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23/10/2002 | FRANCE | N°02-81153

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 octobre 2002, 02-81153


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de la société civile professionnelle VIER et BARTHELEMY, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Ugur, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 24 janvie

r 2002, qui, dans la procédure suivie contre Eric Y... du chef de violences, a prononcé sur l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de la société civile professionnelle VIER et BARTHELEMY, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Ugur, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 24 janvier 2002, qui, dans la procédure suivie contre Eric Y... du chef de violences, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 459, 509, 512, 515, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 1351 du Code civil, 132-24 du Code pénal, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a, sur l'action civile, rejeté les demandes de réparation formées par Guillaume X..., partie civile, à l'encontre d'Eric Y..., définitivement relaxé sur l'action publique ;

"aux motifs que Guillaume X... motive ses conclusions en énonçant que la Cour n'a à connaître que les intérêts et que, devant la Cour, le concluant reprend, sur les seuls intérêts civils, la discussion soutenue dans son exploit introductif d'instance ; que le jugement n'est ni critiqué ni analysé ; que les conclusions d'appel, par ailleurs, doivent être motivées en matière civile et contenir les moyens des parties ; que le jugement a, relaxant du chef de coups et blessures involontaires, recherché à juste titre si d'autres qualifications pouvaient être retenues ; que si l'appel sur les intérêts civils est en effet recevable, il appartient à la cour d'appel de rechercher si les faits peuvent être autrement appréciés et autrement qualifiés ; qu'il est cependant constant que les blessures alléguées ont été jugées non établies comme imputables à Eric Y... ; qu'à ce jour, devant la Cour sont produits trois certificats médicaux du docteur Z..., celui du 13 mars 1998 analysé par le jugement certifiant avoir donné des soins en urgence à Guillaume X... le 1er février 1996, celui du 28 juillet 1998 ajoutant que l'accident a nécessité une incapacité temporaire totale du 1er février 1996 au 5 avril 1996, celui du 27 septembre 2001 ajoutant que Guillaume X... a subi, le 1er février 1996, une intervention chirurgicale sous anesthésie générale ;

qu'il apparaît ainsi que, le 1er février 1996, il y a eu bagarre avec échange de coups et chutes entre Guillaume X... et Eric Y... ; que, le 1er février 1996, Guillaume X... a subi des soins ; que les certificats médicaux ne disent rien de l'origine de la blessure ; que l'imputation à Eric Y... des blessures en cause, par son fait volontaire, a été jugée non établie ; que la Cour, saisie en matière civile, ne peut revenir sur la qualification de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité temporaire totale supérieure à huit jours, définitivement écartée par le tribunal en une décision pénale ayant acquis l'autorité de chose jugée ; que la cour d'appel pourrait, en matière civile, si les dommages étaient établis comme imputables à Eric Y..., qualifier ceux-ci de blessures involontaires ; que, cependant, l'incapacité temporaire totale en l'espèce étant inférieure à trois mois, la qualification pénale serait contraventionnelle ; que la prescription de un an serait acquise, l'action civile au pénal étant prescrite comme l'action pénale ; qu'aucune analyse des faits n'apparaît possible ; que le doute sérieux sur l'imputabilité de la blessure subie au partenaire de ladite bagarre résulte de divers éléments déjà invoqués et ne peut permettre à la Cour, en toute hypothèse, de dire qu'il existe un lien de causalité entre les faits commis par les deux protagonistes de la rixe invoquée et la blessure soignée à 17 heures 35 ; qu'en effet, outre la tardiveté du dépôt de la plainte, il a été souligné qu'aucun témoin n'a vu les faits, que les incidents verbaux et les provocations existaient entre les parties, que, selon les collègues de travail, Guillaume X... était animé par une tendance à se considérer victime et à chercher les incidents ; que, par suite, alors que Guillaume X... a allégué d'une blessure due à une chute due à son fait, il n'apparaît pas possible de définir un lien certain de causalité entre l'échange de coups et la blessure constatée ; qu'il résulte de la procédure d'enquête que les deux protagonistes sont partis ensemble pour aller se battre ou se disputer, loin des regards des tiers, chacun se suivant au volant de son propre véhicule ; qu'ils ont alors assumé en un consentement mutuel les conséquences de leurs actes ; que l'excuse de provocation alléguée par Eric Y... en subsidiaire serait, en outre, invocable en l'espèce, d'ailleurs réciproquement au cas toujours où l'imputabilité de la blessure en cause à Eric Y... serait établie, les protagonistes de cette dispute s'étant provoqués l'un l'autre, étant précisé à toutes fins que la dispute elle-même a été proposée (provoquée) par Guillaume X... ;

