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01/03/2005 | FRANCE | N°04-87398

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 mars 2005, 04-87398


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire MENOTTI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Abdelhamid,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 26 octobre 20

04, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de meurtre aggravé et tentative, v...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire MENOTTI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Abdelhamid,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 26 octobre 2004, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de meurtre aggravé et tentative, vols aggravés et vols, a rejeté sa demande de mise en liberté ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 144, 148-1, 148-2, 194, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoirs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé de constater qu'Abdelhamid X... n'était plus détenu en vertu d'un titre de détention à compter du 8 août 2004 et de prononcer sa mise en liberté d'office ;

"aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure, que, par déclaration faite le 5 mai 2004 auprès du greffe du centre pénitentiaire de Clairvaux, X... Abdelhamid a formé une demande de mise en liberté, au visa des articles 148-1 et suivants du Code de procédure pénale ; cette demande, transmise le même jour à la cour d'appel de Versailles, a été visée le 7 mai 2004 au cabinet du procureur général, selon le cachet apposé sur l'imprimé, puis retournée par courrier du 12 mai, au centre pénitentiaire de Clairvaux, revêtue d'une mention indiquant "ne concerne pas la cour d'appel de Versailles" ; que par lettre datée du 28 mai 2004, le responsable du greffe judiciaire de Clairvaux a informé le requérant que sa demande avait été retournée au centre pénitentiaire avec cette indication ; l'intéressé, n'a, à ce moment, formulé ni observation ni protestation à cet égard, alors que sa précédente demande, du 26 avril 2004, était pendante devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles ; qu'un avis d'audience pour le 8 juin 2004 lui avait été adressé le 19 mai 2004, et qu'il avait rédigé, à la date du 29 mai 2004, un mémoire de six pages, enregistré le 4 juin 2004 par le greffier de la chambre de l'instruction, ne faisant aucune référence à cette deuxième demande, ou à ses difficultés d'acheminement ; par lettre du 8 octobre 2004, Me Thierry Levy, avocat d'Abdelhamid X..., a attiré l'attention de M. le procureur général près la cour d'appel de Versailles sur le fait que la chambre de l'instruction n'avait pas statué dans le délai légal de deux mois, courant à compter de l'arrêt du 8 juin 2004 ; sollicité à cet effet, le greffe du centre pénitentiaire de Clairvaux a alors transmis, par télécopie, le 11 octobre 2004, à la cour d'appel de Versailles, copie de la demande de mise en liberté du 5 mai 2004, et des pièces ayant accompagné son retour ; cette demande a finalement été enregistrée au greffe de la chambre de l'instruction le 11 octobre 2004 ; il est établi qu'après avoir transité dans différents services, la déclaration d'Abdelhamid X... n'est parvenue entre les mains du greffier de la chambre de l'instruction, qui en était seul destinataire, que le 11 octobre 2004, date à laquelle elle a été transcrite selon les formes prévues par la loi ; ces éléments établissent que cette transcription a été différée en raison d'une circonstance imprévisible et insurmontable, indépendante de la volonté du destinataire du courrier, dont l'acheminement a été défaillant, revêtant les caractères exigés par l'article 194 (3ème alinéa, in fine) du Code de procédure pénale, rien n'indiquant que la première transmission lui soit effectivement parvenue, le délai de deux mois prévu par l'article 148-2 du Code de procédure pénale se calcule à compter du lendemain du jour où la demande a été enregistrée au greffe de la chambre de l'instruction ; ce délai n'est pas expiré à ce jour ; il n'y a donc pas lieu à remise en liberté d'office du requérant ;

"alors, d'une part, qu'en vertu de l'article 148-2 du Code de procédure pénale, lorsque la personne a déjà été jugée en premier ressort et qu'elle est en instance d'appel, la juridiction saisie d'une demande de mise en liberté statue dans les deux mois de la demande ; toutefois, lorsqu'au jour de la réception de la demande il n'a pas encore été statué sur une précédente demande, le délai ne commence à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente ; faute de décision à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire ; qu'en l'espèce, Abdelhamid X... a, par déclaration faite le 5 mai 2004, auprès du greffe du centre pénitentiaire de Clairvaux, formé une demande de mise en liberté ; cette demande a été reçue et visée le 7 mai 2004 au cabinet du procureur général de la cour d'appel de Versailles, avant qu'une précédente demande ne soit rejetée par un arrêt du 8 juin 2004 de la chambre de l'instruction de Versailles ; qu'ainsi, la chambre de l'instruction de Versailles qui a refusé de constater qu'en l'absence de décision dans le délai de deux mois à compter de cet arrêt, la détention provisoire d'Abdelhamid X... avait pris fin le 8 août 2004, et de prononcer sa mise en liberté d'office, a excédé ses pouvoirs et violé les textes et principes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la chambre de l'instruction ne pouvait pas justifier son refus de mettre fin à la détention provisoire d'Abdelhamid X..., en lui reprochant un manque de diligences lorsqu'il a appris que sa demande avait été renvoyée par le parquet de la cour d'appel de Versailles ; qu'en ajoutant ces conditions qui ne sont pas prévues par la loi, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs et violé les textes et principes susvisés ;

"alors, de surcroît, que la chambre de l'instruction ne pouvait pas sans contradiction affirmer que le point de départ du délai se situait le jour où la demande avait été enregistrée au greffe de la chambre de l'instruction de Versailles, soit le 11 octobre 2004, tout en justifiant le retard pris dans l'examen de la demande le 26 octobre 2004, par référence à l'article 194 du Code de procédure pénale qui permet un retard en cas d'événement imprévisible et insurmontable ;

"alors, enfin, que le défaut d'enregistrement par le parquet général de la cour d'appel de Versailles, juridiction compétente pour examiner la demande de mise en liberté, formée par déclaration d'Abdelhamid X... auprès du greffe de l'établissement pénitentiaire de Clairvaux, ne saurait constituer une circonstance imprévisible et insurmontable suspendant le délai fixé à l'article 148-2 du Code de procédure pénale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par déclaration faite le 5 mai 2004 auprès du chef de l'établissement pénitentiaire, Abdelhamid X..., condamné en première instance par la cour d'assises des Hauts de Seine, dont la décision a été frappée d'appel, a formé une demande de mise en liberté, alors qu'il n'avait pas encore été statué sur une précédente demande rejetée par arrêt de la chambre de l'instruction le 8 juin suivant ; que, transmise au procureur général, cette nouvelle demande de mise en liberté a été retournée à son expéditeur ; qu'elle est en définitive parvenue au greffe de la chambre de l'instruction le 11 octobre 2004, date à laquelle elle a été enregistrée ; que la chambre de l'instruction a statué sur cette demande le 26 octobre 2004 ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation d'Abdelhamid X..., qui demandait sa mise en liberté d'office, faute de décision ayant statué sur sa demande dans le délai légal, les juges relèvent, notamment, que le délai de deux mois prévu par l'article 148-2 du Code de procédure pénale se calcule à compter du lendemain du jour où la demande a été enregistrée au greffe de la chambre de l'instruction, et qu'il n'était donc pas expiré au jour du prononcé de leur décision ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de la loi ;

D'où il suit que le moyen doit être rejeté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 144, 148-1, 148-2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté présentée par Abdelhamid X... ;

"aux motifs qu'Abdelhamid X... a été placé sous mandat de dépôt le 2 septembre 1984 ; qu'il a été condamné le 8 décembre 1989 par la cour d'assises de l'Yonne ; cette décision est devenue définitive lors du rejet de son pourvoi, le 5 décembre 1990 ;

à compter de cette date, il a exécuté successivement plusieurs peines privatives de liberté, et ce jusqu'au 30 novembre 2000, date à laquelle la commission de réexamen a ordonné la suspension de l'exécution de la peine de réclusion criminelle, l'intéressé demeurant détenu pour autre cause ; Abdelhamid X... n'a été de nouveau incarcéré, au titre de l'affaire criminelle, que le 26 février 2003, suite à l'arrêt de condamnation prononcé par la cour d'assises de Nanterre ; l'intéressé ayant formé appel, la chambre criminelle a désigné la cour d'assises de Versailles le 24 avril 2003 ; en raison de l'encombrement du rôle de cette Cour, saisie de nombreux dossiers complexes, nécessitant chacun plusieurs journées d'audience, et de l'importance de la procédure concernant Abdelhamid X..., il n'a pas été possible d'audiencer l'affaire immédiatement, étant observé que le président de la cour d'assises ayant à en connaître a ordonné des expertises complémentaires relatives à la personnalité de l'accusé ; l'affaire ayant été fixée aux audiences des 27 septembre au 4 octobre 2004, Abdelhamid X... et son avocat ont sollicité un renvoi à une session ultérieure ; l'affaire est à présent fixée aux audiences des 10 au 17 janvier 2005 ; il n'apparaît pas, en conséquence, que la nouvelle période de détention, en attente de ce nouveau jugement, ait dépassé un délai raisonnable ;

"alors, d'une part, qu'il y a lieu de faire droit à la demande de mise en liberté d'un accusé lorsque le délai raisonnable prévu à l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme est dépassé ; que c'est le cas d'Abdelhamid X... qui a été incarcéré le 2 septembre 1984, et qui ne doit être rejugé que le 10 janvier 2005 ;

"alors, d'autre part, que, même à supposer que le point de départ de la détention doit être fixé au 26 novembre 2003, sa durée de plus d'un an et onze mois dépasse également un délai raisonnable, sans qu'elle ne puisse être justifiée ni par le prétendu encombrement de la juridiction ni par les prétendues mesures d'expertises complémentaires demandées par le président de la cour d'assises" ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief des motifs par lesquels les juges ont estimé que sa détention n'excédait pas un délai raisonnable, dès lors qu'après déclaration, par la cour d'assises de première instance, du bien-fondé de l'accusation dirigée contre lui, l'accusé, privé de sa liberté conformément à l'article 5.1.a) de la Convention européenne, ne peut, dans l'attente de la décision de la cour d'assises d'appel, bénéficier des dispositions de l'article 5.3 du même texte, qui accordent à toute personne arrêtée ou détenue le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du Code de procédure pénale ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Ménotti conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-87398
Date de la décision : 01/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, 26 octobre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 mar. 2005, pourvoi n°04-87398


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.87398
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