AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société Anphocolor, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / M. X..., demeurant ..., représentant des créanciers de la S.A. Anphocolor,
3 / M. Z..., demeurant ..., administrateur judiciaire de la S.A. Anphocolor,
4 / les ASSEDIC - AGS Poitou-Charentes, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 février 1996 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale), au profit de M. Jacques Y..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 novembre 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen, faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, MM. Carmet, Le Roux-Cocheril, Ransac, Bouret, conseillers, M. Frouin, Mmes Girard, Barberot, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les deux moyens, réunis :
Attendu que M. Y... a démissionné, le 18 janvier 1993, de l'emploi de représentant exclusif qu'il occupait au sein de la société Anphocolor depuis le 1er janvier 1988 ;
Attendu que la société Anphocolor et M. Z..., ès qualités d'administrateur au redressement judiciaire de ladite société, reprochent à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 21 février 1996) d'avoir fixé la créance de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de l'intéressé au passif de la procédure collective, alors, selon le moyen, d'une part, que la démission de M. Y... ne pouvant être considérée comme équipollente à une rupture à l'initiative de l'employeur, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé que la rupture devait s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse a violé les articles L. 122-14-4 et L. 122-14-5 du Code du travail ; et alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui a alloué à l'intéressé des dommages-intérêts d'un montant supérieur au salaire des six derniers mois sans constater l'existence d'un préjudice particulier, a violé l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, ayant relevé que M. Y... n'avait donné sa démission que parce qu'il avait refusé la diminution de sa rémunération et la réduction de sa zone de prospection imposées par la société Anphocolor, a pu décider que la rupture résultant du refus de l'intéressé de continuer le travail dans l'entreprise après une modification de son contrat de travail s'analysait en un licenciement ;
Et attendu, d'autre part, que les juges du fond ont apprécié souverainement l'existence et le montant du préjudice ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Anphocolor, M. X..., ès qualités et M. Z..., ès qualités aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.