qu'il résulte de ces données que Guillaume X... doit être débouté de ses demandes, d'ailleurs non particulièrement développées en cause d'appel ;

"alors que, d'une part, l'appel de la partie civile défère à la juridiction du second degré l'action en réparation des conséquences dommageables de tous les faits visés à la prévention initiale, qu'ils eussent été ou non partiellement écartés par la décision sur l'action publique ; qu'ainsi saisis, les juges du second degré sont tenus, au regard de l'action civile, de rechercher si les faits qui leur sont déférés constituent une infraction pénale et de prononcer, en conséquence, sur la demande en réparation de la partie civile ; qu'en refusant d'examiner en l'espèce les demandes en réparation de Guillaume X... compte tenu de l'autorité de chose jugée qui s'attacherait aux qualifications de coups et blessures volontaires définitivement écartés par le tribunal correctionnel, la chambre des appels correctionnels a méconnu le sens et la portée des textes visés au moyen ;

"alors que, d'autre part, la chambre des appels correctionnels a expressément relevé que, le 1er février 1996, une bagarre avait éclaté entre Guillaume X... et Eric Y..., le premier ayant subi des soins administrés le jour même par un médecin ;

qu'en relevant, pour rejeter l'action civile de Guillaume X..., qu'un lien de causalité entre les faits commis par les protagonistes de la rixe et la blessure soignée le même jour n'était pas établi, la chambre des appels correctionnels a entaché sa décision d'une grave contradiction privant sa décision de toute motivation ;

"alors que, de troisième part, la procédure devant le juge pénal est orale et ce, même lorsqu'il est appelé à statuer sur les intérêts civils ; qu'en retenant que le jugement n'était ni critiqué ni analysé et que les conclusions d'appel ne contenaient pas de moyens, la chambre des appels correctionnels a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen ;

"alors, enfin, que l'excuse de provocation a été supprimée par le nouveau Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994 ; qu'en jugeant qu'Eric Y... pouvait invoquer cette excuse atténuante, la chambre des appels correctionnels a violé les règles applicables" ;

Vu les articles 509 et 515 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, si les juges du second degré, saisis du seul appel de la partie civile, ne peuvent prononcer aucune peine contre le prévenu définitivement relaxé, ils n'en sont pas moins tenus, au regard de l'action civile, de rechercher si les faits qui leur sont déférés constituent une infraction pénale et de prononcer en conséquence sur la demande de réparation civile ;

Attendu qu'Ugur X..., partie civile, a interjeté appel du jugement rendu le 18 juillet 2001 par le tribunal correctionnel de Montluçon, ayant relaxé Eric Y... du chef de violences aggravées ;

Attendu que les juges du second degré, après avoir relevé que ladite voie de recours était recevable et qu'il leur appartenait de rechercher si les faits pouvaient être autrement appréciés ou qualifiés, constatent que "l'imputation à Eric Y... des blessures en cause, par son fait volontaire, a été jugée non établie" et que "la Cour, saisie en matière civile, ne peut revenir sur la qualification" de violences aggravées, "définitivement écartée par le tribunal en une décision pénale ayant acquis force de chose jugée" ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel qui, statuant sur l'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction, devait examiner si les faits constituaient le délit poursuivi, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 24 janvier 2002, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bourges, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Riom et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Sassoust conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-81153
Date de la décision : 23/10/2002
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

APPEL CORRECTIONNEL OU DE POLICE - Appel de la partie civile - Relaxe du prévenu en première instance - Effet.


Références :

Code de procédure pénale 509 et 515

Décision attaquée : Cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, 24 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 oct. 2002, pourvoi n°02-81153


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.81153
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