AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 janvier 1996 par la cour d'appel de Riom (2e chambre civile), au profit de M. Daniel X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 novembre 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Guérin, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Bargue, conseiller faisant fonctions d'avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Guérin, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de M. Jean X..., de Me Copper-Royer, avocat de M. Daniel X..., les conclusions de M. Bargue, conseiller faisant fonctions d'avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. Jean X... fait grief à l'arrêt attaqué (Riom, 16 janvier 1996) d'avoir, sur la demande de son frère Daniel, ordonné l'inscription d'une somme de 80 000 francs au passif de la succession de leur mère, à titre d'indemnité d'hébergement de celle-ci, sans répondre aux conclusions dans lesquelles il faisait valoir, d'une part, que sa mère, disposant de ressources personnelles, n'était pas dans le besoin, d'autre part, que son frère n'avait fait que se soumettre à son obligation de verser à ses parents une rente en contrepartie de la donation d'un fonds de commerce ;
Mais attendu qu'en retenant que M. Daniel X... avait hébergé sa mère grabataire et lui avait prodigué des soins, et en relevant ainsi le caractère exceptionnel de cette charge, la cour d'appel a implicitement jugé que les ressources de la mère étaient insuffisantes au regard des charges assumées par celui qui l'hébergeait ; qu'elle a ainsi répondu aux conclusions et que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur la troisième branche :
Attendu que M. Jean X... fait encore grief à la cour d'appel d'avoir privé sa décision de base légale au regard de l'article 1235 du Code civil, en s'abstenant de rechercher si, en assumant volontairement la charge de l'entretien et de l'hébergement de sa mère, M. Daniel X... n'avait pas contracté une obligation naturelle, fondée sur un devoir de reconnaissance ou d'assistance, qui ne pouvait donner lieu à répétition ;
Mais attendu que les cohéritiers doivent contribuer entre eux au paiement des dettes et charges de la succession ; qu'ayant considéré que M. Daniel X... avait, en hébergeant sa mère grabataire, évité des frais importants qui auraient grevé le patrimoine successoral, la cour d'appel en a, à bon droit, déduit qu'il pouvait prétendre à une indemnité compensatrice à la charge de la succession ; qu'elle a ainsi, sans avoir à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Jean X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.