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18/09/1997 | FRANCE | N°96-85155

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 septembre 1997, 96-85155


REJET du pourvoi formé par :
- X... Abraham,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 8 octobre 1996, qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis et a une amende, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 B, 1741, 1743 et 1750 du Code général des Impôts, 2-3 et 12 d

e la Convention franco-israélienne du 20 août 1963, L. 227 du Livre des procé...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Abraham,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 8 octobre 1996, qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis et a une amende, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 B, 1741, 1743 et 1750 du Code général des Impôts, 2-3 et 12 de la Convention franco-israélienne du 20 août 1963, L. 227 du Livre des procédures fiscales, 388, 459 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Abraham X... coupable de fraude fiscale par soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu par défaut de déclaration et omission d'écritures comptables ;
" aux motifs propres à la cour :
" sur la domiciliation fiscale en France d'Abraham X... au sens de l'article 4 B du Code général des impôts :
" que les premiers juges ont, à juste titre relevé les éléments de fait qui établissent la réalité d'une activité professionnelle du prévenu en France, que celui-ci reconnaît avoir procédé en France à l'acquisition de tableaux pour le compte des sociétés Artmod et Juva Holding ;
" qu'il ne conteste pas en avoir réglé lui-même le prix ; qu'il ne justifie pour son activité en Israël, que de revenus très inférieurs à ceux de son activité en France ;
" sur la qualité de résident israélien d'Abraham X... et l'application de la Convention fiscale franco-israélienne du 20 août 1963 :
" que le prévenu justifie qu'il est résident israélien au sens de l'article 2-3 de la Convention ;
" que par ses déclarations devant la Cour et dans ses écritures, il conteste avoir exercé une activité commerciale et expose que son rôle était celui d'un consultant expert et, mandataire, qu'au vu de ses déclarations la Cour retiendra qu'Abraham X... exerçait en France une activité libérale ;
" que dans ces conditions, les articles 5 et 6 de la Convention du 20 août 1963 ne lui sont pas applicables, qu'en revanche, selon l'article 12 de la Convention " les revenus qu'un résident d'un Etat retiré d'une activité libérale ou d'autres activités indépendantes de caractère analogue ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que ce résident ne dispose de façon habituelle dans l'autre Etat contractant d'une base fixe pour l'exercice de ses activités. S'il dispose d'une telle base, la partie des revenus qui peut être attribuée à cette base est imposable dans cet autre Etat " ;
" qu'Abraham X... avait en Israël une activité très réduite alors qu'il disposait en France d'une base fixe pour l'exercice de son activité principale, qu'en conséquence cette activité lui a procuré des revenus imposables en France ;
" qu'Abraham X... s'est indûment déclaré fiscalement domicilié en Israël, que devant la Cour, il déclare ignorer si les revenus visés sont imposés en Israël ou encore en Suisse où ils seraient perçus selon lui, qu'est ainsi démontrée sa volonté d'échapper à l'établissement et au paiement de l'impôt ;
" et aux motifs, adoptés des premiers juges, que ne peuvent être retenus en l'espèce ni le critère du centre des intérêts économiques visé par l'article 4 A du Code général des impôts, ni celui du foyer ou lieu de résidence principale ;
" qu'en revanche, le prévenu reconnaît avoir procédé en France à des achats de tableaux pour le compte des sociétés Artmod et Juva Holding en vertu d'un mandat lui conférant les pouvoirs les plus larges et avoir perçu des commissions dont le montant est contesté sur ces achats ;
" que les comptes bancaires des époux X... ont été crédités en 1990 d'une somme de 5 108 181 francs dont l'origine ou le caractère non imposable n'ont pas été justifiés ;
" qu'Abraham X... ne justifie que d'un emploi à temps partiel dans une galerie d'art de Tel Aviv ;
" que dans ces conditions l'activité exercée en France par Abraham X... ne peut être considérée comme accessoire, qu'il a eu une activité professionnelle principale en France pendant les deux années visées à la prévention et que cette activité individuelle de courtage en oeuvres d'art sous couvert de sociétés-écrans domiciliées dans des pays à régime fiscal privilégié lui a procuré des rémunérations imposables en France dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux par application de l'article 155 A du Code général des impôts ;
" alors que, d'une part, en l'état des conclusions du prévenu dans lesquelles ce dernier expliquait que pendant les deux années visées par la prévention, il avait seulement été l'expert et le conseiller de deux sociétés étrangères dont il avait été le mandataire rémunéré à la commission en Suisse sans jamais avoir été leur dirigeant occulte, pour que ces deux sociétés, courtiers en oeuvres d'art, puissent, grâce à son intervention, acquérir des tableaux sur le marché de l'art parisien comme dans d'autres villes étrangères après qu'elles aient crédité ses comptes bancaires français des sommes nécessaires à ces acquisitions, la Cour, qui contrairement au tribunal a admis, que comme le soutenait le prévenu pour contester avoir lui-même exercé une activité de courtier en oeuvres d'art sous le couvert de ces deux sociétés étrangères, cette activité constituait une activité de consultant-expert-mandataire exercée pour lesdites sociétés, s'est mise en contradiction avec ses propres