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Sur le moyen unique :
Vu l'article 15-II de la loi du 20 juillet 1988 ;
Attendu que, selon ce texte, tout salarié qui, depuis le 22 mai 1981, a été licencié pour une faute, autre qu'une faute lourde, commise à l'occasion de l'exercice de sa fonction de représentant élu du personnel, de représentant syndical au comité d'entreprise ou de délégué syndical, peut invoquer cette qualité, que l'autorisation administrative de licenciement ait été ou non accordée, pour obtenir, sauf cas de force majeure, sa réintégration dans son emploi ou dans un emploi équivalent, chez le même employeur ou chez l'employeur qui lui a succédé en application de l'article L. 122-12 du Code du travail ; que le contentieux de la réintégration est soumis à la juridiction prud'homale qui statue comme en matière de référé ;
Attendu que M. X..., embauché le 1er juillet 1986 comme ouvrier par la société ISS Hôpital Service, a été élu délégué du personnel le 12 mai 1987 ; qu'il a été licencié le 6 novembre 1987, après une autorisation donnée par le ministre du Travail ; qu'il a demandé le 23 août 1988 sa réintégration en application de l'article 15-II de la loi d'amnistie et devant le refus de son employeur a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la cour d'appel a décidé que la juridiction prud'homale devait surseoir à statuer sur la demande du salarié jusqu'à ce que la juridiction administrative ait statué au motif que la décision du ministre du Travail du 3 novembre 1987 annulant le refus de l'inspecteur du Travail d'autoriser le licenciement de M. X... est actuellement déférée au tribunal administratif et qu'il appartient à celui-ci d'apprécier lui-même la gravité des faits reprochés au salarié et de décider s'ils sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ; que le juge judiciaire ne peut se prononcer sur l'applicabilité de l'article 15 de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988, faute par lui de pouvoir apprécier le degré de gravité des fautes imputées au salarié et leur relation éventuelle avec l'exercice de ses fonctions représentatives ;
Attendu cependant que le juge prud'homal est seul compétent pour statuer sur la demande de réintégration fondée sur l'amnistie et qu'il lui appartient de rechercher, que l'autorisation administrative ait été ou non accordée et quelle que soit la décision du juge administratif saisi d'un recours contre cette autorisation, si les conditions de la réintégration sont remplies et, en particulier, si le salarié investi d'une mission représentative a commis une faute lourde faisant échec à la demande ; qu'en prononçant un sursis à statuer jusqu'à la décision du juge administratif, la cour d'appel a méconnu sa propre compétence et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée