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07/04/1993 | FRANCE | N°89-43847

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 avril 1993, 89-43847


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,

a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Automobiles Peugeot, ayant son siège social ... Armée à Paris (168), agissant poursuites et diligences de son représentant légal demeurant en cette qualité audit siège,

en cassation d'un arrêt rendu le 8 juin 1989 par la cour d'appel de Paris (21e chambre, section B), au profit :

18/ de M. Lahcen X..., demeurant ... (Seine-Saint-Denis),

28/ de M. Lahcen Y..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

38/ de M. L... Bouhadi, demeurant ... Ã

  Bondy (Seine-Saint-Denis),

48/ de M. Ahmed E..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

5...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,

a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Automobiles Peugeot, ayant son siège social ... Armée à Paris (168), agissant poursuites et diligences de son représentant légal demeurant en cette qualité audit siège,

en cassation d'un arrêt rendu le 8 juin 1989 par la cour d'appel de Paris (21e chambre, section B), au profit :

18/ de M. Lahcen X..., demeurant ... (Seine-Saint-Denis),

28/ de M. Lahcen Y..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

38/ de M. L... Bouhadi, demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

48/ de M. Ahmed E..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

58/ de M. Salah G..., demeurant ... à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis),

68/ de M. Brahim H..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

78/ de M. Mohamed I..., demeurant ... à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis),

88/ de M. Brahim J..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

98/ de M. Tayed M..., demeurant ... à Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis),

108/ de M. Q... Munoz O..., demeurant ... à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis),

118/ de M. Vaclav N..., demeurant ... à Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis),

128/ de M. Brahim P..., demeurant ... (Seine-Saint-Denis),

138/ de M. Mustapha R..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

148/ de M. Mohamed Z..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

158/ de Mme Ginette C..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

168/ de M. El Hassane F..., demeurant ... à Bondy (Seine-Saint-Denis),

178/ de M. Jan S..., demeurant ... à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis),

défendeurs à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 23 février 1993, où étaient présents :

M. Kunhmunch, président, M. Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, MM. Saintoyant, Lecante, Boittiaux, Bèque, Carmet, Boubli, conseillers, Mme B..., M. K..., Mmes Pams-Tatu, Bignon, Girard-Thuilier, conseillers référendaires, M. Graziani, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Bonnet, conseiller référendaire, les observations de la SCPatineau, avocat de la société automobiles Peugeot, de Me Vuitton, avocat des défendeurs, les conclusions de M. Graziani, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société automobiles Peugeot de son désistement en ce qu'il est dirigé contre MM. X..., A..., E... et F... ; Attendu, selon la procédure, que MM. Y... et douze autres salariés, employés à la fonderie de Bondy, appartenant à la société des automobiles Peugeot, ont, l'établissement cessant toute activité, été licenciés pour motif économique le 10 juillet 1984, avec un préavis de deux mois qu'ils ont été dispensés d'exécuter ; que les salariés ont signé un reçu pour solde de tout compte, pendant la période de préavis ; que d'autres salariés n'ont pas été licenciés mais ont été reclassés dans d'autres entreprises de la société Peugeot ou à l'extérieur ; que les salariés susvisés ont invoqué une violation de l'ordre des licenciements et demandé des dommages-intérêts ; que l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 1989), a déclaré recevable la demande des salariés et leur a alloué des dommages-intérêts pour violation de l'ordre des licenciements ; Sur le premier moyen du pourvoi, en tant qu'il concerne MM. M..., G... et J... :

Attendu que la société des automobiles Peugeot fait d'abord grief à la cour d'appel d'avoir déclaré recevable la demande des trois salariés précités, selon le moyen, alors, d'une part, que le reçu pour solde de tout compte peut être valablement délivré par l'employeur avant l'expiration du préavis dès lors que le salarié a été expressément dispensé de l'exécution effective de celui-ci, ce dernier n'étant, plus à compter de ce jour, sous la dépendance de son employeur ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel a violé l'article L. 122-17 du Code du travail ; et alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, le salarié qui n'a pas dénoncé dans le délai légal l'irrégularité entachant le reçu pour solde de tout compte délivré par

l'employeur, accepte par là-même de reconnaître la valeur libératoire à celui-ci ; qu'en déclarant dès lors recevable la demande des salariés licenciés faite près de deux ans après la signature de leur solde de tout compte dont l'irrégularité invoquée n'avait jamais été dénoncée, la cour d'appel a violé l'article L. 122-17 du Code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que les reçus pour solde de tout compte concernant MM. M... et G... étaient dépourvus de date et que le reçu signé par M. J... portait la mention "sous réserve de tous mes droits", a exactement décidé que ces reçus n'étaient pas opposables à ces salariés ;

Sur le deuxième moyen, en tant qu'il concerne MM. M..., G... et J... :

