AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Marie-Thérèse X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 octobre 1997 par la cour d'appel de Colmar (Cambre sociale), au profit de la Société nationale des chemins de fers français (SNCF), dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 janvier 2000, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Bourgeot, conseiller référendaire rapporteur, M. Brissier, Mme Lemoine Jeanjean, conseillers, M. Poisot, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Guénée-Sourie, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Bourgeot, conseiller référendaire, les observations de Me Odent, avocat de la SNCF, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme X... a été engagée le 17 juin 1991, en qualité d'aide soignante, par la maison de Santé médicale et de cure de Munster-Haslach, devenue le 1er janvier 1993 la propriété de la Caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF ; que la salariée a été en arrêt de travail pour maladie du 8 avril 1994 au 11 juin 1994, puis du 14 juin 1994 au 4 octobre 1994 ; que le médecin du travail l'a déclarée, le 4 octobre 1994 inapte à son emploi, un reclassement vers un poste sédentaire étant possible sur le plan médical ; que la salariée a été licenciée le 6 octobre 1994 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée aux dépens de première instance et d'appel, alors, selon le moyen, que l'article 696 du nouveau Code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge par décision motivée n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie ; que la cour d'appel n'ayant pas motivé sa décision a considéré la salariée comme partie perdante alors que le jugement de première instance lui a accordé une indemnité au titre du non-respect de la procédure de licenciement ; que ce jugement a également reconnu que la SNCF avait fait parvenir à la salariée un bulletin de paie daté du 31 janvier 1995 postérieurement à l'introduction de la demande au conseil de prud'hommes lui réglant certains chefs de ses demandes : un rappel sur l'indemnité de licenciement, un rappel sur l'indemnité de congés payés et sur la prime de fin d'année qu'à l'évidence la salariée n'aurait pas obtenue sans son intervention auprès du conseil de prud'hommes ;
que la cour d'appel fait fi de sa propre décision qui ordonne la rectification du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC, outre une somme complémentaire accordée au titre des congés payés ; que la cassation est également encourue au vu du jugement du conseil de prud'hommes qui a condamné la SNCF aux entiers frais et dépens après avoir accordé à la salariée une partie de ses chefs de demande et au vu de l'arrêt de la cour d'appel qui a de nouveau accordé à la salariée une autre partie de ses chefs de demande ce dont il résultait que la cour d'appel n'a pas considéré la salariée comme partie perdante et n'a donc pas satisfait à son obligation de motiver sa décision de condamnation à la totalité des dépens de première instance et d'appel ;
Mais attendu que les juges du fond, lorsque deux parties succombent respectivement sur quelques chefs de leurs prétentions, sont investis d'un pouvoir discrétionnaire pour mettre les dépens à la charge de l'une d'elles sans avoir à justifier l'exercice de ce pouvoir par des motifs spéciaux ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur la première branche du second moyen :
Vu l'article L. 122-24-4 du Code du travail ;
Attendu que pour dire que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement et dire que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse et débouter en conséquence la salariée de sa demande en dommages et intérêts de ce chef, la cour d'appel, après avoir exactement énoncé que la recherche d'une possibilité de reclassement devait se faire dans l'ensemble des activités de l'entreprise, s'est bornée à relever que l'employeur avait démontré l'impossibilité de fournir à la salariée un emploi sédentaire conforme à l'avis du médecin du travail dans le cadre de l'antenne strasbourgeoise dont la salarié relevait ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations, selon lesquelles le reclassement devait s'effectuer dans l'ensemble de l'entreprise ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition ayant débouté la salariée de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 23 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la SNCF aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille.