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29/06/1999 | FRANCE | N°98-82883

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 juin 1999, 98-82883


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me COSSA et de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur le pourvoi formé par:

- A... Georges,

contre l'arrêt n° 21 de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 15 janvier 1998, qui, pour publicité fausse ou

de nature à induire en erreur, l'a condamné à 20 000 francs d'amende, a ordonné une m...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller MAZARS, les observations de Me COSSA et de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;

Statuant sur le pourvoi formé par:

- A... Georges,

contre l'arrêt n° 21 de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 15 janvier 1998, qui, pour publicité fausse ou de nature à induire en erreur, l'a condamné à 20 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 115-5, L. 121-1, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation, 5 du règlement CEE n° 3201/90 de la commission du 16 octobre 1990 portant modalités d'application pour la désignation et la présentation des vins et des moûts, 122-3 du nouveau Code pénal, 2 et 593 du Code de procédure pénale, 339 de la loi d'adaptation du 16 décembre 1992, défaut, insuffisance et contradiction de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Georges A... coupable de publicité de nature à induire en erreur et, en conséquence, l'a condamné à la peine de 20 000 francs d'amende, outre des réparations civiles ;

"aux motifs que M. et Mme Z... ont acquis avec leurs enfants le domaine viticole du Pech de Jammes exploité par la société civile d'exploitation agricole gérée par Georges A..., le vin étant commercialisé par la société anonyme Georges A... ;

qu'ils se sont plaints le 3 juillet 1995 à la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes que des cartons d'emballage du vin Pech de Jammes et des affiches publicitaires portaient la mention "Georges A... propriétaire récoltant" ; que l'enquête diligentée par la DDCCRF a révélé que la même mention se trouvait sur des étiquettes ou sur des publicités utilisées : - pour le vin Château de Mercuès alors que le propriétaire foncier et le récoltant sont le groupement foncier agricole des coteaux du Cahors Georges A..., - pour le vin Château de Haute Serre alors que le propriétaire foncier et le récoltant sont le même groupement foncier agricole des coteaux du Cahors Georges A... ; que, par ailleurs, le vin Château Leret Montpezat était commercialisé par la société anonyme Georges A... avec la mention "SC X... Jean-Baptiste de Y... propriétaire récoltant", alors que le domaine foncier appartient au groupement foncier agricole Domaine du Leret ; qu'enfin il est apparu que Georges A... utilisait la marque "Atrium du Cahors" ; que Georges A... proteste de sa bonne foi au motif premier que le nom du propriétaire récoltant n'a pas fait l'objet d'une réglementation et au motif second qu'il a obtenu de la DDCCRF, en 1978, une autorisation pour une appellation "Château de Haute Serre Georges Vigouroux, propriétaire récoltant" ; que sur le premier motif, l'absence de réglementation spécifique conduit à donner aux mots leur sens généralement usité ; que dans le domaine agricole, le terme de propriétaire s'entend de la propriété foncière et le terme de récoltant de celui qui cultive et recueille le fruit de la production ;

que les mentions apposées sur les étiquettes et affiches publicitaires litigieuses sont donc inexactes au regard des personnes physiques ou morales propriétaires et (ou) récoltants ;

que, sur le deuxième motif, Georges A... produit non pas une approbation d'un fonctionnaire de la DDCCRF sur l'appellation proposée mais une lettre dans laquelle il fait part à ce fonctionnaire de ses réflexions ; que Georges A... ne peut donc invoquer une erreur de droit exonératrice de sa responsabilité pénale au sens de l'article L. (sic) 122-3 du Code pénal ; que sur l'utilisation de la marque "Atrium du Cahors", qu'il résulte de l'article L. 115-5, alinéas 3 et 4 du Code de la consommation qu'une AOC ne peut jamais être considérée comme présentant un caractère générique et tomber dans le domaine public et que le nom géographique qui constitue l'appellation d'origine ne peut être employé pour aucun produit similaire ; qu'il est constant que l'appellation Cahors est une AOC ; que l'utilisation de l'expression "du Cahors" est de nature à faire croire à une exclusivité du vin portant cette appellation d'origine ;

