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27/03/2001 | FRANCE | N°00-86015

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 mars 2001, 00-86015


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept mars deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Guy,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NOUMEA, chambre correctionnelle, en date du 22 août 2000, qui, sur renvoi après cassation, l'a co

ndamné, pour extorsion de fonds, à un an d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs C...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept mars deux mille un, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Guy,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NOUMEA, chambre correctionnelle, en date du 22 août 2000, qui, sur renvoi après cassation, l'a condamné, pour extorsion de fonds, à un an d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs CFP d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille ;

Vu les mémoires ampliatif et complémentaire produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 592 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt mentionne que la cour d'appel était composée "lors des débats" de Monsieur Fey, président, de Monsieur Grafmuller et de Mademoiselle Imassi, conseillers, que ces magistrats ont participé au délibéré et que la Cour était composée "lors du prononcé du délibéré" de Monsieur Fey, président, et de Messieurs Mauri et Stoltz, conseillers ;

"alors que les décisions rendues en dernier ressort par les juridictions de jugement sont déclarées nulles lorsqu'elles ont été rendues par des juges qui n'ont pas assisté à toutes les audiences de la cause ; qu'en l'état des mentions ambiguës précitées, la Cour de Cassation n'est pas en mesure de s'assurer que les magistrats ayant participé au délibéré sont ceux qui avaient siégé à l'audience des débats, en sorte que l'arrêt n'établit pas la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu" ;

Attendu que les mentions de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les mêmes magistrats ont participé aux débats et au délibéré et que l'arrêt a été lu par le président en l'absence des autres magistrats du siège, en application de l'article 485 du Code de procédure pénale ;

Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4 et 312-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable du délit d'extorsion de fonds ;

"aux motifs que les faits d'extorsion de fonds décrits par M. Z... sont établis en vertu d'un faisceau de présomptions précises et concordantes ; que la remise de fonds est le résultat de la très forte contrainte morale exercée par Guy X... sur M. Z... ; qu'outre la répétition incessante des appels téléphoniques depuis le 8 novembre, il importe de prendre en compte la personnalité de chacun des protagonistes et l'état d'esprit dans lequel se trouvait M. Z... à ce moment ; que M. Z..., responsable d'une agence de voyage alors en grande difficulté puisqu'elle sera ultérieurement déclarée en état de liquidation judiciaire, est alors cité à comparaître devant le tribunal correctionnel pour une affaire dans laquelle certains mis en cause sont traduits en cour d'assises ; qu'il est placé sous contrôle judiciaire ; que M. Z... est aussi indicateur de la DST ; qu'il se trouve confronté à l'intervention de Guy X..., lieutenant de police de la DST en Nouvelle-Calédonie depuis 1994, policier expérimenté, qui ajoute à ses craintes quant à la décision qui risque d'être prononcée contre lui ; que Guy X... a d'ailleurs déclaré que "M. Z... était crédule pour certaines choses" et "qu'avec du recul, il apparaît possible que M. Z... ait senti une pression psychologique (...) il supportait déjà une pression psychologique du fait de l'imminence de sa comparution au tribunal correctionnel" ;

ajoutant que "bien sur il y a eu une démarche positive de ma part en vue d'influencer M. Z... dans la mesure où M. Z... pensait pouvoir se servir de ces révélations d'écoutes sur sa ligne et, dans la mesure où je lui ai proposé un moyen de le déterminer" ; que la personnalité de Guy X... et les moyens employés par lui pour faire pression sur M. Z..., alors psychologiquement très éprouvé, ont accentué l'angoisse et l'inquiétude de ce dernier qui pouvait penser que s'il ne remettait pas l'argent réclamé, il risquait gravement pour sa liberté et pouvait aussi craindre les réactions d'un policier de la DST auquel il aurait résisté ; qu'ainsi l'élément moral de la contrainte morale se trouve caractérisé ;

"alors, d'une part, que la vulnérabilité étant une circonstance aggravante du délit d'extorsion, elle ne saurait caractériser à elle seule un élément constitutif de cette infraction ;

qu'ainsi, en déduisant la contrainte morale de ce que le demandeur aurait profité de l'angoisse et de l'inquiétude de M. Z..., objet d'un procès pénal, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que l'extorsion est le fait d'obtenir par violence, menace de violence ou contrainte la remise de fonds ;

