AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Pierre X...,
2 / Mme Armelle X...,
demeurant ensemble ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 5 juillet 1996 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section C), au profit de la Compagnie commerciale de location, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 novembre 1998, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Bargue, conseiller rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, M. Sempère, conseiller faisant fonctions d'avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bargue, conseiller, les observations de Me Balat, avocat des époux X..., de Me Baraduc-Benabent, avocat de la compagnie commerciale de location, les conclusions de M. Sempère, conseiller faisant fonctions d'avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que par acte sous seing privé du mois d'octobre 1987, rédigé par un avocat, M. et Mme X... ont acquis de la société Le Terminus, un fond de commerce de bar-restaurant-hôtel, pour le financement duquel ils ont contracté un emprunt d'un montant de 900 000 francs, remboursable en 84 mensualités du 15 février 1988 au 15 février 1995 de 16 059,89 francs, consenti selon acte sous seing privé du 14 janvier 1988, par la Société financière de banque et de l'Union meunière, aux droits de laquelle vient la Compagnie commerciale de location ; que l'organisme prêteur qui avait donné procuration à ce même avocat à l'effet de consentir ce prêt, a pris, en garantie, un nantissement sur le fonds de commerce ; que la cession du fonds n'ayant pas été faite dans les formes requises et le bail commercial ayant été résilié à la requête du bailleur, les époux X... qui ont engagé une action en responsabilité contre l'avocat, ont été mis en demeure de s'acquitter de leurs échéances impayées ; que par ordonnance du président du tribunal de commerce du 7 juin 1994, ils ont obtenu une suspension de leur prêt pour le temps de la procédure en responsabilité ;
qu'entre-temps, la Compagnie commerciale de location les ayant assignés au fond, le tribunal de commerce les a condamnés à payer le montant des échéances impayées et ordonné la vente des éléments garnissant le fonds de commerce qu'ils avaient transféré dans une autre localité ;
Attendu que pour faire droit à ces demandes, l'arrêt attaqué énonce qu'une ordonnance de référé est une décision provisoire qui n'a pas autorité de la chose jugée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la circonstance que l'ordonnance de référé du 7 juin 1994 n'avait pas été frappée d'appel, n'interdisait pas à l'organisme prêteur de reprocher aux époux X... d'avoir cesser de régler les échéances du prêt contractuellement prévues, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 juillet 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la Compagnie commerciale de location aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Compagnie commerciale de location à payer aux époux X... la somme de 8 000 francs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.