisant ainsi aux exigences du texte susvisé ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les salariés et le syndicat font encore grief à l'arrêt d'avoir réformé le jugement en ce qu'il avait décidé de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure administrative en cours et d'avoir constaté que les mandats avaient pris fin le 22 mai 2003, alors, selon le moyen :

1 / qu'il appartient aux juges de respecter le principe de séparation des pouvoirs, résultant de la loi des 16-24 août 1790 ; qu'en refusant de le faire au seul motif que le sursis à statuer n'était pas demandé, la cour d'appel a violé ledit principe et ladite loi ;

2 / qu'il n'appartient qu'à l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé de déterminer, sous le contrôle du juge administratif, l'employeur du salarié, notamment en cas de transfert partiel d'entreprise contesté ; que, dès lors, en refusant de surseoir à statuer de ce chef, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790 ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucune demande de question préjudicielle et qui n'était pas tenue de surseoir à statuer sur les demandes qui lui étaient soumises jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur les autorisations de licenciement, a estimé, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer ;

Que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les salariés et le syndicat font également grief à l'arrêt d'avoir constaté que les mandats de délégués syndicaux avaient pris fin le 22 mai 2003 et de les avoir condamnés au paiement d'une indemnité alors, selon le moyen :

1 / que le transfert de l'activité d'une entreprise ne peut entraîner l'application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail et la poursuite des contrats de travail des salariés affectés à cette entité avec le cessionnaire que s'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'à la date du transfert, l'entité reprise avait "vocation" à se maintenir sous une direction nouvelle, de sorte qu'il devait être considéré que celle-ci conservait son identité, peu important que les conditions d'exploitation aient été modifiées du fait du regroupement fonctionnel opéré avec l'activité de fabrication de produits laitiers exploitée par le cessionnaire sur le site de Livarot, ayant pour conséquence que l'activité cédée avait perdu toute autonomie ; qu'il résulte de ces constatations que l'activité en cause n'avait pas conservé son identité, de sorte qu'il n'y avait pas lieu à application des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail, ainsi violé par fausse application ;

2 / que les salariés, dans leurs conclusions, faisaient valoir que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation quant au transfert de leurs contrats de travail, avait émis d'abord les plus grandes réserves sur le fait que l'ensemble du personnel retrouverait un poste de travail rigoureusement identique à celui précédemment occupé, la future usine de Livarot étant une unité de production nettement plus moderne et automatisée que celle de Saint-Désir, ce qui devait générer sur un certain nombre de postes des modifications de tâches non négligeables auxquelles il convenait d'ajouter le changement de lieu de travail et la modification des horaires de travail ; qu'il résultait des propres constatations de la société Fromagerie de Livarot la disparition de fait de l'établissement distinct de Saint-Désir ; que les anciens salariés de Saint-Désir ne faisaient l'objet d'aucun regroupement particulier et travaillaient sur le même site que leurs collègues, les équipes dans lesquelles ils étaient affectés étant composées "indistinctement" d'anciens salariés de Saint-Désir et de salariés de l'entreprise et qu'ils ne disposaient d'aucun encadrement spécifique ; qu'il appartenait en tout cas à la cour d'appel de répondre à ce chef des conclusions des salariés ;

que, faute de l'avoir fait, elle a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

3 / qu'il résulte de l'article L. 412-18 du code du travail que lorsqu'un délégué syndical est compris dans un transfert partiel d'entreprise par application du deuxième alinéa de l'article L 122-12, le transfert de ce salarié doit être soumis à l'inspecteur du travail ; qu'en l'espèce, à tenir même pour applicables les dispositions de l'article L. 122-12, étant constant que la cession portait sur une "partie du fonds de commerce de la société Fromagerie de saint-Désir", il appartenait à la cour d'appel de rechercher si le transfert des salariés intéressés avait bien été autorisé, ce qui était précisément contesté ; que faute d'avoir procédé à cette recherche, elle n'a pas, en tout cas, légalement justifié sa décision au regard des dispositions susvisées ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans être liée par un avis de l'inspecteur du travail exprimé avant le changement d'employeur, a constaté qu'au jour du transfert, la branche d'activité cédée constituait une entité économique autonome et que les modifications ensuite apportées dans son fonctionnement par la société cessionnaire n'avaient pas affecté son identité à la date du changement d'employeur ; qu'elle a pu en déduire que, nonobstant la perte d'autonomie de l'entité après son transfert, celui-ci relevait de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail ;

Attendu ensuite qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni de la procédure, que les salariés aient soutenu que, du fait des conditions de la cession, le transfert de leur contrat de travail devait être autorisé par l'inspecteur du travail ;

D'où il suit que le moyen, qui n'est pas fondé dans ses deux premières branches et qui est irrecevable en sa troisième branche, comme nouveau et mélangé de fait et de droit, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. X... et Y... et le Syndicat général agroalimentaire CFDT du Calvados aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-41800
Date de la décision : 13/11/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen (1re chambre civile), 17 janvier 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 nov. 2007, pourvoi n°06-41800


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BAILLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:06.41800
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award