qu'en se bornant à relever que le demandeur aurait fait usage de contrainte à l'égard de M. Z..., sans relever aucun acte de violence ni aucune menace, et en constatant que la transaction proposée à M. Z... avait pour objet de faciliter sa défense devant la juridiction pénale dans une procédure déjà engagée, ce dont il résulte que le refus de M. Z... d'acquérir le matériel litigieux ne l'aurait pas exposé à un mal plus grand, Guy X... ne disposant, en tout état de cause, d'aucun pouvoir de nature à aggraver le sort judiciaire de M. Z..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, enfin, que le demandeur faisait valoir que l'élément de contrainte n'était nullement caractérisé (conclusions p. 5) dès lors, qu'en mobilisant les gendarmes pour le surprendre au moment de la remise des fonds litigieux, M. Z... ne se trouvait pas soumis à une contrainte morale motivant ladite remise, laquelle était en réalité justifiée par d'autres mobiles étrangers à toute pression émanant de la part de Guy X... ; qu'ainsi, en considérant (arrêt p. 9) que la remise des fonds était le résultat de la contrainte morale, exercée sur M. Z... tout en constatant (p. 2) que ce dernier avait, avant même la remise des fonds, contacté les services de police pour dénoncer les faits qu'il imputait à Guy X... et que des policiers étaient présents lors de cette remise, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes visés au moyen" ;

Sur le moyen additionnel, pris de la violation des articles 111-4 et 312-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable du délit d'extorsion de fonds ;

"aux motifs que les faits d'extorsion de fonds décrits par M. Z... sont établis en vertu d'un faisceau de présomptions précises et concordantes ; que la remise de fonds est le résultat de la très forte contrainte morale exercée par Guy X... sur M. Z... ; qu'outre la répétition incessante des appels téléphoniques depuis le 8 novembre, il importe de prendre en compte la personnalité de chacun des protagonistes et l'état d'esprit dans lequel se trouvait M. Z... à ce moment ; que M. Z..., responsable d'une agence de voyage alors en grande difficulté puisqu'elle sera ultérieurement déclarée en état de liquidation judiciaire, est alors cité à comparaître devant le tribunal correctionnel pour une affaire dans laquelle certains mis en cause sont traduits en cour d'assises ; qu'il est placé sous contrôle judiciaire ; que M. Z... est aussi indicateur de la DST ; qu'il se trouve confronté à l'intervention de Guy X..., lieutenant de police de la DST en Nouvelle Calédonie depuis 1994, policier expérimenté, qui ajoute à ses craintes quant à la décision qui risque d'être prononcée contre lui ; que Guy X... a d'ailleurs déclaré que M. Z... était crédule pour certaines choses et qu'avec du recul, il apparaît possible que M. Z... ait senti une pression psychologique (...) il supportait déjà une pression psychologique du fait de l'imminence de sa comparution au tribunal correctionnel" ;

ajoutant que "bien sur il y a eu une démarche positive de ma part en vue d'influencer M. Z... dans la mesure où M. Z... pensait pouvoir se servir de ces révélations d'écoutes sur sa ligne et, dans la mesure où je lui ai proposé un moyen de le déterminer" ; que la personnalité de Guy X... et les moyens employés par lui pour faire pression sur M. Z..., alors psychologiquement très éprouvé, ont accentué l'angoisse et l'inquiétude de ce dernier qui pouvait penser, que s'il ne remettait pas l'argent réclamé, il risquait gravement pour sa liberté et pouvait aussi craindre les réactions d'un policier de la DST auquel il aurait résisté ; qu'ainsi l'élément moral de la contrainte morale se trouve caractérisé ;

"alors que les juges doivent répondre aux chefs péremptoires les conclusions dont ils sont saisis ; qu'en l'espèce, le demandeur se prévalait de ce que (conclusions p. 4 et 5) le délit d'extorsion ne pouvait être retenu à son encontre, dès lors que l'objet de la transaction litigieuse était illusoire, de sorte que l'on était en présence d'un délit impossible, ce dont M. Z... était, au demeurant, parfaitement conscient ; qu'il ressort sans ambiguïté des motifs de la cour d'appel que celle-ci n'a tenu aucun compte de cette articulation essentielle, laquelle avait pourtant pour effet de priver la décision de condamnation de tout fondement, entachant ainsi son arrêt d'un défaut de réponse à conclusion, en violation des textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'en l'état des motifs partiellement repris aux moyens, qui caractérisent en tous ses éléments la tentative d'extorsion de fonds, la décision attaquée n'encourt pas les griefs allégués ;

D'où il suit que les moyens, qui, pour le surplus, se bornent à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond de la contrainte morale exercée par le prévenu sur la victime, ne peuvent qu'être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, conformément aux dispositions de l'article L. 131-7, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire : M. Joly conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Palisse conseiller rapporteur, Mme Anzani, M. Beyer conseillers de la chambre, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-86015
Date de la décision : 27/03/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de NOUMEA, chambre correctionnelle, 22 août 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 mar. 2001, pourvoi n°00-86015


Composition du Tribunal
Président : Président : M. JOLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.86015
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