"alors, de première part, qu'en matière de vins, la qualité de propriétaire récoltant se réfère à l'exploitation viticole et non pas à la propriété foncière ; qu'en considérant, au contraire, pour statuer ainsi qu'elle l'a fait, qu'en l'absence de réglementation spécifique, le terme de propriétaire s'entendait de la propriété foncière et celui de récoltant de la personne qui cultive et recueille le fruit de la production, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors que, de deuxième part, et subsidiairement, qu'à l'appui de l'erreur de droit plaidée, Georges A... s'était prévalu, dans ses conclusions d'appel, d'un écrit de l'inspecteur-général chef de la brigade nationale de contrôle des vins et spiritueux du 20 décembre 1978, produit aux débats, qui l'autorisait à utiliser pour des actions publicitaires, son propre nom suivi de la qualité de "Propriétaire Récoltant", sous la dénomination "Château de la Haute Serre, Appellation Cahors Contrôlée" ; que pour considérer qu'il ne pouvait invoquer l'erreur de droit, au sens de l'article 122-3 du nouveau Code pénal, la cour d'appel a énoncé que "Georges A... protestait de sa bonne foi au motif qu'il avait obtenu de la DDCCRF en 1978 une autorisation pour une appellation Château de Haute Serre Georges Vigouroux propriétaire récoltant", puis encore que "Georges A... produit non pas une approbation d'un fonctionnaire de la DDCCRF sur l'appellation proposée mais une lettre dans laquelle il faisait part à ce fonctionnaire de ses réflexions" ; qu'en méconnaissant de la sorte, aussi bien les termes clairs des conclusions d'appel que ceux de l'autorisation produite aux débats, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors que, de troisième part, et au surplus, qu'après avoir établi que Georges A... dirigeait les différentes personnes morales qui exploitaient les vignes, procédaient à la vinification et à la mise en bouteille du vin, la cour d'appel devait, ainsi qu'elle y était invitée, rechercher si Georges A... s'était présenté de bonne foi comme propriétaire récoltant ; que le déclarant coupable de publicité de nature à induire en erreur, sans avoir procédé à cette recherche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

"alors, de quatrième part que, si le nom géographique qui constitue l'appellation d'origine ne peut être employé pour aucun produit similaire, il est possible de l'incorporer dans une marque complexe désignant un produit ayant droit à ladite appellation ;

qu'en jugeant, au contraire, pour retenir la culpabilité de Georges A..., que celui-ci ne pouvait utiliser l'appellation d'origine "Cahors" pour désigner des vins de Cahors dans la marque complexe "Atrium du Cahors", la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"et alors, de cinquième part, et en toute hypothèse, qu'à supposer même que l'utilisation de la marque complexe "Atrium du Cahors", sur des affiches publicitaires ait pu être "de nature à faire croire à une exclusivité du vin portant cette appellation d'origine", la cour d'appel devait, ainsi qu'elle y était invitée, rechercher si cette marque avait été utilisée de bonne foi par Georges A... ; qu'en le déclarant coupable de publicité de nature à induire en erreur, sans avoir procédé à cette recherche, la cour d'appel a une nouvelle foi privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés" ;

Attendu que Georges A..., qui dirige plusieurs sociétés produisant et commercialisant des vins obtenus à partir des vignes de différents domaines de la région de Cahors, a mentionné sur les étiquettes et les publicités de ses vins : "Georges A..., propriétaire récoltant" ; qu'il a utilisé l'expression "l'Atrium du Cahors" à la fois comme enseigne et pour des affichages ; que, sur la plainte des propriétaires de l'un des domaines viticoles concernés, Georges A... est poursuivi pour publicité fausse ou de nature à induire en erreur ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de ce délit, les juges d'appel énoncent que, l'absence de réglementation spécifique conduisant à donner aux mots leur sens généralement usité, le terme de "propriétaire" s'entend de la propriété foncière, et le terme de "récoltant" de celui qui cultive et recueille le fruit de la production ; qu'examinant la situation pour chacun des vins, ils relèvent que la mention "Georges A..., propriétaire récoltant" est inexacte au regard des personnes physiques ou morales, propriétaires des parcelles où ils sont récoltés ;

que, par motifs adoptés les juges retiennent que le prévenu ne peut utilement se prévaloir de l'approbation par l'Administration, consultée en 1978, de l'étiquette du vin Château de Haute Serre mentionnant "Georges A..., propriétaire récoltant", puisque le domaine viticole de ce cru est la propriété d'un groupement foncier agricole ; que la juridiction d'appel relève enfin que l'utilisation de l'expression Cahors dans la marque "l'Atrium du Cahors" est de nature à faire croire à une exclusivité du vin portant sur cette appellation d'origine contrôlée ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisantes comme de contradiction, abstraction faite d'un motif erroné mais inopérant critiqué par la deuxième branche du moyen, la cour d'appel, qui n'avait pas à se prononcer sur la mauvaise foi du prévenu, a caractérisé le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond du caractère trompeur de la publicité, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Mazars conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Géronimi ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-82883
Date de la décision : 29/06/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, 15 janvier 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 jui. 1999, pourvoi n°98-82883


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.82883
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