Sur les deux moyens, réunis :
Attendu que Mme X..., locataire d'un emplacement de supermarché qui lui a été concédé par la société Arcande, fait grief à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 12 février 1990) d'avoir décidé que les dispositions du décret du 30 septembre 1953 n'étaient pas applicables à cette location, alors, selon le moyen, 1°) que bénéficie d'un bail commercial soumis au statut des baux commerciaux, le commerçant inscrit au registre du commerce auquel a été concédé un emplacement fixe situé à l'extérieur du supermarché et qui exploite, sous une enseigne distincte de celle du supermarché, un fonds de commerce auquel est attachée une clientèle personnelle ; qu'il résulte des constatations qui figurent dans l'arrêt attaqué, jointes à celles, non contestées par la cour d'appel, des premiers juges, que toutes ces conditions se trouvaient en l'espèce satisfaites puisque Mme X... était inscrite au registre du commerce, occupait, sous une enseigne distincte, un emplacement fixe et distinct situé à l'extérieur du supermarché et qu'elle avait une clientèle personnelle, ayant gardé une partie de la clientèle qui était celle de son même commerce de poissonnerie exercé auparavant en un autre lieu de la même commune, ainsi qu'il est constaté dans l'arrêt attaqué ; que la cour d'appel a refusé de tirer de ses propres constatations les conséquences légales qui en étaient la suite nécessaire, à savoir que Mme X... exploitait un fonds de commerce personnel et bénéficiait d'un bail commercial régi par le décret du 30 septembre 1953 ; qu'elle a violé les articles 1er, 4, 8 et 35 dudit décret ; 2°) que la cour d'appel ajoute à la loi une condition supplémentaire qui n'y figure pas et inverse la charge de la preuve lorsqu'elle met à la charge de la commerçante, qui justifiait qu'elle avait une clientèle personnelle, l'obligation d'établir que cette clientèle était largement prédominante par rapport à celle du supermarché ; que la cour d'appel a donc violé l'article 1315 du Code civil, ainsi que l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 ; 3°) que le Tribunal décidait, après une analyse détaillée des termes des attestations respectivement versées aux débats par chacune des parties, qu'il résultait de ces attestations que Mme X... possédait une clientèle personnelle qui lui était très attachée et qui bénéficiait pour partie au supermarché puisque certaines personnes faisaient leurs achats à l'intérieur du magasin après s'être approvisionnées en poissons et que les attestations communiquées par la société Arcande indiquent seulement que le signataire était client du banc de poisson d'Intermarché depuis sa création, qu'elles ne pouvaient combattre les attestations précises et détaillées versées aux débats par Mme X... ; que ces motifs ne sont pas réfutés par la cour d'appel, qui se contente d'écarter en bloc toutes les attestations par un motif d'ordre général sans en analyser les termes ; que l'arrêt attaqué est donc, sur ce point, entaché d'un défaut de motifs sanctionné par l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 4°) que la cour d'appel fonde sa conviction, sur une prétendue prédominance de la clientèle du supermarché sur celle de la commerçante en poissons, sur de simples suppositions concernant la renonciation de Mme X..., dans le contrat de location, aux garanties du décret du 30 septembre 1953 et
sur le caractère attractif d'une grande surface commerciale pour une clientèle saisonnière ; que ces motifs à caractère imprécis, dubitatifs et d'ordre général ne sauraient donner une base légale à la décision ; que la cour d'appel a, par de tels motifs, violé l'article 5 du Code civil, ainsi que l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 5°) que la cour d'appel ne pouvait retenir, à titre de présomption, le fait que le contrat de bail contenait une clause par laquelle la locataire renonçait aux garanties du décret du 30 septembre 1953 ; qu'une telle clause est déclarée nulle et de nul effet par l'article 35 du décret du 30 septembre 1953 ; que la cour d'appel a violé cette disposition légale d'ordre public ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, ni faire application d'une clause nulle, légalement justifié sa décision en retenant, par des motifs non dubitatifs, que si Mme X... avait conservé une partie des clients de son ancien fonds, elle ne pouvait prétendre au bénéfice de la législation sur les baux commerciaux dès lors que la clientèle du banc de poisson, dont l'exploitation lui avait été concédée par la société Arcande, était constituée de manière largement prédominante, par celle du supermarché exploité par cette société ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi