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Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 431-4, L. 431-5 et L. 432-3 du Code du travail ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, le comité d'entreprise a pour objet d'assurer une expression collective des salariés, permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production ; que, selon le deuxième, le comité d'entreprise pour formuler un avis motivé, doit disposer d'informations précises et peut entreprendre les études et recherches nécessaires à sa mission ; que, selon le troisième, le comité d'entreprise est informé et consulté sur les problèmes généraux concernant les conditions de travail résultant de l'organisation du travail, de la technologie, des conditions d'emploi, de l'organisation du temps du travail, des qualifications et des modes de rémunération ; qu'à cet effet il étudie les incidences sur les conditions de travail des projets et décisions de l'employeur dans les domaines susvisés ;
Attendu qu'à la suite de la négociation annuelle prévue par l'article L. 132-27 du Code du travail, les participants ont signé un constat de désaccord le 4 décembre 1986 et, dès le 15 décembre suivant, la direction de la Société française des pétroles BP a diffusé une note faisant connaître quelle serait la politique salariale de l'entreprise ; qu'il en résultait que les sommes distribuées au titre des augmentations individuelles le seraient en fonction de l'efficacité personnelle et des résultats individuels ; qu'au cours de la réunion du comité central d'entreprise, tenue le 18 décembre 1986, le chef d'entreprise ayant réaffirmé la décision d'individualiser la rémunération des salariés en fonction de leur performance individuelle, les membres du comité ont décidé, pour compléter leur information, d'organiser une consultation du personnel sur le nouveau mode de rémunération ; que l'employeur, contestant le droit pour le comité de consulter le personnel, a demandé en justice l'annulation de la décision litigieuse ; que le comité a demandé à titre reconventionnel que la société soit tenue de lui communiquer le fichier des adresses des salariés de l'entreprise ;
Attendu que, pour faire droit à la demande principale et rejeter la demande du comité, l'arrêt infirmatif attaqué énonce que si aux termes de l'article L. 432-3 du Code du travail, le comité central d'entreprise doit être informé et consulté sur la qualification et les modes de rémunération, il ne dispose pas à cet égard d'un rôle revendicateur l'autorisant à décider une consultation générale de l'ensemble du personnel sur le montant des rémunérations ; qu'à supposer que les élus au comité d'entreprise, qui émanent des organisations syndicales réprésentatives, ignorent les aspirations du personnel à cet égard, alors que les contacts qu'ils entretiennent avec les adhérents au syndicat qu'ils réprésentent au sein du comité central d'entreprise doivent leur permettre de disposer d'informations privilégiées en cette matière, il reste au comité central d'entreprise la possibilité d'être informé des suggestions et
observations du personnel par la communication qu'il peut en obtenir des délégués du personnel, comme le prévoit l'article L. 422-2 du Code du travail ; que c'est d'ailleurs en ce sens que doit être interprété le pouvoir donné au comité par l'article L. 431-5 d'entreprendre les études et recherches nécessaires à sa mission ;
Attendu cependant que le comité central d'entreprise, ayant à étudier les incidences sur les conditions de travail du nouveau mode de rémunération des salariés, pouvait s'informer des préférences de ces derniers par une consultation du personnel, dont les frais devaient s'imputer sur son budget de fonctionnement, sans que, pour autant, à cette occasion, l'employeur ait l'obligation de communiquer au comité les adresses des salariés ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'information du comité n'est limitée ni aux renseignements dont disposent ses membres à titre individuel ni aux observations et suggestions des délégués du personnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a annulé la décision prise le 18 décembre 1986 par le comité central d'entreprise d'organiser une consultation du personnel sur la politique salariale de l'entreprise, l'arrêt rendu le 7 mars 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris