AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme X..., épouse Y...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 mars 1996 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section C), au profit de M. Y...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience du 2 décembre 1998, où étaient présents : M. Guerder, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Kermina, conseiller référendaire rapporteur, M. Pierre, conseiller, M. Chemithe, avocat général, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller référendaire, les observations de Me Roger, avocat de Mme Y..., née X..., les conclusions de M. Chemithe, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 6 mars 1996), que M. Y... a assigné son épouse en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code civil et que celle-ci a formé une demande reconventionnelle aux mêmes fins ;
Attendu que Mme Y...-X... fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé le divorce à ses torts exclusifs et dit n'y avoir lieu à prestation compensatoire, alors que, selon le moyen, d'une part, la cour d'appel, qui n'a pas recherché l'incidence de la précédente procédure en divorce n'ayant pas abouti sur le comportement prétendu fautif de l'épouse et la réalité du grief allégué par le mari, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 242 du Code civil ; que, d'autre part, en s'abstenant d'examiner, comme l'y invitaient les conclusions de l'épouse, le grief tiré de l'abandon matériel imputé au mari au titre de l'inexécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 455 du nouveau Code de procédure civile et 242 du Code civil ; qu'enfin, l'existence d'une séparation de fait entre époux et l'introduction d'une demande en divorce ne confèrent pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité privant de leurs effets normaux les faits dont ils peuvent se rendre coupables ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 242 du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a retenu que Mme Y..., qui avait pris l'initiative d'une séparation des époux, lors d'une procédure antérieure n'ayant pas abouti, en assignant son mari en séparation de corps, lequel avait répliqué par une demande en divorce, n'a pas repris la vie commune à la suite de la décision déboutant respectivement les époux de leurs demandes ;
Attendu, ensuite, que Mme Y... se bornait à faire valoir, dans ses conclusions tendant à la confirmation du jugement ayant prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'époux sur le fondement d'un grief d'adultère, que M. Y... ne versait aucune somme au titre de l'entretien de l'enfant commun et non pas qu'il pouvait lui être reproché un grief d'abandon matériel au titre de l'inexécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage ;
Attendu, enfin, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a estimé, compte tenu des circonstances de l'espèce, que l'adultère commis par M. Y... ne constituait pas une faute au sens de l'article 242 du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y..., née X..., aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.