AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Le Chatham, société à responsabilité limitée dont le siège social est 22, place du Maréchal Foch, 14360 Trouville-sur-Mer,
en cassation d'un arrêt rendu le 13 mai 1996 par la cour d'appel de Caen (3e Chambre sociale), au profit de M. Pierre X..., demeurant D 278, Villa Eros, 14800 Tourgeville,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 8 juillet 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Ransac, conseiller rapporteur, M. Bouret, conseiller, Mme Barberot, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Ransac, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat de la société Le Chatham, de Me Ricard, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Le Chatham fait grief à l'arrêt attaqué (Caen, 13 mai 1996) d'avoir constaté qu'elle n'avait formé aucun appel recevable à l'encontre du jugement rendu le 21 décembre 1993 par le conseil de prud'hommes, dans l'instance qui l'oppose à M. X..., alors, selon le moyen, que, de première part, en matière sociale, la déclaration d'appel, si elle est imprécise, peut être régularisée par lettre simple tant que le délai d'appel n'est pas expiré ; que la cour d'appel a retenu que le délai d'appel expirait le 24 janvier 1994 ; que, par un pli recommandé du 21 janvier 1994, la société Le Chatham avait interjeté appel d'un jugement du 6 avril 1992, et qu'une lettre simple du 22 janvier 1994 avait rectifié la déclaration d'appel, en précisant que le recours était dirigé contre le jugement du 21 décembre 1993 ; qu'en ne tenant compte que des énonciations du récépissé de déclaration d'appel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 932 du nouveau Code de procédure civile et R. 517-7 du Code du travail ; alors que, de seconde part, l'arrêt constate que la lettre rectificative visant le jugement du 21 décembre 1993 est datée du 22 janvier 1994 ; qu'en décidant, par ailleurs, que cette lettre n'a pas une date certaine, la cour d'appel, en se contredisant, a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que, dans le délai légal, expirant le 24 janvier 1994, a été formé un appel contre un jugement du 6 avril 1992 et que cet appel n'a pas été régularisé à l'encontre du jugement du 21 décembre 1993, avant l'expiration du délai de recours, à défaut de preuve de la date réelle d'expédition ou de remise d'un courrier rectificatif de l'appelant daté du 22 janvier 1994, l'arrêt retient que les mentions du récepissé de la déclaration d'appel établi par le greffe ne peuvent pallier cette absence de preuve ; que, sans encourir les griefs du moyen, la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Chatham aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.