constatations et a privé sa décision de motifs au regard des dispositions de l'article 4 B, 1-b du Code général des impôts, en se référant aux motifs du jugement d'où les premiers juges avaient déduit l'existence d'un domicile fiscal en France de ce prévenu du fait que les revenus que lui avait procuré son activité libérale étaient très supérieurs à ceux qu'il avait perçus en Israël ; qu'en effet, en vertu du texte précité, l'exposant ne pouvait être considéré comme ayant eu son domicile fiscal en France à raison de son activité professionnelle dans ce pays, s'il justifiait que cette activité avait été exercée en France à titre accessoire, ce caractère accessoire devant être apprécié non pas par rapport à une autre activité professionnelle distincte exercée à l'étranger par l'intéressé, mais par rapport à son activité déployée à l'étranger dans le cadre de la même profession ;
" alors que, d'autre part, la Cour a violé les articles 388 du Code de procédure pénale et 6-3 a de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les droits de la défense et a statué sur un fait qui n'avait jamais été relevé par les parties poursuivantes à l'encontre du prévenu, en déclarant que ce dernier disposait de façon habituelle d'une base fixe en France pour l'exercice de son activité libérale d'expert-consultant-mandataire de deux sociétés étrangères, en sorte qu'en application de la Convention fiscale franco-israélienne du 20 août 1963 les revenus provenant de cette activité étaient imposables en France, les parties poursuivantes et le titre de la poursuite n'ayant jamais prétendu que le prévenu disposait à titre habituel d'une base fixe en France pour l'exercice de son activité libérale mais, lui ayant reproché d'avoir, sous couvert de deux sociétés établies dans des pays à régime fiscal privilégié, exercé en France la profession de courtier en oeuvres d'art ;
" et qu'enfin, les délits de fraude fiscale par soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt et d'omission d'écritures, supposent, pour être constitués, que l'auteur ait eu l'intention de commettre ces infractions ; que dès lors en l'espèce, s'agissant d'un citoyen israélien domicilié en Israël où, selon les constatations formelles des juges du fond, se trouve le centre de ses intérêts familiaux et financiers, et ayant eu une activité d'expert-consultant exercée notamment en France pour deux sociétés étrangères qui lui versaient des rémunérations en Suisse, la Cour n'a pas caractérisé l'élément moral des infractions poursuivies à la charge du prévenu en déduisant abusivement la preuve de sa mauvaise foi d'éléments de fait postérieurs à leur commission, tels que l'ignorance reconnue par le prévenu devant la Cour du régime fiscal applicable à ses revenus perçus en Suisse ;
Attendu que, pour déclarer Abraham X... coupable des délits visés à la prévention, les juges relèvent que le prévenu, négociateur en oeuvres d'art, de nationalité israélienne, n'a déposé en France, où il exerçait son activité, aucune déclaration de revenus au titre des années 1989 et 1990 avant la vérification fiscale, malgré deux mises en demeure, qu'il a produit, le 3 décembre 1991, des déclarations ne faisant état d'aucun revenu imposable et qu'il n'a pu présenter à l'Administration aucun document comptable ;
Attendu que, pour écarter le moyen de défense du prévenu, qui prétendait ne pas être soumis à l'impôt sur le revenu en France, en raison de sa qualité de résident israélien, les juges relèvent qu'Abraham X... était propriétaire d'un appartement à Paris et que, sous le couvert de deux sociétés écrans, respectivement domiciliées au Liechtenstein et au Panama, il a exercé sur le territoire national une activité individuelle de courtage d'oeuvres d'art, notamment en participant à diverses ventes aux enchères, pour laquelle il a perçu des commissions s'élevant pour la période considérée à 9,49 millions de francs ; qu'ils constatent, en outre, que le prévenu n'a pu justifier ni de l'origine ni du caractère non imposable de la somme de 5 108 181 francs créditée en 1990 sur des comptes bancaires ouverts à son nom dans un établissement parisien ;
Que les juges ajoutent que cette activité ne saurait être considérée comme l'accessoire de celle que l'intéressé a exercée en Israël, laquelle se réduisait à un emploi à temps partiel dans une galerie d'art lui ayant procuré d'infimes revenus, et concluent qu'Abraham X... était fiscalement domicilié en France au sens de l'article 4 B, 1.b, du Code général des impôts ; qu'ils énoncent, enfin, qu'en se prétendant indûment domicilié fiscalement en Israël, en s'abstenant de toute déclaration spontanée et en déposant en cours de contrôle des déclarations ne mentionnant aucun revenu imposable, il a manifesté sa volonté d'échapper à l'impôt ;
Que les juges d'appel, faisant application des dispositions de la convention franco-israélienne du 20 août 1963, invoquées par le prévenu, relèvent qu'au regard de l'article 12 de ce texte, Abraham X..., qui disposait d'une base fixe en France pour l'exercice de son activité principale, est soumis à l'impôt sur le revenu ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que le bénéfice éventuel d'une convention tendant à éviter une double imposition ne dispense pas le contribuable de souscrire une déclaration de revenus, la cour d'appel, qui n'a en rien excédé les limites de sa saisine, a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme,
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-85155
Date de la décision : 18/09/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Fraude fiscale - Eléments constitutifs - Elément légal - Non-déclaration des revenus - Convention internationale relative aux doubles impositions - Obligations du contribuable.

