La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2006 | FRANCE | N°03-47481

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 février 2006, 03-47481


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 octobre 2003) et la procédure, M. X... et cinq autres salariés de la société Colas Ile-de-France Normandie ont été licenciés le 24 janvier 1997 pour faute grave, motifs pris par l'employeur d'un refus d'obéissance et d'abandon de poste à la suite de leur refus, le 6 décembre 1996, de prendre leur poste de travail pour cause d'intempéries puis de leur départ sans autorisation du chantier à l'annonce du non-paiement des heures d'int

erruption de leur tâche ; qu'un arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 octobre 2003) et la procédure, M. X... et cinq autres salariés de la société Colas Ile-de-France Normandie ont été licenciés le 24 janvier 1997 pour faute grave, motifs pris par l'employeur d'un refus d'obéissance et d'abandon de poste à la suite de leur refus, le 6 décembre 1996, de prendre leur poste de travail pour cause d'intempéries puis de leur départ sans autorisation du chantier à l'annonce du non-paiement des heures d'interruption de leur tâche ; qu'un arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le 20 décembre 2001 sur renvoi après cassation (chambre sociale, 12 décembre 2000 : Bulletin V n° 414) a jugé que les salariés avaient exercé leur droit de grève et, annulant les licenciements prononcés et ordonnant la réintégration des intéressés dans l'entreprise, a condamné l'employeur à leur verser une provision avant expertise sur l'indemnité pour perte de salaire subie ;

Attend que la société Colas Ile-de-France Normandie fait grief à l'arrêt, rendu après expertise, de l'avoir condamnée à payer aux salariés des sommes au titre des salaires, du treizième mois, des primes de vacances, d'ancienneté et exceptionnelle ainsi que de congés payés, avec intérêts de droit et capitalisation, pour la période comprise entre la date de leur licenciement et celle de leur réintégration, alors, selon le moyen :

1 / que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement ; que le jugement qui se borne, dans son dispositif, à ordonner une mesure provisoire n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; que par arrêt en date du 20 décembre 2001, la cour d'appel, dans son dispositif, a octroyé aux salariés réintégrés "une provision" à titre "d'indemnité" de perte de salaire ; que l'arrêt du 20 décembre 2001 n'a donc pas tranché dans son dispositif le litige relatif à la somme que devait percevoir les salariés en réparation de leur préjudice dans la limite du montant des salaires dont ils ont été privés ; qu'en décidant qu'il résultait de l'arrêt du 20 décembre 2001 qu'aucune déduction ne pouvait être opérée sur les salaires dus aux salariés, la cour d'appel a violé les articles 480 et 482 du nouveau Code de procédure civile et l'article 1351 du Code civil ;

2 / que le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé ; qu'il appartient au juge de déduire des sommes dues au salarié les revenus qu'il a pu tirer d'une autre activité professionnelle pendant la période correspondante et le revenu de remplacement qui a pu lui être servi pendant cette période ;

que pour déterminer l'indemnité de perte de salaire due à chacun des salariés, la cour d'appel a énoncé qu'il importait peu, comme le faisait pourtant valoir la société Colas Ile-de-France dans ses conclusions, que les salariés aient perçus ou non des allocations de chômage ou des salaires pendant la période de nullité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 521-1 du Code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958, que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle ; que selon l'article L. 521-1 du Code du travail, qui détermine les conditions d'exercice de ce droit, la grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié et que l'exercice du droit de grève ne saurait donner lieu de la part de l'employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux et que tout licenciement prononcé en violation de ce texte est nul de plein droit ; que dès lors, la cour d'appel a exactement décidé que les salariés, dont les contrats de travail n'avaient pas été rompus et dont les licenciements étaient nuls, avaient droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'ils auraient dû percevoir entre leur éviction de l'entreprise et leur réintégration, peu important qu'ils aient ou non reçu des salaires ou un revenu de remplacement pendant cette période ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Colas Ile-de-France Normandie SA aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-47481
Date de la décision : 02/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Droit de grève - Exercice - Conséquences - Réparation du préjudice des salariés dont le licenciement est nul - Indemnités - Montant.

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Nullité - Effets - Réparation du préjudice - Indemnités - Montant

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Poursuite du contrat de travail - Effet

Il résulte du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958, que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle ; et, selon l'article L. 521-1 du code du travail, qui détermine les conditions d'exercice de ce droit, la grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ; l'exercice du droit de grève ne pouvant donner droit de la part de l'employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux, et tout licenciement prononcé en violation de ce texte est nul de plein droit. Une cour d'appel décide donc exactement que des salariés dont les contrats de travail n'avaient pas été rompus et dont les licenciements étaient nuls, avaient droit au paiement d'une indemnité égale au montant de la rémunération qu'ils auraient dû recevoir entre leur éviction et leur réintégration, peu important qu'ils aient ou non perçu des salaires ou un revenu de remplacement pendant cette période.


Références :

Code civil 1351
Constitution du 04 octobre 1958
Nouveau code de procédure civile 480, 482
Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
code du travail L521-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 octobre 2003

Sur l'effet de la nullité du licenciement d'un salarié gréviste, dans le même sens que : Chambre sociale, 1994-06-29, Bulletin 1994, V, n° 215, p. 146 (cassation). Sur les conséquences de la nullité d'un licenciement, en sens contraire : Chambre sociale, 2003-05-28, Bulletin 2003, V, n° 181, p. 176 (cassation partielle) ; Chambre sociale, 2003-07-03, Bulletin 2003, V, n° 214, p. 220 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 fév. 2006, pourvoi n°03-47481, Bull. civ. 2006 V N° 53 p. 47
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 V N° 53 p. 47

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Allix.
Rapporteur ?: Mme Perony.
Avocat(s) : Me Le Prado.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:03.47481
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award