Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Montluçon, 23 septembre 1991), que le 13 février 1989, la Société d'application générale d'électricité et de mécanique (Sagem), invoquant des difficultés économiques, a réduit l'horaire de travail hebdomadaire dans l'entreprise de 39 à 37 heures, mais a refusé d'accomplir les formalités nécessaires à l'application des dispositions légales sur le chômage partiel comme le demandaient les organisations syndicales ; que Mme X... et soixante-six autres salariés ont alors saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en réparation du préjudice que leur avait causé ce refus ;
Attendu que l'employeur fait grief au jugement de l'avoir condamné au paiement de sommes (représentant le supplément de salaires et de congés payés qu'ils auraient perçu s'ils avaient travaillé 39 heures par semaine), alors, d'une part, que la réduction de 2 heures du temps de travail hebdomadaire imposée, sans limitation de durée, par l'employeur à l'ensemble du personnel afin de faire face aux problèmes de sous-charge de l'entreprise s'analyse en une modification non substantielle des contrats de travail impliquant une réduction de salaire correspondante ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes ne pouvait refuser de qualifier cette réduction, toujours en vigueur au moment où il statuait, comme constitutive d'une modification du contrat de travail au prétexte que l'employeur ne l'avait pas présentée comme telle, sans violer, par fausse application, les articles L. 351-25 et R. 351-50 du Code du travail et l'Accord national interprofessionnel du 21 février 1968 et refus d'application des articles L. 432 et R. 620-1 du Code du travail ; alors que seul un préjudice réel et certain est susceptible de réparation ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes ne pouvait condamner l'employeur à payer aux salariés différentes sommes en retenant qu'ils avaient été privés du bénéfice éventuel des dispositions instaurées en matière de chômage partiel sans même rechercher si les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage partiel étaient remplies ; qu'en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes, qui a réparé un préjudice seulement éventuel, a violé les articles 1382 du Code civil, L. 351-25 et R. 351-50 du Code du travail ; alors que la réparation d'un préjudice doit être égale au préjudice réellement subi ; que la loi limite la durée pendant laquelle les salariés peuvent être placés en chômage partiel ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes ne pouvait, pour condamner l'employeur à indemniser les salariés privés de tout droit à percevoir les revenus prévus en cas de chômage partiel, se borner à indiquer de manière impersonnelle et générale que la réparation du dommage correspondait aux sommes réclamées sans caractériser ni l'objet, ni le mode de calcul, ni le montant des demandes, ni le nombre d'heures, ni la période indemnisée, rendant de ce fait impossible tout contrôle de la Cour de Cassation sur l'étendue exacte du préjudice réparé ; qu'en statuant ainsi, le conseil de prud'hommes a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard des articles 1382 du Code civil, R. 351-50 et R. 351-51 du Code du travail ;
Mais attendu que pour déterminer si l'employeur doit mettre en oeuvre la procédure de chômage partiel, il convient de se placer à la date à laquelle l'employeur a décidé de réduire l'horaire ; qu'ayant constaté qu'à cette date la réduction d'horaire se présentait, non comme une modification définitive du contrat de travail, mais comme une mesure provisoire liée à la conjoncture du moment et susceptible de révision, le conseil de prud'hommes a justement décidé que la procédure de chômage partiel aurait dû être mise en oeuvre et a condamné l'employeur à réparer le préjudice qui était résulté de sa carence et qu'il a souverainement évalué ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.