Selon l'article 170-4 du Code général des impôts, le contribuable est tenu de déclarer les éléments du revenu global, y compris ceux qui en vertu d'une convention internationale relative aux doubles impositions sont susceptibles d'être exonérés. Caractérise le délit de fraude fiscale, par défaut de déclaration, l'arrêt qui relève que le prévenu, qui prétendait bénéficier de la convention fiscale franco-israélienne du 20 août 1963, conclue pour éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, avait en réalité sa résidence effective en France, où il exerçait son activité principale, et qu'il se prévalait donc sciemment d'un régime fiscal indu pour s'abstenir de faire toute déclaration à l'impôt sur le revenu sur le territoire national. (1).


Références :

CGI 170-4, 4 B.1, b
Convention franco-israëlienne en matière fiscale du 20 août 1963, art. 12

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 octobre 1996

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1989-03-29, Bulletin criminel 1989, n° 153, p. 397 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1990-12-03, Bulletin criminel 1990, n° 411, p. 1032 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1992-06-10, Bulletin criminel 1992, n° 224, p. 622 (cassation partielle sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 sep. 1997, pourvoi n°96-85155, Bull. crim. criminel 1997 N° 307 p. 1027
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 307 p. 1027

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Culié
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Schumacher.
Avocat(s) : Avocats : MM. Choucroy, Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.85155
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