AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les pourvois n° s 92-42.584, 92-42.585, 92-42.586 et 92-42.587 formés par :
1 / la société anonyme Lec Réfrigération France, dont le siège est sis ... (Pas-de- Calais), représentée par ses représentants légaux en exercice,
2 / le syndicat des industries métallurgiques et annexes du Pas-de-Calais Ouest, rue des Fleurs à Calais (Pas- de-Calais), représenté par ses représentants légaux en exercice,
3 / la société anonyme Houle Dentelles, dont le siège est sis ... (Pas-de-Calais), représentée par ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,
4 / la société à responsabilité limitée Textiles Bomy, dont le siège est sis Campagne-les-Guines (Pas-de- Calais), représentée par son gérant en exercice,
5 / la société anonyme Dentelles Calaisiennes, dont le siège est sis à Calais (Pas-de-Calais), ..., représentée par ses représentants légaux en exercice, domiciliés audit siège,
6 / la Chambre syndicale des fabricants de dentelles, dont le siège est sis ... (Pas-de-Calais), représentée par ses représentants légaux en exercice, en cassation des arrêts rendus le 17 avril 1992 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), au profit :
1 / de Mme Gisèle B..., demeurant les Hemmes d'Oye Plage à Oye Plage (Pas-de-Calais),
2 / de Mme Josiane Y..., demeurant ... (Pas-de-Calais),
3 / de Mme Lydie A..., demeurant ... (Pas-de-Calais),
4 / de M. Jean-Paul Z..., demeurant ... (Pas-de-Calais),
5 / de l'Ordre des avocats du barreau de Boulogne- sur-Mer, tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 juin 1994, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Le Roux- Cocheril, conseiller rapporteur, MM. Saintoyant, Bèque, Carmet, Boubli, Brissier, Ransac, conseillers, Mmes Béraudo, Pams-Tatu, Bignon, Girard-Thuilier, Barberot, conseillers référendaires, M. Le Foyer de Costil, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Le Roux-Cocheril, les observations de Me Delvolvé, avocat de la société Lec Réfrigération France, du syndicat des industries métallurgiques et annexes du Pas-de-Calais, de la société Houle Dentelles, de la société Textiles Bomy, de la société Dentelles Calaisiennes et de la Chambre syndicale des fabricants de dentelles, les conclusions de M.
Le Foyer de Costil, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° 92-42.584 au n° 92-42.587 ;
Sur le moyen additionnel :
Attendu qu'après avoir déposé, dans le délai légal, un mémoire proposant deux moyens, la société Dentelles Calaisiennes et la chambre syndicale des fabricants de dentelles ont, le 2 mars 1994, déposé un mémoire additionnel présentant un moyen supplémentaire ;
Mais attendu qu'après l'expiration du délai de trois mois imparti par l'article 989 du nouveau Code de procédure civile, aucun moyen nouveau ne peut être invoqué contre la décision attaquée ; que le moyen est donc irrecevable ;
Attendu que les sociétés Lec Réfrigération France, Houle Dentelles, Textiles Bomy et Dentelles Calaisiennes ont, dans le litige les opposant devant le conseil de prud'hommes respectivement à Mme B..., Mme Y..., Mme A... et M. Z..., donné mandat pour les représenter à M. X..., délégué permanent de la chambre syndicale des dentelles de Calais et du syndicat des industries métallurgiques et annexes du Pas-de-Calais, et salarié de l'Union Patronale Interprofessionnelle du Pas- de-Calais ouest ; que l'ordre des avocats du barreau de Boulogne-sur-Mer est intervenu volontairement dans ces instances pour faire juger que M. X... était dépourvu de qualité pour agir au nom des sociétés ;
Sur le moyen unique des trois premiers pourvois et sur le second moyen du quatrième pourvoi :
Attendu que les sociétés ainsi que les chambres syndicales des fabricants de dentelles de Calais, et le syndicat des industries métallurgiques et annexes du Pas de Calais font grief aux arrêts attaqués (Douai, 17 avril 1992) d'avoir admis cette fin de non-recevoir alors, selon les moyens, d'une part, que l'article R.
516-5 du Code du travail n'exige pas que les délégués permanents ou non permanents des organisations syndicales ouvrières ou patronales, aient la qualité de membres de ces organisations pour être habilités à assister ou à représenter les parties en matière prud'homale, les organisations syndicales étant seules juges de leurs intérêts et de la capacité des personnes qu'elles mandatent pour assurer la défense de leurs adhérents et qu'en ajoutant au texte une condition qu'il ne prévoit pas, la cour d'appel a violé l'article R. 516-5 du Code du travail ; et alors, d'autre part, qu'en application de l'article L. 411-1 du Code du travail, les organisations syndicales patronales ont pour objet l'étude et la défense des droits, ainsi que des intérêts matériels et moraux tant collectifs qu'individuels des personnes visées par leurs statuts, soit en l'espèce des entreprises, personnes morales, qui seules peuvent adhérer à la chambre syndicale et qui y cotisent ; que la défense des intérêts de ces personnes morales, membres du syndicat et leur représentation en justice ne peuvent être assurées que par des personnes physiques qui
ne peuvent adhérer en tant que telles au syndicat, de telle sorte qu'en exigeant d'elles qu'elles soient membres de ce syndicat, la cour fait obstacle à l'exercice de la mission dévolue par la loi aux syndicats en violation de l'article L. 411-1 du Code du travail ;
Mais attendu que les délégués permanents ou non permanents des organisations syndicales ouvrières ou patronales, qui peuvent assister ou représenter les parties en matière prud'homale, doivent être membres de l'organisation syndicale qui les a délégués, et non salariés de celle-ci ; d'où il suit que la cour d'appel a fait une exacte application de l'article R. 516-5 du Code du travail en décidant que M. X..., délégué de syndicats d'employeurs et salarié d'une union patronale, non membre de ceux-ci, n'avait pas qualité pour représenter les sociétés devant le conseil de prud'hommes ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du quatrième pourvoi :
Attendu que la société Dentelles Calaisiennes et la chambre syndicale des fabricants de dentelles reprochent encore à l'arrêt d'avoir refusé d'annuler le jugement rendu le 2 octobre 1991 par le conseil de prud'hommes de Calais alors, selon le moyen, que par jugement en date du 28 décembre 1990, le conseil de prud'hommes a déclaré irrecevable la contestation élevée par M. Z... sur le problème de la représentation de la société Dentelles Calaisiennes par M. X..., de telle sorte que la question ne pouvait de nouveau être examinée lors de l'audience du conseil de prud'hommes présidée par le juge départiteur, et qu'en examinant de nouveau cette contestation à l'audience du 3 juillet 1991 sans avoir mis préalablement M. X... en mesure de présenter ses observations sur sa recevabilité et son bien-fondé, le conseil de prud'hommes a méconnu le principe du contradictoire, de telle sorte qu'en refusant d'annuler le jugement ainsi rendu la cour d'appel a violé par fausse application l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir que l'intéressé avait eu la possibilité de s'expliquer à l'audience et que le principe du contradictoire avait été respecté ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les demandeurs, envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.