AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 122-14-3 et L. 321-1-1 du Code du travail ;
Attendu que M. X..., engagé en 1980 par la société Gilleront en qualité "d'homme toutes mains", a été licencié pour motif économique le 11 février 1994 ;
Attendu que pour dire que le licenciement du salarié n'était pas fondé sur un motif économique réel et sérieux, a condamné l'employeur à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du Code du travail et lui a ordonné de rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage versées à l'intéressé dans la limite de trois mois, la cour d'appel a énoncé que l'employeur n'avait pas respecté les règles relatives à l'ordre des licenciements, que la méconnaissance par l'employeur des critères prévus pour fixer l'ordre des licenciements n'est réprimée par aucun texte spécifique en droit du travail, que le fait qu'à deux reprises le législateur ait entendu faire figurer dans les dispositions de l'article L. 122-14-4 du Code du travail une sanction spécifique du licenciement pour motif économique, et qu'aucune disposition ne vienne compléter celles de l'article L. 321-1 pour le non-respect de l'ordre des licenciements et pour le défaut de reclassement prouve que le législateur a entendu donner à l'article L. 122-14-4 du Code du travail une portée générale pour sanctionner tout licenciement suspect ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse et n'est pas soumise aux sanctions énoncées à l'article L. 122-14-4 du Code du travail, mais constitue une illégalité qui entraîne pour le salarié un préjudice réparé selon son étendue par les juges du fond, la cour d'appel, qui de surcroît, a constaté que l'employeur "connaissait en 1993-94 des difficultés économiques justifiant qu'il recourût à des mesures de restructuration", a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen qui ne seraient pas de nature à elles seules d'admettre le pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 avril 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille quatre.