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24/09/2003 | FRANCE | N°00-16831

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 septembre 2003, 00-16831


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 15 mars 2000), que le Comptoir central de matériel d'entreprise (le CCME), aux droits duquel est venue la société Procrédit Probail, a consenti des concours financiers à deux sociétés de travaux publics constituant le Groupe X... (la société X...) ; que ces concours ont été garantis par le cautionnement, par actes du 16 novembre 1982, de MM.

Marcel et Louis X... et Mme Simone X... ; que la société X... et le CCME ont con...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 15 mars 2000), que le Comptoir central de matériel d'entreprise (le CCME), aux droits duquel est venue la société Procrédit Probail, a consenti des concours financiers à deux sociétés de travaux publics constituant le Groupe X... (la société X...) ; que ces concours ont été garantis par le cautionnement, par actes du 16 novembre 1982, de MM. Marcel et Louis X... et Mme Simone X... ; que la société X... et le CCME ont constitué une SARL, nommée Société auxiliaire de matériels X... (la société SAM), dont le capital social était réparti entre la société X..., propriétaire de 99 % des parts, et le CCME, propriétaire de 1 %, qui avait pour fonction d'acquérir des matériels et de les mettre à la disposition de la société X... ; que, le 20 décembre 1982, la société X... a signé une convention avec le CCME lui accordant, en garantie de ses prêts, un nantissement sur ses parts de la société SAM et une cession de ses créances sur la société SAM, au titre du compte courant de

participation ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société X..., MM. Marcel et Louis X..., ainsi que les héritiers de Mme X... (les cautions), poursuivis par le CCME, ont assigné ce dernier en paiement d'une somme équivalente aux montants des ventes de matériels, en soutenant qu'en l'absence de réalisation du nantissement, la garantie complémentaire constituée par la cession de créance n'était pas acquise et que cette abstention était constitutive d'une faute engageant sa responsabilité ;

Attendu que les cautions reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le moyen :

1 / que la caution est fondée à invoquer, indépendamment de la mise en oeuvre des dispositions de l'article 2037 du Code civil, la responsabilité du créancier qui, abusant du droit que lui confère l'engagement souscrit à son profit, s'abstient de mettre en oeuvre les diligences efficaces et nécessaires au recouvrement de sa créance auprès du débiteur principal ; que les cautions avaient invoqué la responsabilité du CCME, établissement de crédit professionnel et bénéficiaire de leur engagement, qui avait commis une faute dans la mise en oeuvre d'un mécanisme qu'il avait lui-même conçu en tant que spécialiste du financement des opérations en cause et destiné à assurer le paiement de sa créance par le débiteur principal ; qu'en écartant une telle action en responsabilité en relevant que les demandeurs avaient renoncé au bénéfice de l'article 2037 du Code civil et que les conditions d'application de cette disposition n'étaient pas remplies, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants en violation des articles 1134, alinéa 2, 1135 et 1147 du Code civil ;

2 / que pour motiver sa décision, le juge doit se déterminer d'après les circonstances particulières du procès et non par voie de référence à des causes déjà jugées ; que pour écarter toute responsabilité du CCME dans la mise en uvre du mécanisme, destiné à assurer le paiement de sa créance, qu'il avait conçu et mis en place, la cour d'appel s'est bornée à viser les décisions qui avaient statué sur ce mécanisme, sans préciser les raisons pour lesquelles de telles décisions excluaient une faute lourde ou intentionnelle de cet établissement de crédit ; qu'en se prononçant ainsi, sans apprécier les incidences des arrêts auxquels elle se référait sur le litige dont elle était saisie et sur la faute du CCME, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que les cautions avaient souligné dans leurs conclusions d'appel que le CCME avait conçu le système destiné à assurer le recouvrement de sa créance contre le débiteur principal et fondé sur les sociétés dites "Sociétés auxiliaire de matériel" ; qu'il était ajouté que la faute commise dans la mise en oeuvre de ce système - faute qui avait privé le créancier de la possibilité de recouvrer sa créance auprès du débiteur principal - ne pouvait procéder d'une simple erreur et résultait nécessairement de la volonté délibérée du créancier qui avait parallèlement fait croire aux cautions que les dettes garanties pourraient être payées grâce au système mis en place ; qu'en s'abstenant d'analyser ces éléments d'où les cautions déduisaient l'existence d'une faute lourde ou intentionnelle commise par le CCME, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que tout manquement à ses obligations engage la responsabilité de son auteur ; qu'en écartant la responsabilité du CCME au motif qu'aucune faute lourde ou dolosive n'était caractérisée à sa charge, et en s'abstenant ainsi de rechercher si cet établissement de crédit n'avait pas manqué à l'obligation d'exécuter le contrat conformément aux exigences de la bonne foi et suivant les conditions s'imposant à tout professionnel diligent, en omettant de mettre en uvre de façon efficace le système dit des "Sociétés auxiliaires de matériel" qu'il avait pourtant lui-même conçu et mis en place et dont il reconnaissait qu'il fonctionnait également dans l'intérêt des cautions, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1135 et 1147 du Code civil ;

5 / que les cautions avaient, dans leurs conclusions d'appel, démontré, par une analyse de la convention instituant le mécanisme dit des "Sociétés auxiliaires de matériel" et des décisions rendues qui avaient rejeté l'action par laquelle le CCME avait tenté d'obtenir le bénéfice du système mis en place, que l'échec de l'opération résultait de ce que cet établissement de crédit avait omis de réaliser le nantissement prévu, c'est-à-dire avait omis de faire vendre ou de se faire attribuer les parts sociales nanties ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui critiquait spécifiquement les motifs des premiers juges qui avaient estimé à tort que l'échec de l'application du mécanisme litigieux résultait du défaut de signification de l'acte de nantissement et qu'une telle cause pouvait être imputée à faute aux cautions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et privé d'effectivité le droit au double degré de juridiction en violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que, dès lors que la responsabilité de l'établissement de crédit est recherchée pour perte du bénéfice de subrogation aux droits du créancier, la renonciation par la caution aux dispositions de l'article 2037 du Code civil lui interdit, sauf dol ou faute lourde du créancier, de rechercher cette responsabilité ; qu'ainsi, après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que l'article 8 de l'acte du 20 décembre 1982, établi en trois exemplaires originaux, porte que "ces nantissements et cession transport de créance seront signifiés en application des articles 2075 et 1690 du Code civil aux sociétés intéressées, à leur siège social" ; " à cet effet, tous pouvoirs sont donnés au porteur d'un original des présentes", l'arrêt retient que la maîtrise de l'opération n'était pas dévolue au seul CCME, qu'il appartenait aux cautions de veiller à ne pas concourir à la réalisation de leur propre dommage et qu'en conséquence, les cautions ne rapportaient pas la preuve d'une faute lourde ou dolosive du CCME les privant d'être subrogées dans ses droits ; qu'en l'état de ces motifs, répondant aux conclusions invoquées dans la dernière branche et abstraction faite de ceux surabondants critiqués par la deuxième branche, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer d'autre recherche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne MM. Christian, Frédéric, Louis et Marcel X... et Mmes Josiane et Chantal X... à payer à la société Procredit Probail la somme globale de 1800 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 00-16831
Date de la décision : 24/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), 15 mars 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 sep. 2003, pourvoi n°00-16831


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.16831
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