Attendu que la société des automobiles Peugeot reproche encore à la cour d'appel d'avoir décidé que l'employeur n'avait pas respecté l'ordre des licenciements et d'avoir alloué aux trois salariés précités des dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que si l'employeur est tenu, en vertu des dispositions de l'article L. 321-2 du Code du travail, d'énoncer les critères l'ayant déterminé à choisir parmi les salariés ceux qui seront l'objet d'une mesure de licenciement, il n'a en revanche aucunement l'obligation de proposer aux salariés ainsi congédiés leur reclassement dans une autre entreprise ; qu'à fortiori, l'employeur ne saurait être tenu de justifier des motifs l'ayant conduit à proposer à certains salariés et non à d'autres un tel reclassement, étant seul juge, en vertu de son pouvoir de direction et de gestion, de l'opportunité de telles mesures ; qu'en affirmant que la société des automobiles Peugeot ne justifiait pas des motifs l'ayant conduit à proposer à certains salariés seulement de l'établissement des fonderies de Bondy leur reclassement dans une autre entreprise du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 321-2 du Code du travail et l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, si l'employeur est tenu d'observer les critères posés par la loi ou la convention collective pour l'ordre des

licenciements, il appartient au salarié qui prétend que l'employeur aurait fondé sa décision sur des éléments subjectifs ou sans relation avec ces critères légaux ou conventionnels d'en rapporter la preuve ; qu'en affirmant, dès lors, que si l'employeur alléguait avoir respecté la législation en vigueur, il ne rapportait aucun élément ni sur les critères, ni sur l'ordre des congédiements, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 du Code civil et l'article L. 322-1 du Code du travail ; et alors, enfin, que la perte d'une chance ne peut donner lieu à l'allocation de dommages-intérêts qu'à la condition qu'il soit établi que la chance prétendûment perdue était réelle et sérieuse ; qu'en accordant ainsi à chacun des demandeurs l'équivalent d'un mois de salaire, sans même constater que chacun d'entre eux avait une chance réelle et sérieuse d'obtenir son reclassement dans une autre entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; Mais attendu qu'après avoir constaté qu'un certain nombre d'autres salariés avaient fait l'objet d'un reclassement, ce dont il résultait que l'ensemble des salariés de l'établissement de Bondy n'avaient pas été licenciés, la cour d'appel a décidé à juste titre que l'employeur était tenu vis-à-vis des autres, à respecter un ordre des licenciements ; qu'ayant constaté qu'à l'égard du licenciement collectif dans lequel avaient été inclus les trois salariés concernés, l'employeur admettait n'avoir suivi aucun ordre de licenciement, c'est à bon droit que la cour d'appel, constatant la faute de l'employeur, et le

préjudice subi par les salariés, a alloué à ces derniers une indemnité dont elle a souverainement apprécié le montant ; que le moyen n'est pas fondé ; Mais sur le premier moyen du pourvoi, en tant qu'il concerne Mme D... et MM. S..., N..., P..., R..., Munoz, Z..., H..., I..., Y... :

Vu l'article L. 122-17 du Code du travail ; Attendu, selon ce texte, que le reçu pour solde de tout compte délivré par le travailleur à l'employeur lors de la résiliation ou de l'expiration de son contrat peut être dénoncé dans les deux mois de la signature ; Attendu que pour déclarer recevables les demandes des salariés susnommés, la cour d'appel a énoncé que le reçu pour solde de tout compte délivré, comme en la cause, avant l'expiration du délai-congé bien que le salarié soit dispensé d'exécuter effectivement ce préavis, sans que le lien contractuel ne soit rompu, n'emporte pas d'effet libératoire ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que les salariés concernés, qui avaient été dispensés d'effectuer leur préavis, ne se trouvaient plus sous la dépendance de l'employeur lors de la signature du reçu pour solde de tout compte, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen en tant qu'il est dirigé à l'encontre de Mme D..., et MM. S..., N..., P..., R..., Munoz, Z..., H..., I..., Y... ; REJETTE le pourvoi en tant qu'il est formé à l'encontre de MM. M..., G... et J... ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de Mme D... et de MM. S..., N..., P..., R..., Munoz, Z..., H..., I..., Y..., l'arrêt rendu le 8 juin 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept avril mil neuf cent quatre-vingt-treize.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Reçu pour solde de tout compte - Validité - Absence de signature (non).

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Licenciement collectif - Ordre des licenciements - Non respect - Préjudice des salariés.


Références :

Code civil 1382
Code du travail L122-17, L322-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 juin 1989


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 07 avr. 1993, pourvoi n°89-43847

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Composition du Tribunal
Président : Président : M. KUHNMUNCH

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 07/04/1993
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89-43847
Numéro NOR : JURITEXT000007195470 ?
Numéro d'affaire : 89-43847
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;1993-04-07;89.43847 ?
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