AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société SCOA, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 10 octobre 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Raymond X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 novembre 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Bourgeot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Brissier, Texier, conseillers, Mme Duval-Arnould, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Bourgeot, conseiller référendaire, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., engagé le 10 novembre 1983 par la société SCOA, a été affecté auprès de la Compagnie commerciale du Gabon (CCDG) le 12 juin 1985 en qualité de responsable du service après-vente ; qu'il a été en arrêt de travail pour maladie à partir du 7 mai 1992 régulièrement prolongé jusqu'au 31 décembre 1992 ; qu'il a été licencié le 7 novembre 1992 pour absence supérieure à six mois en application de l'article 31 du Code du travail gabonais ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes dont une demande en paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 10 octobre 1996) d'avoir considéré que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte des motifs adoptés des premiers juges concernant l'exposé des faits de l'espèce que le premier arrêt maladie de M. X..., survenu le 7 mai 1992, a été prolongé à plusieurs reprises jusqu'au 31 décembre 1992 ; que le licenciement effectif au 7 novembre 1992 étant intervenu six mois exactement après le premier arrêt de travail, la cour d'appel, qui a considéré que M. X... aurait été en arrêt de travail pendant plus d'un an pour en déduire qu'il était atteint d'une maladie de longue durée, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 21-2 de la convention collective du secteur commerce au Gabon et 34 du Code du travail du Gabon ; d'autre part, que l'article 21-1 de la convention collective du secteur commerce au Gabon définit la maladie de courte durée comme entraînant la suspension du contrat de travail pendant une période maximum de six mois ; que dès lors, le licenciement de M. X... survenu très exactement six mois après son premier arrêt de travail ne pouvait être considéré comme prononcé en cours de suspension de son contrat de travail pour longue maladie ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 21-1 et 21-2 de la convention collective du secteur commerce au Gabon et 34 du Code du travail du Gabon ; de
troisième part, que l'article 34 du Code du travail du Gabon définit la maladie de longue durée en fonction exclusivement de la nature même de l'affection, sans qu'une durée minimale soit fixée ; qu'il s'ensuit que la différence entre les maladies de courte et longue durée ne s'opère pas selon le seul critère de la durée de l'arrêt maladie du salarié ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sur le seul constat au demeurant erroné d'un arrêt maladie de plus d'un an, la cour d'appel a donc violé les articles 21-1 et 21-2 de la convention collective du secteur commerce au Gabon et 34 du Code du travail du Gabon ; de quatrième part, que dans ses écritures d'appel, la société SCOA faisait valoir que les arrêts de travail de M. X..., établis par des praticiens différents, soit généralistes soit spécialistes, n'avaient jamais dépassé la durée d'un mois ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces circonstances desquelles il résultait pourtant que le salarié n'avait pas nécessité un traitement régulier et ne pouvait, de ce fait, se voir reconnaître le bénéfice des dispositions concernant les maladies de longue durée, la cour d'appel a privé l'arrêt attaqué de base légale au regard des dispositions des articles 21-2 de la convention collective du secteur commerce au Gabon et 34 du Code du travail gabonais ; alors, enfin, que la qualification de maladie longue durée ne peut être retenue, aux termes de l'article 34 du Code du travail gabonais que si elle est reconnue comme telle par un contrôle médical ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence d'un tel contrôle -dont les premiers juges avaient relevé qu'il n'avait jamais été effectué- la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Mais attendu que, par une interprétation souveraine du contenu de la loi étrangère et de la convention collective étrangère applicables, la cour d'appel a estimé qu'elle interdisait la résiliation du contrat de travail pendant une maladie de longue durée, et que le salarié était atteint lors de son licenciement d'une maladie de longue durée au sens de l'article 34 du Code du travail gabonais ; que sans encourir les griefs du moyen, elle a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.