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06/05/1999 | FRANCE | N°97-15453

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mai 1999, 97-15453


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / Mme Eléna X..., née Stan, demeurant ..., bâtiment A, appartement 34, 93220 Gagny,

2 / M. Christian Radu X..., demeurant ..., agissant en qualité de tuteur légal de sa mère, Mme Eléna Y..., veuve X...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1997 par la cour d'appel de Versailles (chambres sociales réunies), au profit :

1 / de la Caisse d'allocations familiales (CAF) des Hauts-de-Seine, dont le siège est ...,

2 / d

u directeur régional des affaires sanitaires et sociales d'Ile-de-France (DRASSIF), domicilié ...,

d...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / Mme Eléna X..., née Stan, demeurant ..., bâtiment A, appartement 34, 93220 Gagny,

2 / M. Christian Radu X..., demeurant ..., agissant en qualité de tuteur légal de sa mère, Mme Eléna Y..., veuve X...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 mai 1997 par la cour d'appel de Versailles (chambres sociales réunies), au profit :

1 / de la Caisse d'allocations familiales (CAF) des Hauts-de-Seine, dont le siège est ...,

2 / du directeur régional des affaires sanitaires et sociales d'Ile-de-France (DRASSIF), domicilié ...,

défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 mars 1999, où étaient présents : M. Favard, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Liffran, conseiller référendaire rapporteur, MM. Gougé, Thavaud, Mme Ramoff, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Liffran, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Griel, avocat de Mme Eléna X... et de M. Christian X..., ès qualités, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que la Caisse d'allocations familiales de la région parisienne a cessé, à compter de novembre 1984, de verser l'allocation de logement à Mme Stan, veuve X... ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale a rejeté le recours formé contre cette décision par M. X..., agissant en tant qu'administrateur légal de sa mère, et condamné celle-ci à rembourser les sommes qu'elle avait perçues au titre de cette allocation de février 1983 à octobre 1984 ; que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 4 décembre 1992 confirmant ce jugement a été cassé, le 29 juin 1995, pour manque de base légale sur la question de la prescription de l'action en remboursement de l'allocation de logement ; que la cour d'appel de Versailles (14 mai 1997), statuant comme juridiction de renvoi, a confirmé le jugement ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les exceptions de procédure qu'il avait opposées, tirées de la nullité de l'intervention de la Caisse d'allocations familiales de Nanterre et de son défaut de capacité à agir, alors, selon le moyen, d'une part, que compte tenu du lieu de résidence habituelle de l'allocataire située à Gagny (Seine-saint-Denis) selon les énonciations mêmes dudit arrêt et en l'état des conclusions de M. X... soulignant que le domicile de celui-ci, qui constituait en même temps le domicile légal de sa mère, était situé depuis le 1er juillet 1989 à Paris, la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que la Caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine avait vocation à se substituer dans cette affaire à la Caisse d'allocations familiales de la région parisienne et qu'elle n'a pas ainsi donné de base légale à sa décision au regard des articles 117 du nouveau Code de procédure civile, R 514-1 du Code de la sécurité sociale, 108-3 du Code civil, 2 du décret n° 90-920 du 2 octobre 1990 et 1er de l'arrêté du 10 décembre 1990 ; alors, d'autre part, qu'il résulte de l'article 631 du nouveau Code de procédure civile qu'après cassation, les parties sont remises en l'état de la procédure antérieure à la décision cassée ; que M. X... ayant soulevé dans ses conclusions devant la cour de renvoi la nullité pour vice de forme de l'intervention de la Caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine du 24 novembre 1992 avant d'opposer la fin de non-recevoir tirée de la prescription, il appartenait à la cour de renvoi de se prononcer sur cette nullité et qu'en le déclarant, au contraire, irrecevable à critiquer la manière dont la Caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine avait pris la suite de la Caisse d'allocations familiales de la région parisienne, la cour d'appel a violé par refus d'application le texte précité, et par fausse application l'article 112 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'aux termes de l'arrêt de cassation du 29 juin 1995, la Caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine est une partie à l'instance ; que, dès lors, le moyen, reprochant à la cour de renvoi d'avoir statué en conformité de cet arrêt qui l'avait saisie, est irrecevable ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. X... fait en outre grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le principe de la contradiction des débats avait été respecté et qu'il n'y avait pas lieu de rouvrir les débats sur la question de la prescription, alors, selon le moyen, qu'en statuant ainsi sans s'assurer que M. X... avait été en mesure de répondre aux conclusions de la Caisse d'allocations familiales des Hauts-de-Seine qui abordaient pour la première fois la question de la prescrption et qui lui avaient été notifiées deux jours avant l'audience, la cour de renvoi a violé les articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que s'agissant du contentieux général de la sécurité sociale, la procédure est orale ; que, dès lors, les pièces et les documents visés dans l'arrêt attaqué sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été contradictoirement discutés devant les juges du fond ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen pris en ses trois branches :

Attendu que M. X... fait en outre grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme Stan, veuve X..., au remboursement des sommes indûment perçues au titre de l'allocation de logement, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en énonçant que les conclusions écrites de M. X... ne précisaient rien sur la prescription, la cour de renvoi a dénaturé les conclusions déposées devant la cour d'appel de Paris, le 23 octobre 1992, lesquelles soulevaient bien la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'article L 835-3 du Code de la sécurité sociale et qu'elle a, par là même, violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'il résulte de l'article 634 du nouveau Code de procédure civile que les parties qui ne formulent pas de moyens nouveaux ou de nouvelles prétentions devant la juridiction de renvoi sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la juridiction dont la décision a été cassée et qu'en déduisant la volonté de Mme Z... de ne plus soutenir son appel de ce que M. X..., ès-qualités de tuteur légal de sa mère, n'avait pas repris dans ses conclusions devant elle la fin de non-recevoir tirée de la prescription, la cour de renvoi a violé le texte précité ; alors, enfin, que la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter ,que d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer et qu'en l'occurence, la cour de renvoi, qui avait elle-même constaté que M. X..., ès-qualités, n'avait rien dit à l'audience parce qu'il entendait obtenir le renvoi de l'affaire sur ce point, ne pouvait déduire la volonté de Mme Z... de renoncer à son appel de ce que l'intéressé n'avait pas repris à l'audience ses conclusions écrites sur la prescription et qu'elle a, par là même, violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 835-3 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale, la prescription biennale n'est pas applicable à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement de prestations indûment versées en cas de fraude ou de fausse déclaration ;

qu'ayant relevé qu'une fausse déclaration avait été faite à la Caisse pour obtenir le bénéfice de l'allocation de logement, de sorte que la prescription biennale n'était pas applicable, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les conclusions de M. X... invoquant le bénéfice de cette prescription a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... reproche également à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il l'a fait alors, selon le moyen, d'une part, qu'en retenant le moyen tiré de l'application de la prescription trentenaire qui, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, avait été soulevé pour la première fois à l'audience par la caisse d'allocations familiales, sans s'assurer que M. X... avait été effectivement en mesure de s'expliquer sur ce moyen, la cour de renvoi a violé les articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que la cour d'appel a conclu à l'existence d'une fausse déclaration intentionnelle, sans caractériser la mauvaise foi et l'intention malveillante de Mme Y... et qu'elle n'a pas ainsi donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 835-3 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu, d'abord, que s'agissant d'une procédure orale, les moyens débattus à l'audience sont présumés l'avoir été contradictoirement ; qu'ensuite, la cour d'appel a estimé que la fausse déclaration avait été faite intentionnellement ; que, par ce seul motif, elle a légalement justifié sa décision ;

Et sur le cinquième moyen pris en ses quatre branches :

Attendu, enfin, que M. X... reproche à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, de première part, que la cour d'appel n'a pu reconnaître un effet interruptif à la décision de la Caisse d'allocations familiales de la région parisienne du 12 avril 1985 ordonnant le reversement de l'allocation de logement indûment perçue en mai et juin 1983 sans constater que cette décision était bien parvenue à l'allocataire et que la cour d'appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 2244 du Code civil ; alors, de deuxième part, qu'en ne précisant pas en quoi l'enquête de contrôle effectuée par la Caisse fin 1984 avait mis celle-ci dans l'impossibilité absolue d'agir et ainsi suspendu le cours de la prescription, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 2251 et suivants du Code civil ; alors, de troisième part, que la règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque, résultant soit de la loi soit de la convention ou de la force majeure, ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription et qu'en ne recherchant pas en l'espèce si, à la fin de l'enquête de contrôle remise par son rédacteur à la Caisse d'allocations

familiales de la région parisienne, le 9 janvier 1985, selon les énonciations mêmes de l'arrêt attaqué, la Caisse ne disposait pas encore du temps nécessaire pour agir en vue du remboursement de l'allocation de logement indûment perçue en mars, avril, mai et juin 1983, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 2251 et suivants du Code civil ; alors, de quatrième part, qu'à l'inverse de l'interruption, la suspension n'efface pas le délai qui avait commencé à courir avant la suspension et qu'en ne recherchant pas si, à la date de présentation de sa demande reconventionnelle le 7 janvier 1986 et compte tenu du délai de prescription déjà couru avant l'ouverture de l'enquête en novembre 1984, la Caisse n'était pas forclose pour agir en répétition des allocations de mars, avril, mai et juin 1983, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 2251 et suivants du Code civil ;

Mais attendu que la prescription de l'action en recouvrement de prestations indûment payées ne court qu'à compter de la date à laquelle le caractère indu des paiements effectués a été révélé à l'organisme payeur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, par suite de la fausse déclaration faite à la Caisse, ce n'est qu'une fois connus, le 9 janvier 1985, les premiers éléments de son enquête, que la caisse d'allocations familiales a découvert que Mme X... ne pouvait prétendre au bénéfice de l'allocation de logement, de sorte que la prescription n'avait pu courir avant cette date ; que par ce motif, la décision attaquée se trouve légalement justifiée ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Eléna X... et M. Christian X... ès qualités aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 97-15453
Date de la décision : 06/05/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE - Caisse - Créances - Prescription de l'action en remboursement - Prestations versées à la suite d'une fraude ou fausse déclaration - Point de départ du délai.


Références :

Code civil 2251
Code de la sécurité sociale L835-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambres sociales réunies), 14 mai 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mai. 1999, pourvoi n°97-15453


Composition du Tribunal
Président : Président : M. FAVARD conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.15453
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